Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation: CH c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2021 TSS 432

Numéro de dossier du Tribunal: GP-19-2011

ENTRE :

C. H.

Appelante (requérante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Intimé


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Section de la sécurité du revenu


Décision rendue par : Tyler Moore
Représentante de la requérante : Jennifer Langille
Date de l’audience par téléconférence : Le 4 février 2021
Date de la décision : Le 12 février 2021

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Décision

[1] La requérante, C. H., n’a pas droit à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[2] La requérante a travaillé pour la dernière fois comme auxiliaire en soins continus (ASC) à temps plein chez X de 2003 à décembre 2014, date à laquelle elle a eu un accident de voiture. Elle a affirmé qu’elle ne pouvait plus travailler à compter de cette date en raison d’une fracture au pied droit, d’une blessure ou fracture à la main droite ayant nécessité une intervention chirurgicale et d’un trouble de stress post-traumatique (TSPT).

[3] La requérante a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC le 6 juillet 2018. Le ministre d’Emploi et Développement social Canada a rejeté sa demande parce que la preuve ne permettait pas de conclure que ses limitations empêchaient toute forme de travail.

[4] La requérante avait déjà présenté une demande de pension d’invalidité du RPC le 10 février 2016. Le ministre a initialement refusé sa demande, et la requérante n’a pas demandé le réexamen de cette décision.

Ce que la requérante doit prouver

[5] Pour obtenir gain de cause, la requérante doit prouver qu’elle avait une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2016. Cette date est fondée sur ses cotisations au RPCNote de bas de page 1.

[6] Une invalidité n’est grave que si elle rend une personne incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice. Elle est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 2.

Les motifs de ma décision

[7] Je conclus que la requérante n’a pas prouvé qu’elle avait une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2016. J’ai pris cette décision en tenant compte des questions suivantes :

L’invalidité de larequérante était-elle grave?

Les limitations fonctionnelles de la requérante n’empêchaient pas toute forme de travail

[8] Ma décision quant à savoir si l’invalidité de la requérante était grave n’est pas fondée sur ses diagnostics. Elle est fondée sur la question de savoir si elle avait des limitations fonctionnelles qui l’empêchaient de travaillerNote de bas de page 3. Je dois examiner son état de santé global et réfléchir à la façon dont ses problèmes de santé ont pu nuire à sa capacité de travaillerNote de bas de page 4.

[9] J’ai trouvé que la requérante était généralement crédible. Elle a toutefois eu de la difficulté à se rappeler les dates de traitement et à distinguer les blessures subies par suite de l’accident de voiture de 2014 de celles subies par suite de l’accident de 2017. Pour cette raison, j’ai accordé plus de poids à la preuve médicale contenue dans le dossier d’audience. Je dois aussi garder à l’esprit que le deuxième accident de voiture est survenu après la date importante du 31 décembre 2016; je ne peux donc pas tenir compte de l’impact de cet accident.

[10] La requérante soutient que l’accident de décembre 2014 lui a causé une fracture de la cheville et du talon droit, une fracture de la main droite qui a nécessité une intervention chirurgicale et un coup de fouet, ainsi que de l’anxiété et de la dépression. Elle a déclaré qu’elle était restée au lit pendant près de quatre mois après l’accident, puis qu’elle était passée du déambulateur à la canne pour marcher.

[11] La requérante ne s’était pas complètement rétablie au moment de son accident de décembre 2017. Dans sa demande actuelle reçue en juillet 2018, elle a noté qu’elle avait de la difficulté à s’asseoir et à marcher pendant plus de 30 minutes, surtout à marcher sur des surfaces inégales. Elle avait des poussées de douleurs et de sensations de brûlure et de picotement qui pouvaient survenir à tout moment, même lorsqu’elle était en position assise. En outre, elle marchait en boitant et pouvait laisser tomber des objets lourds si elle les tenait dans la main droite.

[12] En décembre 2016, la requérante pouvait conduire sur de courtes distances. Elle comptait sur son mari pour l’entretien extérieur de la maison. Il aidait également à l’entretien ménager et à la cuisine. La requérante pouvait faire de la vaisselle et passer le balai et l’aspirateur dans une mesure modérée. Elle s’assoyait sur un tabouret lorsqu’elle travaillait dans la cuisine ou qu’elle pliait le linge. Elle a expliqué que sa mémoire était déficiente et qu’elle avait de la difficulté à se concentrer. Sa famille et ses amis proches lui rendaient quand même visite et elle aimait aussi faire du camping dans sa roulotte.

[13] La preuve médicale présentée par les divers médecins de famille de la requérante, le Dr Dunsinger, le Dr Karabatsos et Mme Taylor, n’étaye pas son argument selon lequel elle était incapable d’occuper régulièrement un emploi véritablement rémunérateur au 31 décembre 2016.

[14] En juin 2016, le médecin de famille de la requérante a déclaré que le plan consistait à entreprendre un programme de rétablissement fonctionnel de 10 semaines pour que la requérante puisse retourner au travail.

[15] En juillet 2016, le Dr Koshi, spécialiste en médecine physique, a déclaré que la requérante se plaignait principalement de douleurs au pied droit notamment et de pulsations. Marcher, se pencher et monter des escaliers, des bordures et des trottoirs aggravait ses douleurs. La requérante pouvait s’occuper d’elle-même et elle a été encouragée à faire plus d’efforts pour surmonter ses problèmes à la cheville et marcher.

[16] En juillet 2017, le Dr Karabatsos, chirurgien orthopédiste, a déclaré que la requérante était invalide en ce qui concerne les tâches quotidiennes plus lourdes dont elle pouvait s’occuper avant la collision et pour ce qui est de soulever des objets lourds ou de se pencher/se tourner et en ce qui concerne également une pression accrue exercée sur le pied/la cheville droite. Même si elle n’était pas apte physiquement à retourner au travail à temps plein à titre d’ASC, on estimait qu’elle était apte physiquement à accomplir les fonctions essentielles d’un travail sédentaire à temps pleinNote de bas de page 5.

[17] En juillet 2017, dans une analyse des compétences transférables de la requérante, Mme Taylor, ergothérapeute, a noté que cette dernière n’avait aucune difficulté à s’occuper de ses soins personnels, qu’elle était responsable de la préparation des repas à la maison et qu’elle était en mesure d’effectuer la majorité des travaux d’entretien à domicile.

[18] En octobre 2019, le Dr Ohson, médecin de famille, a déclaré que l’accident de décembre 2017 de la requérante avait entraîné des blessures physiques et un trouble de stress post-traumatique qui continuaient de contribuer à son incapacité de retourner au travail. Elle avait de la difficulté à se concentrer et à accomplir des tâches mentales et avait des pensées intrusives et une énergie limitée. Le Dr Ohson était d’avis qu’elle ne pouvait pas travailler en raison d’une grave maladie mentale. Le rapport a toutefois été rédigé près de trois ans après le 31 décembre 2016, et bien après le deuxième accident de voiture.

[19] En juin 2019, le Dr Dunsinger, psychologue, a signalé que la requérante avait subi des dommages psychologiques par suite de ses accidents de voiture, mais en particulier de l’accident de décembre 2017. Ce n’est qu’après l’accident de décembre 2017 qu’elle a reçu un diagnostic de syndrome de stress post-traumatique. Le Dr Dunsinger a ajouté que les problèmes passés de la requérante concernant le trouble d’adaptation et la dépression à la suite de l’accident de décembre 2014 l’avaient rendue plus vulnérable aux problèmes psychologiques après son deuxième accident.

[20] Toute détérioration importante de l’état de santé de la requérante après le 31 décembre 2016 n’est pas pertinente dans mon évaluation de sa capacité de travailler à cette date. Bien que j’admette qu’elle ne s’était pas complètement rétablie physiquement et psychologiquement de son accident de décembre 2014 au 31 décembre 2016, la preuve médicale ne permet pas de conclure que ses limitations l’empêchaient régulièrement d’occuper un emploi véritablement rémunérateur à cette date.

La requérante demeurait capable de travailler au 31 décembre 2016.

[21] Pour décider si la requérante est capable de travailler, je ne dois pas seulement tenir compte de ses problèmes de santé et de leur effet sur la fonctionnalité. Je dois aussi tenir compte de son âge, son niveau de scolarité, ses capacités linguistiques et son expérience professionnelle et personnelle. Ces facteurs m’aident à décider si elle peut travailler dans le monde réelNote de bas de page 6.

[22] La requérante était assez jeune en décembre 2016; elle avait 42 ans. Elle parlait couramment l’anglais, avait fini ses études secondaires et avait obtenu un diplôme d’ASC en 2004. Elle avait une expérience de travail dans une poissonnerie, comme aide-ménagère, comme guide touristique et comme ASC. Je conclus qu’elle possédait certaines compétences transférables. Elle avait aussi des connaissances de base en informatique.

[23] Le dernier emploi de la requérante à titre d’ASC à temps plein était exigeant physiquement et avait un rythme soutenu. La requérante devait rester debout toute la journée, soulever des objets, s’étirer, se pencher et se tourner. Je reconnais qu’elle n’a peut-être pas été en mesure de répondre aux demandes du travail d’ASC à temps plein en raison de ses limitations. Je conclus toutefois qu’en dépit de certaines limites, elle était assez jeune et elle possédait certaines compétences transférables, de sorte qu’elle était une bonne candidate pour un recyclage ou un travail de bureau adapté.

[24] La requérante n’a pas cherché de travail ni tenté de travailler ou de se recycler depuis décembre 2014. Compte tenu de l’effort de travail limité de la requérante et des recommandations médicales concernant le travail sédentaire, je ne suis pas convaincu qu’en raison de son état de santé, elle était incapable d’obtenir et de conserver un travail ne serait-ce qu’à temps partiel au 31 décembre 2016. En avril 2017, le Dr Teeluckdharry a déclaré que la requérante ne voulait pas envisager d’occuper d’autres emplois parce qu’elle voulait encore travailler comme ASC. Le critère consiste toutefois à déterminer si la requérante demeurait régulièrement capable d’occuper un emploi véritablement rémunérateur et non seulement si elle pouvait retourner à son ancien emploi.

La requérante avait reçu des traitements prudents et ne les avait pas tous épuisés au 31 décembre 2016

[25] La requérante a fait des efforts raisonnables pour suivre les conseils médicaux reçus, mais elle n’avait pas épuisé tous les traitements recommandés au 31 décembre 2016Note de bas de page 7.

[26] La requérante a essayé d’utiliser des orthèses pour les pieds et des bas de compression faits sur mesure. Elle a un neurostimulateur transcutané (NSTC) à la maison. Elle a suivi des séances de physiothérapie pour la dernière fois vers 2019. Elle n’avait pas participé à un programme de restauration fonctionnelle, essayé le Cymbalta ou reçu des injections visant les zones gâchettes/guidées au dosNote de bas de page 8. Selon les notes cliniques du médecin de famille de la requérante, cette dernière craignait de suivre le programme de restauration fonctionnelle recommandé par son physiothérapeute.

[27] Selon une analyse des compétences transférables datée de juillet 2017, la requérante prenait du Dilantin pour une épilepsie de longue date et du Lyrica. Elle n’a pris du Citalopram et du Lyrica que pendant quelques mois avant d’arrêter à cause d’effets secondaires. Elle a fait valoir qu’elle prenait également du Naproxen en décembre 2016. Elle prend actuellement du Dilantin, de l’Ativan, du Tylenol, du Paxil et du Naproxen.

[28] En avril 2016, le Dr Ohson a noté que la dépression de la requérante était bien gérée avec le Citalopram. En juin 2016, elle n’avait besoin d’Ativan que rarement pour son anxiété. Elle n’avait également eu besoin que d’un seul renouvellement de ce médicament depuis janvier 2015. Le Dr Ohson a également confirmé dans ses notes cliniques de février 2019 que le trouble de stress post-traumatique de la requérante était attribuable à l’accident de décembre 2017 et non à celui de décembre 2014. Cela ne confirme pas que la requérante souffrait d’un grave problème de santé mentale au 31 décembre 2016.

[29] La requérante a été dirigée pour la première fois en psychothérapie en 2015. Elle a déclaré qu’elle avait suivi des séances de counseling avec une certaine Mme Teed avant son deuxième accident de voiture. Les notes cliniques de Mme Teed montrent toutefois que la requérante n’a commencé un counseling qu’en janvier 2018, ou après son deuxième accident de voiture. Elle n’a consulté Mme Teed que cinq ou six fois. Le Dr Ohson l’a confirmé dans ses notes cliniques de février 2019. La requérante a aussi consulté un psychologue, le Dr Dunsinger, mais pas avant 2018. Elle suivait une thérapie tous les quelques mois.

[30] Outre le Paxil, qu’elle a commencé à prendre en 2018, la requérante ne reçoit actuellement aucun traitement pour sa santé mentale. Pour ses problèmes physiques, elle prend des médicaments, consulte un ostéopathe tous les quelques mois et consulte un massothérapeute toutes les quatre à six semaines. Elle ne fait aucun suivi auprès d’autres spécialistes. En décembre 2016, les traitements que la requérante recevait étaient encore prudents et ils n’avaient pas été épuisés.

L’invalidité de larequérante n’était pas grave

[31] L’invalidité de la requérante n’était pas grave au 31 décembre 2016. Cela signifie que je n’ai pas à décider si son invalidité était prolongée.

Conclusion

[32] Je rejette cet appel.

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