Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : CD c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 286

Numéro de dossier du Tribunal: GP-19-1880

ENTRE :

C. D.

Appelant (requérant)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Lianne Byrne
Requérant représenté par : Denise D’Silva
Date de l’audience par
téléconférence :
Le 19 janvier 2021
Date de la décision : Le 31 janvier 2021

Sur cette page

Décision

[1] Le requérant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] Le requérant était travailleur indépendant dans le domaine de la construction jusqu’en janvier 2016. Il a cessé de travailler en raison de douleurs aux coudes, aux épaules et au cou. Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité du requérant le 28 septembre 2018. Le ministre a rejeté la demande initialement et après révision. Le requérant a porté en appel la décision découlant de la révision devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Pour être admissible à une pension d’invalidité du RPC, le requérant doit répondre aux exigences énoncées dans le RPC. Plus précisément, le requérant doit être déclaré invalide au sens du RPC au plus tard à la date marquant la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA est fondé sur les cotisations du requérant au RPC. Je constate que la PMA du requérant a pris fin le 31 décembre 2017.

Questions en litige

[4] Les problèmes de santé du requérant lui ont-ils entraîné une invalidité grave qui le rendait régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice au 31 décembre 2017?

[5] Dans l’affirmative, l’invalidité du requérant était-elle également d’une durée longue, continue et indéfinie au 31 décembre 2017?

Analyse

[6] Une invalidité est définie comme une invalidité physique ou mentale qui est grave et prolongéeNote de bas de page 1 . Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décès. Toute personne doit prouver que, selon la prépondérance des probabilités, son invalidité répond aux deux volets du critère. Ainsi, si elle ne répond qu’à un seul volet, elle n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Invalidité grave

[7] Le requérant était travailleur indépendant dans le domaine de la construction (rénovations de maisons) du 8 octobre 2009 au 20 janvier 2016. Il a cessé de travailler en raison de douleurs aux coudes, aux épaules et au cou. 

[8] Le requérant a témoigné qu’en 2017, il avait des douleurs aux deux coudes et partout dans son corps. Ses douleurs s’aggravaient la nuit. Il avait de la difficulté à dormir. Il ressentait de la fatigue toute la journée. Il avait de la difficulté à tenir ou transporter des objets. Il n’avait aucune bonne journée. Il avait de la difficulté à marcher pendant plus que quelques minutes. Il était incapable de faire une quelconque activité. Sa femme l’aidait à entrer et sortir du bain. 

[9] En plus de ses douleurs, il a commencé à se sentir dépressif il y a environ trois ans. Sa mémoire et sa concentration sont pauvres. On lui a prescrit des antidépresseurs, ce qui lui causait des effets secondaires, comme des étourdissements. 

[10] Sa femme, L. D., a aussi témoigné lors de l’audience. Elle a expliqué qu’il était un travailleur de la construction qui faisait un travail exigeant sur le plan physique. Il a commencé à ressentir de la douleur aux coudes, qui s’est aggravée en 2015. Il a cessé de travailler en 2015. 

[11] Elle a déclaré que ses symptômes de dépression avaient commencé il y a environ trois ans. Son médecin de famille l’a aiguillé vers un psychiatre. On lui a prescrit des médicaments. Il est toujours irascible et se met facilement en colère. 

[12] Il a présenté une demande de prestations d’invalidité du RPC en 2017 en raison de douleurs aux deux coudes, aux deux pouces, au bas du dos, au cou et à l’épaule droite. Il peinait à marcher. Il avait de la difficulté à dormir et se sentait fatigué toute la journée. Il avait besoin d’aide pour ses soins personnels, comme entrer et sortir de la douche. Sa situation s’est aggravée depuis.

[13] Il y a plusieurs rapports médicaux au dossier et je les ai tous examinés. Plusieurs rapports du Dr Imtiaz Khan, rhumatologiste, indiquent que le requérant avait de la douleur et des limitations en 2017. Toutefois, il semble évident que ses limitations ne l’empêchaient pas se chercher un autre type de travail mieux adapté à ses limitations. 

[14] Le 17 mars 2017, le Dr Khan a indiqué que le requérant avait des douleurs bilatérales aux coudes depuis trois ans. Il a cessé de travailler en 2016. Il a commencé à sentir de la douleur aux premières articulations MCP, au point qu’il avait du mal à utiliser des baguettes ou à saisir quoi que ce soit. Il s’agit d’une lésion des tissus mous. Il a reçu une injection. 

[15] Le Dr Khan a écrit le 10 avril 2017 qu’il souffrait de douleurs épicondyliennes bilatérales progressives avec des douleurs au niveau des premières articulations MCP. Il a signalé que l’injection ne lui a apporté aucun soulagement. Il a plus de sensibilité sur les épicondyles médiaux et latéraux gauches. 

[16] Ravinder Faury, physiothérapeute, a constaté le 13 septembre 2017 que la physiothérapie avait apporté une certaine amélioration. Le requérant était capable de bouger ses coudes mieux qu’avant et était capable de faire tous les exercices, mais il ressentait encore des douleurs. 

[17] Le Dr Minh Quan, médecin de famille, a rempli un rapport médical du RPC le 26 février 2017. Le requérant a des douleurs chroniques quotidiennes au coude, une épicondylite et des douleurs aux deux pouces. Il a cessé de travailler dans la construction en raison de la douleur et de sa difficulté à transporter des objets. 

[18] Le Dr Minh D. Quan a écrit le 31 janvier 2017 que le requérant souffrait quotidiennement de douleurs aux deux coudes. Il était dans l’incapacité de travailler depuis longtemps. Le Dr Quan a écrit le 3 mars 2017 que le requérant avait des douleurs chroniques quotidiennes aux coudes. Le Dr Quan a ensuite indiqué, le 30 novembre 2017, que le requérant se plaignait de douleurs aux deux épaules, aux deux coudes et aux deux pouces depuis plus d’un an. 

[19] Le Dr Michael J. Weinberg a déclaré le 19 décembre 2017 que le requérant éprouvait une douleur aiguë aux deux pouces (pire au pouce droit) depuis deux ans. Elle survenait au niveau de l’articulation MCP et de son coude. Le Dr Weinberg était d’avis qu’il devait continuer à travailler et à lutter contre sa douleur. 

[20] Il y a plusieurs rapports de la Dre Amina Lodhi, rhumatologue. Je constate que la Dre Lodhi a commencé à traiter le réclamant juste après la fin de sa PMA, en janvier 2018. Il est évident, d’après les rapports de la Dre Lodhi, que le requérant était incapable de travailler dans le domaine de la construction. Toutefois, ses limitations ne l’empêchaient pas se chercher un autre type de travail mieux adapté à ses limitations. 

[21] Le 19 janvier 2018, la Dre Lodhi a signalé que le requérant avait été suivi pour de l’arthrite. Il avait de la douleur au coude droit depuis trois ans et celle-ci s’aggravait avec l’activité. Il avait également des douleurs aux deux pouces et une douleur constante dans son épaule droite depuis environ un an. Il avait des douleurs occasionnelles aux chevilles et à l’articulation MTP. Il souffrait de maux de dos avec l’activité depuis de nombreuses années. Sa douleur bilatérale au coude correspondait à une épicondylite latérale bilatérale et à une épicondylite médiale droite. Sa douleur à l’épaule droite était cohérente avec un diagnostic de tendinopathie de la coiffe des rotateurs.

[22] Le 20 février 2018, on a indiqué qu’il avait de la douleur à l’épaule droite, de la douleur bilatérale au coude. On a aussi indiqué que le requérant avait de l’arthrose aux mains, mais qui n’entraînait pas de douleurs parce qu’il ne travaillait pas.  Le 22 juin 2018, il présentait des douleurs à l’épaule droite, de l’arthrose aux mains, une discopathie dégénérative de la colonne cervicale et des douleurs au cou. Le 18 septembre 2018, on a noté que ses activités étaient restreintes en raison de la douleur. 

[23] La Dre Lodhi a rempli le rapport médical du RPC le 24 septembre 2018. Il y est écrit que le requérant souffre d’une tendinopathie, d’une déchirure et d’une bursite de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite. Il est également atteint d’une tendinopathie bilatérale du fléchisseur et de l’extenseur communs et d’une déchirure du tendon fléchisseur commun droit. Il est atteint d’arthrose aux mains et de discopathie dégénérative à la colonne cervicale. Il a des douleurs à l’épaule droite, aux deux coudes, aux deux mains et au cou. Sa douleur est modérément contrôlée grâce à des antidouleurs. Il a de multiples problèmes dégénératifs au niveau des articulations, ce qui limite sa capacité à travailler, car son travail exige de soulever des objets lourds. 

[24] Il y a un rapport psychiatrique daté de bien après la fin de sa PMA. Le 7 octobre 2019, le Dr Phuong Tran, psychiatre, a écrit qu’il faisait de l’insomnie depuis deux ans, avec un sentiment d’irritabilité.

Il a un trouble de la douleur et un trouble dépressif majeur (épisode unique). 

[25] Je reconnais que les problèmes de santé du requérant l’ont empêché de reprendre son travail exigeant physiquement dans le domaine de la construction. Toutefois, j’ai tenu compte du fait qu’on établit que l’invalidité est « grave » non pas à partir de l’existence d’affections graves, mais plutôt à partir du fait que l’invalidité empêche la personne de gagner sa vie. Il ne s’agit pas de savoir si une personne est incapable d’exercer son emploi régulier, mais plutôt de savoir si elle est incapable d’effectuer un travail véritablement rémunérateurNote de bas de page 2 .

[26] J’estime aussi qu’il y des preuves de la capacité du requérant à travailler. Les rapports médicaux au dossier indiquent que le requérant ne peut pas continuer à travailler dans le domaine de la construction, un travail exigeant sur le plan physique. Cependant, ses limitations fonctionnelles ne l’auraient pas empêché de tenter de faire un travail plus léger. Je remarque également que le Dr Weinberg pense qu’il devrait continuer à travailler. 

[27] Lorsqu’il existe une preuve de capacité de travail, la personne doit montrer que ses démarches pour obtenir et conserver un emploi ont été infructueuses en raison de son état de santéNote de bas de page 3 . Dans le cas présent, le requérant n’a pas tenté de trouver ou d’occuper un emploi plus léger depuis qu’il a cessé de travailler dans la construction. 

[28] Je dois évaluer la partie du critère portant sur la gravité dans un contexte réalisteNote de bas de page 4 . Cela signifie que pour déterminer si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de certains facteurs comme l’âge, le niveau d’instruction, les aptitudes linguistiques, les antécédents de travail et l’expérience de la vie. Dans ce cas-ci, j’ai tenu compte du fait que le requérant avait 49 ans à la fin de sa PMA. Il a fait des études collégiales au Vietnam. Il a principalement travaillé dans le domaine de la construction (rénovations de maisons). Il est capable de communiquer un peu en anglais, mais a besoin de l’aide de sa femme. Il peut lire et écrire un peu en anglais. Il n’est pas capable d’utiliser un ordinateur.

[29] Malgré sa pauvre maîtrise de l’anglais et des ordinateurs, le requérant est relativement jeune et bien instruit. En tenant compte de ses caractéristiques personnelles, je ne pense pas qu’il n’est pas employable dans un contexte réaliste. Bien que je reconnaisse qu’il serait incapable de reprendre son travail physiquement exigeant dans la construction, il ne serait pas exclu qu’il puisse faire un travail plus léger adapté à ses limitations, qu’il puisse se recycler en vue d’un travail plus léger ou qu’il puisse améliorer ses compétences en anglais. Il n’a pas essayé de se trouver un travail plus léger. Ainsi, le requérant n’a pas montré que ses démarches pour obtenir et conserver un emploi ont été vaines en raison de son état de santé.

[30] Je dois considérer l’état de santé du requérant dans son ensemble, ce qui veut dire que je dois tenir compte de toutes les détériorations possibles, pas seulement des plus importantes ou des principalesNote de bas de page 5 . Après avoir pris en considération l’ensemble de la preuve et l’effet cumulatif des problèmes de santé, je suis convaincue que, selon la prépondérance des probabilités, le requérant a une invalidité grave. 

Conclusion

[31] L’appel est rejeté.

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