Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : TT c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 504

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, Section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : T. T.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision datée du 24 novembre 2020 rendue
par le ministre de l’Emploi et du Développement social
(communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Anne S. Clark
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 22 juillet 2021
Personnes présentes à l’audience : Requérant
Date de la décision : Le 17 août 2021
Numéro de dossier : GP-21-79

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le requérant, T. T., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pension du Canada. J’explique dans cette décision pourquoi je rejette son appel.

Aperçu

[3] Le requérant avait 48 ans quand il a arrêté de travailler, et 51 ans en date du 31 décembre 2015. Il possède un diplôme de technicien en électronique, et était PDG et propriétaire d’une épicerie quand il a cessé de travailler. Il a écrit qu’il était invalide à cause de lésions nerveuses remontant à décembre 2011. Il attribue son invalidité à ses maux de tête, à ses tensions musculaires, et aux lésionsNote de bas de page 1 nerveuses à sa jambe et à son pied droits.

[4] Le requérant a demandé une pension d’invalidité du RPC le 26 août 2019. Le ministre a rejeté sa demande. Il a alors fait appel de la décision du ministre devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] Le requérant dit être invalide depuis décembre 2011. Il dit souffrir de lésions nerveuses et musculaires permanentes depuis le [traduction] « pincement » d’un nerf, survenu le 21 décembre 2011. En novembre 2012, la douleur et d’autres symptômes, attribuables à un grave problème à la colonne vertébrale, l'ont amené  à vendre son entreprise et à cesser de travailler. Il affirme qu’il s’agit d’un problème évolutif, qui s’est aggravé depuis 2011.

[6] Selon le ministre, la preuve ne prouve pas que le requérant était invalide depuis le 31 décembre 2015. Le ministre a aussi écrit que l’expérience professionnelle et la scolarisation du requérant devraient lui permettre d’occuper un emploi convenable.

Ce que le requérant doit prouver

[7] Pour gagner son appel, le requérant doit prouver que son invalidité était grave et prolongée en date du 31 décembre 2015. Cette date est basée sur les cotisations qu’il a faites au RPCNote de bas de page 2.

[8] Le Régime de pensions du Canada définit les adjectifs « grave » et « prolongée ».

[9] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 3.

[10] Pour décider si l’invalidité du requérant est grave, je dois examiner l’effet global de ses problèmes de santé sur sa capacité de travail. Je dois aussi tenir compte de facteurs, incluant son âge, son niveau d’éducation, son expérience de travail et son expérience personnelle. Ces facteurs me font voir sa situation de façon réaliste. Ils m’aident à décider si son invalidité est grave. Si le requérant est régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permet de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[11] Une invalidité est prolongée si elle doit durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 4.

[12] Autrement dit, aucun rétablissement ne doit être prévu. Pour être prolongée, l’invalidité du requérant doit l’obliger à quitter le marché du travail pendant très longtemps.

[13] Le requérant doit prouver qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée depuis le 31 décembre 2015, au plus tard. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. En d’autres mots, il doit me convaincre que son invalidité est probable à plus de 50 %.

Motifs de ma décision

[14] Je conclus que le requérant n’a pas prouvé qu’il avait une invalidité grave et prolongée en date du 31 décembre 2015.

L’invalidité du requérant était-elle grave?

[15] Le requérant n’est pas atteint d’une invalidité grave. J’ai basé ma conclusion sur plusieurs facteurs. Les voici.

Les limitations fonctionnelles du requérant ne nuisaient pas à sa capacité de travailler en date du 31 décembre 2015

[16] Le requérant est atteint des problèmes de santé suivants : discopathie dégénérative, anxiété, dépression, douleur au dos, au cou et sciatique. Toutefois, un diagnostic ne suffit pas à régler la question de son invaliditéNote de bas de page 5. Je dois plutôt voir si des limitations fonctionnelles l’empêchaient de gagner sa vie en date du 31 décembre 2015Note de bas de page 6. Dans cette optique, je dois tenir compte de tous ses problèmes de santé (pas juste du plus important) et de leur effet sur sa capacité à travaillerNote de bas de page 7.

[17] Je conclus que la preuve ne révèle pas que le requérant avait des limitations fonctionnelles en date du 31 décembre 2015.

Ce que le requérant dit de ses limitations fonctionnelles

[18] Le requérant affirme que les limitations fonctionnelles causées par ses problèmes de santé l’empêchaient de travailler avant le 31 décembre 2015. À l’écrit, il a affirmé avoir une raideur et une douleur au bas du dos depuis 2000, qui se serait aggravé depuis. Il a dit qu’il y avait eu incident alors qu’il était à l’hôpital. Le 21 décembre 2011, il avait eu un [traduction] « pincement » de ses nerfs et sa sciatique. Selon lui, les examens n’avaient pas révélé de lésions puisqu'ils avaient été réalisés avant le [traduction] « pincement » en question. Cet incident avait touché des nerfs et des muscles, lui causant une douleur intense, des dysfonctionnements de la vessie et de l’engourdissement. Il croit que des racines nerveuses ont été atteintes et pense souffrir du syndrome de la queue de cheval à cause d’une blessure à sa colonne vertébrale. Il affirme que ces problèmes sont extrêmement sérieux et le rendent complètement incapable de travailler.

Ce que la preuve révèle sur les limitations fonctionnelles du requérant

[19] Le requérant doit soumettre des éléments de preuve médicale qui montrent que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travailler en date du 31 décembre 2015Note de bas de page 8. Le requérant croit avoir subi en 2011 une lésion grave qui n’aurait jamais été diagnostiquée. Malheureusement, cette croyance ne remplit pas l’exigence en matière de preuve médicale.

[20] La preuve médicale au dossier ne corrobore pas les prétentions du requérant. En réalité, il y a bien peu d’éléments concernant sa santé ou ses traitements avant le 31 décembre 2015. Le requérant a attribué cette situation à deux choses. D’une part, l’hôpital lui avait fait faire des examens en décembre 2011, avant l’avènement du [traduction] « pincement ». D’autre part, il prenait son traitement en charge lui-même.

[21] Le requérant a affirmé qu’il avait posé son propre diagnostic du fait que tous les résultats des examens de 2011 étaient essentiellement normaux. Il avait dû [traduction] « cerner sa propre pathologie ». Il dit qu’il avait des lésions nerveuses permanentes à la jambe, au pied et à la vessie. Il croit qu’il s’agit du syndrome de la queue de cheval, qui est un problème grave. Il estime qu’il aurait dû être opéré rapidement en 2011 pour empêcher une aggravation des lésions. Comme il n’a jamais eu de diagnostic, il n’a jamais été opéré. Les lésions étaient donc devenues permanentes et intraitables. Il a aussi expliqué que l’atteinte subie en 2011 était un problème différent de sa discopathie dégénérative, qui était apparue plus tard. Il croit qu’il présentait ces deux problèmes de santé en date du 31 décembre 2015.

[22] Aucune preuve médicale ne confirme ce que le requérant croit. Il dit avoir fait de la physiothérapie et appris à composer avec sa douleur. Il n’avait donc pas besoin de voir des professionnels de la santé. Il se traite à la maison quand il a une poussée de douleur.

[23] Les examens médicaux subis par le requérant avant le 31 décembre 2015 ou vers cette date ne corroborent pas sa position. Par exemple, il n’y avait aucun pincement de nerf en 2011Note de bas de page 9. En août 2014, sa vessie, sa prostate et son abdomen paraissaient normaux.Note de bas de page 10 Il avait eu des difficultés temporaires pour uriner, mais les résultats à ses examens se sont révélés [traduction] « très normaux », et il se sentait [traduction] « beaucoup » mieux en août 2012Note de bas de page 11.

[24] Le requérant a visité une clinique trois fois en 2015. Il avait besoin de renouveler son ordonnance pour un antidépresseur. Il a été noté qu’il se sentait bien en avril 2015. En juillet 2015, il a parlé de la possibilité d’arrêter certains médicaments. En septembre, il avait eu des questions sur des médicaments et sa prostateNote de bas de page 12. Les visites médicales de 2015 semblent montrer qu’il maîtrisait sa dépression et sa douleur. Toutefois, rien ne montre qu’il avait des limitations fonctionnelles.

[25] À partir de 2018, la preuve confirme que le requérant avait un problème au dos qui se détériorait et nécessitait un traitement. Un rapport de physiothérapie de 2020 fait mention de douleur lombaire chroniqueNote de bas de page 13. La docteure T. Razack a écrit en août 2019 que le requérant présentait une discopathie dégénérative et prenait des médicaments en vente libre, en plus de faire de la thérapie à domicile. Elle a affirmé que son problème s’aggravait et qu’un [traduction] « engourdissement apparaissait à son genou gauche »Note de bas de page 14. Malheureusement, la preuve datant de 2018 et plus tard ne concerne pas son état de santé ou ses limitations fonctionnelles en date du 31 décembre 2015.

[26] Le requérant laisse entendre qu’une invalidité n’est pas nécessairement impossible du simple fait que la preuve médicale au 31 décembre 2015 est insuffisante. Selon lui, la preuve montre qu’il est maintenant atteint d’une discopathie dégénérative. Il dit qu’il s’agit d’une maladie évolutive, et que celle-ci devait donc déjà exister le 31 décembre 2015, même si les examens de 2011 n’ont pas révélé de lésions. Je ne suis pas d’accord avec le requérant. Le manque de preuve médicale m’empêche effectivement de conclure qu’il avait une invalidité grave en date du 31 décembre 2015. Il lui faut soumettre des éléments de preuve sur sa santé en date du 31 décembre 2015, et les éléments soumis ne portent pas sur cette période.

[27] La preuve médicale ne montre pas que le requérant avait des limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité de travailler en date du 31 décembre 2015. Il n’a donc pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave.

[28] Pour décider si l’invalidité d’une personne est grave, il faut généralement tenir compte de ses caractéristiques personnelles.

[29] Sa capacité de travail est ainsi évaluée sous un angle réalisteNote de bas de page 15.

[30] Par contre, il ne sert à rien d’appliquer cette analyse ici, puisqu’aucune limitation fonctionnelle n’empêchait le requérant de travailler en date du 31 décembre 2015. Autrement dit, il n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave à la date requiseNote de bas de page 16.

Conclusion

[31] Je conclus que le requérant n’est pas atteint d’une invalidité grave et qu’il n’est donc pas admissible à une pension d’invalidité du RPC. Étant donné que l’invalidité doit obligatoirement être grave et prolongée, il ne sert à rien de décider si son invalidité est prolongée.

[32] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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