Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : DO c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 37

Numéro de dossier du Tribunal: AD-21-18

ENTRE :

D. O.

Demandeur
(requérant)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Intimé
(ministre)


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division d’appel


Décision relative à une demande de
permission d’en appeler rendue par :
Neil Nawaz
Date de la décision : Le 4 février 2021

Sur cette page

Décision et motifs

Décision

[1] Le requérant a présenté sa demande de permission d’en appeler en retard, mais j’ai décidé de l’examiner quand même. Cependant, je la rejette parce qu’il n’a pas soulevé de cause défendable.

Aperçu

[2] Le requérant est un ancien briqueteur qui a cessé de travailler après avoir subi des blessures à la tête et au dos dans un accident de voiture en novembre 2012. Il a maintenant 35 ans.

[3] En juin 2019, le requérant a demandé des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC), soutenant qu’il ne pouvait plus travailler en raison d’un certain nombre de problèmes de santé, notamment un syndrome de douleur chronique, un syndrome de douleur myofasciale, un syndrome du défilé thoraco-brachial et un syndrome postcommotionnel.

[4] Le ministre a rejeté la demande après avoir décidé que le requérant n’avait pas cotisé suffisamment au RPC. Il a donc conclu que le requérant n’était pas admissible aux prestations d’invalidité du RPC.

[5] Le requérant a fait appel du refus du ministre à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a commencé son audience, mais l’a ensuite suspendue pour donner l’occasion au requérant de démontrer qu’il était le principal responsable de ses enfants et qu’il pouvait donc se prévaloir de la clause d’exclusion pour élever des enfants. Le requérant est revenu avec une décision de l’Agence du revenu du Canada confirmant que s’il avait demandé la Prestation fiscale pour enfants, il y aurait eu droit d’août 2008 à avril 2010.

[6] Dans une décision datée du 13 octobre 2020, la division générale a rejeté l’appel parce que le requérant avait réalisé des gains admissibles et versé des cotisations valides pendant seulement trois années, en 2007, 2012 et 2013. La division générale a conclu que même en appliquant la clause d’exclusion pour élever des enfants était appliquée, le requérant n’avait pas versé suffisamment de cotisations au RPC pour établir une période minimale d’admissibilité (PMA)Footnote 1.

[7] Le 16 janvier 2021, le requérant a demandé la permission d’en appeler à la division d’appel du Tribunal, prétendant que la division générale avait commis une erreur en rendant sa décision. Le requérant a souligné que l’ARC avait jugé qu’il avait droit à la Prestation fiscale pour enfants d’août 2008 à avril 2010 puisqu’il avait été le principal responsable de son enfant pendant cette période. Il a laissé entendre que les cinq derniers mois de 2008 auraient dû être exclus de sa période cotisable puisqu’il prenait soin de son enfant à ce moment-là. Il a déclaré que ses gains en 2008 n’étaient inférieurs que de quelques centaines de dollars au seuil minimum et qu’ils auraient donc dû être considérés comme des gains admissibles aux fins du calcul de sa PMA. Le requérant a fait valoir que la clause d’exclusion pour élever des enfants et la disposition relative au calcul au prorata lui auraient permis d’établir une PMA valide si 2008 avait été comptée parmi ses autres années de gains admissibles et de cotisations valides.

Questions en litige

[8] Je dois trancher les questions connexes suivantes :

  1. Le requérant a-t-il présenté sa demande de permission d’en appeler en retard? Dans l’affirmative, dois-je accorder au requérant une prorogation de délai pour présenter sa demande de permission d’en appeler?
  2. Est-ce que l’un des motifs d’appel du requérant a une chance raisonnable de succès?

Analyse

Le requérant a présenté sa demande de permission d’appeler en retard, mais il mérite de se voir accorder une prorogation de délai

[9] Une partie requérante doit présenter sa demande de permission d’en appeler à la division d’appel dans les 90 jours suivant la date à laquelle elle reçoit communication de la décisionFootnote 2. Dans la présente affaire, la division générale a rendu sa décision le 13 octobre 2020, et le Tribunal l’a envoyé par courriel aux parties le lendemain. La division d’appel a reçu la demande de permission d’en appeler du requérant le 16 janvier 2021, trois jours après le délai de dépôt de 90 joursFootnote 3.

[10] Bien que le requérant ait présenté sa demande de permission d’en appeler en retard, je l’accepte quand même en me fondant sur les quatre facteurs énoncés dans l’affaire GattellaroFootnote 4. Le poids qu’il convient d’accorder à chacun de ces facteurs peut différer d’une affaire à l’autre, mais la considération primordiale est de servir l’intérêt de la justiceFootnote 5.

[11] Premièrement, le requérant a raisonnablement expliqué son retard : sa représentante a dit qu’elle avait noté la mauvaise date limite dans son journal. Deuxièmement, le requérant a manifesté une intention persistante de poursuivre l’appel; sa demande était seulement en retard de trois jours, et sa représentante et lui ont communiqué régulièrement avec le Tribunal dans les semaines et les mois qui ont suivi la réception de la décision de la division généraleFootnote 6. Troisièmement, le fait d’accorder une prorogation du délai ne portera pas préjudice aux intérêts de l’autre partie. En effet, je ne pense pas que le ministre, compte tenu de ses ressources, subira un préjudice important si j’accorde au requérant un délai supplémentaire pour poursuivre son appel.

[12] Le quatrième facteur énoncé dans la décision Gattellaro consiste à savoir si la partie qui demande une prorogation du délai dispose d’une cause défendable en appel. La Cour d’appel fédérale a établi que la question de savoir si une partie requérante a une cause défendable revient à se demander si son appel a une chance raisonnable de succèsFootnote 7. Il s’agit là du critère de la permission d’en appeler.

[13] Comme les trois premiers facteurs énoncés dans la décision Gatellaro favorisent le requérant, je suis prêt à accepter sa demande de permission d’en appeler, même si elle a été présentée en retard. Toutefois, comme le requérant ne dispose pas d’une cause défendable, je ne peux pas instruire son appel.

Le requérant ne dispose pas d’une cause défendable

[14] Il existe seulement trois moyens d’appel à la division d’appel. Une partie requérante doit démontrer que la division générale a agi de façon inéquitable, qu’elle a mal interprété la loi ou qu’elle a fondé sa décision sur une erreur de fait importanteFootnote 8.

[15] Un appel peut seulement être instruit si la division d’appel accorde d’abord la permission d’en appelerFootnote 9. À ce stade, la division d’appel doit être convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès. Il s’agit d’un critère relativement facile à satisfaire, et cela signifie que la partie requérante doit présenter au moins un argument défendable.

[16] Indépendamment du fait que le requérant ait présenté ou non sa demande de permission d’en appeler en retard, je suis obligé de décider s’il a soulevé une cause défendable. Pour les raisons ci-dessous, je conclus que ce n’est pas le cas.

[17] Pour qu’une partie requérante puisse avoir gain de cause à la division d’appel, elle ne doit pas seulement être en désaccord avec la décision de la division générale. Elle doit également relever des erreurs précises que la division générale a commises en rendant sa décision et expliquer comment ces erreurs, le cas échéant, correspondent à l’un ou plusieurs des trois moyens d’appel prévus par la loi.

[18] Dans la présente affaire, le requérant me demande de réexaminer la preuve que la division générale a déjà examinée. Le requérant a démontré à la division générale qu’il était le principal responsable de son jeune fils entre août 2008 et avril 2010. Il a fait valoir qu’on devait tenir compte du fait qu’il avait été le principal responsable de son fils non seulement pendant toute l’année 2009, mais aussi pendant cinq mois en 2008 et quatre mois en en 2010. La division générale a pris en considération cette observation, mais a conclu qu’aux fins du RPC, le requérant ne pouvait exclure que 2009 du calcul de sa PMA.

[19] J’estime qu’on ne peut pas soutenir que la division générale a commis une erreur de droit ou de fait en parvenant à cette conclusion. La clause d’exclusion pour élever des enfants permet à une partie requérante d’exclure de sa période cotisable les années où elle était la principale personne responsable d’un enfant de moins de sept ansFootnote 10. En règle générale, seules des années complètes peuvent être exclues. Grâce à la clause d’exclusion pour élever des enfants, 2009 a été exclue de la période cotisable du requérant. Les années 2008, 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014 ont donc été prises en compte. Cependant, sur ces six années, le requérant n’a que deux années de gains admissibles et de cotisations valides, soit 2012 et 2013. Il ne parvient donc toujours pas à établir de PMA.

[20] À l’audience de la division générale, le requérant a fait valoir que ses gains en 2008 devraient être inclus dans le calcul de sa PMA, même s’ils étaient inférieurs au seuil minimum de 4 400 $ fixé pour cette année-là. La division générale a également examiné et rejeté cet argument, ajoutant : « Si le requérant estime que le montant établi pour l’année en question est inexact, il peut s’adresser à la Cour canadienne de l’impôt. S’il avait gain de cause, il pourrait peut-être alors établir une PMA calculée au prorata valideFootnote 11. » Encore une fois, il n’est pas possible à mon avis de soutenir que la division générale a commis une erreur sur ce point. La division générale était en droit de s’appuyer sur le registre des gains du requérantFootnote 12, qui montrait clairement que celui-ci n’a que trois années de gains admissibles et de cotisations valides au total.

[21] Enfin, la division générale a examiné si le requérant pouvait établir une PMA en incluant 2013 au moyen de la soi-disant disposition relative au calcul au prorataFootnote 13. Cette disposition vise à faire en sorte qu’une partie demanderesse ne soit pas désavantagée par des cotisations et des gains insuffisants au cours de l’année où elle est déclarée invalide. Lorsqu’on procède à un calcul au prorata, les cotisations qu’une partie requérante doit verser et les gains qu’elle doit réaliser sont réduits en proportion du nombre de mois pendant lesquels elle a été en mesure de travailler au cours de la dernière année de sa période cotisable. Dans la présente affaire, la division générale a conclu que le requérant ne pouvait pas se prévaloir de la disposition relative au calcul au prorata parce qu’il n’avait quand même que trois des six années de cotisations valides requises pendant sa période cotisable, même si ses cotisations et ses gains inférieurs au seuil de 2014 étaient pris en compte. Selon moi, l’argument selon lequel la division générale a commis une erreur en tirant cette conclusion n’est pas défendable.

[22] Un appel à la division d’appel ne constitue pas une occasion pour une partie requérante de plaider à nouveau sa cause et de demander un résultat différent. Je ne peux pas annuler une décision à moins d’être convaincu que la division générale a commis une erreur correspondant à l’un ou plusieurs des trois moyens d’appel prévus par la loi. D’après ce que je peux voir, la division générale a fait ce qu’elle a pu pour trouver une PMA, mais n’en a pas trouvé en se fondant sur la preuve disponible et le droit applicable. L’argument voulant que la division générale ait commis une erreur dans son analyse n’est à mon avis pas défendable.

Conclusion

[23] Le requérant n’a pas soulevé de moyen d’appel qui confèrerait à l’appel une chance raisonnable de succès. La permission d’en appeler est donc refusée.

Représentante :

Amanda Byrne, représentante du requérant

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