Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : CB c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 127

Numéro de dossier du Tribunal: GP-20-366

ENTRE :

C. B.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Gerry McCarthy
Requérante représentée par : Monique Long
Date de l’audience par
téléconférence :
Le 9 février 2021
Date de la décision : Le 10 février 2021

Sur cette page

Décision

[1] La requérante a droit au versement d’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) à compter de février 2018.

Aperçu

[2] Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité de la requérante le 29 janvier 2019. Il a rejeté la demande une première fois, puis il l’a rejetée de nouveau après révision. La requérante a porté la décision issue de la révision en appel au Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Pour avoir droit à une pension d’invalidité du RPC, la requérante doit remplir les conditions énoncées dans le RPC. Plus précisément, elle doit être déclarée invalide au sens du RPC au plus tard à la fin de la période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA repose sur les cotisations que la requérante a versées au RPC. Je constate que la PMA de la requérante prendra fin le 31 décembre 2022.

Question préliminaire

[4] Mme Monique Long (parajuriste à Phoenix Paralegal and Advocacy Services [services parajuridiques et de représentation Phoenix]) s’est jointe à l’audience par téléconférence. Elle a expliqué qu’elle allait représenter la requérante en remplacement de Tami Cogan, qui travaille pour la même organisation. La requérante avait déjà consenti à être représentée par Phoenix Paralegal and Advocacy Services dans le formulaire autorisant la divulgation de renseignements qui figure dans le document GD-10.

Questions en litige

[5] Les problèmes de santé de la requérante ont-ils entraîné chez elle une invalidité grave, c’est-à-dire était-elle régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice au plus tard à la date de l’audience (le 9 février 2021)?

[6] Si oui, l’invalidité de la requérante devait-elle aussi durer pendant une période longue, continue et indéfinie?

Analyse

[7] L’invalidité se définit comme une invalidité physique ou mentale qui est grave et prolongéeNote de bas de page 1. Une personne est considérée comme ayant une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décès. La personne doit prouver selon la prépondérance des probabilités que son invalidité satisfait aux deux volets du critère. Autrement dit, si la requérante satisfait seulement à un volet, elle n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Invalidité grave

[8] Je dois évaluer le critère relatif à la gravité dans un contexte réalisteNote de bas de page 2. Ainsi, pour décider si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de facteurs tels que l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de vie.

[9] Pour évaluer si une invalidité est « grave », il ne s’agit pas de savoir si la personne a des déficiences graves, mais si l’invalidité l’empêche de gagner sa vie. Il n’est pas question de savoir si une personne est dans l’impossibilité d’accomplir ses tâches habituelles, mais plutôt si elle est incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 3.

[10] Je dois évaluer l’état de santé de la requérante dans son ensemble, ce qui signifie que je dois tenir compte de toutes les déficiences possibles, et pas seulement des déficiences les plus importantes ou de la déficience principaleNote de bas de page 4.

[11] Lorsque la capacité à travailler est établie, la personne doit démontrer que les efforts qu’elle a déployés pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueux en raison de son problème de santéNote de bas de page 5.

La requérante avait-elle une invalidité grave au plus tard le 9 février 2021?

[12] Je juge que, selon la prépondérance des probabilités, la requérante avait une invalidité grave au plus tard le 9 février 2021. Voici pourquoi.

[13] Premièrement, le dossier contient de nombreux rapports médicaux qui indiquent que la requérante ne pouvait occuper aucun emploi. Par exemple, la Dre O’Connor a écrit en septembre 2018 qu’étant donné la gravité de ses symptômes et de ses limitations fonctionnelles, la requérante ne serait jamais capable d’exercer les fonctions d’une occupation, quelle qu’elle soit (page GD2-49). De plus, Mme Barnett (infirmière praticienne) a déclaré en janvier 2019 qu’il était peu probable que la requérante soit un jour en mesure de se rétablir complètement de son problème de santé ou d’exercer un emploi rémunérateur (page GD2-70). Enfin, le Dr Barnett a écrit en août 2020 que la requérante était incapable d’obtenir ou de conserver un emploi (page GD6-4).

[14] Deuxièmement, le témoignage que la requérante a présenté de vive voix sur ses limitations fonctionnelles, son trouble de stress post-traumatique (TSPT), son anxiété, ses crises de panique, sa dépression et ses douleurs chroniques était crédible parce que ses déclarations étaient assez cohérentes, détaillées et directes. Je comprends que le ministre a soutenu que les renseignements fournis n’appuyaient pas la thèse d’un grave problème de santé physique ou psychologique qui empêchait la requérante d’effectuer un autre travail. Toutefois, j’accorde plus d’importance au témoignage de la requérante selon lequel son problème de santé mentale et physique l’empêchait de travailler, peu importe l’emploi. J’accorde également beaucoup d’importance au rapport médical de la Dre O’Connor qui indique que la requérante était incapable d’exercer les fonctions de quelque occupation que ce soit (page GD2-49).

[15] Troisièmement, la requérante a suivi la plupart des recommandations de traitement formulées par ses médecins. Par exemple, la requérante a continué de prendre ses médicaments contre l’anxiété (Ativan). De plus, elle a reçu des services de consultation psychologique et psychiatrique et elle a suivi une thérapie cognitivo-comportementale. Je conviens que la requérante a rejeté les électrochocs offerts comme option thérapeutique par le Dr Anil en 2017 (page GD2-78). Toutefois, dans les circonstances, j’admets que le rejet de ce traitement était raisonnable compte tenu de la controverse que ce traitement peut susciter.

[16] Quatrièmement, il faut tenir compte de l’ensemble des déficiences de la requérante. Plus précisément, la requérante fait des crises de panique et présente un TSPT. Toutefois, elle est aussi atteinte d’un trouble dépressif caractérisé, d’un trouble anxieux initial, de troubles de mémoire, de difficultés de concentration et d’un syndrome d’hypersensibilité chronique et elle a de la difficulté à entretenir des relations interpersonnelles. Je sais que, selon le ministre, la preuve n’appuyait pas la thèse d’un grave problème de santé physique ou psychologique. Néanmoins, l’ensemble des déficiences de la requérante la rend régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

Autres observations du ministre

[17] Je comprends que le ministre a soutenu que rien ne démontrait que la requérante avait tenté d’effectuer un autre type de travail. Cependant, la requérante a essayé de tisser des tapis de yoga, mais les tâches s’échelonnaient sur plusieurs semaines et ont déclenché ses douleurs physiques.

[18] J’admets également que le ministre a dit que la requérante avait envisagé d’enseigner le yoga. Je sais bien sûr que la requérante a obtenu un certificat d’enseignement du yoga. Néanmoins, la requérante a déclaré que son intention en suivant des cours de yoga était d’améliorer sa santé mentale et non d’enseigner. J’accepte le témoignage de la requérante sur ce point comme étant raisonnable dans les circonstances. De plus, il m’est impossible de conclure que la présence de la requérante à des cours de yoga démontrait qu’elle avait la capacité d’exercer un emploi véritablement rémunérateur.

Invalidité prolongée

L’invalidité de la requérante devait-elle durer pendant une période longue, continue et indéfinie?

[19] Je juge que, selon la prépondérance des probabilités, l’invalidité de la requérante devait durer pendant une période longue, continue et indéfinie. Voici pourquoi.

[20] Premièrement, le rapport de Mme Barnett (infirmière praticienne) expliquait qu’il était peu probable que la requérante soit un jour en mesure de se rétablir complètement de son problème de santé ou d’exercer un emploi rémunérateur (page GD2-70).

[21] Deuxièmement, le Dr Barnett a écrit que le problème de santé de la requérante était chronique et peu susceptible de se résorber (page GD6-4).

[22] Troisièmement, la Dre O’Connor a déclaré que la requérante avait partiellement répondu au traitement et que les symptômes résiduels étaient chroniques et peu susceptibles de se résorber complètement (page GD2-49).

[23] Quatrièmement, le témoignage que la requérante a donné de vive voix m’a convaincu que son problème de santé et ses limitations fonctionnelles devaient durer pendant une période longue, continue et indéfinie.

Conclusion

[24] La requérante avait une invalidité grave et prolongée en septembre 2015, lorsqu’elle a cessé de travailler comme sage-femme. Toutefois, pour établir la date du paiement de la pension, il faut considérer qu’une personne est réputée être devenue invalide tout au plus 15 mois avant que le ministre reçoive sa demande de pensionNote de bas de page 6. La demande a été reçue en janvier 2019, donc la date réputée de l’invalidité est octobre 2017. Le versement de la pension commence quatre mois après la date réputée de l’invalidité, donc à compter de février 2018Note de bas de page 7.

[25] L’appel est accueilli.

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