Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : ND c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 471

Numéro de dossier du Tribunal: GP-19-1678

ENTRE :

N. D.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Lianne Byrne
Requérante représentée par : I. D.
Date de l’audience par vidéoconférence : Le 15 décembre 2020
Date de la décision : Le 12 février 2021

Sur cette page

Décision

[1] La requérante n’était pas incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada avant la date de sa demande.

Aperçu

[2] La requérante travaillait à son compte comme parajuriste. Elle a subi un accident vasculaire cérébral (AVC) en mai 2014. Sa mémoire et son état fonctionnel ont ensuite décliné progressivement. Le ministre a reçu sa demande de pension d’invalidité le 22 janvier 2018. Il l’a approuvé avec une date de début du versement d’octobre 2016, soit la rétroactivité maximale permise par le Régime.

[3] Le fils et mandataire de la requérante a contesté la date de début du versement de la pension au motif que la requérante était incapable depuis 2014. Il soutient qu’elle était incapable avant janvier 2018 de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du Régime.

[4] Le ministre a rejeté la demande de révision au motif que la preuve ne permet pas de conclure que la requérante satisfaisait aux dispositions relatives à l’incapacité. Cette dernière a porté la décision en appel au Tribunal de la sécurité sociale.

Question préliminaire

[5] La requérante n’a pas assisté à l’audience. Son fils et mandataire, I. D., y a assisté en son nom pour présenter des éléments de preuve et des observations.

Droit applicable

[6] Les dispositions relatives à l’incapacité sont énoncées aux articles 60(8), (9) et (10) du Régime de pensions du Canada. Conformément à l’article 60(8) du Régime, dans le cas où le ministre est convaincu, sur preuve présentée par la personne ayant fait une demande ou en son nom, que celle-ci n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations le jour où celle-ci a été faite, le ministre peut réputer cette demande avoir été faite le mois qui précède celui au cours duquel la prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon le ministre, la dernière période pertinente d’incapacité de la personne a commencé.

[7] L’article 60(9) prévoit que le ministre peut réputer une demande de prestations avoir été faite le mois qui précède le premier mois au cours duquel une prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon lui, la dernière période pertinente d’incapacité de la personne ayant fait la demande a commencé, s’il est convaincu, sur preuve présentée par cette personne :

  1. a) que la personne n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant la date à laquelle celle-ci a réellement été faite;
  2. b) que la période d’incapacité de la personne a cessé avant cette date;
  3. c) que la demande a été faite, selon le cas, (i) au cours de la période — égale au nombre de jours de la période d’incapacité mais ne pouvant dépasser douze mois — débutant à la date où la période d’incapacité de la personne a cessé, ou (ii) si la période décrite au sous-alinéa (i) est inférieure à trente jours, au cours du mois qui suit celui au cours duquel la période d’incapacité de la personne a cessé.

[8] Conformément à l’article 60(10), pour l’application des paragraphes (8) et (9), une période d’incapacité doit être une période continue à moins qu’il n’en soit prescrit autrement.

Questions en litige

[9] Je dois décider s’il est plus probable qu’improbable que la requérante était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité du Régime avant la date de sa demande, soit le 22 janvier 2018. Dans l’affirmative, je dois aussi décider de sa période d’incapacité.

Preuve

Témoignage de I. D.

[10] Le fils et mandataire de la requérante, I. D., a témoigné à l’audience en son nom. Il a expliqué que la requérante est devenue parajuriste accréditée en 2010. Depuis 2012, elle travaille à domicile comme parajuriste à son compte. Elle travaille à temps partiel et fait très peu d’heures chaque semaine.

[11] La situation de la requérante a changé en mai 2014 à la suite d’une chute dans un stationnement. Elle a été conduite à l’urgence et a reçu son congé le jour même. Quelques jours plus tard, elle est retournée à l’urgence avec des symptômes de double vision et des problèmes de mémoire. On lui a dit qu’elle avait subi un AVC.

[12] I. D. a décrit le déclin rapide de la santé de sa mère après son AVC en 2014. Elle a cessé de conduire, ce qui lui a fait perdre son indépendance. Elle a commencé à être désordonnée à la maison. Elle payait ses factures en retard. Elle achetait des articles en ligne qu’elle n’achetait pas normalement. Elle avait des problèmes de mémoire. Par exemple, elle posait deux fois la même question.

[13] En mars 2016, I. D. est parti en voyage d’affaires pendant deux semaines. Les amis de N. D. l’ont aidée pendant son absence.

[14] En juin 2016, I. D. est parti pour un autre voyage d’affaires de quatre jours. Il a demandé à son oncle en Floride d’appeler sa mère pour prendre des nouvelles. Pendant son absence, il allègue que son oncle a appelé d’autres membres de sa famille, qui ont fait signer à la requérante des documents leur donnant accès à ses comptes bancaires. Ils ont épuisé ses économies et pris neufs meubles dans la maison. À son retour, I. D. a déposé un rapport de police. Toutefois, aucune accusation n’a été portée parce qu’il n’était pas clair si la requérante avait donné ces meubles aux membres de sa famille ou s’ils avaient été volés.

[15] En septembre 2016, N. D. s’est présentée à quatre reprises à l’urgence avec des taux élevés d’enzymes hépatiques. On lui a diagnostiqué une maladie auto-immune du foie. En octobre 2016, elle a été admise à l’hôpital pour délire. Elle a reçu son congé avec un diagnostic de démence vasculaire. I. D. a refusé l’option de placer la requérante dans un établissement de soins de longue durée parce qu’il voulait s’occuper d’elle. Elle a commencé un programme de jour à l’hôpital après avoir obtenu son congé.

[16] En février 2017, la requérante était très fatiguée et ne pouvait pas sortir du lit. I. D. a appelé une ambulance. Les tests ont révélé que la requérante avait une glycémie élevée. Elle a été admise à l’hôpital et y est restée pendant trois mois. Une fois son congé de l’hôpital obtenu, elle a traité sa glycémie en diminuant sa dose de Prednisone et en faisant des promenades quotidiennes. Sa glycémie est stable depuis.

[17] En septembre 2017, I. D. a demandé à la requérante de signer une nouvelle procuration. Il a expliqué que la procuration précédente signée en septembre 2015 le désignait mandataire et désignait un autre membre de la famille comme mandataire remplaçant en son absence. I. D. a reformulé le document pour retirer ce membre de la famille comme mandataire remplaçant puisqu’il avait coupé les liens avec la famille. Il a expliqué à sa mère ce qu’il avait fait et lui a demandé de signer la nouvelle procuration, ce qu’elle a fait. Il estime qu’elle était capable de signer ce document, mais soutient qu’elle était incapable aux termes du Régime.

[18] En mai 2018, la requérante a été hospitalisée pendant une semaine pour une faiblesse du côté gauche. On a jugé qu’elle avait subi un autre AVC. Depuis, les doigts de sa main gauche sont paralysés. Elle a passé six autres jours à l’hôpital en août 2020 à cause d’un petit AVC. Son état s’est stabilisé, mais il ne s’améliore pas.

[19] On a interrogé I. D. au sujet du travail de la requérante après son AVC. Il prétend qu’elle a [traduction] « essentiellement » cessé de travailler. Il a admis qu’elle avait continué de travailler sur des dossiers non réglés, mais a ajouté qu’elle avait cessé d’accepter du travail. Il a dit qu’il s’agissait de questions simples, comme la notarisation de documents et la perception d’un paiement après un règlement. Il la conduisait à ses rendez-vous.

[20] I. D. a également expliqué qu’un homme avait profité de la requérante. Celui-ci lui demandait de fournir des services juridiques, mais il percevait et gardait ses honoraires. I. D. ne sait pas quel travail elle faisait, mais pense qu’elle authentifiait des documents pour des dossiers d’immigration. I. D. a appelé la police, mais cet incident n’a pas fait l’objet d’investigations.

[21] I. D. a décrit les changements radicaux survenus dans sa propre vie depuis l’AVC de la requérante. Il a réduit considérablement sa charge de travail et sa vie sociale parce qu’il a commencé à prendre soin de sa mère. Il fait l’épicerie et la cuisine. Il la conduit et assiste à tous ses rendez-vous médicaux. Il remplit ses formulaires d’admission et fournit ses antécédents médicaux afin qu’elle ne soit pas au courant de son diagnostic de démence.

[22] I. D. s’est occupé de la demande de prestations d’invalidité de la requérante, qui a été faite en janvier 2018. Il a expliqué que c’est lui qui a rempli tous les formulaires en son nom. C’est également lui qui a signé la demande en son nom. Cependant, il a reçu un appel de Service Canada l’informant que la requérante devait signer la demande. Il a amené la requérante à un Centre Service Canada, lui a expliqué qu’il demandait prestations d’invalidité pour elle et lui a demandé de signer la demande, ce qu’elle a fait en février 2018.

Preuve documentaire

[23] Il y a de nombreux documents au dossier, que j’ai tous pris en considération, mais que je n’ai pas tous résumés ou mentionnés dans les présents motifs. J’ai abordé les documents que je trouve les plus pertinents, notamment :

  • Une procuration perpétuelle relative aux biens signée par la requérante le 1er septembre 2017. K. C. et B. G. ont assisté à la signature de cette procuration et ont confirmé ce qui suit : [traduction] « Ni l’un ni l’autre d’entre nous n’a de raison de croire que le mandataire est incapable de donner une procuration perpétuelleNote de bas de page 1  ».
  • Un formulaire de consentement autorisant Service Canada à obtenir des renseignements personnels daté du 18 janvier 2019 et signé par la requérante et I. D.
  • La demande de prestations d’invalidité signée par I. D. le 1er janvier 2018 et la requérante le 2 février 2018. Mme Tracy Kidd a également signé la demande à titre de témoin le 18 janvier 2018.
  • Un formulaire de demande pour la clause pour élever des enfants signé par la requérante le 2 février 2018.

[24] Il y a de nombreux documents et rapports médicaux au dossier, y compris de nombreux rapports du Dr Mina Mousa. En particulier, je remarque que le Dr Mousa a rempli un formulaire de déclaration d’incapacité le 30 juillet 2018, dans lequel il est indiqué que l’incapacité de la requérante a commencé le 28 mai 2014 et qu’elle se poursuit. Toutefois, le Dr Mousa n’était pas le médecin traitant de la requérante lorsque son incapacité a commencé.

[25] Le Dr Mousa a rempli un rapport médical du Régime de pensions du Canada le 12 janvier 2018. Il a mentionné dans celui-ci que la requérante était atteinte d’hépatite auto-immune et d’hépatite C, d’une démence mixte combinant la maladie d’Alzheimer et une démence vasculaire, de diabète de type 2 et de dépression. La requérante avait reçu deux diagnostics d’AVC silencieux en mai 2014 et en mai 2015. Depuis, elle était atteinte de troubles cognitifs et était incapable d’effectuer certaines de ses activités quotidiennes.

[26] Le Dr Mousa a confirmé dans une lettre datée du 15 février 2019 que la requérante était sa patiente depuis septembre 2017. Il a affirmé qu’elle était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations. L’état de la requérante s’était détérioré en février 2018.

[27] Le 12 octobre 2020, le Dr Mousa a dit que la requérante répondait aux critères d’incapacité du Régime. Il a souligné que I. D. s’était beaucoup occupé d’elle. Il assistait à tous ses rendez-vous et l’aidait à remplir ses formulaires. Le Dr Moussa a affirmé que depuis la fin de 2017, la requérante était incapable d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité. Il ne pouvait pas préciser quand son incapacité avait commencé parce qu’il n’était pas son médecin traitant à l’époque. Il a ajouté qu’à son avis, les gens pouvaient être capables de consentir à certains traitements, mais être incapables de prendre des décisions complexes dans leur vie quotidienne.

[28] Le dossier contient aussi de nombreux rapports médicaux du Dr Michael E. Aubrey, médecin en médecine interne. Le 10 août 2015, il a noté que l’état de la requérante s’était stabilisé depuis son AVC. Il a jugé à nouveau le 11 août 2016 que son état était stable. Le 11 août 2017, le Dr Aubrey a noté que la requérante avait dit se sentir bien et qu’elle avait l’air bien en général. Bien que la présence de I. D. soit notée à bon nombre de ces rendez‑vous, la requérante a également pris une part active à ses propres soins.

[29] Le 6 avril 2020, le Dr Aubrey a écrit une lettre à l’appui de l’appel de la requérante. Il affirme dans cette lettre que I. D. accompagne la requérante à ses rendez-vous. Il y dresse aussi la liste de ses médicaments et fait le point sur son état de santé. Le Dr Aubrey affirme que ses interactions avec la requérante sont limitées en raison de sa capacité. Il dit qu’elle est incapable de faire elle-même une demande de prestations, de se défendre ou de se représenter, et qu’elle est aussi incapable de demander à quelqu’un d’autre de faire une demande en son nom. Il juge que son diagnostic comme étant progressif. Je remarque toutefois que le Dr Aubrey a formulé cet avis plusieurs années après la demande de prestations d’invalidité de la requérante et après que son état se soit détérioré.

[30] Le 6 mai 2016, le Dr T. Axelrod, chirurgien orthopédiste, a dit que la requérante réussissait à effectuer ses activités quotidiennes. Il est également évident que la requérante fournissait parfois ses antécédents médicaux. Le 13 juillet 2016, le Dr Arun Sundaram, neurologue, a déclaré que les renseignements sur les antécédents médicaux avaient été obtenus de la requérante et de son fils en raison de ses troubles cognitifs.

[31] Le dossier contient également de nombreux rapports médicaux de la Dre Sara Mitchell, spécialiste en neurologie cognitive et comportementale. Le 22 août 2016, la Dre Mitchell a souligné que I. D. avait l’impression que les membres de sa famille profitaient de la requérante. Elle aurait apparemment prêté 3 000 $ à son neveu pour un condo. La Dre Mitchell a parlé à la requérante séparément et celle-ci a été en mesure d’expliquer de façon cohérente pourquoi elle avait donné l’argent à son neveu. La requérante aurait discuté de ses médicaments, de son humeur et de ses niveaux d’énergie avec la Dre Mitchell.

[32] Le 4 mai 2017, la Dre Mitchell a signalé que l’état de santé de la requérante s’était détérioré de façon importante. Elle avait été admise à l’hôpital en octobre 2016 pour un délire et en février 2017 pour une infection sanguine. Depuis sa sortie de l’hôpital, les choses s’étaient stabilisées. Elle participait à un programme de jour quatre jours par semaine. Elle était atteinte de certains troubles cognitifs liés à son délire, mais ceux-ci semblaient s’être stabilisés.

[33] Le 14 mai 2017, la Dre Mitchelle a noté que le Donepezil avait permis d’améliorer les fonctions cognitives de la requérante. Elle était un peu plus alerte. Son état de santé s’était amélioré depuis sa dernière visite. Le 19 mai 2017, la Dre Mitchelle a noté que le diagnostic de démence mixte de la requérante affectait ses fonctions cognitives et sa pensée. Elle était donc incapable de continuer de travailler comme parajuriste. Le 28 août 2017, la requérante a dit qu’elle avait l’impression que sa mémoire était bonne, même si I. D. a affirmé qu’il lui donnait beaucoup d’indices. I. D. a dit que son état était généralement stable, mais qu’elle était parfois confuse. Son état s’était amélioré depuis sa dernière visite. Selon ces rapports, la requérante était parfois confuse, mais elle demeurait en mesure de participer à ses rendez-vous médicaux.

[34] Dans son rapport médical du Régime de pensions du Canada daté du 10 janvier 2018, la Dre Mitchell a noté que la requérante était atteinte d’une démence mixte combinant la maladie d’Alzheimer et une démence vasculaire. Cette maladie lui causait des troubles cognitifs importants qui affectaient sa mémoire, son fonctionnement visuospatial, sa prise de décisions, ses fonctions exécutives et son humeur. Elle avait besoin de soins 24 heures sur 24 en raison de son incapacité cognitive à prendre soin d’elle-même. Bien que ses limitations cognitives en date de janvier 2018 soient notées, il est évident, d’après les rapports antérieurs de la Dre Mitchell, que l’état de la requérante s’était amélioré, que la requérante avait l’impression d’avoir une bonne mémoire et qu’elle était en mesure de participer à ses rendez-vous.

[35] La Dre Mitchell a également rempli un certificat d’incapacité daté du 19 octobre 2020. Elle a fait remarquer que la requérante était atteinte d’un trouble neurogénératif qui affectait ses fonctions exécutives et sa prise de décisions. Elle a jugé que la requérante était incapable de gérer ses propres affaires et que ses troubles cognitifs avaient commencé en décembre 2015.

[36] Il y a aussi au dossier de nombreux rapports de la Dre Julia Hopyan, de la clinique de prévention des AVC, dont les suivants :

  • Le 21 mai 2015, la Dre Hopyan a noté que la requérante avait été sensibilisée aux symptômes d’un AVC et qu’elle savait qu’il faut appeler le 911 en cas d’apparition soudaine de tout déficit neurologique focal.
  • Le 29 septembre 2015, la Dre Hopyan a signalé que la requérante avait obtenu des résultats au test MoCA qui se situent dans la normale. Elle avait encore une fois été sensibilisée aux symptômes d’un AVC et savait qu’il faut appeler le 911 en cas d’apparition soudaine de déficits neurologiques.
  • Le 11 décembre 2016, la Dre Hopyan a noté qu’un ergothérapeute estimait que la requérante était une conductrice à faible risque. La requérante a été sensibilisée aux symptômes d’un AVC et sait qu’il faut appeler le 911 en cas d’apparition soudaine de déficits neurologiques.
  • Le 3 mai 2016, la Dre Hopyan a conseillé à la requérante d’augmenter sa dose de metformine et a discuté avec elle de l’importance de faire de l’exercice. La requérante a encore une fois été sensibilisée aux symptômes d’un AVC et sait qu’il faut appeler le 911 en cas d’apparition soudaine de déficits neurologiques.
  • Le 8 novembre 2016, la Dre Hopyan a noté que la requérante avait été sensibilisée aux symptômes d’un AVC et qu’elle savait qu’il faut appeler le 911 s’ils apparaissent.
  • Le 4 décembre 2017, la Dre Hopyan a noté que la requérante était stable du point de vue des AVC. Elle a été sensibilisée aux symptômes d’un AVC et sait qu’il faut appeler le 911 s’ils apparaissent.

[37] La Dre Prathiba Shammi, neuropsychologue, a signalé le 18 avril 2016 que le profil des tests cognitifs de la requérante montrait des déficits sur le plan de l’attention et des compétences visuospatiales.

[38] Le 28 septembre 2016, le Dr Majid Iqbal du Département de médecine familiale et communautaire a écrit que la requérante avait probablement une pierre qui était passée. Il lui a conseillé de retourner à l’urgence si elle ressentait des douleurs abdominales croissantes.

[39] La Dre Andrea Faris, gastroentérologue, a noté le 20 octobre 2016 que la requérante fournissait des renseignements sur ses antécédents médicaux. Elle précise qu’elle a discuté avec elle des risques de la prednisone et qu’elle en connaissait les effets secondaires à long terme. De même, le 9 mai 2017, la Dre Faris a noté que la requérante avait commencé à prendre un nouveau médicament et qu’elle lui avait expliqué les risques liés à celui-ci. La requérante était consciente du risque accru de lymphome. La Dre Faris lui avait également remis une requête pour une prise de sang.

[40] Le 21 octobre 2016, la Dre Mandana Kayedi, médecin en médecine interne, a signalé que la requérante avait déjà éprouvé de la confusion mentale et eu des hallucinations visuelles pendant une semaine. La Dre Kayedi a noté que son taux de glucose était élevé.

[41] Le 26 octobre 2016, la Dre Andrea Bida, médecin gériatre, a noté que la requérante avait consenti verbalement à ce qu’elle rencontre I. D. La requérante avait obtenu de bons résultats aux tests cognitifs. Ses résultats au test MoCA se situaient dans la normale. La Dre Bida a noté que la requérante continuait de participer à des activités parajuridiques.

[42] Le 31 octobre 2016, le Dr R. Paramsothy, psychiatre, a signalé que la requérante avait obtenu un résultat de 26 sur 30 au test MoCA. Elle était très consciente de son environnement. Sa capacité à se rappeler des informations semblait adéquate. Elle était consciente de ses besoins sur le plan médical.

[43] Le 31 octobre 2016, le Dr Atwal Gulshan a signalé que la requérante avait des troubles cognitifs.

[44] Le 6 décembre 2016, Sheila Ingle, travailleuse sociale, a noté que la requérante avait consenti par écrit à ce qu’une copie de son rapport soit versée à son dossier de santé.

[45] Jill Hartzog, infirmière autorisée, a affirmé dans un questionnaire d’évaluation daté du 28 décembre 2016 que la requérante était incapable de prendre une décision concernant son admission.

[46] Le 9 février 2017, la Dre Lucy Lu, gastroentérologue, a signalé que la requérante s’était présentée à l’hôpital parce qu’elle était confuse et fatiguée. On a découvert qu’elle était atteinte d’hyperglycémie. Elle a été traitée et est devenue beaucoup plus alerte et orientée. La Dre Lu a noté que son niveau de conscience était normal.

[47] La Dre Stephanie Tse a affirmé que la requérante avait été admise à l’hôpital du 9 février au 7 avril 2017 pour confusion, fatigue, hyperglycémie, nausées et vomissements. Elle avait été traitée pour un diabète non contrôlé. Elle était devenue plus alerte et orientée et était revenue à un niveau de conscience normal. On lui a conseillé de surveiller sa glycémie à la maison et de consigner ses résultats dans un journal.

[48] Le 16 février 2017, le Dr Usman Moghal, neurologue, a noté qu’il avait eu une conversation avec la requérante au sujet de sa santé. Elle se sentait beaucoup mieux. I. D. avait fourni la plupart des détails. Le Dr Moghal a noté que la requérante était stable et allait beaucoup mieux.

[49] Le 27 février 2017, on a expliqué à la requérante les risques liés à la gastroscopie et à la coloscopie et on a obtenu son consentement avant les examens.

[50] Le 1er mai 2017, Marcia Palonen, ergothérapeute, a signalé que selon I. D., les fonctions cognitives de la requérante variaient et elle alternait entre une confusion marquée à certains moments et quelques périodes de lucidité.

[51] Le Dr Mario Masellis, neurologue, a signalé le 4 avril 2019 que la mémoire de la requérante était stable depuis deux ans. Elle répondait bien au donepezil qu’elle avait commencé à prendre en 2017 pour ses problèmes de mémoire et ses changements de comportement. En février 2018, elle avait commencé à avoir des tremblements. Ses fonctions cognitives semblaient altérées, car elle n’était pas en mesure d’avoir des conversations complètes ou de suivre des instructions. Ses résultats aux tests cognitifs indiquaient un déclin important. Bien que sa mémoire n’avait pas été affectée, son attention et ses fonctions exécutives avaient diminué considérablement. Elle était probablement atteinte de démence à corps de Lewy et de démence vasculaire en raison d’un AVC antérieur. Selon ce rapport, la requérante était relativement stable avant la date de sa demande, mais son état s’était détérioré considérablement après la date de sa demande.

[52] Le Dr Marc Narayasingh, neurologue, a rédigé une lettre d’appui datée du 14 avril 2020. Il a affirmé dans celle-ci que I. D. avait été la principale personne qui s’occupait de la requérante et qui prenait des décisions pour elle. Le Dr Narayasingh n’a pas été en mesure de procéder à une évaluation officielle des capacités de la requérante, mais il a estimé, selon ses observations, qu’elle était incapable de prendre ses propres décisions médicales depuis 2015.

[53] Le 13 mai 2020, le Dr Gary Gimpel a écrit une lettre d’appui dans laquelle il dit que la requérante l’a consulté pour un problème soudain de double vision en juin 2014. I. D. avait assisté à chaque rendez-vous et la requérante était devenue très dépendante de lui.

[54] Le Dr Mazen Alsahi a écrit le 11 juin 2020 que la requérante était suivie à la clinique du diabète depuis 2016. I. D. assistait à tous ses rendez-vous et participait à tous les aspects de ses soins. Elle avait besoin d’aide, car ses capacités cognitives et de communication étaient très limitées.

[55] Tracy Kidd, responsable des dossiers liés aux prestations intégrées, a écrit le 5 octobre 2020 que la requérante satisfaisait aux dispositions relatives à l’incapacité du Régime. Sa première rencontre avec la requérante a eu lieu le 2 novembre 2017 et cette dernière était incapable de comprendre l’objet du rendez-vous. Elle dépendait entièrement de I. D. pour presque toutes ses activités quotidiennes.

[56] Le 5 octobre 2020, la Dre Konya Kayet, chiropodiste, a écrit que I. D. accompagnait la requérante à tous ses rendez-vous depuis décembre 2017. I. D. remplissait tous ses formulaires d’admission et fournissait ses antécédents médicaux. Il est clair que la requérante ne s’y opposait pas et qu’elle était heureuse que son fils s’occupe de ses soins.

[57] Nancy Feasby, physiothérapeute, a rédigé une lettre d’appui datée du 18 octobre 2020 pour signaler que la requérante avait commencé sa physiothérapie en octobre 2016. Elle a noté que la requérante s’en remettait à I. D. pour prendre des décisions concernant ses objectifs en matière de soins de santé et signer ses formulaires de consentement aux traitements.

[58] Dans un rapport non daté, Christien Soltan, pharmacien, a noté que I. D. s’occupait des affaires de la requérante en ce qui concerne sa santé.

Analyse

[59] La requérante doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité avant le 22 janvier 2018. I. D. a soutenu que la requérante en était incapable avant la date de sa demande. Il soutient que cette incapacité a commencé en mai 2014.

[60] Plusieurs décisions importantes de la Cour d’appel fédérale sont pertinentes dans la présente affaire. Dans l’affaire McDonald c Canada (Procureur général), 2013 CAF 37, la Cour d’appel fédérale a affirmé que la façon dont il faut aborder la question de la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande est à présent bien établie. Il faut apprécier cette capacité en tenant compte de la preuve médicale et des activités de la personne qui demande des prestations pouvant renseigner sur sa capacité entre la date déclarée du début de l’incapacité et la date de la demande. De même, dans l’affaire Sedrak c Canada (Ressources humaines et Développement social), 2008 CAF 86, la Cour d’appel fédérale a conclu qu’il fallait donner au mot « capacité » son sens ordinaire. La capacité de former l’intention de faire une demande de prestations n’est pas de nature différente de la capacité de former une intention relativement aux autres possibilités qui s’offrent à une personne qui demande des prestations. Le fait que celle-ci n’ait pas l’idée d’exercer une faculté donnée en raison de sa vision du monde ne dénote pas chez elle une absence de capacité. Dans la décision Canada (Procureur général) c Danielson, 2008 CAF 78, la Cour d’appel fédérale a conclu que les activités d’une personne pendant la période pertinente peuvent être utiles pour apprécier son incapacité permanente de former ou d’exprimer l’intention requise.

[61] Dans la présente affaire, j’ai examiné la preuve médicale au cours de la période d’incapacité alléguée par la requérante, soit de mai 2014 jusqu’à la date de sa demande en janvier 2018. Le Dr Mousa a rempli un formulaire de déclaration d’incapacité daté de juillet 2018 dans lequel il a affirmé que l’état de santé de la requérante la rendait incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations à compter de mai 2014. Le Dr Mousa a également rédigé une lettre d’appui en octobre 2020 indiquant que la requérante était incapable depuis la fin de 2017. La Dre Mitchell a aussi rempli un formulaire de déclaration d’incapacité daté d’octobre 2015 dans lequel elle a affirmé que l’incapacité de la requérante avait commencé en décembre 2015.

[62] Il y a aussi des lettres d’appui écrites après janvier 2018 par de nombreux professionnels de la santé ayant vu la requérante, notamment le Dr Gimpel, la Dre Kayet, M. Soltan, le Dr Alsahi, le Dr Aubrey, Mme Hartzog et Mme Feasby. Il y a aussi une lettre d’appui de Mme Kidd, responsable des dossiers liés aux prestations intégrées.

[63] Malgré les opinions exprimées dans ces lettres et les formulaires de déclaration d’incapacité, la majeure partie de la preuve médicale au dossier datant d’avant janvier 2018 n’appuie pas la conclusion selon laquelle la requérante était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations. Selon les rapports, même si la requérante éprouvait des difficultés cognitives, elle ne répondait pas à la définition d’incapacité.

[64] J’ai tenu compte du fait que bien que la requérante ait été admise à l’hôpital pour des déficits cognitifs en octobre 2016, ses capacités cognitives se sont grandement améliorées après son hospitalisation. Cela ressort clairement du rapport de la Dre Bida daté d’octobre 2016, dans lequel il est noté que la requérante obtenait de bons résultats aux tests cognitifs et que ses résultats au test Moca se situaient dans la normale. Le Dr Paramsothy a aussi écrit qu’elle était très consciente de son environnement, que sa capacité à se rappeler des informations était adéquate et qu’elle était consciente de ses besoins sur le plan médical. La Dre Lu et la Dre Tse ont écrit en février 2017 et en avril 2017 que le niveau de conscience de la requérante était normal. Le Dr Moghal a écrit en février 2017 qu’elle était stable et allait beaucoup mieux. La Dre Mitchell a noté dans ses rapports de mai 2017 et d’août 2017que l’état de santé de la requérante s’était amélioré et que le médicament s’avérait utile. Tout cela est confirmé par le Dr Masellis en avril 2019, qui a affirmé que la requérante répondait bien au médicament qu’elle prenait pour ses problèmes de mémoire depuis 2017.

[65] Les rapports révèlent également que bien qu’il soit vrai que I. D. ait aidé la requérante, celle-ci était néanmoins capable de communiquer ses symptômes, de consentir à des traitements médicaux et de participer activement à ses traitements pendant toute la période d’incapacité alléguée. Par exemple, la Dre Bida a noté que la requérante avait consenti à ce qu’elle parle à I. D. en octobre 2016 et qu’elle avait aussi consenti à subir une gastroscopie et une coloscopie en février 2017. Mme Ingle a obtenu son consentement écrit pour verser une copie d’un rapport à son dossier de santé en décembre 2016.

[66] La requérante a participé à ses rendez-vous en fournissant ses antécédents médicaux et en répondant aux questions. Cela a été souligné en mai 2016 par le Dr Axelrod, en juillet 2016 par le Dr Sundaram, en août 2016 et en mai 2017 par la Dre Mitchell, en octobre 2016 par le Dre Faris, en février 2017 par le Dr Moghal et en août 2017 par le Dr Aubrey.

[67] Le Dr Iqbal en septembre 2016 et la Dre Faris en octobre 2016 et en mai 2017 ont signalé que la requérante comprenait les risques des traitements et qu’elle avait reçu des directives sur ce qu’il fallait faire si ses symptômes s’aggravaient. La Dre Hopyan a également souligné de mai 2015 à décembre 2017 que la requérante avait été sensibilisée aux symptômes d’un AVC et à ce qu’il fallait faire s’ils apparaissaient.

[68] Il ressort clairement des rapports médicaux au dossier que les capacités cognitives de la requérante se sont considérablement détériorées après qu’elle a signé sa demande de prestations d’invalidité. C’est ce que la Dre Mousa et le Dr Masellis ont affirmé.

[69] Les lettres d’appui et les rapports médicaux au dossier qui appuient l’allégation de la requérante selon laquelle elle était incapable ne concordent pas non plus avec ses activités pendant la période d’incapacité alléguée. La requérante a continué de travailler comme parajuriste après son AVC en mai 2014. I. D. a dit qu’elle avait terminé des dossiers ouverts avant son AVC. Il la conduisait à ses rendez-vous. On ne sait pas pendant exactement combien de temps elle a continué à travailler comme parajuriste et combien de travail elle a réellement accompli. Toutefois, la Dre Bida a souligné qu’elle avait continué de participer à des activités parajuridiques jusqu’en octobre 2016. Ce n’est qu’en mai 2017 que la Dre Mitchell a écrit que la requérante ne pouvait plus travailler comme parajuriste.

[70] La requérante a assisté à une audience du Tribunal de la sécurité sociale en septembre 2015. I. D. a été exclu de l’audience. La requérante a pu témoigner et se représenter elle-même sans l’aide de I. D.

[71] I. D. a indiqué que la requérante avait signé une procuration en septembre 2015, soit pendant la période d’incapacité alléguée. I. D. a ensuite préparé une nouvelle procuration pour retirer un membre de la famille comme mandataire remplaçant. I. D. a expliqué ce document à la requérante. Elle l’a signé le 1er septembre 2017. Rien n’indique qu’elle ne comprenait pas ce qu’elle signait ni pourquoi elle le signait. En fait, deux témoins ont écrit qu’ils ne la croyaient incapable de donner une procuration perpétuelle.

[72] I. D. a rempli plusieurs formulaires au nom de la requérante, y compris un formulaire de consentement autorisant Service Canada à obtenir des renseignements personnels, la demande de prestations d’invalidité de la requérante et un formulaire de demande pour la clause pour élever des enfants. Je vais me concentrer sur la demande de prestations d’invalidité, qui a été signée par I. D. en janvier 2018, puis signée par la requérante en février 2018. Bien que j’accepte que I. D. ait rempli ce formulaire au nom de la requérante, je n’accepte pas le fait que la requérante était seulement capable de signer physiquement le formulaire. Cela ressort clairement du témoignage de I. D. selon lequel il a expliqué le but de la demande à la requérante avant qu’elle le signe.

[73] Par conséquent, d’après l’ensemble de la preuve, je ne suis pas convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que la requérante était incapable de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité avant janvier 2018.

Conclusion

[74] L’appel est rejeté.

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