Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : HS c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 1195

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : H. S.
Représentante ou représentant : Ashwin Ramakrishnan

Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant d’une révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 30 mai 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Lianne Byrne
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 26 septembre 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant de l’appelant

Date de la décision : Le 21 octobre 2022
Numéro de dossier : GP-22-1063

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelant, H. S., a droit à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). Les paiements commencent en décembre 2018. Cette décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant avait 51 ans au 31 décembre 2017. Il a travaillé dans le domaine de la construction jusqu’en juin 2016. Il a cessé de travailler en raison de l’arthrose aux genoux, ce qui causait de la douleur, de l’enflure et des problèmes de mobilité. Il n’a pas repris le travail depuis.

[4] L’appelant a présenté une demande de pension d’invalidité du RPC le 12 novembre 2019. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelant a porté en appel la décision du ministre devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] La division générale a accueilli l’appel. Le ministre a fait appel de cette décision devant la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale. La division d’appel a accueilli l’appel et a renvoyé l’affaire à la division générale pour un réexamen. La division générale a tenu une autre audience le 26 septembre 2022.

[6] L’appelant affirme qu’il a une invalidité grave et prolongée et que la preuve médicale étaye ses dires. Il est invalide depuis 2016. Il souffre d’arthrose aux deux genoux. Ses genoux sont complètement fichus. Il utilise un déambulateur ou une canne pour se déplacer. Il compte sur sa femme pour conduire. Il a peu de chances d’améliorer son état. Son état ne fait qu’empirer. Il n’a occupé que des emplois physiquement exigeants. Il n’a aucune compétence transférable. Il n’a pas pu se recycler parce qu’il a du mal à se concentrer, qu’il a une faible capacité de lecture et qu’il est un analphabète de l’informatique.

[7] Le ministre affirme qu’il n’a pas établi qu’il souffre d’une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2017 et de façon continue par la suite. Il existe des preuves de sa capacité de travailler. Le ministre ne fait pas valoir que l’appelant est incapable d’accomplir le travail physique qu’il faisait dans son emploi précédent. Toutefois, cela ne signifie pas qu’il serait incapable d’exécuter un autre type de travail. Rien ne prouve qu’il ait déjà tenté de le faire.

Ce que l’appelant doit prouver

[8] Pour obtenir gain de cause, l’appelant doit prouver qu’il avait une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2017. Cette date est fondée sur ses cotisations au RPCNote de bas de page 1.

[9] Le Régime de pensions du Canada définit « grave » et « prolongée ».

[10] Une invalidité n’est grave que si elle rend une partie appelante régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 2.

[11] Cela signifie que je dois examiner l’ensemble des problèmes de santé de l’appelant pour voir quel effet ils ont sur sa capacité de travailler. Je dois également tenir compte de facteurs tels que son âge, son niveau de scolarité et son expérience professionnelle et personnelle antérieure. Et ce pour que je puisse obtenir une image réaliste de la gravité de son invalidité. Si l’appelant est en mesure d’effectuer régulièrement un travail qui lui permettrait de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[12] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 3.

[13] Cela signifie que l’invalidité de l’appelant ne peut comporter une date prévue de rétablissement. Il faut s’attendre à ce que l’invalidité empêche l’appelant de travailler longtemps.

[14] L’appelant doit prouver qu’il a une invalidité grave et prolongée. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités, c’est-à-dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est invalide.

Motifs de ma décision

[15] Je conclus que l’appelant était atteint d’une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2017. J’ai pris cette décision en tenant compte des questions suivantes :

  • L’invalidité de l’appelant était-elle grave?
  • L’invalidité de l’appelant était-elle prolongée?

L’invalidité de l’appelant était-elle grave?

[16] L’invalidité de l’appelant était grave. J’en suis arrivée à cette conclusion en tenant compte de plusieurs facteurs. J’explique ces facteurs ci-après.

Les limitations fonctionnelles de l’appelant affectent effectivement sa capacité de travailler

[17] L’appelant est atteint d’arthrose aux deux genoux. Toutefois, je ne peux me concentrer sur le diagnostic de l’appelantNote de bas de page 4. Je dois plutôt me demander s’il avait des limitations fonctionnelles qui l’empêchaient de gagner sa vieNote de bas de page 5. Dans le cadre de cette démarche, je dois examiner tous les problèmes de santé de l’appelant (pas seulement le problème principal) et réfléchir à leur incidence sur sa capacité de travaillerNote de bas de page 6.

[18] Je juge que l’appelant a des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travailler.

Ce que l’appelant dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[19] L’appelant affirme que son problème de santé a entraîné des limitations fonctionnelles qui affectent sa capacité de travailler. Il a occupé des emplois physiquement exigeants toute sa vie. Plus récemment, il a travaillé à temps plein de janvier 2013 à juin 2016 dans une entreprise de construction effectuant des travaux de construction. Ses fonctions comprenaient le travail du ciment et des métaux, l’encadrement, le forage et le meulage. Il a dû utiliser un marteau-piqueur. Il devait monter et descendre des collines en portant du bois. Il aimait cet emploi, mais il éprouvait de plus en plus de difficultés au fil du temps.

[20] L’appelant souffrait de douleur et d’enflure aux genoux. Il voulait continuer à travailler et trouvait des moyens d’accomplir toute sa journée de travail. Il a notamment pris des analgésiques et reçu des injections de cortisone. Il a acheté une grande paire de jeans pour pouvoir porter des genouillères sous son jean avec une autre paire de genouillères sur le dessus. Après le travail, il a passé le reste de sa nuit à faire tremper ses pieds et à les soulever. Ses problèmes aux genoux se sont aggravés en 2016.

[21] Il dit avoir dû cesser de travailler en juin 2016 parce que ses genoux étaient « fichus ». Ses genoux étaient enflés et douloureux. Il ne pouvait pas marcher sur une très grande distance ni faire grand-chose. Il peinait à se pencher. Il prenait des comprimés pour soulager la douleur la nuit pour l’aider à dormir. Il se réveillait encore beaucoup la nuit en raison de douleurs. Sa femme a dû l’aider à sortir du lit parce qu’il avait de la difficulté à en sortir.

[22] Il est allé voir son médecin pour une évaluation. On lui a fait des injections aux genoux. Son médecin lui a dit qu’il devait arrêter de travailler. Son médecin a aussi écrit à son employeur pour lui dire que l’appelant ne pouvait plus travailler. Lorsque l’appelant a questionné son médecin, ils ont discuté de sa capacité de travailler. Son médecin lui a crié qu’il doit comprendre qu’il ne peut plus travailler. Tous les médecins qu’il a consultés lui ont dit qu’il est incapable de travailler.

[23] Son état a continué de s’aggraver une fois qu’il a cessé de travailler. En décembre 2017, il souffrait de douleurs constantes aux genoux. Ses genoux étaient toujours enflés. Il utilisait une canne pour marcher. Il passait le plus clair de son temps assis sur le canapé. Il devait fréquemment se lever pour se promener parce que ses genoux s’immobilisent lorsqu’il est en position assise. Il avait installé des barres d’appui dans sa salle de bain et utilisait des tapis de douche et une chaise de douche. Sa femme conduisait la plupart du temps. Sa santé ne s’est pas améliorée au fil du temps malgré le traitement.

[24] En plus de ses problèmes aux genoux, il souffre d’apnée sévère du sommeil. Il est essoufflé. Il a pris du poids en raison de son manque de mobilité. Il a subi deux AVC en 2009 et 2010.

Ce que la preuve médicale révèle au sujet des limitations fonctionnelles de l’appelant

[25] L’appelant doit fournir une preuve médicale qui permet d’établir que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travailler au 31 décembre 2017Note de bas de page 7.

[26] La preuve médicale étaye les propos de l’appelant. Le rapport médical du RPC a été rempli le 23 octobre 2019 par le Dr Ewaen Igbinidu, médecin de famille. Le requérant souffre d’arthrose aux deux genoux, ce qui entraîne une restriction importante des mouvements de ses genoux et de la marche. Sa capacité de marcher est limitée. Il a d’autres comorbidités comme l’obésité qui compliquent son état.

[27] Le 1er décembre 2015, le Dr Barry Cayen, chirurgien orthopédiste, a écrit que le requérant avait de nombreuses années d’antécédents de douleurs au genou droit supérieures à celles du genou gauche. Un traitement non opératoire a été recommandé pour son genou droit pendant qu’il continue à effectuer des travaux de construction lourds. Une fois qu’il est en mesure d’obtenir un emploi avec des tâches plus légères, il peut poursuivre une arthroplastie totale du genou droit.

[28] Le Dr Cayen a déclaré de nouveau le 13 décembre 2016 que l’appelant aura besoin d’une arthroplastie totale du genou droit. Toutefois, étant donné son jeune âge, il survivra à une arthroplastie primaire du genou et aura probablement besoin d’une révision à l’avenir. Par conséquent, une tâche sans levage a été suggérée après l’opération. Le Dr Cayen a également fait remarquer que l’appelant a des antécédents d’AVC du côté gauche dans le passé et qu’il a subi une certaine faiblesse des membres supérieurs.

[29] Dans un rapport d’évaluation des capacités fonctionnelles daté du 5 octobre 2016, Steve Brown, physiothérapeute, et Alan Sze, kinésiologue, ont écrit que l’appelant a démontré des tolérances de force dans la catégorie de force sédentaire légère. Toutefois, je note que l’appelant n’a pas d’expérience dans le travail sédentaire ou léger. Je note également que son état s’est détérioré après la date du présent rapport.

[30] Il y a plusieurs rapports au dossier du Dr Jack Sussman, médecin de famille. Ils comprenaient les documents suivants :

  • Dans un formulaire d’assurance rempli le 15 décembre 2015, on peut lire qu’il souffre d’arthrose sévère au genou droit et de douleurs importantes au genou. Ses restrictions comprennent la marche sur des surfaces inégales, la position debout et la marche de façon générale. Il n’a aucune restriction pour la conduite et la position assise. Ses fonctions devront être allégées en permanence. Il aura assurément besoin d’une arthroplastie totale des genoux, mais il devra exécuter seulement des travaux légers par la suite.
  • Dans un rapport daté du 6 mars 2016, le Dr Sussman résume sa compréhension des conseils du Dr Cayen. Plus précisément, le Dr Sussman écrit que l’appelant a été dirigé vers un chirurgien orthopédiste. Celui-ci estimait qu’il bénéficierait d’une intervention chirurgicale complète du genou, mais que s’il continuait de tenter d’accomplir son travail physique habituel, l’intervention se traduirait prématurément par un échec. On lui a conseillé de chercher à exécuter des tâches plus légères, ce qu’il n’est pas parvenu à faire.
  • Le 6 mars 2018, à peine quelques mois après la fin de la PMA, le Dr Sussman a écrit que l’appelant souffre de douleurs graves au genou droit qui ont progressé depuis quelques années. Il est atteint d’arthrose aux deux genoux, mais plus sévèrement au genou droit. Le Dr Cayen estimait qu’une arthroplastie totale du genou échouerait prématurément s’il continuait à accomplir son travail physique habituel. L’appelant n’a pu prendre des dispositions pour accomplir des tâches plus légères. Le Dr Sussman estime que son travail lourd précédent l’a complètement handicapé.

[31] Le Dr Roderick Martin, chirurgien orthopédiste, a déclaré après la fin de la PMA le 16 décembre 2019 que l’appelant souffre d’arthrose bilatérale des genoux. Il a aussi noté que l’appelant avait subi un accident vasculaire cérébral en 2009. Il souffre d’hypertension, de maladie vasculaire, d’apnée obstructive du sommeil et d’angine. Un rendez-vous lui a été fixé pour une arthroplastie totale du genou droit.

[32] La preuve médicale confirme que l’arthrose bilatérale du genou de l’appelant (plus grave à droite qu’à gauche) l’a empêché d’effectuer un travail exigeant physiquement, y compris des travaux de construction au 31 décembre 2017.

[33] J’examinerai maintenant si l’appelant a suivi les conseils médicaux.

L’appelant a suivi les conseils médicaux

[34] Pour recevoir une pension d’invalidité, un appelant doit suivre les conseils médicauxNote de bas de page 8. S’il ne le fait pas, il doit avoir une explication raisonnable. Je dois également examiner l’effet, le cas échéant, que les conseils médicaux auraient pu avoir sur l’invalidité de l’appelantNote de bas de page 9.

[35] En l’espèce, l’appelant a subi de nombreux traitements dans le but d’améliorer sa santé. Il a mis à l’essai divers analgésiques, dont le Tylenol 3 et le Lenoltec. Il utilise de l’onguent A-535. Il a consulté un physiothérapeute, qui lui a dit que la physiothérapie ne lui serait pas utile. Il a aussi essayé l’acupuncture. Il a fait retirer le liquide de ses genoux à de nombreuses reprises. Il a subi des injections de cortisone aux deux genoux qui l’aident à se déplacer. Il a essayé de nombreuses genouillères différentes, comme le recommandent ses médecins. Il porte régulièrement ces genouillères pour obtenir du soutien.

[36] Une arthroplastie totale du genou droit a été recommandée. Cette intervention chirurgicale avait été réservée pour une date plus rapprochée, mais elle a été annulée. Il existe une divergence concernant la personne qui a annulé l’intervention. L’appelant nie avoir annulé l’intervention chirurgicale. Il affirme qu’elle a été annulée par son médecin en raison de la pandémie de COVID-19. À mon avis, il importe peu de savoir pourquoi l’intervention a été retardée parce qu’au départ, le Dr Cayen avait recommandé que l’appelant continue de recevoir un traitement conservateur. Le Dr Cayen craignait que, compte tenu de son jeune âge, il survive à une arthroplastie du genou et que l’état de son genou doive être révisé à l’avenir. Je n’accepte donc pas qu’un retard dans la réalisation d’une arthroplastie totale du genou indique que l’appelant n’a pas respecté les recommandations de traitement.

[37] Néanmoins, l’appelant a subi une intervention chirurgicale au genou droit en mai 2022. Il est resté six jours à l’hôpital. Il a reçu son congé avec une marchette, qu’il utilise encore. Il affirme que son genou droit n’a pas guéri correctement. Il continue d’éprouver beaucoup de douleur et son genou craque de plus belle. Son médecin pense qu’il pourrait avoir besoin d’une autre opération au genou droit. Il attend de voir si l’opération du genou droit sera couronnée de succès avant de subir une opération au genou gauche.

[38] L’appelant a suivi les conseils médicauxNote de bas de page 10.

[39] Je dois maintenant décider si l’appelant peut effectuer sur une base régulière d’autres types de tâches. Pour pouvoir être qualifiées de sévères, les limitations fonctionnelles de l’appelant doivent l’empêcher de gagner sa vie dans n’importe quel type d’emploi, pas seulement dans son emploi habituelNote de bas de page 11.

L’appelant ne peut pas travailler dans le monde réel

[40] Lorsque je décide si l’appelant peut travailler, je ne peux pas simplement examiner ses problèmes de santé et leur incidence sur ce qu’il peut faire. Je dois également tenir compte de facteurs comme :

  • son âge
  • son niveau de scolarité
  • ses compétences linguistiques
  • son expérience de travail et de vie antérieure.

[41] Ces facteurs m’aident à décider si l’appelant peut travailler dans le monde réel, c’est-à-dire s’il est réaliste de dire qu’il peut travaillerNote de bas de page 12.

[42] Je conclus que l’appelant ne peut pas travailler dans le monde réel. Il avait 51 ans au 31 décembre 2017. Il a une onzième année. Il n’a aucune habileté en informatique. Il n’a occupé que des emplois exigeants physiquement, notamment dans les domaines de la construction, de la peinture par pulvérisation et de la construction de ponts. Il n’a jamais occupé un emploi sédentaire ou léger.

[43] L’appelant ne peut pas exercer les types d’emplois qu’il a occupés dans le passé en raison de ses importantes restrictions de mobilité. Le ministre le reconnaît. Il a écrit qu’il ne fait pas valoir que l’appelant est incapable d’accomplir du travail physique comme il l’avait fait dans son emploi précédent. Toutefois, il est plaidé que cela ne signifie pas qu’il serait incapable d’effectuer un autre type de travail et qu’il n’y a aucune preuve qu’il a déjà tenté d’exécuter un autre type de travail.

[44] Le ministre a souligné plusieurs rapports qu’il soumet comme preuve de la capacité de travailler. Ces documents ont également été mentionnés dans la décision de la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale, qui a déclaré qu’ils étaient suffisamment importants pour faire l’objet de discussions. Je traiterai donc précisément de chacun de ces documents dans ces motifs pour expliquer pourquoi je ne les considère pas comme une preuve de capacité de travail.

[45] Les premiers documents mentionnés sont les rapports du Dr Sussman et du Dr Cayen. Le 1er décembre 2015, le Dr Cayen a suggéré que l’arthroplastie totale du genou droit puisse faire l’objet d’une discussion une fois que l’appelant sera en mesure d’exercer des fonctions plus légères. Il ressort clairement du témoignage de l’appelant qu’il n’a pas obtenu des fonctions plus légères à ce moment-là et qu’il a continué d’occuper son emploi habituel. Il ressort également du témoignage de l’appelant que son état s’est aggravé après la date du rapport, de sorte qu’il a dû cesser complètement de travailler en juin 2016.

[46] Le rapport suivant du Dr Cayen est daté du 13 décembre 2016, soit après que l’appelant a cessé de travailler. Ce rapport indique que l’appelant aura besoin d’une arthroplastie totale du genou droit. Toutefois, étant donné son jeune âge, il survivra à une arthroplastie primaire du genou et aura probablement besoin d’une révision à l’avenir. Par conséquent, une tâche sans levage a été suggérée après l’opération. Il importe de noter que le Dr Cayen n’indique pas que l’appelant est capable d’accomplir des tâches plus légères à la date du présent rapport. Le Dr Cayen affirme plutôt qu’il ne devrait pas subir l’opération tant qu’il ne pourra pas obtenir des tâches plus légères après celle-ci. De plus, l’état de l’appelant a continué de s’aggraver après la date du présent rapport. Par conséquent, je n’accepte pas que les rapports du Dr Cayen constituent une preuve de capacité de travail.

[47] De même, je n’accepte pas que les rapports du Dr Sussman datés du 15 décembre 2015, du 27 juin 2016 et du 6 mars 2018 démontrent la capacité de travailler au 31 décembre 2017.

[48] Le Dr Sussman a rempli un formulaire d’assurance le 15 décembre 2015. On note qu’il souffre d’arthrose sévère au genou droit et de douleurs importantes au genou. Ses restrictions comprennent la marche sur des surfaces inégales, la position debout et la marche de façon générale. Aucune restriction n’est notée pour la position assise et la conduite. Ses fonctions devront être allégées en permanence. Il aura assurément besoin d’une arthroplastie totale des genoux, mais il devra exécuter seulement des travaux légers par la suite. Il ressort clairement du témoignage de l’appelant et des autres rapports médicaux au dossier que l’état de l’appelant s’est considérablement aggravé après la date du présent rapport.

[49] Dans son rapport daté du 6 mars 2016, le Dr Sussman indique clairement qu’il résume sa compréhension des conseils du Dr Cayen. Plus précisément, le Dr Sussman écrit que l’appelant a été dirigé vers un chirurgien orthopédiste. Celui-ci estimait qu’il bénéficierait d’une intervention chirurgicale complète du genou, mais que s’il continuait de tenter d’accomplir son travail physique habituel, l’intervention se traduirait prématurément par un échec. On lui a conseillé de chercher à exécuter des tâches plus légères, ce qu’il n’est pas parvenu à faire. Le Dr Sussman n’affirme pas que l’appelant est capable de reprendre des fonctions plus légères. Il a simplement fourni un résumé de sa compréhension des conseils du Dr Cayen.

[50] Dans le rapport daté du 27 juin 2016, le Dr Sussman a écrit que l’appelant s’était absenté du travail en raison de douleurs croissantes au genou. Le Dr Sussman a écrit que l’appelant avait été aiguillé vers un chirurgien orthopédiste qui estimait qu’il serait candidat à une arthroplastie totale du genou droit, mais que s’il continuait à accomplir le travail physique lourd qu’il fait maintenant, la procédure serait un échec. Le 15 décembre 2015, le Dr Sussman a dit à l’appelant qu’il aurait besoin de fonctions permanentes allégées, puis qu’il serait candidat à une intervention chirurgicale totale du genou. Il a été revu le 1er juin 2016. Aucune fonction légère n’était disponible. Il utilisait une attelle et une canne pour se déplacer. Il accomplirait des tâches plus légères si des dispositions peuvent être prises à cet égard pour lui. Bien qu’il soit noté qu’il bénéficierait de tâches plus légères, il ressort clairement du témoignage de l’appelant et des autres rapports au dossier que l’état de santé de l’appelant s’est détérioré après la date du présent rapport.

[51] Pour ces raisons, je ne considère pas les rapports du Dr Sussman comme une preuve de capacité de travail au 31 décembre 2017.

[52] Je vais maintenant examiner l’évaluation des capacités fonctionnelles datée du 5 octobre 2016. Dans ce rapport, MM. Brown et Sze ont écrit que, dans l’ensemble, il a démontré des tolérances de force dans la catégorie de force sédentaire légère. J’ai accordé très peu de poids à ce rapport parce que l’état de l’appelant s’est aggravé après la date du présent rapport. Il ressort clairement du témoignage de l’appelant qu’en date du 31 décembre 2017, il avait une capacité très limitée de marcher et avait besoin d’utiliser une canne. Il ne pouvait pas rester assis pendant de longues périodes sans se lever pour se déplacer, sinon ses genoux se bloquaient. Sa femme conduisait la plupart du temps. Cela démontre une détérioration de ses capacités fonctionnelles après la date du présent rapport. C’est ce que confirme le Dr Lee, qui a écrit que ses symptômes invalidants se sont progressivement aggravés depuis le début.

[53] J’examinerai ensuite le formulaire de restrictions à la participation de l’Ontario, que le Dr Sussman a rempli le 16 mai 2018. Le Dr Sussman a écrit que l’appelant a des limites en ce qui concerne le levage, la marche, la flexion et la position debout. Il est confirmé que l’appelant a une capacité très limitée de se déplacer et qu’il utilise une canne. Comme l’a souligné la division des appels, le Dr Sussman ne coche pas les limites concernant la position assise, la capacité de concentration, l’énergie et l’endurance, la motricité fine, le fonctionnement de la machinerie et la conduite.

[54] En ce qui concerne la position assise, l’appelant a reconnu dans son témoignage qu’il a passé la majeure partie de la journée en position assise sur le divan parce qu’il lui était très difficile de se tenir debout et de marcher. Toutefois, il a aussi témoigné que ses genoux devenaient douloureux et se bloquaient, ce qui l’obligerait à se lever et à se déplacer. En ce qui concerne la conduite automobile, l’appelant pouvait encore conduire sur de courtes distances. Toutefois, sa femme conduisait la plupart du temps parce qu’il lui était difficile de conduire compte tenu de ses problèmes de genou. Ce pourrait même être un problème de sécurité si ses genoux se bloquaient.

[55] Il convient de noter que même le rapport d’évaluation des capacités fonctionnelles indiquait des intervalles de 20 à 45 minutes en position assise avant que l’appelant doive se lever. De plus, l’examen de 12 mois de l’assureur daté du 14 février 2017 souligne qu’une position assise prolongée aggrave sa douleur.

[56] Par conséquent, je n’accepte pas que le défaut du Dr Sussman de cocher les limites concernant la capacité de l’appelant de s’asseoir ou de conduire constitue une preuve de la capacité de travailler. Lorsque la preuve, dans son ensemble, est examinée, il est clair que les genoux de l’appelant deviennent douloureux et peuvent se bloquer lorsqu’il reste assis trop longtemps et qu’il ne conduit que sur de courtes distances en raison de ses genoux.

[57] Enfin, j’examinerai les documents d’assurance, qui comprennent ce qui suit :

  • Un registre des appels téléphoniques daté du 28 juillet 2017 résumant les principaux points discutés avec l’appelant. L’appelant a notamment déclaré qu’il avait déjà conduit un camion. Il a déclaré qu’il ne peut pas conduire un véhicule à transmission manuelle. À l’audience, l’appelant a nié avoir déjà été camionneur et n’a pas énuméré la conduite de camion lorsqu’il a été interrogé sur ses antécédents professionnels. Toutefois, même s’il possédait de l’expérience en conduite de camions, j’accepte son témoignage selon lequel, en décembre 2017, ses genoux se bloquent lorsqu’il conduit et selon lequel il ne peut parcourir que de courtes distances. Je note également que l’appelant a des limites bien documentées en ce qui concerne la montée des escaliers. Il est donc raisonnable de s’attendre à ce qu’il éprouve également de la difficulté à monter dans un camion et à descendre d’un camion. Cela ne semble pas être un travail qu’il peut exécuter et son assureur n’a pas poursuivi cette option pour lui au-delà de cet appel téléphonique. Par conséquent, je ne considère pas cela comme une preuve de capacité de travailler.
  • Une enquête sur le marché du travail datée du 17 mai 2016 énonce les exigences d’emploi d’un répartiteur, ce qui comprend l’utilisation d’un ordinateur.
  • Une lettre de l’assureur datée du 5 janvier 2017 indiquait qu’il a été déterminé que l’appelant devrait être capable d’occuper un autre emploi, comme celui de répartiteur.
  • Un examen sur 12 mois de l’assureur, daté du 14 février 2017, indique qu’il ne peut marcher que 1 ou 2 pâtés de maisons, même avec une canne et une attelle. Il n’a constaté aucune amélioration. Il est capable de se tenir debout moins de 20 minutes et ne peut marcher que 10 minutes à la fois. Il a des problèmes à monter et descendre les escaliers. Il bénéficierait de tâches plus légères. On remarque que la marche, la montée d’un escalier et une position assise et debout prolongée aggravent sa douleur. L’évaluation des capacités fonctionnelles d’octobre 2016 est de nouveau citée en référence pour démontrer qu’il est dans la catégorie sédentaire à légère. Comme il a été mentionné précédemment, son état s’est aggravé après la date du présent rapport. De plus, l’assureur a fait remarquer que le poste de répartiteur n’était peut-être pas un poste de rechange solide pour lui parce qu’il exige des compétences de base en informatique et que les compétences en informatique de l’appelant sont inconnues. L’assureur ajoute que s’il fait appel de la décision de l’assureur, il devrait être envoyé pour une autre évaluation des capacités fonctionnelles. L’assureur doute de la capacité de l’appelant à travailler comme répartiteur étant donné que ses compétences en informatique sont inconnues. L’appelant a témoigné à l’audience qu’il n’a pas de compétences en informatique. Par conséquent, je n’accepte pas que la conclusion de l’assureur selon laquelle il pourrait travailler comme répartiteur constitue une preuve de capacité de travail.
  • Le plan d’évaluation et de gestion du portefeuille de l’assureur daté du 28 juillet 2017 indique que l’appelant possède des certificats de chauffeur de chariot élévateur et de transpalette. Le poste de répartiteur est désigné comme autre emploi pour l’appelant. Il est à noter qu’aucune formation n’est requise et qu’il peut être formé en cours d’emploi. Sa capacité à accomplir ce travail semble fondée sur le rapport d’évaluation des capacités fonctionnelles d’octobre 2016, qui a révélé qu’il est en mesure d’effectuer un travail de sédentaire à léger. Toutefois, comme il a été mentionné précédemment, l’état de l’appelant s’est aggravé après la date du présent rapport. De plus, comme il a été mentionné précédemment, l’appelant n’a pas les compétences en informatique pour cet emploi. Par conséquent, je n’accepte pas que ce document témoigne de sa capacité de travailler.

[58] Au 31 décembre 2017, l’état de l’appelant s’était aggravé depuis la conclusion de l’évaluation des capacités fonctionnelles selon laquelle il pouvait exercer des fonctions sédentaires ou légères. Je note qu’il n’a jamais occupé un emploi sédentaire, voire léger. Compte tenu de son âge, de ses études, de son expérience de travail et de ses compétences en informatique, il serait peu probable qu’il obtienne un emploi sédentaire ou un emploi léger, même sans tenir compte de son état de santé. Il lui faudrait se recycler pour effectuer des travaux sédentaires ou légers, ce qui est irréaliste compte tenu de ses importants problèmes de mobilité et de sa difficulté à rester assis longtemps. Je conclus que l’appelant n’était pas employable dans un contexte réel au 31 décembre 2017. Je conclus également qu’il n’y a aucune preuve de capacité de travailler au 31 décembre 2017.

[59] Je conclus que l’invalidité du requérant était grave au 31 décembre 2017.

L’invalidité de l’appelant était-elle prolongée?

[60] L’invalidité de l’appelant était prolongée.

[61] Les affections de l’appelant ont commencé en 2013 et se sont aggravées au fil du temps. Cet état s’est poursuivi depuis et il se poursuivra probablement indéfinimentNote de bas de page 13.

[62] Le Dr Igbinidu affirme que son état est susceptible de se détériorer. Le Dr Lee a écrit qu’il est peu probable que son état invalidant s’améliore dans un délai raisonnable de sorte qu’un retour au travail réussi soit possible. Ses symptômes invalidants se sont progressivement aggravés depuis leur apparition et devraient être d’une durée indéterminée. Il a subi une intervention chirurgicale au genou droit qui, jusqu’ici, s’est avérée infructueuse. Il pourrait avoir besoin d’une deuxième intervention chirurgicale au genou droit. Il attend de voir s’il y a une amélioration au genou droit avant de subir une intervention chirurgicale au genou gauche.

[63] L’appelant a déjà subi une intervention chirurgicale au genou droit sans en tirer d’avantages jusqu’à maintenant. Il pourrait devoir subir une deuxième intervention chirurgicale au genou droit. On ignore pour l’instant l’issue de ces interventions. Toutefois, le Dr Igibnidu est d’avis qu’il est peu probable que son état invalidant s’améliore dans un délai raisonnable de sorte qu’un retour au travail réussi sera possible.

[64] J’accepte également le témoignage de vive voix de l’appelant selon lequel il souffre de douleurs continues au genou et de limitations fonctionnelles qui se sont aggravées au fil du temps.

[65] L’opinion du Dr Igbinidu et le témoignage de l’appelant montrent que son invalidité est prolongée depuis longtemps et d’une durée indéterminée. Je conclus que l’invalidité de l’appelant était prolongée au 31 décembre 2017.

Début des paiements

[66] L’appelant avait une invalidité grave et prolongée en décembre 2017, lorsqu’il a déclaré que sa mobilité était considérablement limitée en raison de douleurs et d’enflures aux genoux.

[67] Toutefois, en vertu du Régime de pensions du Canada, une appelante ou un appelant ne peut être considéré comme invalide plus de 15 mois avant que le ministre reçoive sa demande de pension d’invaliditéNote de bas de page 14. Par la suite, il y a une période d’attente de quatre mois avant le début des paiementsNote de bas de page 15.

[68] Le ministre a reçu la demande de l’appelant en novembre 2019. Le requérant est donc considéré comme devenu invalide en août 2018.

[69] Le paiement de sa pension débute en décembre 2018.

Conclusion

[70] Je conclus que l’appelant a droit à une pension d’invalidité du RPC parce que son invalidité est grave et prolongée.

[71] Cela signifie que l’appel est accueilli.

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