Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : SM c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 395

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision relative à une demande de
permission d’en appeler

Partie demanderesse : S. M.
Partie défenderesse : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 31 mars 2021
GP-20-1357

Membre du Tribunal : Kate Sellar
Date de la décision : Le 29 juillet 2021
Numéro de dossier : AD-21-225

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette la demande de permission d’en appeler. L’appel n’ira pas de l’avant. Voici les motifs de ma décision.

Aperçu

[2] S. M. (requérant) a présenté une demande de pension d’invalidité en juin 2019, et sa demande a été approuvée. Le Régime de pensions du Canada (RPC) comprend une règle selon laquelle une pension d’invalidité peut être approuvée au plus tôt 15 mois avant la date à laquelle la partie requérante a présenté sa demande (règle des 15 moisNote de bas de page 1).

[3] Dans le présent cas, cela signifie que l’approbation du requérant a commencé en mars 2018, 15 mois avant qu’il présente sa demande en juin 2019. Les versements commencent quatre mois plus tard, soit à partir de juillet 2018Note de bas de page 2.

[4] Il existe toutefois une exception à la règle des 15 mois. Une demande de pension peut être approuvée plus tôt que 15 mois avant la présentation de la demande si la partie requérante peut démontrer qu’elle n’était pas en mesure de former ou d’exprimer son intention de présenter une demande de pension d’invalidité plus tôt que le moment où elle l’a fait (règle d’incapacitéNote de bas de page 3).

[5] Le requérant a demandé au ministre de réviser la décision. Il voulait que sa pension commence plus tôt parce qu’il était invalide depuis 2008. Le ministre a rejeté sa demande et n’a pas changé la date d’entrée en vigueur de sa pension. Le requérant a fait appel au Tribunal.

[6] La division générale a appliqué la règle des 15 mois et a décidé que le requérant avait reçu sa pension d’invalidité le plus tôt possible selon le RPC.

[7] La division générale a également décidé que la règle d’incapacité ne pourrait pas aider le requérant étant donné qu’il n’avait pas été en mesure de prouver qu’il était incapable de formuler ou d’exprimer son intention de présenter une demande plus tôt. La division générale a rejeté l’appel.

[8] Le requérant demande la permission de faire appel de la décision de la division générale.

[9] Je dois décider s’il est possible de soutenir que la division générale a commis une erreur au titre de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS) qui justifierait qu’on accorde au requérant la permission de faire appel.

[10] Le requérant n’a pas soulevé un argument selon lequel la division générale aurait commis une erreur. Je n’accorde pas la permission d’en appeler, alors l’appel n’ira pas de l’avant.

Questions en litige

[11] Les questions à trancher dans la présente affaire sont les suivantes :

  1. a) Peut-on soutenir que la division générale n’a pas fourni au requérant un processus équitable en allant de l’avant avec l’appel même si le ministre n’a jamais fourni de preuve ou d’argument concernant les avis erronés que le requérant dit avoir reçus du ministre?
  2. b) Peut-on soutenir que la division générale a commis une erreur de fait au sujet de la dépression du requérant et de ses répercussions sur lui lorsqu’elle a décidé qu’il n’était pas frappé d’incapacité?

Analyse

Révision des décisions de la division générale

[12] La division d’appel ne donne pas aux parties la possibilité de présenter de nouveau les arguments liés à leur cause de façon intégrale. J’ai plutôt examiné les arguments du requérant et la décision de la division générale pour décider s’il est possible que la division générale ait commis des erreurs.

[13] Cet examen est fondé sur le libellé de la Loi sur le MEDS, qui établit les « moyens d’appel ». Les moyens d’appel sont les raisons de l’appel. Pour accorder la permission d’en appeler, je dois conclure qu’il est possible de soutenir que la division générale a commis au moins une des erreurs suivantes :

  • Elle a agi de manière inéquitable.
  • Elle a omis de statuer sur une question qu’elle aurait dû trancher, ou elle a statué sur une question qu’elle n’aurait pas dû trancher.
  • Elle a fondé sa décision sur une erreur importante concernant les faits au dossier.
  • Elle a mal interprété ou appliqué la loiNote de bas de page 4.

[14] À l’étape de la demande de permission d’en appeler, une partie requérante doit démontrer que l’appel a une chance raisonnable de succèsNote de bas de page 5. Pour ce faire, le requérant doit seulement démontrer qu’il existe un motif défendable grâce auquel l’appel pourrait être accueilliNote de bas de page 6.

Aucun argument selon lequel la division générale a omis de fournir un processus équitable

[15] La division générale a fourni un processus équitable au requérant. La division générale n’a pas eu besoin de prendre d’autres mesures pour obtenir des renseignements du ministre au sujet de l’allégation du requérant selon laquelle le ministre lui avait donné des conseils erronés. La question des conseils erronés était importante pour le requérant, mais la division générale n’a pas le pouvoir de l’aborderNote de bas de page 7.

[16] Le requérant souligne que le ministre n’a jamais répondu à l’information qu’il a fournie au sujet du fait qu’il avait reçu des conseils erronés de sa part. Ces conseils ont eu une incidence sur le moment où il a décidé de faire sa demande de pension d’invalidité. Le requérant estime que ces conseils erronés sont au cœur de sa cause et que la division générale n’avait pas suffisamment d’information à ce sujet. Le requérant estime que la division générale aurait dû aborder ce problème pour lui dans le cadre de l’appel.

[17] Le requérant soutient qu’il s’agit d’une question d’équité procédurale parce qu’il n’a pas eu l’occasion d’avoir une audience complète portant sur les questions qui étaient importantes dans son cas.

[18] Il affirme également qu’il s’agit d’une erreur de compétence parce que la division générale aurait dû tenir compte des conseils erronés et faire quelque chose pour y remédier.

[19] À mon avis, la division générale n’a commis aucune erreur quant à l’équité procédurale. Le ministre n’a pas assisté à la téléconférence prévue par la division générale. La division générale n’a fait aucun effort pour obtenir plus d’information des parties au sujet de l’allégation de conseils erronés. Toutefois, cela n’a pas rendu le processus inéquitable.

[20] Ce qu’exige l’équité dépendra du contexteNote de bas de page 8. Pour que le processus soit équitable, une personne doit avoir l’occasion de présenter des arguments sur tous les faits ou facteurs pertinentsNote de bas de page 9.

[21] Je comprends comment le fait que le requérant a reçu des conseils erronés de la part du ministre pourrait aider à expliquer pourquoi il a demandé sa pension d’invalidité au moment où il l’a fait. Cependant, la question que la division générale devait trancher était de savoir si la pension d’invalidité du requérant pouvait commencer plus tôt que la date à laquelle elle avait commencé. La seule exception à la règle des 15 mois que la division générale pouvait envisager d’appliquer était la règle d’incapacité.

[22] Par conséquent, même si l’information sur la possibilité d’avoir reçu des conseils erronés pourrait aider à expliquer pourquoi le requérant n’a pas présenté sa demande plus tôt, elle ne peut permettre au requérant de recevoir sa pension plus tôt. Cela n’est pertinent à aucune question que la division générale a le pouvoir d’aborder.

Aucun argument selon lequel la division générale n’a pas tenu compte de la dépression du requérant

[23] La division générale n’a pas commis d’erreur en ignorant la dépression du requérant au moment de décider si sa demande bénéficierait de la règle d’incapacité.

[24] Si la division générale rend sa décision sans tenir compte du dossier, cela peut constituer une erreur de faitNote de bas de page 10. La division générale n’a pas à faire mention de chaque élément de preuve dans sa décisionNote de bas de page 11. Je présume que la division générale a examiné tous les éléments de preuve. Toutefois, le requérant peut renverser cette présomption en démontrant que les éléments de preuve que la division générale n’a pas mentionnés dans ses motifs étaient suffisamment importants pour que la division générale doive en discuterNote de bas de page 12.

[25] Autrement dit, je peux déduire une erreur de fait lorsque la division générale omet de mentionner certains éléments de preuve pertinents dans ses motifs. Plus l’élément de preuve non mentionné est important, plus cela donne à penser que la division générale l’a ignoréNote de bas de page 13.

[26] La division générale a expliqué que le terme « incapacité » est considéré dans son sens ordinaire et qu’il est déterminé en fonction de la preuve médicale et des activités de la personneNote de bas de page 14.

[27] Le témoignage du requérant concordait avec l’idée qu’il était généralement capable de prendre soin de lui-même. Il était capable de faire ce qui suit :

  • conduire;
  • payer ses factures;
  • vivre de manière autonome;
  • cuisiner ses propres repas;
  • faire sa propre épicerie.

[28] Bien que les diagnostics du requérant soient pertinents, le requérant n’a pas fourni d’élément de preuve de dépression qui aurait amené la division générale à conclure qu’il était incapable de formuler ou d’exprimer une intention de présenter une demande plus tôt.

[29] À mon avis, la division générale n’a pas commis d’erreur de fait en ignorant les éléments de preuve concernant la dépression du requérant. La division générale a expliqué brièvement comment elle a décidé que le requérant n’était pas incapable de présenter une demande de pension d’invalidité. Même si la décision ne désigne pas la dépression du requérant par son nom, elle met l’accent sur ce qui suit :

  • le fait que le requérant n’a pas fourni de preuve médicale précisant qu’il était incapable;
  • le fait que les activités du requérant ne portaient pas non plus à croire qu’il était incapable.

[30] Le fait est que le diagnostic du requérant n’était pas suffisamment important dans la présente affaire pour que la division générale le nomme dans la décision. Je suis convaincue que la division générale n’a pas ignoré le diagnostic du requérant; elle s’est seulement concentrée sur les aspects les plus importants du critère relatif à l’incapacité, soit la preuve médicale portant spécifiquement sur l’incapacité et les renseignements sur les activités du requérant qui laissent entendre qu’il ne pouvait pas prendre soin de lui-même. La division générale n’a pas ignoré la dépression du requérant.

[31] J’ai examiné les documents dans la présente affaire et je suis convaincue que la division générale n’a pas ignoré ou mal compris la preuve.

[32] En plus des motifs fournis par la division générale, je note que le requérant a présenté une demande de pension d’invalidité plus tôt, en février 2013. Le ministre a rejeté la demande, et le requérant lui a demandé de procéder à une révision. Le ministre a rejeté la demande parce qu’elle était en retard. Cette demande ne fait pas l’objet d’un appel, mais elle démontre que le requérant a été en mesure de former et d’exprimer l’intention de présenter une demande en 2013, parce qu’il l’a fait.

[33] Comme dernière remarque, le requérant affirme avoir reçu des conseils erronés de la part du ministre et que cela a retardé sa demande de prestations d’invalidité. Si le ministre est convaincu qu’une personne a reçu des conseils erronés et que, par conséquent, elle s’est vue refuser une partie de ses prestations d’invalidité, il peut prendre les mesures qu’il juge appropriées pour la remettre dans la situation où elle se serait trouvée si on ne lui avait pas fourni de conseils erronésNote de bas de page 15.

[34] Je ne peux pas ordonner au ministre de fournir au requérant une réponse à sa demande que le ministre mène une enquête et règle le problème qu’il décrit. Toutefois, si le ministre communiquait avec le requérant en dehors du processus du Tribunal pour lui fournir une réponse à son allégation, cela lui serait évidemment utile. Dans le cadre du présent appel, le requérant a décrit au Tribunal sa frustration de ne pas avoir obtenu toutes les réponses dont il avait besoin.

Conclusion

[35] Je rejette la demande de permission d’en appeler. Cela signifie que l’appel n’ira pas de l’avant.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.