Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Résumé :

Canada Pension Plan – disability – need for objective medical evidence as of Minimum Qualifying Period (MQP) – General Division did not make an error in dismissing appeal because Claimant’s only evidence of depression during MQP was her own testimony and self-reported history.

The Claimant applied for Canada Pension Plan disability benefits, citing a long history of mental health problems. Her minimum qualifying period (MQP) ended on December 31, 2010.

The Minister refused her application. The General Division (GD) upheld that refusal because the Claimant had not produced any objective medical evidence to show that she had a severe and prolonged disability at the end ofher MQP.

The Claimant appealed the GD decision to the Appeal Division (AD). The AD dismissed the appeal, saying the GD correctly relied on case law (Dean, Angell, Warren) requiring at least some medical evidence from the minimum qualifying period (MQP) to support a disability claim. In this case, the Claimant testified that she suffered from debilitating depression and anxiety before 2011, but her subjective oral evidence did not meet the legal standard. The Claimant also relied on a psychiatrist’s report, but it was prepared eight years after the MQP and, in any case, was based on the Claimant’s own self-reported history. Finally, the GD did not err in dismissing an emergency report documenting the Claimant’s suicide attempt because it was dated 10 months after the MQP.

The AD also found that the GD had given the Claimant sufficient opportunity to obtain medical evidence dating from the MQP. The record showed that the Claimant was aware that there were gaps in the evidence. She told the GD that she asked her family physician to request her former psychiatrist’s files, but he was told they no longer existed. That being the case, there was no need for the GD to adjourn the hearing to allow the Claimant more time to gather evidence.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : KC c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 719

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : K. C.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentante ou représentant : Jessica Grant (avocate)

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 23 avril 2021 (GP-19-1666)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 5 octobre 2021
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante
Personne représentant la partie intimée

Date de la décision : Le 26 novembre 2021
Numéro de dossier : AD-21-243

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

Aperçu

[2] L’appelante, K. C. (requérante), fait appel de la décision de la division générale du 23 avril 2021. La division générale a conclu que les problèmes de santé mentale de la requérante ne l’ont pas rendue régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice au plus tard à la fin de sa période minimale d’admissibilité (PMA), le 31 décembre 2010Note de bas de page 1 . Elle a également conclu que la requérante n’était pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

[3] La requérante soutient que la division générale a commis des erreurs de droit et de fait. Elle demande donc une révision. L’intimé, le ministre de l’Emploi et du Développement social, soutient que la division générale n’a commis aucune erreur. Le ministre demande à la division d’appel de rejeter le présent appel.

Questions en litige

[4] Les questions à trancher dans la présente affaire sont les suivantes :

  1. a) La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en exigeant de la requérante qu’elle fournisse une preuve médicale objective de son état de santé à la fin de sa PMA?
  2. b) La division générale a-t-elle omis de tenir compte de l’ensemble des problèmes de santé de la requérante?
  3. c) La division générale a-t-elle omis de donner à la requérante une chance équitable d’examiner les dossiers médicaux?
  4. d) La division générale a-t-elle omis de donner à la requérante la possibilité de produire les dossiers médicaux pertinents?
  5. e) La division générale a-t-elle omis de tenir compte des éléments de preuve concernant l’expérience de dépersonnalisation et de déréalisation de la requérante?
  6. f) La division générale a-t-elle omis de tenir compte de l’explication de la requérante concernant les lacunes dans la preuve?

Analyse

[5] La division d’appel peut intervenir dans les décisions de la division générale si elles contiennent des erreurs de compétence, de procédure, de droit ou certains types d’erreurs de fait.

La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en exigeant de la requérante qu’elle fournisse une preuve médicale objective de son état de santé à la fin de sa PMA?

[6] La requérante soutient que la division générale a commis une erreur de droit en exigeant qu’elle fournisse une preuve médicale objective pour prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée à la fin de sa PMA. Elle affirme que son témoignage a établi qu’elle était atteinte d’une invalidité grave à la fin de sa PMA. Selon elle, la division générale aurait dû accepter son témoignage de vive voix comme preuve médicale objective.

Décision de la division générale

[7] La division générale a cité plusieurs affaires judiciaires lorsqu’elle a écrit qu’une partie requérante doit fournir une preuve médicale objective de son invalidité au moment de sa PMA si elle veut être admissible à une pension d’invaliditéNote de bas de page 2 .

[8] La division générale a jugé que les rapports rédigés par le médecin de famille et la psychiatre de la requérante après la fin de la PMA ne constituaient pas une « preuve médicale objective » datant de la PMA. Il en est ainsi parce que la psychiatre :

  • a évalué la requérante pour la première fois huit ans après la fin de sa PMANote de bas de page 3 ;
  • s’est fondée sur les déclarations de la requérante plutôt que sur des observations ou des évaluations cliniques de 2010, ou sur l’examen des dossiers médicaux de 2010.

[9] La division générale a reconnu que ni le médecin de famille ni la psychiatre n’auraient pu examiner les dossiers médicaux de 2010 concernant l’état psychologique de la requéranteNote de bas de page 4 . La requérante n’avait tout simplement pas de dossier médical portant sur son état psychologique avant octobre 2011.

[10] La division générale a conclu que la requérante n’avait produit aucun document montrant qu’elle était atteinte d’une invalidité grave au plus tard le 31 décembre 2010. Pour cette raison, la division générale a conclu qu’il n’y avait [traduction] « pas suffisamment d’éléments de preuve médicale sur lesquels fonder une conclusion selon laquelle ses problèmes de santé, sa dépression et son anxiété l’empêchaient de travailler au plus tard le 31 décembre 2010Note de bas de page 5  ».

Décision du 28 juillet 2021 de la division d’appel

[11] La division d’appel a examiné si la requérante avait soulevé des arguments défendables quant à la question de savoir si elle devait fournir une preuve médicale objective de son état de santé à la fin de sa PMA.

[12] La membre de la division d’appel a fait référence à une autre affaire de la division d’appel. Dans cette affaire, le membre a conclu que la preuve médicale objective pouvait comprendre une description des observations physiques, des symptômes cliniques, des limitations fonctionnelles établies et des diagnostics posés par un professionnel de la santéNote de bas de page 6 . La division d’appel a conclu que des déclarations faites par la personne concernée constituaient également un élément légitime de la preuve médicale objective.

[13] La division d’appel a également souligné qu’il n’était pas nécessaire que la preuve médicale date de la PMA et que les dossiers médicaux préparés après la PMA pouvaient être pertinents s’ils traitaient de l’état de santé d’une partie requérante au cours de sa PMA.

[14] La division d’appel a établi que, dans la mesure où les documents sont pertinents, même s’ils ont été préparés après la PMA, la division générale devrait en tenir compte. La division d’appel a précisé que la division générale ne devrait pas rejeter automatiquement des éléments de preuve simplement parce qu’il est possible qu’ils aient été préparés après la PMA ou qu’ils aient été créés à ce moment.

[15] La division d’appel a jugé que la requérante avait une cause défendable selon laquelle la division générale [traduction] « avait exigé plus d’éléments de preuve médicale de la requérante que ce que la loi exigeNote de bas de page 7  ». La division d’appel a donné la permission à la requérante d’aller de l’avant avec son appel.

La division générale n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’elle a exigé de la requérante qu’elle fournisse une preuve médicale objective de son état de santé à la fin de sa PMA

[16] À première vue, la division générale aurait pu sembler exiger plus de la requérante que ce que la loi exige. Cependant, dans l’ensemble, la division générale n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’elle a exigé de la requérante qu’elle fournisse une preuve médicale objective de son état de santé à la fin de sa PMA.

[17] Dans la décision WarrenNote de bas de page 8 , la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il est bien établi qu’une partie demanderesse doit fournir une preuve médicale objective.

[18] Dans la présente affaire, les éléments de preuve médicale disponibles étaient limités. Bien que la division générale ait peut-être déclaré qu’elle exigeait que la requérante présente des éléments de preuve médicale objectifs, il est clair que la division générale s’est concentrée sur la question de savoir s’il y avait des éléments de preuve médicale (mis à part le témoignage de la requérante) qui portaient sur l’état de santé de la requérante à la fin de sa PMA.

[19] Comme l’a fait remarquer la division générale, les premiers renseignements médicaux au dossier qui se rapportaient à l’état psychologique de la requérante remontaient à 10 mois après la PMA de la requérante. La division générale a estimé que ce rapport médical n’aidait pas la requérante puisqu’il a été préparé bien après la fin de la PMA.

[20] Le 18 octobre 2011, la requérante s’est rendue à l’urgence de son centre local des sciences de la santé pour un épisode d’intoxication alcoolique aiguë. Elle a essayé de s’enlever la vie en s’ouvrant les veines des deux poignets.

[21] Le médecin n’a pas consigné d’antécédents antérieurs ou continus d’intoxication alcoolique aiguë ou de tentatives de suicideNote de bas de page 9 . C’est probablement pour cette raison que la division générale a jugé que le dossier médical du 18 octobre 2011 n’a pas aidé la requérante à établir qu’elle avait une invalidité grave à la fin de sa PMA.

[22] La division générale a reconnu qu’il n’était pas nécessaire de fournir des renseignements médicaux datant des alentours de la date de fin de la PMA. Toutefois, la division générale a conclu que ni le rapport du médecin de famille ni l’évaluation de la psychiatre ne traitaient de l’état de santé de la requérante à la fin de sa PMA.

[23] Le médecin de famille a préparé un rapport médical du RPC en juin 2018Note de bas de page 10 . Il a commencé à traiter la requérante en mai 2017, bien après la fin de sa PMA. Il lui a diagnostiqué un trouble d’anxiété sociale et une dépression. Il n’a pas donné d’avis sur l’état de santé de la requérante vers décembre 2010.

[24] Une psychiatre a évalué la requérante en juin 2018.Note de bas de page 11 Elle a examiné les antécédents psychiatriques de la requérante. La psychiatre a souligné que la requérante était atteinte de dépression et d’anxiété depuis longtemps. Toutefois, elle n’a pas abordé directement l’état de santé de la requérante vers la fin de sa PMA.

[25] La division générale a reconnu que la requérante était atteinte de dépression et d’anxiété depuis longtemps. Cependant, la division générale a jugé qu’un problème de santé de longue date n’établit pas nécessairement le caractère grave d’une invalidité. À cet égard, la division générale a laissé entendre que des déclarations faites par toute personne concernée au sujet d’une invalidité grave devaient être appuyées par des dossiers médicaux datant de l’époque de la PMA. Les dossiers pouvaient comprendre, sans toutefois s’y limiter, des observations ou des évaluations cliniques.

[26] Comme l’a affirmé la Cour d’appel fédérale dans la décision Angheloni, « [l]es souffrances [d’une partie] défenderesse ne constituent cependant pas un élément sur lequel repose le critère de l’“invalidité”Note de bas de page 12  ». Autrement dit, la Cour d’appel n’a pas considéré que les déclarations faites par la partie requérante au sujet de son état de santé constituaient une preuve médicale « objective ».

[27] La division générale n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’elle a conclu que la requérante n’avait pas fourni suffisamment d’éléments de preuve médicale objectifs d’une invalidité grave à la fin de sa PMA. La requérante n’a fourni aucun dossier médical datant des alentours de la date de fin de la PMA. Plus important encore, aucun des dossiers médicaux dont la division générale était saisie ne traitait directement de l’état de santé de la requérante vers la fin de sa PMA.

La division générale a-t-elle omis de tenir compte de l’ensemble des problèmes de santé de la requérante?

[28] La requérante soutient que la division générale n’a pas tenu compte de l’ensemble de ses problèmes de santé. Elle affirme que la division générale n’a pas tenu compte des dossiers médicaux que son ancien avocat aurait dû obtenir. La requérante demande que ces dossiers soient examinés une fois qu’elle les aura reçus.

[29] La division générale n’a pas omis de tenir compte de certains dossiers médicaux parce qu’ils n’ont pas été présentés en preuve. De plus, le représentant de la requérante n’a pas demandé un ajournement ou la possibilité de produire ces documents avant que la division générale ne rende sa décision.

La division générale a-t-elle omis de donner à la requérante une chance équitable d’examiner les dossiers médicaux?

[30] La requérante soutient que la division générale ne lui a pas donné l’occasion d’examiner les dossiers d’urgence de l’hôpital. La requérante écrit ce qui suit :

[traduction]

À l’audience du 20 janvier 2021, je n’ai pas eu l’occasion d’examiner personnellement les dossiers d’urgence de l’hôpital présentés pendant l’audience. Les dossiers médicaux d’urgence étaient inutiles et n’appuyaient pas la décision de la division générale. [...] J’ai demandé d’autres évaluations, rendez-vous psychiatriques et diagnostics au Dr [L]Note de bas de page 13 .

[31] La requérante laisse entendre que si elle avait eu l’occasion d’examiner les dossiers d’urgence de l’hôpital pendant l’audience, elle aurait réalisé qu’il manquait des dossiers. Aussi, si elle avait su que certains documents manquaient, elle aurait avisé la division générale. Elle affirme qu’elle aurait demandé à la division générale d’ajourner l’instance afin d’obtenir ces documents et de les inclure dans la preuve.

[32] Pourtant, il ressort clairement de l’enregistrement audio de l’audience devant la division générale que la requérante savait qu’il y avait des dossiers antérieurs à la PMA qu’elle n’avait pas encore reçusNote de bas de page 14 . Le représentant de la requérante a dit à la membre de la division générale que ni lui ni Service Canada (à titre d’agent du ministre) n’ont pu obtenir les dossiers antérieurs à la PMA, malgré leurs efforts.

[33] La membre de la division générale a ensuite dit à la requérante et à son représentant qu’une preuve médicale objective était nécessaire pour prouver l’existence d’une invalidité graveNote de bas de page 15 . La membre a demandé à la requérante si elle avait fait des démarches visant à obtenir les dossiers antérieurs à la PMA.

[34] La requérante a répondu qu’elle avait demandé à son médecin de famille actuel d’obtenir des dossiers de son ancien psychiatre. Son médecin de famille actuel lui a dit que [traduction] « parce que c’était à une époque différente, avant les ordinateurs ou autres choses du genre, il n’en avait pas, il avait tout noté et il ne gardait plus ces documents […] Il a dit qu’il avait essayé d’obtenir ces renseignements.Note de bas de page 16  »

[35] Autrement dit, le médecin de famille actuel de la requérante lui a dit qu’il avait essayé d’obtenir les dossiers du psychiatre, mais qu’ils n’étaient plus disponibles.

[36] J’estime que les arguments de la requérante sont sans fondement. Elle affirme qu’elle ne savait pas que les dossiers dont disposait la division générale étaient limités et qu’ils n’incluaient pas les dossiers antérieurs à la PMA. Cependant, l’enregistrement audio de l’audience indique que la requérante savait que la division générale n’avait pas en sa possession de dossiers antérieurs à la PMA. Ni la requérante ni son représentant n’ont pu obtenir ces dossiers parce qu’ils n’existent apparemment plus, selon le médecin de famille de la requérante.

La division générale a-t-elle omis de donner à la requérante la possibilité de produire les dossiers médicaux pertinents?

[37] La requérante soutient que la division générale ne lui a pas donné la possibilité de produire les dossiers médicaux pertinents. Elle voulait fournir les dossiers médicaux d’un psychiatre qu’elle a vu au début de son adolescenceNote de bas de page 17 .

[38] La requérante soutient que ces dossiers médicaux antérieurs à sa PMA étaient importants. Comme elle n’avait pas bénéficié de soins médicaux à la fin de sa PMA, elle ne pouvait pas fournir de dossiers datant de 2010 pour établir qu’elle était atteinte d’une invalidité grave à ce moment-là. Elle affirme qu’elle doit se fier aux dossiers médicaux antérieurs et postérieurs à la PMA pour prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité grave.

[39] La requérante soutient que la membre de la division générale aurait dû tenir compte de ces dossiers médicaux antérieurs à la PMA. Elle affirme que ces dossiers établissent une tendance de problèmes de santé mentale continus pour lesquels elle n’a pas reçu de soins médicaux adéquats.

[40] L’ancien représentant de la requérante a obtenu les dossiers médicaux au nom de la requérante. La requérante affirme qu’elle croyait que son représentant avait obtenu tous les dossiers médicaux pertinents, y compris les dossiers antérieurs à la PMA provenant du psychiatre qu’elle a vu il y a environ 20 ans. La requérante laisse entendre qu’elle a appris l’existence des dossiers manquants seulement après la fin de l’audience devant la division générale. La requérante soutient que la division générale aurait dû lui donner la possibilité de fournir ces documents.

[41] Habituellement, la division générale aurait le droit de supposer que les parties ont présenté tous les documents pertinents sur lesquels elles veulent s’appuyer. La division générale serait également en droit de supposer que les parties leur feraient savoir s’il y a des documents manquants ou si elles ont besoin de plus de temps pour les obtenir.

[42] Dans la présente affaire, la division générale savait qu’il n’y avait pas de dossiers médicaux datant de 1999 à 2010. Cependant, la division générale n’a pas commis d’erreur lorsqu’elle a procédé à l’audience.

[43] Le représentant de la requérante n’a pas demandé l’ajournement de l’audience afin que sa cliente et lui puissent obtenir des documents supplémentaires. Le représentant de la requérante a expliqué que Service Canada et lui avaient déjà essayé d’obtenir des dossiers antérieurs à la PMA.

[44] Plus important encore, la requérante a déclaré que son médecin de famille lui avait dit que ces dossiers n’étaient plus disponibles en raison du temps qui s’était écoulé.

[45] La division générale a également demandé à la requérante si elle avait vu des spécialistes pour un traitement médical entre 1999 et 2017. La requérante a répondu que nonNote de bas de page 18 .

[46] La division générale a été amenée à croire que les enregistrements antérieurs à la PMA n’existaient plus. Il n’était donc pas nécessaire d’ajourner l’instance pour permettre aux parties d’obtenir ces dossiers.

[47] Mis à part cela, la requérante n’avait pas besoin de se fier aux dossiers pour établir qu’elle avait des antécédents de problèmes de santé mentale. La requérante a déclaré qu’elle avait commencé à avoir des problèmes de santé mentale à un jeune âge et qu’elle avait vu un psychiatre au début de son adolescence. La division générale n’a pas rejeté le témoignage de la requérante sur ce point. En fait, la membre a trouvé la requérante franche et sincère.

[48] La division générale a signalé que les éléments de preuve médicale montraient de longs antécédents de maladie, qui ont commencé à un jeune âge et se sont poursuivis pendant la PMA et jusqu’à maintenantNote de bas de page 19 . Cependant, il est clair que la division générale a jugé que ces antécédents à eux seuls n’étaient pas suffisants pour établir l’existence d’une invalidité grave à la fin de la PMA.

[49] La division générale avait besoin de voir certains dossiers médicaux datant des alentours de 2010 qui traitaient expressément de l’état de santé de la requérante pendant la période pertinente. Les anciens dossiers antérieurs à la PMA n’auraient pas été suffisants.

[50] Autrement dit, rien ne prouve que l’absence des dossiers médicaux datant d’environ 20 ans a désavantagé la requérante. Les dossiers antérieurs à la PMA n’auraient pas permis d’établir que la requérante était devenue gravement invalide à la fin de sa PMA.

La division générale a-t-elle omis de tenir compte des éléments de preuve concernant l’expérience de dépersonnalisation et de déréalisation de la requérante?

[51] La requérante soutient que la division générale n’a pas tenu compte des éléments de preuve concernant ses épisodes de dépersonnalisation et de déréalisation.

[52] La requérante a décrit ces épisodes de dépersonnalisation et de déréalisation à la psychiatreNote de bas de page 20 . La requérante a déclaré qu’elle avait l’impression d’entrer dans un endroit sombre. Elle a déclaré avoir eu son premier épisode à environ 12 ans. Il a duré une heure. Par la suite, elle s’est sentie très déprimée pendant plusieurs mois.

[53] La psychiatre a souligné que la requérante avait souvent ce genre d’épisodes. La requérante estime qu’ils durent jusqu’à une heure, bien que son conjoint se demande s’ils durent aussi longtemps. Conduire, participer à des activités sociales ou parler avec d’autres personnes peut déclencher des épisodes. La requérante a signalé à la psychiatre qu’elle pouvait ne pas avoir d’épisodes ou qu’elle pouvait en avoir jusqu’à 20 au cours d’une semaine typiqueNote de bas de page 21 .

[54] La requérante laisse entendre que si la division générale avait tenu compte du fait qu’elle avait vécu des épisodes de dépersonnalisation et de déréalisation, elle aurait convenu que la requérante était atteinte d’une invalidité grave à la fin de sa PMA.

[55] La division générale n’a mentionné aucun de ces épisodes. Toutefois, il existe en droit une présomption générale selon laquelle un décideur tient compte de tous les éléments de preuve dont il dispose. Ainsi, le décideur n’a pas à discuter de chaque élément de preuve, ni même à y faire référence, à moins que cet élément ne soit d’une valeur probante telle que le décideur aurait dû en discuter. La preuve a une valeur probante si elle est d’une telle importance qu’elle pourrait avoir une certaine incidence sur l’issue de l’affaire.

[56] Il est clair que la principale préoccupation de la division générale était de savoir s’il y avait des dossiers datant de l’époque de la PMA qui documentaient l’état de santé de la requérante. Donc, en l’absence de dossiers à l’appui de ses affirmations, la division générale a estimé qu’elle ne pouvait pas nécessairement conclure que la requérante avait prouvé que son état était grave à la fin de sa PMA.

[57] J’estime que la division générale n’a pas commis d’erreur de droit lorsqu’elle n’a pas mentionné les épisodes de dépersonnalisation et de déréalisation de la requérante. Du point de vue de la division générale, la requérante devait produire des documents datant d’environ 2010.

[58] La division générale a simplement jugé qu’il devait y avoir des dossiers médicaux pour appuyer les allégations de la requérante. La preuve concernant les épisodes de dépersonnalisation et de déréalisation de la requérante n’aurait pas permis à elle seule d’établir que la requérante était atteinte d’une invalidité grave, sans dossiers médicaux à l’appui datant d’environ 2010.

La division générale a-t-elle omis de tenir compte de l’explication de la requérante concernant les lacunes dans la preuve?

[59] La requérante n’a pas produit de dossiers médicaux pour la période de 2010. Elle affirme avoir expliqué de façon raisonnable pourquoi il y avait des lacunes dans les dossiers médicaux. Sa grand-mère est décédée le 14 décembre 2009. Cela a eu un effet traumatisant sur elle. Elle dit que cela l’a plongée dans une grande dépression et qu’elle était incapable de sortir de chez elle ou d’interagir avec les autres. C’était très difficile pour elle de demander de l’aide ou un traitement.

[60] La requérante affirme que la division générale n’a pas tenu compte de cette preuve. Elle dit que cette preuve était importante. Elle soutient que si la division générale n’avait pas ignoré cette preuve, elle aurait accepté que ses problèmes de santé mentale aient été continus et qu’elle ait été atteinte d’une invalidité grave à la fin de sa PMA.

[61] La division générale a tenté d’aborder cette question sous la rubrique intitulée « Pourquoi il n’y a pas de preuve médicale avant le 31 décembre 2010 ».

[62] La division générale a pris note de la preuve de la requérante selon laquelle elle avait vu un psychiatre de 1998 à 1999. La division générale a pris note du témoignage de la requérante :

  • Elle n’avait pas de médecin de famille de 1999 à 2017. Il n’y en avait pas de disponible.
  • La requérante est allée dans des cliniques sans rendez-vous.
  • Pour les services d’urgence, elle est allée à l’hôpital. Par exemple, elle est allée à l’hôpital aux alentours de 2002 à 2005, puis de nouveau à 21 ans, à 22 ans et à 26 ansNote de bas de page 22 .

[63] Toutefois, la division générale n’a pas expliqué pourquoi la requérante n’avait pas produit de dossiers médicaux datant des alentours de 2010. Cependant, dans l’instance dont je suis saisie, la requérante affirme qu’il n’y a pas de dossiers pour cette période parce qu’elle n’a pas reçu d’aide ou de soins médicaux en 2010.

[64] Il importe peu que la division générale n’ait pas tenu compte de l’explication de la requérante concernant l’absence de dossiers médicaux datant de 2010, car l’explication n’aurait toujours pas prouvé qu’elle avait une invalidité grave à la fin de sa PMA. Elle devait quand même produire des éléments de preuve médicale objectifs.

[65] La division générale était prête à accepter que les dossiers datant d’après la PMA puissent être pertinents et montrer que la requérante avait une invalidité grave à la fin de sa PMA. Cependant, toute opinion reçue après la PMA devait traiter de la période de 2010, ce qui n’était pas le cas dans la présente affaire.

[66] Même si les dossiers et les opinions datant d’après la PMA avaient porté sur la période de la PMA, il devait quand même y avoir un fondement ou une base autre que les déclarations faites par la requérante. Il devait y avoir un fondement sur lequel les médecins pouvaient se faire une opinion sur l’état de santé de la requérante à la fin de sa PMA.

[67] Il y avait d’autres lacunes dans la preuve médicale, notamment en ce qui concerne la période antérieure à la PMA. Toutefois, la requérante n’a pas dit à la division générale pourquoi elle n’avait pas produit les dossiers antérieurs à la PMA. Elle n’a pas expliqué l’absence des dossiers antérieurs à la PMA parce qu’elle ne savait pas qu’ils ne faisaient pas partie du dossier d’audience. Elle s’est fiée à son représentant pour obtenir et produire ces dossiers. Par conséquent, la division générale n’aurait pas pu ignorer l’explication de la requérante concernant les lacunes dans les dossiers antérieurs à la PMA si la requérante n’avait donné aucune explication en premier lieu.

Conclusion

[68] En résumé, la division générale n’a pas ignoré des éléments de preuve, soit parce qu’ils n’existaient pas, soit parce qu’ils n’avaient aucune incidence sur l’issue de l’affaire.

[69] La division générale n’a pas non plus commis d’erreur de droit en exigeant que la requérante fournisse des éléments de preuve médicale objectifs. Les tribunaux ont toujours affirmé que les parties requérantes doivent produire des éléments de preuve médicale objectifs.

[70] La requérante affirme qu’elle ne devrait pas être tenue de respecter une norme aussi rigoureuse de production d’éléments de preuve médicale objectifs. Elle dit que son témoignage de vive voix devrait être suffisant pour prouver sa cause. Cependant, la division générale a eu raison d’exiger que la requérante produise certains documents (même s’ils ont été créés après la fin de la PMA) qui traitaient de l’état de santé de la requérante à la fin de sa PMA.

[71] L’appel est rejeté.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.