Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : KF c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2020 TSS 1147

Numéro de dossier du Tribunal: GP-20-202

ENTRE :

K. F.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Tyler Moore
Représentant de la requérante : Paul Sacco
Date de l’audience par
téléconférence :
Le 26 novembre 2020
Date de la décision : Le 8 décembre 2020

Sur cette page

Décision

[1] La requérante, K. F., est admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). Les paiements commencent en novembre 2018. La présente décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

Aperçu

[2] La requérante a travaillé pour la dernière fois de septembre 2015 à juillet 2018. Elle occupait un poste d’infirmière autorisée à temps partiel et assurait le service de triage par téléphone. Elle a précisé qu’elle n’a plus été capable de travailler à partir de ce moment‑là en raison de la fibromyalgie, du syndrome de fatigue chronique et de l’anxiété.

[3] La requérante a demandé une pension d’invalidité du RPC le 18 mars 2019. Le ministre de l’Emploi et du Développement social du Canada a rejeté sa demande parce que les éléments de preuve médicale de son rhumatologue et de son médecin de famille n’appuyaient pas de conclusions graves qui l’auraient empêchée d’exercer certains types d’emplois qui lui conviennent. La requérante a fait appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

Ce que la requérante doit prouver

[4] Pour avoir gain de cause, la requérante doit prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité au plus tard à la date de l’audienceNote de bas de page 1.

[5] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 2.

Motifs de ma décision

[6] J’estime que la requérante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à compter de juillet 2018. J’ai pris cette décision après avoir tenu compte des questions suivantes.

L’invalidité de la requérante est-elle grave?

La requérante a des limitations fonctionnelles qui affectent sa capacité de travailler

[7] Ma décision sur la question de savoir si l’invalidité de la requérante est grave n’est pas fondée sur ses diagnostics. Elle est fondée sur la question de savoir si elle a des limitations fonctionnelles qui l’empêchent de travaillerNote de bas de page 3. Je dois examiner son état de santé global et réfléchir à la façon dont ses problèmes pourraient affecter sa capacité de travaillerNote de bas de page 4.

[8] J’ai trouvé que la requérante était crédible. Son témoignage était clair et franc. Pour cette raison, j’ai accordé un poids égal à la preuve médicale contenue dans le dossier d’audience et au témoignage de la requérante.

[9] La requérante fait valoir que la fibromyalgie, le syndrome de fatigue chronique et l’anxiété ont entraîné chez elle la nécessité de faire une sieste pendant quelques heures tous les jours. Ses problèmes de santé lui causent des brûlements aux jambes lorsqu’elle monte des escaliers, de la douleur au dos et aux hanches lorsqu’elle marche, le besoin de s’asseoir lorsqu’elle fait des tâches à la maison, par exemple cuisiner ou plier le linge, et l’incapacité de s’asseoir pendant plus de cinq minutes avant d’être obligée de se lever et de bouger.

[10] La requérante soutient également que sa mémoire est mauvaise, qu’elle ne peut pas suivre des instructions, qu’elle a de la difficulté à trouver le mot juste, et qu’elle a une mauvaise compréhension verbale parce que son cerveau est embrouillé et qu’elle ressent une fatigue constante. Elle n’est pas capable de s’adonner à une quelconque activité pendant plus de 10 minutes. Elle doit se fier à son époux pour tenir la maison en ordre; c’est lui qui fait tout l’entretien de la maison et qui s’occupe de leurs finances. La requérante ne peut même pas prendre sa douche sans devoir s’étendre par la suite.

[11] La preuve médicale du Dr Ruban et du Dr Pinto appuie l’argument de la requérante. En 2018, le Dr Ruban a rapporté que la requérante avait des douleurs musculaires et articulaires depuis 2011. Ses symptômes s’étaient résorbés pendant un certain temps, puis étaient réapparus en juillet 2018. Elle avait eu besoin d’accroître son usage de médicaments antidouleurs et avait été dirigée vers une clinique de cannabis. En juillet 2019, le Dr Pinto a rapporté que la requérante continuait de ressentir des douleurs diffuses aux muscles et aux articulations, ainsi que d’autres symptômes causés par le travail à l’ordinateur et les mouvements répétitifs. En avril 2020, le Dr Pinto a rapporté que les douleurs et l’humeur de la requérante étaient stables, mais qu’il n’y avait pas eu d’amélioration à cet égard. En septembre 2020, les notes cliniques du Dr Pinto montrent que la requérante ne pouvait pas avoir un quelconque type d’horaire régulier en raison de son état. Son pronostic était qualifié de faible.

[12] La preuve médicale montre que la requérante avait des limitations fonctionnelles qui ont affecté sa capacité de travailler en date de l’audience.

La requérante n’a pas la capacité de travailler

[13] Pour décider si la requérante est capable de travailler, je ne dois pas examiner seulement ses problèmes de santé et leurs répercussions sur sa capacité fonctionnelle. Je dois aussi tenir compte de son âge, de son niveau d’instruction, de ses compétences linguistiques et de ses expériences de travail et de vie. Ces facteurs m’aideront à décider si elle peut travailler dans un contexte réalisteNote de bas de page 5.

[14] La requérante a 41 ans et elle parle couramment anglais. Elle a terminé ses études secondaires et elle a obtenu un diplôme universitaire en soins infirmiers. Elle a travaillé uniquement comme infirmière autorisée. Compte tenu de son instruction et de son expérience de travail, elle a des compétences transférables.

[15] Il ne fait aucun doute que la requérante est relativement jeune et instruite, et qu’elle possède des compétences transférables. Cependant, elle a aussi de nombreuses limitations psychologiques et fonctionnelles. J’estime que ces limitations l’emportent sur son instruction et ses compétences transférables, et l’empêchent d’être une candidate au recyclage ou à un autre emploi.

[16] La requérante a fait un effort pour exécuter un travail modifié plus léger avant d’arrêter de travailler complètement en 2018. Elle travaillait de la maison; ses heures étaient régulières; elle travaillait seulement trois jours par semaine et son travail n’était pas exigeant physiquement. Elle devait se lever souvent en raison de la douleur associée à la position assise pour travailler à l’ordinateur, et elle a essayé différents types de casques d’écoute, ce qui n’a pas aidé. Elle avait des maux de tête tous les jours, de l’anxiété, une incapacité à se concentrer sur les appels et de la fatigue au point où elle s’endormait pendant ses pauses. Elle a ensuite réduit encore davantage ses heures de travail pour travailler un quart de travail de quatre heures par semaine. Elle faisait encore des erreurs et des oublis, et elle avait constamment besoin de bouger. Il lui fallait plusieurs jours pour se remettre de chacun de ses quarts de travail. C’est à ce moment‑là que le Dr Pinto lui a conseillé d’arrêter de travailler pour voir si cela soulagerait ses symptômes. Malheureusement, cela n’a pas aidé.

[17] La requérante n’a cherché aucun autre travail depuis juillet 2018. Son emploi ne s’est pas amélioré à un point tel qu’il lui permettrait d’être capable de travailler. J’accepte le fait qu’elle travaillerait si elle le pouvait.

[18] La requérante n’était pas capable de continuer à faire ne serait-ce qu’un quart de travail de quatre heures à la maison par semaine. Elle n’est pas capable de rester dans la même position ni d’exécuter une activité pendant un certain temps; elle ne peut pas se concentrer, et elle ne peut pas suivre des instructions. Elle doit faire des siestes pendant la journée, et même des tâches de base, comme prendre une douche, l’épuisent. Il est difficile de penser qu’un employeur, dans un marché du travail concurrentiel, tiendrait compte, de façon réaliste, des limitations de la requérante pendant une durée indéterminée.

La requérante a fait des efforts raisonnables pour suivre les traitements recommandés

[19] La requérante a suivi les conseils du médecin du mieux qu’elle l’a puNote de bas de page 6. Elle a essayé de prendre les médicaments Cymbalta, Lyrica, Gabapentin, Naproxen, Tylenol no 3, Contrive, Quetiapine et Sertraline. Elle a utilisé de l’huile de CBD, a suivi des traitements de physiothérapie, d’ergothérapie et de massothérapie. Elle fait de la thérapie cognitivo-comportementale une fois par mois avec une ou un psychothérapeute, elle fait de la médication [sic] guidée, et elle pratique le yoga. Elle a consulté des médecins spécialistes.

[20] La requérante prend présentement du Sertraline, du Tylenol, du Advil et de l’huile de CBD. Elle a arrêté les traitements de physiothérapie et les massages thérapeutiques parce qu’ils n’aidaient pas. L’huile de CBD l’aide un peu pour son anxiété, mais n’a pas atténué sa douleur ou sa fatigue. En fait, les choses se sont détériorées malgré l’arrêt de travail et les traitements.

[21] La requérante attend présentement d’être dirigée vers une clinique de gestion de la douleur. Le Dr Pinto l’a toutefois avisée qu’il ne sait pas ce qu’ils pourraient faire d’autre pour l’aider que ce qu’elle a déjà essayé. J’accepte cela. Malheureusement, les traitements de la requérante n’ont pas amélioré sa capacité fonctionnelle.

L’invalidité de la requérante est-elle prolongée?

[22] L’invalidité de la requérante est prolongée. Ses problèmes de santé ont commencé en 2011, ils étaient présents lorsqu’elle a quitté le travail en juillet 2018, et il est encore présent aujourd’hui. Malgré le fait qu’elle a essayé de nombreux médicaments et qu’elle a participé aux thérapies qui lui ont été recommandées, l’état de la requérante ne s’est pas amélioré. Le médecin de famille de la requérante, le Dr Pinto, ne prévoit pas que l’état de la requérante s’améliorera ni qu’elle sera capable de retourner sur le marché du travail.

Conclusion

[23] J’accueille cet appel. L’invalidité de la requérante était grave et prolongée en juillet 2018. La pension d’invalidité commence à être versée après une période d’attente de quatre moisNote de bas de page 7. Cela signifie que le versement des paiements commence en novembre 2018.

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