Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : AG c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 925

Numéro de dossier du Tribunal: AD-20-763

ENTRE :

A. G.

Demandeur
(Requérant)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Défendeur
(Ministre)


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


Décision relative à une demande de
permission d’en appeler rendue par :
Neil Nawaz
Date de la décision : Le 27 octobre 2020

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Décision et motifs

Décision

[1] La permission d’en appeler est refusée.

Aperçu

[2] Le requérant a été victime d’agressions sexuelles durant son enfance et a passé sous silence ce traumatisme jusqu’en 2012. C'est alors qu’il a demandé l’aide de son médecin de famille. Mis à part un poste de directeur d’entreprise qu’il a brièvement occupé jusqu’en 2010, il a passé l’essentiel de sa carrière à travailler pour l’entreprise familiale.

[3] En avril 2018, le requérant a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RCP). Il affirmait qu’il n’était plus capable de travailler à cause d’une dépression, d’anxiété et d’un trouble de stress post-traumatique. Le ministre a approuvé sa demande, pour une pension versée à compter de mai 2017. Le requérant bénéficiait ainsi du nombre maximal de prestations rétroactives permis par la loi.

[4] Le requérant a fait appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Il contestait la décision du ministre quant à la date du premier versement de sa pension. Le requérant soutenait qu’il avait été incapable de faire sa demande avant avril 2018.

[5] La division générale a tenu une audience par téléconférence. Dans une décision datée du 8 juin 2020, elle a rejeté l’appel. Selon la division générale, l’état et les activités du requérant durant les mois et les années ayant précédé avril 2018 ne permettaient pas de croire qu’il avait été incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant cette date.

[6] Le requérant demande maintenant la permission d’en appeler à la division d’appelNote de bas de page 1. En effet, il n’est pas d’accord avec la décision de la division générale. Il maintient qu’il a cessé de travailler en 2010 parce qu’il s’était soudainement senti écrasé par les souvenirs de ses agressions sexuelles, autrefois réprimés. Il a demandé au Tribunal de réviser sa décision et de lui accorder des prestations d’invalidité rétroactives à compter de 2010.

[7] Après sa demande de permission d’en appeler, le requérant a aussi soumis un paquet de dossiers médicaux, accompagné d’un résumé détaillé des dossiers inclusNote de bas de page 2. D’après ce que je peux voir, la division générale ne disposait pas de ces documents, pour la grande majorité du moins, avant de se prononcer sur l’appel du requérant.

[8] Le Tribunal a ensuite envoyé deux lettres au requérant. Dans la première lettre, on lui a rappelé que la division d’appel peut seulement considérer certaines erreurs précises de la division générale. On lui demandait aussi de préciser davantage les raisons de son appel. La seconde lettre informait le requérant que les documents qu’il avait soumis semblaient être de nouvelles preuves, et que la division d’appel ne peut pas habituellement tenir compte de nouvelles preuves. La lettre l’avisait qu’il était en droit de présenter une demande pour faire annuler ou modifier la décision de la division générale sur le fondement de faits nouveaux. Les deux lettres lui donnaient jusqu’au 16 octobre 2020 pour présenter des observations supplémentairesNote de bas de page 3.

[9] Jusqu’à aujourd’hui, le Tribunal n’a eu aucune nouvelle du requérant ni de son représentant autorisé.

[10] J’ai maintenant examiné la décision de la division générale à la lumière du dossier. J’ai conclu que le requérant n’a invoqué aucun des moyens qui pourraient donner à son appel une chance raisonnable de succès.

Question en litige

[11] Il y a trois moyens d’appel à la division d’appel. La personne qui demande la permission d’en appeler doit montrer que la division générale (i) n’a pas respecté l’équité procédurale ou a commis une erreur de compétence; (ii) a commis une erreur de droit; ou (iii) a commis une importante erreur de faitNote de bas de page 4.

[12] Pour se prononcer sur un appel, la division d’appel doit d’abord accorder la permission d’en appelerNote de bas de page 5. Pour donner cette permission, la division d’appel doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 6. C’est un critère assez facile à satisfaire : la personne demanderesse doit présenter au moins un argument défendableNote de bas de page 7.

[13] Je dois décider si les arguments du requérant révèlent une cause défendable correspondant à au moins un des moyens d’appel permis.

Analyse

[14] Pour avoir gain de cause à la division d’appel, il ne suffit pas que le requérant exprime son désaccord face à la décision de la division générale. Il lui faut relever des erreurs précises que la division générale a commises dans sa décision. Il doit aussi expliquer pourquoi ces erreurs éventuelles correspondent à l’un ou l’autre des trois moyens d’appel auxquels la loi permet de recourir.

[15] Le requérant soutient que la division générale a rejeté son appel malgré la preuve médicale révélant qu’il était « incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande » avant avril 2018Note de bas de page 8.

[16] Selon moi, cet argument n’a aucune chance raisonnable de succès. La division générale est le juge des faits. Il faut donc faire preuve d’une certaine retenue par rapport à la façon dont elle choisit d’évaluer la preuve. J’ai examiné la décision de la division générale. Je constate qu’elle a analysé avec soin l’information dont elle disposait. Elle est ensuite arrivée à la conclusion, défendable, qu’il était plus probable qu’improbable (il y avait plus de chances que non) que le requérant avait été capable de former ou d’exprimer l’intention de demander une pension d’invalidité du RPC avant avril 2018, soit le mois où il a fini par soumettre sa demande. Plus précisément, la division générale a accordé de l’importance aux preuves révélant que le requérant avait lui-même pris en charge sa santé entre 2010 et 2018, et qu’il avait, durant cette même période, intenté une poursuite pour que ses agresseurs soient tenus responsables de leurs actes.

[17] Je tiens à rappeler que l’invalidité et l’incapacité sont deux concepts distincts selon le Régime de pensions du Canada. L’invalidité est l’état d’une personne qui ne peut pas détenir une occupation rémunératrice. L’incapacité est l’état d’une personne qui ne peut pas former ou exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité. L’invalidité est généralement beaucoup plus difficile à prouver que l’incapacité. Même si le requérant a longtemps souffert d’un trouble de stress post-traumatique et d’autres problèmes psychologiques débilitants, son état ne lui permet pas forcément de faire la preuve, relativement difficile, qu’il avait été incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestation.

[18] Même si la division générale n’a pas tiré la conclusion que le requérant espérait, il ne m’appartient pas, comme membre de la division d’appel, de réévaluer la preuve. Je peux seulement déterminer si la décision de la division générale est défendable au regard des faits et du droit. Un appel à la division d’appel n’est pas l’occasion pour un demandeur de plaider de nouveau sa cause dans le but d’obtenir un résultat différent. Ma compétence se limite à déterminer si le requérant a invoqué l’un ou l’autre des moyens d’appel admissibles et si l’un d’eux donne à son appel une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[19] Le requérant n’a pas avancé de moyen d’appel qui donnerait à son appel une chance raisonnable de succès. Par conséquent, la demande de permission d’en appeler est rejetée.

Représentant :

P. P., pour le requérant

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