Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : AD c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 1203

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale — Section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : A. D.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision datée du 23 avril 2021 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : James Beaton
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 9 novembre 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Témoin de l’appelant
Date de la décision : Le 15 novembre 2022
Numéro de dossier : GP-21-1659

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] Le requérant, A. D., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] Le requérant a 41 ans. Il a travaillé pour la dernière fois comme coordonnateur de la sécurité. Il a subi de multiples opérations chirurgicales, notamment une opération à l’oreille et une opération cardiaque d’urgence vers 1991, mais également une opération chirurgicale cardiaque en 1999 et en mars 2018. Il a tenté de reprendre son emploi de coordonnateur de la sécurité en juin 2018, mais il s’est retrouvé en congé d’invalidité de longue durée en octobre 2018Note de bas page 1. Il n’a pas travaillé depuis.

[4] Le requérant a demandé une pension d’invalidité du RPC le 25 mars 2020. Il a fondé sa demande sur l’anxiété et un certain nombre de problèmes de santé. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. Le requérant a porté la décision du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] Le requérant affirme que ses problèmes de santé le rendent complètement incapable de travailler.

[6] Le ministre affirme que la preuve médicale n’appuie pas le fait que les problèmes de santé du requérant sont aussi graves qu’il le prétend. Il n’y a aucune preuve qu’il a essayé certains traitements, sinon de leurs effets. Le ministre estime que le requérant peut toujours travailler, et qu’il n’a simplement pas essayé.

Ce que le requérant doit prouver

[7] Pour avoir gain de cause, le requérant doit prouver qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2019. Cette date est établie en fonction des cotisations qu’il a versées au RPCNote de bas page 2.

[8] Le Régime de pensions du Canada définit les termes « grave » et « prolongée ».

[9] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas page 3.

[10] Cela signifie que je dois examiner l’ensemble des problèmes de santé du requérant pour voir leur effet global sur sa capacité de travail. Je dois aussi tenir compte de ses antécédents (y compris son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de vie). Ces éléments me permettent de voir de façon réaliste si son invalidité est grave ou non. Si le requérant est régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permet de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[11] Une invalidité est prolongée si elle doit durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décèsNote de bas page 4.

[12] Par conséquent, l’invalidité du requérant ne peut pas avoir une date de rétablissement prévue. Il faut s’attendre à ce que l’invalidité tienne le requérant à l’écart du marché du travail pendant longtemps.

[13] Le requérant doit prouver qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est invalide.

Questions que je dois examiner en premier

J’ai accepté le document du requérant soumis en retard

[14] La veille de l’audience, le requérant a envoyé un document de six pages en réponse aux observations du ministreNote de bas page 5. Même s’il a été présenté en retard, je l’ai accepté parce qu’il contenait seulement des renseignements que le requérant aurait pu dire à l’audience de toute façon.

Les motifs de ma décision

[15] Je conclus que le requérant n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2019.

L’invalidité du requérant était-elle grave?

[16] L’invalidité du requérant n’était pas grave en date du 31 décembre 2019. J’ai tiré cette conclusion en examinant plusieurs facteurs. J’explique ces facteurs ci-dessous.

Les limitations fonctionnelles du requérant nuisaient à sa capacité de travail

[17] Le requérant est anxieux et a divers problèmes de santé physique. Cependant, je ne peux pas me concentrer sur les diagnostics du requérantNote de bas page 6. Je dois plutôt vérifier s’il a des limitations fonctionnelles qui l’empêchaient de gagner sa vie au plus tard le 31 décembre 2019Note de bas page 7. Dans ce contexte, je dois examiner tous ses problèmes de santé (pas seulement le plus important) et évaluer leurs effets sur sa capacité de travailNote de bas page 8.

[18] Je conclus que le requérant avait des limitations fonctionnelles avant le 31 décembre 2019.

Ce que la preuve révèle sur les limitations fonctionnelles du requérant

[19] Le requérant affirme que ses problèmes de santé ont entraîné des limitations fonctionnelles qui ont nui à sa capacité de travail avant le 31 décembre 2019. Il doit fournir des éléments de preuve médicale à l’appui de cette affirmationNote de bas page 9. Je vais maintenant examiner ce que la preuve dans son ensemble révèle au sujet de chacun de ses problèmes de santé et de ses limitations fonctionnelles.

L’opération de 1991

[20] Vers 1991, alors que le requérant avait 10 ans, il a subi une opération chirurgicale à l’oreille, suivie d’une opération cardiaque d’urgence. À ce moment-là, les médecins ont découvert qu’il avait un problème cardiaque. Son problème cardiaque est stableNote de bas page 10.

[21] Le requérant affirme que son tympan de l’oreille gauche a été perforé lors d’une opération chirurgicale de l’oreille. En conséquence, les bruits forts et les bruits à une certaine fréquence sont douloureux. Il porte donc souvent des bouchons d’oreille ou des coquilles sur ses oreillesNote de bas page 11.

[22] Dans l’ordre chronologique, le premier élément de preuve médicale que le requérant a fourni au Tribunal date de janvier 2017Note de bas page 12. Il n’y a aucune preuve médicale qui daterait de l’opération elle-même. Cependant, j’accepte le récit du requérant sur ce qui s’est passé.

L’opération de 1999

[23] En 1999, quelques semaines avant d’avoir 18 ans, le requérant a subi une autre opération chirurgicale cardiaque. Au cours de cette opération, il a subi une blessure aux cordes vocales, et lorsque le chirurgien lui a retenu le bras, son nerf radial gauche a été coincé. De plus, il a subi des lésions au cuir chevelu. Il dit avoir aussi subi d’autres lésions nerveuses aux pieds, au coude, à l’épaule et au dos. Il a commencé à souffrir de douleurs thoraciques.

[24] Par conséquent, le requérant affirme ce qui suit :

  • Sa voix craque s’il parle plus d’une heure.
  • Il a le syndrome du canal carpien à la main gauche (il est droitier). Il peut tirer avec sa main, mais il ne peut pas pousser. Il peut appuyer sur les touches d’un clavier, mais il est plus difficile de les soulever de nouveau. Il tape donc lentement.
  • En raison de ses lésions au cuir chevelu, c’est inconfortable de porter quoi que ce soit sur la tête.
  • Son endurance est généralement limitée. Conjugué à la douleur chronique, cela nuit à sa capacité de s’asseoir, de monter des escaliers, de s’agenouiller, de se pencher, de soulever des objets et de les transporter. De plus, il a mal à l’épaule lorsqu’il marche.

[25] Encore une fois, il n’y a aucune preuve médicale qui daterait de l’opération. Cependant, j’accepte ce que le requérait dit au sujet de sa voix et des douleurs au cuir chevelu parce que ces limitations sont liées à des détails précis de l’opération, lesquels sont fiables. Il n’y a aucune preuve pour les contredire. Cependant, je ne crois pas que le fait de ne pas être à l’aise en portant quelque chose sur la tête constitue une limitation fonctionnelle (il devait le faire lorsqu’il travaillait comme coordonnateur de la sécuritéNote de bas page 13).

[26] Je crois que le syndrome du canal carpien du requérant est un problème qui date d’avant le 31 décembre 2019, toutefois celui-ci n’est pas constant. Après l’intervention chirurgicale, le requérant a suivi une thérapie pour rétablir une certaine fonctionnalité au nerfNote de bas page 14. Son médecin de famille, le Dr El-Hajj, a écrit plusieurs années plus tard en décembre 2018 que le syndrome du canal carpien était un problème depuis [traduction] « quelques annéesNote de bas page 15 ». Il n’y a aucune autre mention de ce problème dans la preuve médicale.

[27] Le requérant croit que l’hypertension contribue également à son manque d’endurance et à ses limitations physiques. Je vais maintenant aborder la question de l’hypertension.

Hypertension

[28] À l’âge de 24 ans, le requérant a reçu un diagnostic d’hypertension. Il a dit que cela entraîne constamment des maux de tête, ainsi qu’une ou deux fois par semaine des migraines avec aura (effet de kaléidoscope) accompagnées de vision floue. Cela le rend irritable, faible et essoufflé lorsqu’il doit faire des efforts.

[29] Il y a peu d’éléments de preuve médicale qui appuient ce que le requérant dit au sujet des effets de son hypertension.

[30] Je n’admets pas que le requérant avait des maux de tête ou des migraines qui nuisaient à sa capacité de travail avant le 31 décembre 2019. En juillet 2020 (après le 31 décembre 2019), il a dit à son neurologue, le Dr Jeerakathil, qu’il avait des maux de tête et des migraines qui empiraient. Cependant, le tomodensitogramme de sa tête était tout à fait normalNote de bas page 16. Il n’y a aucune autre mention de maux de tête ou de migraines dans la preuve médicale.

[31] De même, je ne pense pas qu’il soit irritable ou ait d’autres difficultés à interagir avec les gens, du moins pas en raison de ses problèmes de santé. En septembre 2020, il a dit à son cardiologue, le Dr Taylor, qu’il devenait irritable en faisant des effortsNote de bas page 17. Cependant, il n’y a aucune autre mention de l’irritabilité ou de la difficulté à interagir avec les gens dans le reste de la preuve médicale. Les propos du requérant ne sont pas appuyés par des observations objectives.

[32] Je n’accepte pas non plus que son endurance et ses autres limitations physiques soient aussi importantes qu’il le prétend. Il a dit au Dr El-Hajj qu’il se sentait faible et était souvent essoufflé, mais le Dr Taylor croit que le requérant peut (et devrait) tout de même participer à des activités de conditionnement physique. Selon le Dr El-Hajj, le requérant avait seulement de la difficulté à monter des escaliers, à marcher de longues distances et à soulever plus de 15 livres. Bien qu’il ait déclaré qu’il ne pouvait faire aucune forme d’exercice autre que s’étirer et marcher brièvement, le requérant a dit au Dr Jeerakathil qu’il pratiquait le jiu-jitsu [traduction] « modérément » avec l’un de ses filsNote de bas page 18.

[33] On ne peut pas dire que l’importance des limitations qui sont présentées dans la preuve médicale correspond à ce que décrivent le requérant et les membres de sa familleNote de bas page 19. La preuve médicale ne doit pas nécessairement énumérer précisément toutes les limitations fonctionnelles qu’une partie requérante prétend avoirNote de bas page 20. Toutefois, je crois que ce que la preuve médicale ne montre pas peut être pertinent en soi, surtout lorsqu’une partie requérante déclare avoir des limitations importantes.

[34] Je ne vois aucune preuve de ces limitations, ni en ce qui concerne les traitements suivis ni dans les observations objectives des médecins. Bien que la douleur soit une expérience subjective, la faiblesse et l’essoufflement peuvent être mesurés objectivement. J’accorde beaucoup d’importance à l’évaluation objective du Dr El-Hajj, laquelle mentionne seulement les escaliers, la marche et le fait de soulever des objets pesant plus de 15 livres comme limitations fonctionnelles.

L’opération de 2018

[35] En 2018, le requérant a reçu une valve cardiaque et il a commencé à prendre de la warfarine.

[36] Il dit que le bruit de tic-tac de la valve l’empêche parfois de dormir, interrompt sa concentration et le rend mal à l’aise autour des gens. Il arrive qu’il ne dorme pas pendant des jours et il est anxieux à l’idée de quitter la maison. La warfarine fait en sorte qu’il peut facilement se faire des ecchymoses et il saigne de façon incontrôlable s’il se blesse. Il a de la difficulté à trouver le bon mot dans une conversation (ce qu’on appelle [traduction] « la difficulté à trouver ses mots »). Sa mémoire à court terme n’est pas très bonne. Il ne se souvient plus des codes de sécurité dont il avait besoin lorsqu’il travaillait.

[37] Il a dit à ses médecins qu’il avait de la difficulté à dormir et qu’il se sentait fatigué; j’accepte que ce soient des problèmes pour luiNote de bas page 21. Toutefois, je pense que le requérant a exagéré ses troubles de sommeil. Il a déclaré qu’il lui arrive de ne pas dormir du tout quelques jours à la fois. Malgré cela, comme nous le verrons plus loin, il a pu travailler à temps plein pendant environ cinq mois. Je ne pense pas qu’il aurait pu travailler à temps plein pendant une période prolongée s’il bénéficiait de si peu de sommeil.

[38] J’admets que le bruit de tictac de sa valve cardiaque a une incidence sur sa concentration.

[39] On a diagnostiqué son d’anxiété en septembre 2019Note de bas page 22. J’admets donc que le requérant se sent anxieux lorsqu’il se trouve autour d’autres gens.

[40] En effet, le requérant prend de la warfarine. Cependant, le fait qu’il est porté à se faire des ecchymoses ou à saigner de façon incontrôlable s’il se blesse ne signifie pas nécessairement qu’il a une limitation qui nuit à sa capacité de travailler.

[41] La preuve médicale n’appuie pas ce que le requérant dit au sujet de sa difficulté à trouver ses mots et ses légers problèmes de mémoire. Le Dr Jeerakathil n’a trouvé aucune preuve de ces problèmes. L’examen neurologique était normal même si le requérant a refusé de terminer le test. De plus, il a continué à effectuer [traduction] « des tâches cognitives complexes comme composer de la musique pour de multiples instruments ». Le Dr Jeerakathil a conclu qu’il pouvait y avoir [traduction] « un léger effet cumulatif » sur sa mémoire à la suite de multiples interventions chirurgicales, mais qu’en fin de compte, ses symptômes étaient subjectifs et probablement dus à l’anxiétéNote de bas page 23. Lorsque j’examine le rapport du Dr Jeerakathil dans son ensemble, je constate que le requérant a de légers problèmes de mémoire, mais qu’il n’a aucune difficulté à trouver ses mots — le Dr Jeerakathil l’aurait remarqué si c’était le cas.

Les autres problèmes de santé

[42] Le requérant affirme être atteint du syndrome du côlon irritable et d’un trouble obsessionnel-compulsif (ou de tendances obsessionnelles compulsives)Note de bas page 24. Aucune preuve médicale ne démontre cela. Par conséquent, je ne peux accepter qu’il ait ces problèmes de santé.

Le résumé de mes conclusions sur les limitations fonctionnelles du requérant

[43] En somme, je conclus que le requérant a les limitations fonctionnelles suivantes depuis le 31 décembre 2019 :

  • Il est sensible aux bruits forts et aux bruits à certaines fréquences.
  • Sa voix craque s’il parle pendant une heure.
  • Il ne peut pas pousser avec sa main gauche (parfois).
  • Il tape lentement et ne peut pas taper longtemps (parfois).
  • Il a de la difficulté à monter les escaliers.
  • Il ne peut pas marcher sur de longues distances.
  • Il ne peut pas soulever ou transporter plus de 15 livres.
  • Il se sent fatigué.
  • Il a de la difficulté à se concentrer.
  • Il est anxieux autour d’autres gens.
  • Sa mémoire à court terme est légèrement affectée.

[44] Je vais maintenant vérifier si le requérant a suivi les conseils médicaux.

Le requérant n’a pas suivi tous les conseils médicaux

[45] Pour recevoir une pension d’invalidité, la partie requérante doit suivre les conseils médicauxNote de bas page 25. Si une partie requérante ne suit pas les conseils médicaux, elle doit avoir une explication raisonnableNote de bas page 26. Si elle n’a pas d’explication raisonnable, je dois aussi évaluer les effets potentiels de ces conseils sur l’invalidité de la personneNote de bas page 27.

[46] Le requérant n’a pas suivi tous les conseils médicaux. Il n’a pas fourni d’explication raisonnable pour ne pas avoir suivi les conseils.

[47] Après avoir terminé sa réadaptation cardiaque en août 2018, le requérant a déclaré qu’il n’avait [traduction] « pas l’intention de continuer à faire de l’activité physique de façon organisée », malgré le fait qu’on l’avait incité à mener un style de vie plus actifNote de bas page 28. Il a déclaré qu’il ne pouvait pas faire de l’activité physique parce que son employeur ne lui accordait pas le temps pour le faire. Rien ne prouve qu’il aurait dû prendre congé pour faire de l’activité physique. Même si c’était nécessaire, rien ne prouve qu’il a augmenté son niveau d’activité physique lorsqu’il a cessé de travailler en octobre 2018.

[48] De plus, en septembre 2020, le Dr Taylor [traduction] « a souligné, aussi gentiment que possible, l’importance d’améliorer sa condition physique et il lui a conseillé d’augmenter graduellement, mais constamment, ses activités de conditionnement physique régulièresNote de bas page 29 ». Le requérant soutient qu’il ne peut rien faire de plus que de courtes promenades et des étirementsNote de bas page 30. Comme je l’ai déjà mentionné, le rapport du Dr Taylor n’appuie pas ces restrictions.

[49] En mai 2019, le Dr Taylor lui a recommandé d’aller dans une clinique de traitement de douleur chronique et d’essayer la gabapentine pour soulager sa douleurNote de bas page 31. Le requérant a déclaré qu’il ne s’y est pas rendu parce que les cliniques ne l’acceptaient pas pendant la COVID-19 vu qu’il ne pouvait pas se faire vacciner en raison de son problème cardiaque.

[50] En toute déférence, l’explication du requérant n’a aucun sens. La recommandation du Dr Taylor a été formulée près d’un an avant que la COVID-19 ne devienne un problème. Il n’y a aucune preuve dans le dossier du requérant qui montre qu’on l’a aiguillé vers une clinique de traitement de douleur chronique ou qu’une clinique l’a rejeté. Les notes du Dr El-Hajj ne mentionnent pas les cliniques et n’indiquent pas non plus que le statut vaccinal du requérant a posé problème. Selon la prépondérance des probabilités, je juge qu’il est plus probable que le requérant n’a pas donné suite à la recommandation du Dr Taylor.

[51] Le requérant a déclaré qu’il n’a pas essayé la gabapentine parce que son épouse prenait ce médicament et qu’il ne voulait pas subir les mêmes effets secondaires. Cela était déraisonnable parce que deux personnes ne réagiront pas nécessairement de la même façon au même médicament.

Le requérant peut travailler dans un contexte réaliste

[52] Je dois maintenant vérifier si le respect de ces conseils médicaux aurait pu avoir une incidence sur l’invalidité du requérant. J’estime que le fait de suivre les conseils aurait pu avoir une incidence sur l’invalidité du requérant. S’il avait suivi les conseils, son endurance (fatigue) et ses limitations physiques auraient pu s’améliorer. Ses limitations restantes ne l’auraient probablement pas empêché d’être régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permettrait de gagner sa vie.

[53] Pour être graves, les limitations fonctionnelles du requérant doivent l’empêcher de gagner sa vie dans n’importe quel type d’emploi, et pas seulement dans son emploi habituelNote de bas page 32. Pour décider si le requérant est capable de travailler, je ne peux pas me contenter d’examiner ses problèmes de santé et leurs effets sur ce qu’il peut faire. Je dois aussi tenir compte des facteurs suivants :

  • son âge;
  • son niveau d’instruction;
  • ses aptitudes linguistiques;
  • ses antécédents de travail et son expérience de vie.

[54] Ces éléments m’aident à décider si le requérant est capable de travailler dans un contexte réaliste, c’est-à-dire s’il est réaliste de dire qu’il peut travaillerNote de bas page 33.

[55] Je conclus que le requérant est capable de travailler dans un contexte réaliste. Il était capable de travailler le 31 décembre 2019. Il avait seulement 38 ans à l’époque, et il avait un diplôme d’études secondaires et un certificat d’agent national de la sécurité de la construction. Il parlait couramment l’anglais. Il a travaillé comme conseiller en sécurité ou coordonnateur de la sécurité pendant près d’une décennie. Il a déclaré qu’après sa dernière opération, il était encore capable de faire certaines choses au travail. Il faisait des tâches légères, semblables à un travail de bureau, et apprenait aux autres comment faire les parties de son travail qu’il ne pouvait pas faire. Cela lui permettait d’éviter les tâches exigeantes sur le plan physiqueNote de bas page 34.

[56] Selon son témoignage, il était censé travailler à temps partiel, mais son employeur ne lui a pas accordé la permission de le faire. Au fil du temps, son employeur l’a obligé à effectuer des tâches plus exigeantes sur le plan physique. Il est ensuite parti en congé d’invalidité de longue durée.

[57] Le requérant n’aurait peut-être pas été en mesure de répondre aux exigences de son employeur. Cependant, je crois qu’il aurait pu continuer à faire des tâches légères de façon prévisible, du moins à temps partiel, pour un autre employeur. Compte tenu de ses études et de son expérience, ce travail aurait probablement été véritablement rémunérateurNote de bas page 35. D’ailleurs, il avait trouvé par le passé des façons de composer avec bon nombre de ses limitations fonctionnelles; il avait réussi à travailler malgré elles.

[58] Par exemple, il porte souvent des bouchons d’oreille. Il parle tout bas pour préserver sa voix. Il est capable d’utiliser un ordinateur, mais il tape lentement. Il fait de son mieux pour s’adapter à ses légers problèmes de mémoire en prenant des notesNote de bas page 36. Il est anxieux autour d’autres personnes, mais il a déclaré qu’il participait à des sessions d’étude de la Bible en groupe — cela démontre que son anxiété ne l’empêche pas d’interagir avec des gens à l’extérieur de sa maison. Je ne pense pas que le fait d’être fatigué (dans la mesure où cela est causé par un mauvais sommeil) l’aurait empêché de travailler à temps partiel, puisqu’il a travaillé à temps plein pendant environ cinq mois avant de s’arrêter. Je ne pense pas que son manque de concentration l’aurait empêché de travailler même en tenant compte de ces autres limitations.

[59] En conclusion, j’estime qu’en date du 31 décembre 2019, les limitations fonctionnelles du requérant ne l’auraient pas empêché d’être régulièrement capable d’effectuer un travail quelconque qui lui permettrait de gagner sa vie. Son invalidité n’était donc pas grave à ce moment-là.

Conclusion

[60] Je conclus que le requérant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC parce que son invalidité n’était pas grave le 31 décembre 2019 ou avant cette date. Comme j’ai conclu que son invalidité n’était pas grave, je n’ai pas eu à vérifier si elle était prolongée.

[61] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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