Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : NS c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 511

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : N. S.
Représentante ou représentant : Eloho Atekha-Aideyan
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision () datée du
3 décembre 2019 rendue par le ministre de l’Emploi et du
Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Jackie Laidlaw
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 13 juillet 2021
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant de l’appelante
Interprète ukrainien
Date de la décision : Le 23 juillet 2021
Numéro de dossier : GP-20-252

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] La requérante, N. S., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] La requérante est une femme de 55 ans qui est venue au Canada d’Ukraine en 2002. Elle est titulaire d’un diplôme universitaire en langue et en littérature. Elle a travaillé comme journaliste en Ukraine, puis à nouveau pendant cinq ans au Canada pour une publication ukrainienne. Elle a travaillé pour la dernière fois comme aide-enseignante, à temps partiel, dans une école Montessori de 2012 à 2018, date à laquelle elle a arrêté de travailler en raison de la douleur et de plusieurs autres problèmes de santé.

[4] La requérante a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC le 20 décembre 2018. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. La requérante a fait appel de la décision du ministre auprès de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] La requérante déclare qu’elle s’est conformée à tous les traitements et qu’elle continue de ressentir de la douleur chronique. Elle a plusieurs problèmes de santé et son état de santé doit être considéré dans son ensemble. Elle ne peut pas travailler dans un contexte « réaliste » parce qu’elle est incapable de se recycler en raison de ses problèmes physiques et mentaux, ses compétences linguistiques ne sont pas très bonnes et le représentant m’a demandé de ne pas tenir compte de sa formation universitaire parce qu’elle n’a pas eu lieu au Canada. Elle a déclaré qu’elle n’a pas à prouver qu’elle a tenté de travailler, car il n’y a aucune preuve de sa capacité de travail.

[6] Le ministre affirme que les éléments de preuve n’appuient aucun problème de santé gravement invalidant, que ce soit pris en compte de manière individuelle ou combinée, par le biais d’un diagnostic, d’une enquête ou d’un examen clinique. Il y a des éléments de preuve à l’appui du fait qu’elle peut occuper un emploi sédentaire.

Ce que la requérante doit prouver

[7] Pour obtenir gain de cause, la requérante doit prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2020. Cette date est fondée sur les cotisations qu’elle a versées au RPCNote de bas de page 1 .

[8] Le Régime de pensions du Canada définit les termes « grave » et « prolongée ».

[9] Une invalidité est grave si elle rend une partie requérante régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 2 .

[10] Je dois donc examiner l’ensemble des problèmes de santé de la requérante pour voir quelle est leur conséquence sur sa capacité de travailler. Je dois également examiner sa situation (y compris son âge, son niveau d’instruction, ses antécédents de travail et son expérience de la vie). Je dois faire cela pour avoir un portrait réaliste de la gravité de son invalidité. Si la requérante est régulièrement capable d’effectuer un travail qui lui permettrait de gagner sa vie, elle n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[11] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 3 .

[12] Cela signifie que la requérante ne peut pas avoir une date de rétablissement prévue pour son invalidité. On doit s’attendre à ce que l’invalidité maintienne la requérante hors du marché du travail pendant une longue période.

[13] La requérante doit prouver qu’elle est atteinte d’une invalidité grave et prolongée. Elle doit prouver cela selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle soit atteinte d’une invalidité.

Motifs de ma décision

[14] J’estime que la requérante n’a pas prouvé qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2020.

L’invalidité de la requérante était-elle grave?

[15] L’invalidité de la requérante n’était pas grave. Je suis parvenue à cette conclusion en tenant compte de plusieurs facteurs. J’explique ces facteurs ci-après.

Les limitations fonctionnelles de la requérante ne nuisent pas à sa capacité à travailler

[16] La requérante a décrit un certain nombre de problèmes de santé dans sa demande. Lors de l’audience, elle s’est concentrée sur la douleur ressentie dans ses genoux, dans ses épaules et sur l’ensemble de son corps. Elle a également fait état d’insomnie, de problèmes d’estomac et de vertiges provoquant des vomissements, des maux de tête et de la fièvre. Elle a également mentionné que sa thyroïde, qui a été enlevée en 1998, continue de la rendre malade et de lui donner des vertiges. La requérante a déclaré qu’elle était également invalide en raison d’une dépression et d’anxiété. Je ne peux pas me concentrer sur les diagnostics de la requéranteNote de bas de page 4 . Je dois plutôt me concentrer sur la question de savoir si elle avait des limitations fonctionnelles qui l’empêchaient de gagner sa vieNote de bas de page 5 . Pour ce faire, je dois examiner tous les problèmes de santé de la requérante (pas seulement le problème principal) et réfléchir à la façon dont ils nuisent à sa capacité à travaillerNote de bas de page 6 . La requérante a demandé que je me concentre sur son état de santé global.

[17] J’estime que la requérante n’a pas de limitations fonctionnelles.

Ce que la requérante dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[18] La requérante affirme que ses problèmes de santé ont entraîné des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité à travailler. Voici ce qu’elle dit :

  1. (a) Elle est incapable de travailler parce qu’elle ne peut pas rester assise ou debout pendant de longues périodes. Elle ne peut pas non plus soulever des objets de plus de 2 kg. 
  2. (b) Elle ne peut pas se recycler, car elle n’est pas capable de passer le test d’anglais.
  3. (c) Comme elle ne peut pas rester assise longtemps, elle est incapable de s’asseoir devant un ordinateur ou de parler au téléphone dans le cadre d’un emploi.
  4. (d) Son vertige la rend malade.
  5. (e) Elle a un problème d’estomac et elle ne peut pas prendre de médicaments.
  6. (f)  Elle ne peut pas dormir en raison de la douleur qu’elle ressent.

Ce que révèlent les éléments de preuve médicale sur les limitations fonctionnelles de la requérante

[19] Je ne conteste pas le témoignage de la requérante selon lequel elle a des douleurs chroniques ou selon lequel elle se sent incapable de travailler. Toutefois, la requérante doit fournir des éléments de preuve médicale démontrant que ses limitations fonctionnelles ont nui à sa capacité de travailler avant le 31 décembre 2020.

[20] Les éléments de preuve médicale ne soutiennent pas ce que dit la requérante.

[21] La Dre Slavina, sa médecin de famille depuis 2010, soutient que la requérante est atteinte de fatigue chronique, d’insomnie, de douleurs chroniques au cou, aux épaules et au dos et d’hypothyroïdie. La Dre Slavina a noté des limitations quand vient le temps de se pencher, de se tourner et de marcherNote de bas de page 7 . La Dre Slavina a noté que la requérante avait déclaré avoir ces douleurs chroniques et qu’elle était incapable d’occuper tout emploi en raison du fait qu’elle manquait d’énergie, qu’elle se fatiguait facilement, qu’elle avait des douleurs constantes et qu’elle faisait de l’insomnieNote de bas de page 8 . La Dre Slavina n’a pas émis cette opinion et a indiqué qu’elle n’avait jamais discuté de la possibilité que la requérante cesse de travailler. En ce qui concerne la douleur, la requérante a bien réagi à une crème topique en vente libre, Pennsaid, qu’elle prenait depuis qu’elle avait eu un accident de voiture en 2010.

[22] La requérante a subi une blessure à l’épaule au travail, ce qui a provoqué sa douleur. En mai 2017, elle déplaçait un objet lourd et a failli se déboîter l’épaule. Elle déclare qu’elle s’est fait mal aux épaules, aux bras, aux coudes et aux poignets pendant plus de trois ans. Elle n’est pas allée voir sa médecin de famille pour obtenir une note demandée par son employeur. Au lieu de cela, elle est allée dans une clinique sans rendez-vous parce que c’était plus proche. Elle a vu le Dr Diyaeb une fois, et celui-ci a rempli la demande d’indemnisation de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) en notant qu’elle se plaignait de douleurs bilatérales aux épaules et aux coudes causées par le soulèvement de charges lourdes au travail. Il a recommandé des tâches modifiées pendant deux semaines, sans soulèvement de charges lourdesNote de bas de page 9 .

[23] Elle est retournée au travail avec des tâches modifiées. L’école a pris fin à la fin de juillet et, comme chaque année, elle a touché des prestations d’assurance-emploi pour le mois d’août. Elle n’a pas touché de prestations de maladie de l’assurance-emploi. Elle est retournée au travail en septembre 2017, au début de la nouvelle année scolaire.

[24] En octobre 2017, la requérante a consulté un chirurgien orthopédique, le Dr James SeligmanNote de bas de page 10 . Elle l’a vu une fois et il a recommandé des tâches modifiées : ne pas soulever, pousser ou tirer des charges. Il n’a rien recommandé de plus, ni examen ni chirurgie, et rien n’indiquait qu’elle avait un problème physique grave. Elle a continué à faire des tâches modifiées au travail. Elle a déclaré avoir consulté la Dre Slavina, car le travail modifié était douloureux. La Dre Slavina a recommandé du Voltaren et du Tylenol, deux traitements conservateurs en vente libre, et de la physiothérapie. Elle a eu 10 séances de physiothérapie, trois fois par semaine, pendant environ un mois. Elle a travaillé pendant l’année scolaire complète.

[25] Après la fin de l’année scolaire en juillet 2018, requérante a de nouveau touché des prestations régulières d’assurance-emploi. Elle n’a pas reçu de prestations de maladie de l’assurance-emploi. En septembre, elle a décidé de ne pas retourner travailler. Elle en a parlé à la Dre Slavina, qui, selon elle, a accepté qu’elle ne retourne pas au travail. Cependant, la Dre Slavina ne lui a pas donné de note indiquant qu’elle devait prendre un congé. La Dre Slavina a déjà mentionné qu’elle n’avait pas discuté avec la requérante de la nécessité de cesser de travailler. La requérante a déclaré que la Dre Slavina recommandait toujours du Voltaren et d’autres remèdes naturels, comme des feuilles de chou sur ses genoux. 

[26] La preuve n’indique pas que la requérante était atteinte d’un problème de santé grave au moment où elle a quitté le travail. Elle ressentait des douleurs et avait consulté un chirurgien orthopédique. Des traitements conservateurs ont été recommandés par sa médecin de famille et certaines limitations pour soulever, pousser et tirer des charges ont été recommandées par le spécialiste. Je reconnais qu’elle a respecté les recommandations consistant en dix traitements de physiothérapie et en la prise de médicaments (Voltaren et Tylenol). Ces recommandations sont très conservatrices.

[27] Aucun des examens diagnostiques effectués de 2010 à 2020 ne révèle de problème au niveau du dos, des épaules ou des pieds qui nécessiterait une intervention chirurgicale, ou dont la gravité l’empêcherait de travailler. En 2017, l’épaule présentait une bursite et une tendinopathie légères, sans déchirure de la coiffe des rotateurs. En 2019, elle a eu un léger ostéophyte au pied gauche ainsi qu’une tendinite du tendon d’Achille et une bursiteNote de bas de page 11 . La Dre Slavina a précisé que la douleur au talon gauche était présente depuis le début de 2019 et que la requérante était capable de marcher sans boiter et qu’il n’y avait aucune déformation du pied en juillet 2019Note de bas de page 12 . En 2020, elle a passé une échographie des deux genoux, qui s’est révélée sans anomalie. De plus, en août 2020, une radiographie de la colonne lombaire a montré une dégénérescence légère à modérée avec scoliose, une dégénérescence minime à S1; des ostéophytes légers du bassin et une dégénérescence minime des hanches.

[28] La Dre Slavina souligne que la requérante a eu des vertiges de façon intermittente depuis janvier 2019, après son arrêt de travail, avec des étourdissements pendant deux ans sans interruption. La Dre Slavina lui a recommandé de mettre de la glace et de s’étirerNote de bas de page 13 . Alors que sa note pour 2020 indiquait que cette information provenait de la requérante, les notes cliniques de 2017 ne montrent pas que la requérante avait des étourdissements continus, et aucune enquête n’a été menée sur de quelconques vertiges. Un rapport fait mention d’une consultation aux urgences en janvier 2019 pour des vertiges, mais aucun examen complémentaire n’a été nécessaireNote de bas de page 14 .

[29] En fait, les notes cliniques du Dr Magdy IbrahimNote de bas de page 15 , provenant du cabinet médical de Jane Park, une autre clinique sans rendez-vous où la requérante est allée deux fois, indiquent qu’elle est tombée sur la glace le 27 février 2019 et qu’elle s’est blessée au coccyx et à l’arrière de la tête. La chute était due à un glissement sur la glace et non à un vertige. Elle n’a pas perdu connaissance et n’a pas signalé de vertiges. Elle a signalé des maux de tête, des acouphènes, une humeur morose fragmentée, un manque de concentration et une photophobie. Encore une fois, du Tylenol et du Voltaren, ainsi que du repos et de la physiothérapie ont été recommandés. Elle a de nouveau suivi des séances de physiothérapie qui ont permis de constater que son amplitude de mouvement cervical était normale et qu’elle était capable de tolérer des exercices avec quelques étourdissementsNote de bas de page 16 .

[30] Rien n’indique que la requérante ait eu besoin d’autres examens concernant ses vertiges ni qu’elle ait besoin d’un traitement.

[31] Il ne fait aucun doute que la requérante a subi une ablation de la thyroïde en 1998. Une échographie de sa thyroïde réalisée en décembre 2018 n’a montré aucune anomalie à la suite de la thyroïdectomie totale effectuée en 1998Note de bas de page 17 . Elle est sous traitement (L-troxin) depuis l’opération. Il s’agit d’un traitement courant lorsque la thyroïde est enlevée.

[32] La requérante a effectivement eu des kystes pelviens et des fibromes utérins en 2012Note de bas de page 18 et en 2017Note de bas de page 19 . En 2020, une échographie pour ses douleurs abdominales n’a pas révélé la présence de fibromesNote de bas de page 20 . Elle a commencé à avoir des problèmes d’estomac et a déclaré que c’était en raison de la prise de L-troxin et de Tylenol. Le Tylenol est connu pour causer des problèmes d’estomac, et la médecin lui a dit d’arrêter d’en prendre en raison de ses douleurs d’estomac et pour son foie. J’accepte qu’elle ne puisse plus prendre de Tylenol contre la douleur. Cependant, le Tylenol est un traitement conservateur et aucun autre médicament n’a été prescrit, à part un médicament en vente libre (le Voltaren).

[33] Elle affirme que l’insomnie la rend faible et malade. Sa médecin de famille ne lui a pas prescrit de médicaments pour le sommeil ni d’étude du sommeil. On lui a dit de prendre du thé avant de se coucher. Ce manque d’intervention n’indique pas que son insomnie est un problème grave sur le plan médical, et il n’y a aucune preuve médicale selon laquelle ce problème a interféré avec sa capacité de travailler.

[34] Actuellement, elle a un nouveau médecin de famille, le Dr Klipitch, qui a commencé à lui faire passer des tests en août 2020 et l’a spécifiquement envoyée chez un gastro-entérologue. Son médecin lui a dit de prendre des Tums pour ses reflux acides. On lui avait prescrit du Pantroprazoprole, qui, selon ses dires, n’a pas fonctionné. Elle attend toujours un rendez-vous avec le spécialiste pour un examen physique. Par conséquent, ses douleurs d’estomac et ses reflux gastriques sont toujours à l’étude, et il existe peut-être un traitement pour gérer ces problèmes de santé.

[35] Finalement, rien ne prouve qu’elle est atteinte de dépression et d’anxiété nécessitant un traitement ou une intervention par un spécialiste, ou qu’elle est incapable de travailler en raison d’un quelconque problème de santé mentale.

[36] Le travail de la requérante en tant qu’aide-enseignante après l’école exigeait un niveau d’effort physique modéré. Elle devait interagir physiquement avec des enfantsNote de bas de page 21 . La preuve médicale démontre que la requérante avait des limitations fonctionnelles qui ont nui à sa capacité d’occuper son emploi précédent. Elle avait des limitations pour ce qui est de pousser, de tirer et de soulever des charges.

[37] À l’exception d’une recommandation selon laquelle elle devait effectuer des tâches modifiées pendant deux semaines après l’accident, il n’y a aucune preuve médicale pour soutenir qu’elle n’a pas pu travailler en raison de problèmes de santé.

La requérante a suivi les recommandations médicales

[38] La requérante a suivi les recommandations médicalesNote de bas de page 22 . Elle m’a demandé d’en tenir compte, et je reconnais qu’elle les a suivis. Je note également que les recommandations médicales ont été très conservatrices et qu’elle n’a pas eu besoin d’une intervention invasive pour l’un ou l’autre de ses problèmes de santéNote de bas de page 23 ni de l’intervention continue d’un spécialiste.

[39] Je dois maintenant décider si la requérante peut régulièrement détenir d’autres types d’emplois. Pour être graves, les limitations fonctionnelles de la requérante doivent l’empêcher de gagner sa vie en occupant tout type d’emploi, et pas seulement son emploi habituelNote de bas de page 24 .

La requérante peut travailler dans un contexte réaliste

[40] Lorsque je décide si la requérante peut travailler, je ne peux pas me contenter de regarder ses problèmes médicaux et la façon dont ils nuisent à ce qu’elle peut faire. Je dois également tenir compte de facteurs comme :

  • son âge;
  • son niveau d’instruction;
  • ses aptitudes linguistiques;
  • ses antécédents de travail et son expérience de vie.

[41] Ces facteurs m’aident à décider si la requérante peut travailler dans un contexte réaliste, c’est-à-dire s’il est réaliste d’affirmer qu’elle peut travaillerNote de bas de page 25 .

[42] Je constate que la requérante peut travailler dans un contexte réaliste. Elle avait 55 ans au moment de sa période minimale d’admissibilité, et il lui restait dix ans avant la retraite. Bien que son âge puisse limiter ses options, cela ne l’empêcherait pas de travailler.

[43] La requérante a une formation universitaire, soit un baccalauréat ès arts en langue et en littérature. Elle m’a demandé de ne pas y accorder d’importance, car l’université se trouve en Ukraine. Je ne suis pas du tout d’accord avec sa demande. Rien ne permet d’affirmer qu’une université ukrainienne est inférieure à une université canadienne, ou que le diplôme qu’elle a obtenu n’est pas pertinent. Je suis d’accord avec le fait que pour travailler au Canada, quel que soit le domaine dans lequel la candidate ou le candidat a été formé ailleurs, la personne doit également passer certains tests liés à la législation canadienne et aux qualifications professionnelles afin de pouvoir exercer sa profession au Canada. Le fait de posséder un diplôme universitaire, quel que soit le lieu où il a été obtenu, indique un niveau d’éducation plus élevé, ainsi qu’une capacité à se former à un niveau supérieur. La requérante a déclaré être théologienne et enseignante en Ukraine et avoir tenté de s’inscrire à l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario en 2007. Elle a échoué deux fois au test d’anglais. Il n’y a pas de preuve substantielle à l’appui du fait qu’elle ait échoué deux fois au test d’anglais, mais je n’ai aucune raison de mettre en doute la véracité de cette affirmation. Toutefois, pour devenir enseignante en Ontario, il serait très utile de pouvoir communiquer en anglais. Cela ne signifie pas pour autant qu’il ne faut pas tenir compte de son diplôme. Je n’accepte pas que ses études supérieures soient un obstacle à l’obtention d’un emploi. J’estime qu’il s’agit d’un facteur positif.

[44] La requérante est venue au Canada en 2002. Elle a suivi un cours d’anglais langue seconde jusqu’au niveau six. Il s’agit du niveau le plus élevé. Bien qu’elle ait échoué au test d’anglais pour se qualifier comme enseignante en Ontario en 2007, j’ai vu des éléments de preuve à l’audience selon lesquels elle est tout à fait capable de communiquer en anglais. Un interprète était présent lors de l’audience, ce qui, je l’admets, est le droit de la requérante. Une audience implique des questions compliquées et des termes juridiques. Il serait raisonnable et prudent d’avoir un interprète si la requérante ne possède pas de bonnes compétences linguistiques. Elle a assisté à toute l’audience sans avoir besoin de l’aide de l’interprète, pas même une seule fois. 

[45] Les compétences linguistiques de la requérante sont suffisamment bonnes pour qu’elle puisse travailler en tant qu’aide-enseignante auprès de jeunes enfants dans une école Montessori, connue pour avoir des normes plus élevées en matière de scolarisation et donc vraisemblablement en ce qui concerne son personnel. Ses compétences linguistiques n’étaient pas un obstacle à l’obtention de cet emploi et ne l’empêcheraient pas de trouver un autre emploi convenable.

[46] En Ukraine, la requérante était journaliste. Lorsqu’elle est arrivée au Canada, elle a travaillé pendant cinq ans comme journaliste indépendante pour une publication ukrainienne. Elle m’a demandé de considérer qu’elle n’a pas de compétences transférables, mis à part pour un travail physiquement exigeant. Je ne suis pas d’accord. Le métier de journaliste est un métier sédentaire. De plus, son emploi d’aide-enseignante après les cours dans une école Montessori exigeait un effort physique modéré. La requérante avait certaines limitations physiques qui nuisaient à sa capacité d’effectuer un travail physiquement exigeant. La preuve médicale ne vient pas appuyer le fait qu’elle est incapable d’occuper un poste sédentaire, et ses compétences en tant que journaliste sont de nature sédentaire. Par conséquent, ses antécédents de travail et ses expériences de vie lui fourniraient des compétences transférables et ne constitueraient pas un obstacle à la recherche d’un emploi rémunérateur.

[47] La requérante est capable de travailler dans un contexte réaliste.

La requérante n’a pas essayé de trouver et de conserver un emploi convenable

[48] Si la requérante peut travailler dans un contexte réaliste, elle doit montrer qu’elle a essayé de trouver et de conserver un emploi. Elle doit également démontrer que ses efforts ont été infructueux en raison de ses problèmes de santéNote de bas de page 26 . Trouver et conserver un emploi comprend le fait de se recycler ou de rechercher un emploi adapté à ses limitations fonctionnelles (en d’autres termes, un emploi comportant des mesures d’adaptation particulières)Note de bas de page 27 .

[49] La requérante n’a pas fait d’efforts pour travailler.  

[50] Elle a déclaré qu’en 2018, lorsqu’elle a décidé de ne pas retourner à l’école, elle est retournée au journal ukrainien pour voir si elle pouvait essayer d’occuper le poste de vendeuse de publicité. Le travail était sédentaire; il s’agissait de s’asseoir à l’ordinateur et de parler au téléphone. Elle n’avait jamais fait ce type de travail auparavant. Elle a déclaré qu’elle a duré une semaine et qu’elle était trop épuisée. Parallèlement, elle a également regardé la description des emplois dans les cafés et les pharmacies et a pensé qu’elle ne pourrait pas les faire parce qu’elle devrait rester debout toute la journée. Elle a déclaré qu’elle avait envisagé des emplois en informatique, mais qu’en raison de son incapacité à rester debout ou assise pendant de longues périodes, elle ne pensait pas non plus pouvoir faire ces emplois.

[51] Rien ne prouve qu’elle a travaillé pour le journal pendant une semaine et qu’elle ne pouvait pas faire ce travail en raison de son état de santé. Je n’accepte pas que son examen des descriptions de postes dans les cafés, les pharmacies et les emplois liés à l’informatique constitue une tentative visant à trouver ou à obtenir un emploi.

[52] Comme elle n’a pas réussi à démontrer qu’elle ne pouvait pas obtenir ou conserver un emploi en raison de son état de santé, je ne peux pas conclure qu’elle était atteinte d’une invalidité grave au 31 décembre 2020.

Conclusion

[53] Je conclus que la requérante n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC parce que son invalidité n’est pas grave. Puisque j’ai conclu que son invalidité n’est pas grave, je n’ai pas eu à examiner si elle est prolongée.

[54] Cela signifie que l’appel est rejeté.

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