Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : PC c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 52

Numéro de dossier du Tribunal: GP-19-1676

ENTRE :

P. C.

Requérant

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Patrick O’Neil
Date de l’audience par vidéoconférence : Le 5 janvier 2021
Date de la décision : Le 13 janvier 2021

Sur cette page

Décision

[1] Le requérant n’a pas cessé d’être invalide au sens du Régime de pensions du Canada (RPC) en date du 31 décembre 2010.

Aperçu

[2] Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité du requérant le 27 mai 1988Note de bas de page 1. Le ministre a approuvé sa demande avec prise d’effet en juin 1987. Après avoir réévalué le dossier du requérant en 2005, le ministre a décidé le 24 août 2005 qu’il continuait d’être admissible à la pension d’invalidité du RPCNote de bas de page 2.

[3] Après avoir réévalué l’admissibilité du requérant à la pension d’invalidité du RPC en 2019, le ministre a établi initialementNote de bas de page 3 et après révisionNote de bas de page 4 qu’il avait cessé d’être invalide en date du 31 décembre 2010. Le ministre a conclu qu’il avait reçu des prestations de pension du RPC auxquelles il n’avait pas droit et qui totalisaient 104 320,56 $ au cours de la période de janvier 2011 à février 2019. Le requérant a fait appel de la décision découlant de la révision au Tribunal.

[4] Le RPC énonce les critères d’admissibilité à une pension d’invalidité du RPC. Pour être admissible à la pension d’invalidité, une partie requérante doit être invalideNote de bas de page 5. Une pension d’invalidité cesse d’être payable à compter du mois où le bénéficiaire cesse d’être invalideNote de bas de page 6.

[5] Si la personne déclarée invalide aux termes de la Loi recommence à travailler, elle en informe sans délai le ministreNote de bas de page 7.

Question en litige

[6] Le requérant a-t-il cessé d’être invalide au sens du RPC en date du 31 décembre 2010?

Analyse

[7] Une personne est considérée comme invalide si elle est atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 8. Une invalidité est grave si elle la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit entraîner vraisemblablement le décès.

[8] Il incombe au ministre de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que le requérant a cessé d’être invalide parce qu’il ne répondait plus aux critères d’admissibilité à une pension d’invalidité lorsque ses prestations d’invalidité du RPC ont été annuléesNote de bas de page 9.

[9] Le ministre a décidé le 27 mai 1988 que l’invalidité du requérant était grave et prolongée en juin 1987. Le ministre a conclu que l’invalidité du requérant était toujours grave et prolongée en date du 24 août 2005. Ces décisions sont définitives. Le ministre ne peut pas modifier ces décisions qui établissent et confirment l’admissibilité du requérant à la pension du RPC à la date où elles ont été renduesNote de bas de page 10.

[10] Le ministre doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, que le requérant a cessé d’être invalide le 31 décembre 2010. Pour ce faire, le ministre doit démontrer que les problèmes de santé sur le fondement desquels l’admissibilité du requérant à la pension d’invalidité a été établie en mai 1988 et confirmée en août 2005 se sont améliorés au point où il n’était plus admissibleNote de bas de page 11. Le ministre doit prouver que les problèmes de santé du requérant n’étaient pas graves et prolongés en date du 31 décembre 2010.

Invalidité grave

Le requérant était atteint d’une invalidité grave en date du 31 décembre 2010

[11] Le ministre a approuvé la demande de prestations d’invalidité que le requérant a présentée le 27 mai 1988 en se fondant sur ses problèmes de santé physiquesNote de bas de page 12. Le requérant a subi des blessures au dos et au genou droit en janvier 1986. Le ministre a jugé que ces blessures étaient graves et prolongées et qu’elles le rendaient admissible à une pension d’invalidité du RPC à compter de février 1987. Le requérant a déclaré que son état ne s’était pas amélioré depuis que le ministre avait conclu en 1988 que ses problèmes de santé étaient graves et prolongés et qu’ils le rendaient admissible à une pension d’invalidité du RPC.

[12] Malgré quatre opérations au genou droit avant la décision de 1988 du ministre, et une cinquième opération en mai 1989Note de bas de page 13, l’état du requérant ne s’est pas amélioré. Le 24 août 2005, le ministre a décidé que l’état du requérant demeurait grave et prolongé et qu’il continuait d’être admissible à une pension d’invalidité du RPC. Ses problèmes de dos et au genou droit ne se sont pas améliorés depuis le 24 août 2005. Son état s’est progressivement aggravé depuis août 2005. Il a dû subir une chirurgie au dos en juin 2020. Il attend de subir une sixième chirurgie au genou droit.

[13] Le requérant exploite une entreprise individuelle depuis septembre 2010. Il achète et vend des marchandises dans des ventes aux enchères en ligne, et il fabrique et vend des meubles en bois rond. Il a employé à l’occasion quelques personnes pour fabriquer les meubles ainsi que pour ramasser et livrer les meubles et les articles achetés et vendus aux enchères. Il travaille au maximum une à deux heures par jour, malgré des douleurs au dos et au genou graves, débilitantes et constantes. Trente minutes après le début d’une enchère en ligne, il doit cesser d’y participer en raison de ses douleurs débilitantes au dos et au genou, ou s’allonger et continuer de travailler en ligne au lit. Il ne fait aucun travail physique. Il quitte rarement sa maison. Il donne des directives aux employés par téléphone ou par courrielNote de bas de page 14.

[14] Le requérant a déclaré des pertes nettes en 2010Note de bas de page 15, et la plupart des années depuisNote de bas de page 16. Le requérant n’a pas informé le ministre qu’il avait commencé à exploiter une entreprise en 2010. Son comptable a appelé Service Canada en sa présence en 2010 et a demandé si le prestataire aurait toujours droit à une pension d’invalidité du RPC s’il lançait une entreprise. On lui a répondu que le requérant demeurerait admissible si son entreprise n’était pas rentable. En raison de cette information, le requérant n’a pas déclaré avoir démarré une entreprise en 2010, car il l’avait exploitée à perte en 2010, et la plupart des années depuis.

[15] L’absence de profits ne signifie pas nécessairement que le requérant n’avait pas la capacité d’exercer un emploi véritablement rémunérateur. Toutefois, les pertes qui découlent de son invalidité sont la preuve qu’il était régulièrement incapable d’exercer un emploi véritablement rémunérateur dans le cadre de cette entreprise ou un autre emploi. La non rentabilité de l’entreprise du requérant était principalement attribuable aux salaires versés aux employés, puisqu’il était incapable de faire du travail physique et seulement capable de faire un peu de travail sédentaire.

[16] Le requérant était un témoin crédible. J’accepte son témoignage décrivant les symptômes débilitants dont il souffre et sa difficulté à fonctionner au quotidien depuis qu’il a subi des blessures au dos et au genou droit en janvier 1986. Il n’y avait aucune indication d’exagération dans sa présentation, ni aucune mention d’exagération dans les rapports médicaux, qui appuyaient son témoignage. Aucun professionnel de la santé n’a laissé entendre que les symptômes du requérant n’existaient pas ou étaient exagérés, ou qu’il simulait une déficience ou était régulièrement capable de détenir une occupation depuis janvier 1986.

[17] Le ministre a établi en 1988 et confirmé en août 2005 que l’invalidité du requérant était grave. Rien ne prouve que les problèmes de santé sur le fondement desquels le ministre a accordé la pension d’invalidité au requérant en 1998 et confirmé son admissibilité en août 2005 se soient améliorés. Le ministre n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que l’état du requérant s’était amélioré au 31 décembre 2020, date à laquelle il a mis fin à ses prestations d’invalidité du RPC. Comme le ministre n’a pas prouvé que les problèmes de santé sur le fondement desquels le requérant s’est vu accorder une pension d’invalidité s’étaient améliorés après août 2005, je conclus que le ministre n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que son invalidité avait cessé d’être grave en date du 31 décembre 2010.

Invalidité prolongée

Le requérant était atteint d’une invalidité prolongée en date du 31 décembre 2010

[18] Le ministre a établi en 1988 et confirmé en août 2005 que l’invalidité du requérant était prolongée. La preuve démontre que le requérant a continué à souffrir de douleurs chroniques au dos et à la jambe droite depuis août 2005, sans que son état ne s’améliore et sans que l’on ne s’attende à des améliorations. J’estime que son invalidité est susceptible de durer pendant une période longue, continue et indéfinie, et qu’elle était donc prolongée en date du 31 décembre 2010.

Conclusion

[19] Le ministre a décidé en 1988 et confirmé en août 2005 que le requérant était atteint d’une invalidité grave et prolongée. Le ministre n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que l’état du requérant s’était amélioré en date du 31 décembre 2010 lorsqu’il a mis fin à ses prestations d’invalidité du RPC. Je conclus que le requérant n’a pas cessé d’être invalide au sens du RPC en date du 31 décembre 2010.

[20] L’appel est accueilli.

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