Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Résumé :

Régime de pensions du Canada – invalidité – grave – capacité à travailler – caractéristiques personnelles (employabilité réelle dans un contexte réaliste) – division d’appel – erreur de droit – jurisprudence non appliquée ou mal interprétée – réparation

La division générale (DG) a conclu que le requérant n’avait pas une invalidité grave à la fin sa période minimale d’admissibilité, soit le 31 décembre 2019. Le requérant a fait appel de cette décision auprès de la division d’appel (DA) en faisant valoir que la preuve présentée à la DG démontre qu’il avait une invalidité grave et prolongée parce qu’il avait été blessé dans un accident de la route en décembre 2016. Le ministre a convenu que la DG avait commis une erreur de droit en omettant de prendre en considération la situation personnelle du requérant quant à sa capacité de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice. Le ministre a convenu que l’appel devait être accueilli.

La DA a estimé que les deux psychologues du requérant étaient d’avis qu’il avait des limitations fonctionnelles en raison de son humeur et de son anxiété. Son trouble d’adaptation avait une incidence sur sa capacité à travailler dans un contexte réaliste. La DG n’a pas pris en compte ces aspects des opinions des psychologues lorsqu’elle a évalué si le requérant avait une invalidité grave et prolongée.

Les parties se sont entendues sur la réparation. Par conséquent, la DA a accepté les arguments des parties et a accueilli l’appel. Elle a conclu que le requérant était invalide au sens du Régime de pensions du Canada en décembre 2016, après son accident de la route. Le requérant avait droit à une pension d’invalidité à compter d’avril 2017.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : AB c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 3

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : A. B.
Représentante ou représentant : Charu Mehta
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentante : Attila Hadjirezaie

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 25 février 2021 (GP-18-2625)

Membre du Tribunal : Janet Lew
Mode d’audience : Sur la foi du dossier
Date de la décision : Le 5 janvier 2022
Numéro de dossier : AD-21-160

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. L’[appelant], A. B. (requérant), a droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada à compter d’avril 2017.

Aperçu

[2] Le requérant porte la décision de la division générale en appel. La division générale a conclu que l’invalidité du requérant n’était pas grave à la fin de sa période minimale d’admissibilitéNote de bas de page 1 , soit le 31 décembre 2019.

[3] Le requérant soutient que la division générale a commis plusieurs erreurs de droit et de fait. Il demande à la division d’appel d’accueillir l’appel et de rendre la décision que, selon lui, la division générale aurait dû rendre.

[4] Le requérant soutient que la preuve présentée à la division générale montre qu’il a une invalidité grave et prolongée depuis qu’il a été blessé dans un accident de la route, soit en décembre 2016. Le requérant demande à la division d’appel de lui accorder une pension d’invalidité.

[5] Le ministre de l’Emploi et du Développement social, l’intimé, accepte les arguments du requérant. Le ministre convient que la division générale a commis une erreur de droit en omettant de prendre en considération la situation personnelle du requérant quant à sa capacité de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice. Le ministre convient que l’appel doit être accueilli. Le ministre soutient que le requérant a droit à une pension d’invalidité à compter d’avril 2017.

Question en litige

[6] La division générale a-t-elle commis une erreur de droit en ne prenant pas en considération la situation personnelle du requérant?

Analyse

[7] La division d’appel peut modifier les décisions de la division générale si elles contiennent des erreurs de compétence, de procédure, de droit ou certains types d’erreurs de faitNote de bas de page 2 .

La division générale a-t-elle omis d’appliquer le critère de la décision VillaniNote de bas de page 3 ?

[8] Le requérant fait valoir que la division générale a omis d’appliquer le critère énoncé dans la décision Villani, car elle n’a pas examiné ses caractéristiques personnelles dans un contexte réaliste.

[9] La division générale a conclu que, pour décider si une invalidité est grave, elle doit parfois tenir compte de l’âge de la personne, de son niveau d’instruction, de ses aptitudes linguistiques, de ses antécédents de travail et de son expérience de vie. La division générale a expliqué que ces éléments permettent d’évaluer la capacité de travail de la personne dans un contexte réaliste.

[10] La division générale a écrit :

Dans la présente affaire, j’ai tenu compte du fait que le requérant avait 57 ans à la fin de sa période minimale d’admissibilité. Il est capable de parler et de comprendre l’anglais. Il a un diplôme universitaire qu’il a obtenu en Inde. Il possède également un certificat de technicien d’appareils électroménagers et un certificat de qualification délivrés au Canada. Il travaille comme technicien d’entretien et de réparation depuis 2008.

Malgré son âge, le requérant est très instruit. Il parle couramment l’anglais. Compte tenu de ses caractéristiques personnelles, j’estime qu’il n’était pas incapable de travailler dans un contexte réaliste à la fin de sa période minimale d’admissibilité. Même si je reconnais qu’il n’a pas pu retourner exercer un emploi exigeant sur le plan physique, rien ne l’aurait empêché d’essayer un travail plus léger qui tiendrait compte de ses restrictions. Il n’a pas tenté d’occuper un autre emploi depuis qu’il a [perdu son emploi]. Par conséquent, il n’a pas démontré que ses démarches pour obtenir et conserver un emploi ont échoué en raison de ses problèmes de santéNote de bas de page 4

[11] Le requérant fait valoir que la division générale n’a pas bien évalué les conséquences réelles de ses caractéristiques professionnellesNote de bas de page 5 .

[12] Le ministre soutient qu’à la lumière de la preuve et des faits propres à la présente affaire, la division générale a commis une erreur de droit en omettant de prendre en considération la situation personnelle du requérant en ce qui a trait à sa capacité de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice.

[13] Le requérant a été impliqué dans un accident de la route en décembre 2016. Il a subi des blessures au bas du dos, à l’épaule gauche, à la jambe gauche et au pied gauche. Il a également développé un trouble d’adaptation mixte avec anxiété et humeur dépressive. Il avait aussi des troubles du sommeil. Dans le questionnaire relatif aux prestations d’invalidité, le requérant a écrit qu’il avait de la difficulté à se concentrer et à focaliser son attentionNote de bas de page 6 .

[14] La compagnie d’assurance du requérant l’a dirigé vers des psychologues, qui ont rédigé des évaluations psychologiques le 11 juin 2018 et le 31 mai 2019. Ces évaluations contiennent les plus récents renseignements médicaux dont la division générale disposait pour faire son examen.

[15] Dans le premier des deux rapports, l’un des psychologues croyait que le requérant avait presque atteint le meilleur degré de rétablissement possible sur le plan psychologique. Il ne s’attendait pas à ce que le rétablissement se poursuive au-delà de huit traitements supplémentaires. Il était d’avis que le requérant présentait des limitations fonctionnelles découlant de son humeur et de son anxiétéNote de bas de page 7 . Le psychologue ne pouvait pas donner son opinion sur les possibles limitations physiques du requérant, car elles dépassaient son champ d’expertise.

[16] La compagnie d’assurance a dirigé le requérant vers une autre psychologue, qui a rédigé une évaluation le 31 mai 2019. La compagnie d’assurance a demandé à la psychologue si le requérant présentait à ce moment-là une déficience attribuable à ses blessures et, si c’était le cas, de décrire cette déficience. La psychologue a écrit que le requérant continuait à présenter :

[traduction]
des symptômes dépressifs et anxieux liés à la persistance de ses douleurs et de ses problèmes physiques, de l’anxiété liée au fait d’être dans un véhicule et des inquiétudes liées à sa santé mentale, à son humeur dépressive, à sa situation financière (à cause de l’épuisement graduel de ses économies), à sa sécurité, à d’éventuels accidents de la route, à son emploi et à son retour au travailNote de bas de page 8

[17] Les deux psychologues étaient d’avis que le requérant avait des limitations fonctionnelles en raison de son humeur et de son anxiété. Son trouble d’adaptation avait une incidence sur sa capacité à travailler dans un contexte réaliste.

[18] La division générale n’a pas pris en compte ces aspects des opinions des psychologues lorsqu’elle a regardé si le requérant avait une invalidité grave et prolongée.

Réparation

[19] Les parties s’entendent sur la réparation à accorderNote de bas de page 9 . Elles soutiennent qu’il faut accueillir l’appel et que je dois conclure que le requérant est devenu invalide au sens de l’article 42(2)(a) du Régime de pensions du Canada en décembre 2016, c’est-à-dire après son accident de la route. De plus, les parties affirment que le requérant a droit à une pension d’invalidité à compter d’avril 2017Note de bas de page 10 .

[20] J’accepte les observations des parties au sujet de la réparation. Le requérant a des problèmes de santé physique et mentale qui ont eu et continuent d’avoir des répercussions sur sa capacité à détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice.

[21] En 2018, un psychologue était d’avis que la santé mentale du requérant s’était améliorée autant que possible. Toutefois, malgré les améliorations, le requérant continuait d’avoir des limitations fonctionnelles découlant de son humeur dépressive et de son anxiété. En raison d’une combinaison de problèmes de santé physique et mentale, le requérant est incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice depuis l’accident de décembre 2016.

[22] Un an plus tard, le tableau clinique du requérant n’avait pas beaucoup changé.

[23] La personne qui représente le requérant a informé la division d’appel que la santé mentale de ce dernier s’était détériorée au point où il était incapable de lui donner des instructions ou de participer à l’instanceNote de bas de page 11 . Rien ne laisse croire que le requérant peut s’attendre à voir son état de santé s’améliorer. Son invalidité est également prolongée.

[24] J’accepte les arguments des parties au sujet de la réparation. Je conclus que le requérant est devenu invalide au sens de l’article 42(2)(a) du Régime de pensions du Canada en décembre 2016, après son accident de la route. Je conclus également qu’il a droit à une pension d’invalidité à compter d’avril 2017Note de bas de page 12 .

Conclusion

[25] L’appel est accueilli. Le requérant a droit à la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada à compter d’avril 2017.

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