Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : SH c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 424

Numéro de dossier du Tribunal: GP-21-73

ENTRE :

S. H.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Gerry McCarthy
Requérante représentée par : Paul Sacco
Date de l’audience par
téléconférence :
Le 10 juin 2021
Date de la décision : Le 14 juin 2021

Sur cette page

Décision

[1] La requérante a droit au versement d’une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada à compter de juillet 2018.

Aperçu

[2] La requérante a cessé de travailler comme adjointe administrative en mai 2017 en raison de ses problèmes de santé. Elle présentait un trouble cognitif, des troubles de la mémoire, une fibromyalgie et des douleurs chroniques. Elle a essayé de retourner au travail à la librairie de sa belle-sœur, mais elle a pu rester seulement une demi-journée en raison de son état de santé. La requérante n’a exercé aucun emploi rémunérateur depuis mai 2017.

[3] Le ministre a reçu la demande de pension d’invalidité de la requérante le 27 juin 2019. Il a rejeté la demande une première fois, puis il l’a rejetée de nouveau après révision. La requérante a porté la décision de révision en appel au Tribunal de la sécurité sociale.

[4] Pour avoir droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, la requérante doit remplir les conditions énoncées dans le Régime. Plus précisément, elle doit être déclarée invalide au sens du Régime au plus tard à la fin de la période minimale d’admissibilité (PMA). Le calcul de la PMA repose sur les cotisations que la requérante a versées au Régime. Je constate que la PMA de la requérante a pris fin le 31 décembre 2019.

Questions en litige

[5] Les problèmes de santé de la requérante ont-ils entraîné chez elle une invalidité grave, c’est-à-dire était-elle régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice au plus tard le 31 décembre 2019?

[6] Si oui, l’invalidité de la requérante devait-elle aussi durer pendant une période longue, continue et indéfinie?

Analyse

[7] L’invalidité se définit comme une invalidité physique ou mentale qui est grave et prolongéeNote de bas page 1. Une personne est considérée comme ayant une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décès. La personne doit prouver selon la prépondérance des probabilités que son invalidité satisfait aux deux volets du critère. Autrement dit, si la requérante satisfait seulement à un volet, elle n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Invalidité grave

[8] Je dois évaluer le volet « grave » du critère dans un contexte réalisteNote de bas page 2. Ainsi, pour décider si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de facteurs tels que son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de vie.

[9] Pour évaluer si une invalidité est « grave », il ne s’agit pas de savoir si la personne a des déficiences graves, mais si l’invalidité l’empêche de gagner sa vie. Il n’est pas question de savoir si elle est dans l’impossibilité d’accomplir ses tâches habituelles, mais plutôt si elle est incapable d’exercer un emploi véritablement rémunérateurNote de bas page 3.

[10] Je dois évaluer l’état de santé de la requérante dans son ensemble, ce qui veut dire que je dois tenir compte de toutes les déficiences possibles, et pas seulement des déficiences les plus importantes ou de la déficience principaleNote de bas page 4.

[11] Lorsque la capacité à travailler est établie, la personne doit démontrer que les efforts qu’elle a faits pour obtenir et conserver un emploi ont échoué à cause de son problème de santéNote de bas page 5.

La requérante avait-elle une invalidité grave au plus tard le 31 décembre 2019?

[12] Je juge que, selon la prépondérance des probabilités, la requérante avait une invalidité grave au plus tard le 31 décembre 2019. Voici pourquoi.

[13] Premièrement, le témoignage oral de la requérante sur ses douleurs chroniques et ses limitations fonctionnelles était crédible parce que ses déclarations étaient plausibles, détaillées et confirmées par une témoin (sa fille). Plus précisément, la requérante a déclaré qu’elle avait des troubles de la mémoire, des douleurs chroniques, des vertiges, des problèmes de concentration, des nausées et de la difficulté à se tenir debout. Je reconnais que le ministre a fait valoir que les résultats obtenus par la requérante lors des tests de mémoire étaient supérieurs à la moyenne pour son groupe d’âge. Néanmoins, j’accorde plus d’importance au témoignage de la requérante parce que ses déclarations étaient franches et confirmées par une témoin. De plus, la Dre Vogel a posé un diagnostic de [traduction] « démence », de neuropathie des petites fibres, de fibromyalgie et de [traduction] « trouble cognitif » non spécifié (page GD2-88 du dossier d’appel).

[14] Deuxièmement, le rapport de la Dre Vogel explique que la requérante ne pouvait pas travailler, quel que soit le poste. Plus précisément, la Dre Vogel a écrit que les diagnostics de la requérante étaient tels qu’ils contribuaient à son invalidité générale. La Dre Vogel a d’ailleurs recommandé que la requérante cesse de travailler en mai 2017. Je comprends que le ministre a fait valoir qu’aucune pathologie ou cause n’avait permis d’expliquer les plaintes de la requérante. Toutefois, j’accorde beaucoup d’importance au rapport de la Dre Vogel parce qu’elle traite la requérante depuis mars 2017 et que son examen était complet.

[15] Troisièmement, la requérante a suivi les recommandations de traitement. Plus précisément, elle a essayé la thérapie cognitivo-comportementale et le traitement au laser. Néanmoins, la requérante a déclaré que ses symptômes ne s’étaient pas améliorés. Je sais que le ministre a soutenu que la requérante s’était vu offrir une thérapie psychologique par un psychiatre, mais qu’elle avait refusé le traitement. Toutefois, la requérante a déclaré ne pas avoir refusé ce traitement psychiatrique. La requérante a expliqué qu’elle a tenté de communiquer avec le bureau du psychiatre, mais qu’elle n’a reçu aucune réponse. J’accepte son explication à ce sujet parce que ses déclarations étaient plausibles, détaillées et confirmées par une témoin.

[16] Quatrièmement, la requérante a tenté d’exercer un autre emploi, mais sans succès en raison de ses problèmes de santé. Plus précisément, elle a essayé de travailler à la librairie de sa belle-sœur, mais elle a pu rester seulement une demi-journée en raison de son trouble cognitif.

Autres observations du ministre

[17] Le ministre a fait valoir que l’âge de la requérante (56 ans) pourrait nuire à sa capacité de s’adapter à un autre travail. Néanmoins, selon le ministre, l’expérience de travail antérieure de la requérante indiquait qu’elle possédait les compétences nécessaires pour obtenir un autre emploi convenable. J’accorde tout de même plus d’importance au rapport de la Dre Vogel, qui précise que la requérante ne pouvait pas travailler peu importe l’emploi, parce que son examen était complet. De plus, la Dre Vogel a expliqué que les nombreux diagnostics de la requérante contribuaient à son invalidité générale.

Invalidité prolongée

L’invalidité de la requérante devait-elle durer pendant une période longue, continue et indéfinie?

[18] Je juge que, selon la prépondérance des probabilités, l’invalidité de la requérante devait durer pendant une période longue, continue et indéfinie. Voici pourquoi.

[19] Premièrement, le rapport que la Dre Vogel a rédigé en juin 2020 indique que la requérante présentait encore des symptômes quotidiens et ne pouvait exercer aucun emploi.

[20] Deuxièmement, le témoignage de la requérante au sujet de ses troubles de la mémoire et de ses limitations fonctionnelles m’a convaincu que son invalidité devait durer pendant une période longue, continue et indéfinie.

[21] Troisièmement, le témoignage de la témoin m’a également convaincu que l’invalidité de la requérante devait durer pendant une période longue, continue et indéfinie.

Conclusion

[22] La requérante avait une invalidité grave et prolongée en mai 2017, lorsqu’elle a cessé de travailler comme adjointe administrative et que la Dre Vogel lui a recommandé d’arrêter de travailler. Toutefois, pour établir la date du paiement de la pension, il faut considérer qu’une personne est réputée être devenue invalide tout au plus 15 mois avant que le ministre reçoive sa demande de pensionNote de bas page 6. La demande a été reçue en juin 2019, donc la date réputée de l’invalidité est en mars 2018. Le versement de la pension commence quatre mois après la date réputée de l’invalidité, donc à compter de juillet 2018Note de bas page 7.

[23] L’appel est accueilli.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.