Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : MC c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 279

Numéro de dossier du Tribunal: GP-20-995

ENTRE :

M. C.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Anne S. Clark
Date de l’audience par
vidéoconférence :
Le 9 février 2021
Date de la décision : Le 16 février 2021

Sur cette page

Décision

[1] La requérante, M. C., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). La présente décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[2] La requérante a 57 ans. Son dernier emploi à temps plein était comme gouvernante/aide domestique. La requérante a dit qu’elle a été congédiée en mars 2018 parce qu’elle avait des maux de dos de plus en plus intenses qui faisaient en sorte qu’elle était incapable de faire son travail. Elle a affirmé qu’elle avait dû cesser de travailler et qu’elle avait besoin de soins médicaux d’urgence. Dans sa demande, elle a affirmé qu’elle était tout simplement incapable de travailler depuis mars 2018. Elle a touché des prestations de maladie ainsi que des prestations régulières de l’assurance-emploi (AE). Pendant ou après sa période de prestations régulières d’AE, elle a postulé de nombreux emplois, a suivi un très court programme de formation et a travaillé pendant un ou deux mois.

[3] La requérante a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC le 25 octobre 2018. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande parce qu’elle n’avait pas essayé d’occuper un travail moins exigeant et qu’elle n’avait pas essayé de se recycler professionnellement. La requérante a fait appel de cette décision devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

Ce que la requérante doit prouver

[4] Pour que la requérante ait gain de cause, elle doit prouver qu’elle avait une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2019 ou avant. Cette date est établie en fonction des cotisations qu’elle a versées au RPCNote de bas de page 1.

[5] Le RPC définit les termes « grave » et « prolongée ». Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 2. Elle est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinieNote de bas de page 3.

[6] La requérante doit prouver qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle soit invalide.

Questions que je dois examiner en premier

Le témoin de la requérante n’était pas fiable

[7] La requérante vit avec DB. DB a affirmé qu’il était témoin des activités de la requérante presque tous les jours. Il a dit qu’ils étaient ensemble depuis cinq ans. Il est à la retraite, et il a donc pu observer quotidiennement son état de santé se détériorer au cours des cinq dernières années. Il a affirmé qu’elle était la plupart du temps assise dans une chaise et qu’elle pleurait. Elle semble être constamment en douleur.

[8] La requérante a plus tard confirmé qu’elle ne vivait pas avec DB depuis cinq ans. Elle le connaissait depuis plusieurs années, mais ils n’ont pas commencé à vivre ensemble avant septembre 2019. La requérante estimait que DB était mélangé lorsqu’il a mentionné qu’il la voyait tous les jours depuis cinq ans. Elle a dit qu’elle vivait avec quelqu’un d’autre jusqu’en février 2019 et elle ne savait pas pourquoi DB avait dit qu’il la voyait quotidiennement depuis tout ce temps.

[9] Je ne sais pas si DB cherchait à m’induire en erreur lorsqu’il a livré ce témoignage en affirmant qu’il était avec la requérante presque quotidiennement depuis cinq ans. L’explication de la requérante était très vague. J’estime qu’il est difficile de considérer qu’il ne s’agissait que d’une erreur lorsqu’il a dit qu’ils étaient ensemble depuis cinq ans, puisqu’ils vivent ensemble depuis seulement un peu plus d’un an.

[10] DB a utilisé un langage très fort pour décrire les symptômes de la requérante. J’estime qu’il n’était pas crédible en ce qui concerne sa relation avec la requérante. La description qu’il a faite des symptômes de la requérante me semblait exagérée. Pour ces raisons, je ne peux pas considérer sa preuve comme étant crédible.

Motifs de ma décision

[11] Je conclus que la requérante n’a pas prouvé qu’elle avait une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2019 ou avant. J’ai tiré cette conclusion après avoir analysé les questions suivantes.

L’invalidité de la requérante n’était pas grave

La preuve ne montre pas que les limitations de la requérante l’empêchaient de travailler

[12] La requérante est atteinte de maux au bas du dos, de dépression et d’anxiété. Toutefois, je ne dois pas me concentrer sur les diagnostics de la requéranteNote de bas de page 4. Je dois plutôt établir si des limitations fonctionnelles l’empêchent de gagner sa vieNote de bas de page 5. Dans cette optique, je dois tenir compte de tous ses problèmes de santé (pas juste du plus important) et de leur effet sur sa capacité à travaillerNote de bas de page 6.

[13] J’estime que la preuve montre que la requérante a des limitations fonctionnelles. Par contre, la preuve ne montre pas que ces limitations l’empêchent de travailler tout court. Ainsi, elles ne font pas en sorte que la requérante est invalide au sens du RPC. Voici les éléments sur lesquels je me suis penchée.

Ce que la requérante dit de ses limitations fonctionnelles

[14] La requérante a affirmé qu’elle présentait des symptômes de dépression et d’anxiété depuis avant l’âge de 30 ans. Elle prend un médicament pour la dépression et cela aide pour les crises d’anxiété et de panique. Elle ne consulte pas de professionnel de la santé mentale, mais elle a déjà vu un thérapeute à deux ou trois reprises en 2016 ou 2017. Elle ne se souvenait pas quand exactement elle avait participé aux séances de counseling.

[15] La requérante a des maux de dos depuis 10 ans. Elle a affirmé qu’elle avait simplement continué à travailler malgré la douleur. Dans le passé, elle ne ressentait des douleurs que lorsqu’elle [traduction] « surpassait ses capacités ». Depuis les trois dernières années, elle a de la douleur quotidiennement. Elle prend des médicaments en vente libre et a une injection tous les quatre à six mois. Elle affirme que l’injection l’aide pendant environ un mois. Elle affirme que son nom est sur une liste d’attente pour consulter un neurochirurgien.

[16] La requérante a eu d’autres problèmes de santé au fil des années, mais affirme qu’elle a réussi à les traiter ou que ceux-ci ne la dérangent pas suffisamment pour nuire à sa capacité de travailler. Elle a une blessure à l’épaule, mais elle est presque toute guérie. Cette blessure la dérange parfois, mais ne l’empêche pas de travailler. Elle a consulté un spécialiste pour des problèmes intestinaux, mais ceux-ci se sont finalement résorbés. Elle a eu des problèmes d’ouïe, mais les examens ont révélé que son ouïe était normale.

[17] La requérante affirme être incapable de travailler en raison de ses maux de dos chroniques, de la dépression et de l’anxiété.

Ce que la preuve médicale révèle sur les limitations fonctionnelles de la requérante

[18] La requérante doit fournir des preuves médicales qui montrent qu’elle avait des limitations qui nuisaient à sa capacité de travailler le 31 décembre 2019 ou avantNote de bas de page 7. La preuve médicale confirme que la requérante est traitée pour la dépression et les maux de dos.

[19] La Dre Cheryl Smith est la médecin de famille de la requérante et elle la traite pour les maux de dos, la dépression et l’anxiété. Elle a dit que la requérante avait peu de possibilités d’emploi en raison de son âge, de sa scolarité et de son expérience. Elle n’a pas précisé les limitations entraînées par l’état de santé de la requérante qui l’aurait empêchée de travailler.

[20] La Dre C. Smith a déclaré en octobre 2018 qu’elle avait vu la requérante à neuf reprises pendant l’année précédente. La requérante avait des maux au bas du dos avec des changements dégénératifs à la colonne lombaire. Elle avait une hernie discale à L5. Elle peut marcher et rester debout de façon limitée. Le traitement recommandé était Tylenol, la gabapentine, des injections de stéroïdes et de l’exercice physique. Elle a été aiguillée en neurochirurgie et est sur la liste d’attente. Il n’y avait pas de date potentielle de retour au travail. La Dre C. Smith a également affirmé qu’elle pensait que la requérante avait des occasions d’emploi limitées en raison de son âge et de son faible niveau de scolarité et de formationNote de bas de page 8.

[21] Dans sa lettre d’aiguillage au Dr David Smith datée du 30 avril 2018, la Dre C. Smith a affirmé que la requérante avait des douleurs au bas du dos depuis plusieurs mois. Un incident survenu en mars 2018 a causé une exacerbation aiguë de ses douleurs au bas du dosNote de bas de page 9.

[22] Le Dr David Smith traite la requérante pour ses douleurs au dos. Il a dit qu’elle guérirait lentement, mais que ses douleurs étaient soulagées pendant quatre à six mois avec chaque injection. Il n’a pas dit qu’elle ne pouvait pas travailler. Il a clairement indiqué que l’activité physique était un élément important de son traitement. La requérante a vu le Dr David Smith pour la première fois en juillet 2018 pour la gestion de sa douleur. Il a écrit qu’il a vu la requérante pour une apparition aiguë de douleurs au dos causées par une blessure subie en mars 2018. Son état de santé général était [traduction] « très bon » et avant mars 2018, elle n’avait aucun problème de santé digne de mention. Il a affirmé qu’elle ne serait pas en mesure de retourner travailler bientôt, parce que sa blessure allait prendre beaucoup de temps à guérir. Il a déclaré qu’il était évident que la requérante avait de la difficulté à marche lorsqu’elle se levait de sa chaiseNote de bas de page 10. Le Dr Smith a injecté les articulations facettaires de la requérante en novembre 2018 et en juin 2019. Ces injections lui ont aidé pendant trois à quatre mois. Le Dr D. Smith a dit que la requérante avait signalé que les douleurs étaient revenues, mais qu’elles étaient moins graves qu’auparavant. Il a demandé à la requérante de faire plus d’exercice physique et puisque les injections l’avaient aidée, il a recommandé qu’elle en reçoive d’autres. Encore une fois, il a indiqué que l’activité physique était un élément important pour son rétablissementNote de bas de page 11.   En septembre 2020, le Dr D. Smith a indiqué qu’il avait de nouveau fait des injections. Il a affirmé que les injections précédentes avaient aidé pendant quatre à cinq mois, mais que la requérante demeurait [traduction] « plutôt inconfortable »Note de bas de page 12.

La requérante a suivi les conseils médicaux

[23] Pour avoir droit à une pension d’invalidité, une personne doit suivre les traitements recommandésNote de bas de page 13. Si une personne ne les suit pas, elle doit pouvoir raisonnablement expliquer pourquoi elle ne suit pas les conseils. Je dois aussi examiner les effets potentiels de ces conseils sur l’invalidité de la personneNote de bas de page 14

[24] La requérante a suivi les conseils médicauxNote de bas de page 15. Elle consulte son médecin de famille et suit les traitements recommandés. Elle se rend à ses rendez-vous avec le Dr D. Smith pour ses injections pour traiter ses douleurs au dos. Aucune preuve n’indique qu’elle a refusé de suivre des conseils médicaux.

[25] À présent, je dois chercher à savoir si la requérante est régulièrement capable d’occuper d’autres types d’emplois. Pour être graves, ses limitations fonctionnelles doivent l’empêcher de gagner sa vie, peu importe l’emploi, et pas seulement la rendre incapable d’occuper son emploi habituelNote de bas de page 16.

La requérante peut travailler dans un contexte réaliste

[26] Lorsque je décide si une personne a la capacité de travailler, je dois examiner davantage que ses problèmes médicaux et leur conséquence sur ses capacités. Je dois aussi examiner son âge, son niveau de scolarité, ses aptitudes linguistiques, son expérience professionnelle et de vieNote de bas de page 17. Ces facteurs m’éclaircissent quant à la capacité de la requérante de travailler dans un contexte réaliste.

[27] Je conclus que la requérante est capable de travailler dans un contexte réaliste. La Dre C. Smith a affirmé qu’elle pensait que la requérante avait des occasions d’emploi limitées en raison de son âge et de son faible niveau de scolarité et de formation. La requérante a dit qu’elle croyait que personne ne l’embaucherait en raison de son âge.

[28] La preuve montre que la requérante a terminé sa 12e année et qu’à l’âge de 47 ans, elle a terminé un cours en soins continus. Aucune preuve n’indique qu’elle a des déficits d’apprentissage ou qu’elle soit incapable de communiquer dans l’une des langues officielles.

[29] La requérante a témoigné qu’en 2018 ou après, elle a terminé une courte formation pour un emploi chez Postes Canada. Elle a postulé des emplois et travaillé pendant un ou deux mois comme aide à la livraison. Elle n’a jamais eu de retour des employeurs et ne peut donc pas dire pourquoi ses demandes d’emploi n’ont pas porté fruit. Elle n’a pas fourni d’information ni de détails supplémentaires sur la formation ou sur son emploi. Elle n’arrivait pas à se souvenir de l’année, mais c’était pendant qu’elle recevait ses prestations d’AE ou après, donc 2018 ou 2019. Compte tenu de l’état de santé de la requérante, elle devrait probablement occuper un poste plus sédentaire et pourrait ne pas pouvoir travailler à temps plein. Selon la preuve qui m’a été présentée, et puisque la requérante a tenté de trouver un travail et a effectivement occupé un emploi, j’estime qu’il est probable qu’elle puisse travailler. Elle n’a pas fourni suffisamment d’information pour montrer que ses circonstances personnelles l’empêchent de travailler dans un contexte réaliste.

La requérante n’a pas essayé de trouver un emploi convenable et de le garder

[30] La requérante affirme qu’elle a postulé des emplois, qu’elle a suivi une formation (très courte) et qu’elle a travaillé pendant un ou deux mois pendant qu’elle touchait des prestations d’AE ou après 2018.

[31] Je lui ai demandé de me fournir plus d’information sur ses tentatives de travailler. Elle a déclaré qu’elle avait présenté des demandes d’emploi, mais qu’elle ne se souvenait pas des détails précis. Elle n’a jamais eu de retour des potentiels employeurs et ne peut donc pas dire pourquoi ses demandes d’emploi n’ont pas porté fruit.

[32] S’il est réaliste qu’elle travaille, la requérante doit montrer qu’elle a essayé de trouver et de garder un emploi. Elle doit aussi montrer que ses efforts ont échoué à cause de sa santéNote de bas de page 18. Par trouver un emploi convenable et le garder, on entend notamment le recyclage professionnel et chercher un emploi adapté à ses limitationsNote de bas de page 19.

[33] La requérante a fait des démarches, mais celles-ci ne montrent pas que son invalidité l’empêche de gagner sa vie. La requérante ne pouvait pas dire pourquoi elle n’avait pas réussi à se trouver un emploi et ne pouvait pas décrire les types d’emplois qu’elle avait postulés. Elle a accepté un poste qu’elle a occupé pendant un ou deux mois. Elle affirme qu’elle n’a pas tenté de se recycler professionnellement et qu’elle n’a suivi qu’une très courte formation afin de pouvoir postuler chez Postes Canada. Il n’y a aucune preuve au dossier qui montre que ses démarches pour travailler ou se recycler professionnellement ont été vaines en raison de sa santé. Ainsi, je ne peux pas conclure qu’elle avait une invalidité grave le 31 décembre 2019 ou avant.

Conclusion

[34] Je conclus que la requérante n’est pas atteinte d’une invalidité grave et qu’elle n’est donc pas admissible à une pension du RPC. Puisque j’ai établi que son invalidité n’était pas grave, je n’ai pas à établir si elle était prolongée.

[35] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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