Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Résumé :

L’intimée est une ancienne ouvrière d’usine de 57 ans. Elle a quitté son emploi en 2005 en raison de douleurs aux genoux et au dos, mais elle est retournée travailler à titre de préposée saisonnière aux commandes en 2013, avant de s’arrêter pour de bon en 2016, après l’apparition d’un syndrome du canal carpien. L’intimée a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada en mai 2019. Le ministre de l’Emploi et du Développement social (le ministre) a rejeté la demande parce que, à son avis, l’intimée n’avait pas démontré qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée pendant sa période minimale d’admissibilité, qui a pris fin le 31 décembre 2007. De plus, le ministre n’a trouvé aucune preuve d’une invalidité qui aurait commencé pendant la période « calculée au prorata » de l’intimée, qui s’est déroulée du 1er janvier 2016 au 31 octobre 2016.

L’intimée a fait appel de la décision du ministre à la division générale. Celle-ci a accueilli l’appel, en concluant que l’intimée était atteinte d’une invalidité grave et prolongée depuis 2005. Elle a accepté le fait que l’intimée ne pouvait pas travailler dans un contexte réaliste parce qu’en plus de ses divers problèmes de santé, elle avait un niveau d’instruction, des compétences et une maîtrise de l’anglais qui étaient limités. La division générale a conclu que, même si l’intimée avait enregistré des gains découlant d’un travail véritablement rémunérateur en 2013, en 2014 et en 2015, elle était néanmoins incapable d’effectuer un travail régulier pendant ces années. Devant la division d’appel, les parties ont conclu une entente. La division d’appel a accepté l’entente des parties et a accueilli l’appel conformément à l’entente.

Le Régime de pensions du Canada associe l’invalidité à un seuil de revenu. Selon l’article 68.1 du Règlement sur le Régime de pensions du Canada, un traitement ou un salaire provenant d’une occupation « véritablement rémunératrice » est égal ou supérieur à la somme annuelle maximale qu’une personne pourrait recevoir à titre de pension d’invalidité. Pour trois des quatre années allant de 2013 à 2016, l’intimée a gagné plus que cette somme. Dans sa décision, la division générale a mentionné le seuil de revenu au passage. Toutefois, elle n’a pas expliqué comment une personne incapable de travailler régulièrement en 2005 a pu effectuer un travail véritablement rémunérateur pendant trois ans et demi une décennie plus tard. La division d’appel a conclu que le défaut de la division générale d’appliquer l’article 68.1 du Règlement sur le Régime de pensions du Canada constituait une erreur de droit. Le fait qu’elle n’ait pas abordé des renseignements très importants avait violé un principe de justice naturelle. La division d’appel a conclu que l’intimée était devenue invalide en octobre 2016. Il s’agit du dernier mois, conformément à la disposition relative au calcul au prorata, au cours duquel l’intimée était couverte contre l’invalidité par le Régime de pensions du Canada. Comme le ministre a reçu sa demande en mai 2019, l’intimée est réputée invalide à compter de février 2018. Ainsi, la date de début du versement de sa pension d’invalidité demeure juin 2018.

Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : Ministre de l’Emploi et du Développement social c RR, 2023 TSS 269

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentante : Rebekah Ferriss
Partie intimée : R. R.
Représentant : R. K.

Décision portée en appel : Décision rendue par la division générale le 30 août 2022
(GP-21-1156)

Membre du Tribunal : Neil Nawaz
Date de la décision : Le 22 février 2023
Numéro de dossier : AD-22-886

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli. La division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que la prestataire, R. R., était devenue invalide en 2005. J’ai décidé de rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, soit de conclure que la prestataire est invalide à compter d’octobre 2016. Toutefois, la date de début de sa pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC) demeure juin 2018.

Aperçu

[2] La prestataire est une ancienne travailleuse d’usine de 57 ans qui vit au Canada depuis 1994. Elle a quitté son emploi en 2005 en raison de douleurs aux genoux et au dos. En 2013, elle a recommencé à travailler : elle a occupé plusieurs emplois de ramasseuses de commandes saisonnières. Lorsqu’elle a commencé à souffrir du syndrome du canal carpien en 2016, elle a cessé de travailler définitivement.

[3] La prestataire a demandé une pension d’invalidité du RPC en mai 2019. Le ministre a rejeté la demande parce qu’il estimait que la prestataire n’avait pas démontré qu’elle avait une invalidité grave et prolongée pendant sa période minimale d’admissibilité, laquelle a pris fin le 31 décembre 2007Note de bas de page 1. Le ministre n’a pas trouvé dans la preuve quelque chose qui montrerait que l’invalidité a commencé pendant la période « calculée au prorata » de la prestataire, soit du 1er janvier 2016 au 31 octobre 2016Note de bas de page 2.

[4] La prestataire a porté la décision du ministre en appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a tenu une audience par vidéoconférence et a accueilli l’appel. Elle a conclu que la prestataire avait une invalidité grave et prolongée à compter de 2005. Elle a admis qu’elle ne pouvait pas travailler dans un contexte réaliste puisque, outre ses divers problèmes de santé, elle avait peu d’instruction, d’aptitudes et de compétences linguistiques en anglais. Même si la prestataire a touché un salaire véritablement rémunérateur en 2013, en 2014 et en 2015, la division générale a conclu qu’elle était néanmoins incapable de travailler régulièrement pendant ces années.

[5] Le ministre a demandé la permission de faire appel de la décision de la division générale. Il a affirmé que la division générale a commis des erreurs de droit et de fait lorsqu’elle a décidé que la prestataire avait une invalidité grave et prolongée en 2005.

[6] En décembre 2022, j’ai accordé au ministre la permission de faire appel parce que j’estimais qu’il avait soulevé un argument défendable.

[7] Dans l’intervalle, les parties ont conclu un accordNote de bas de page 3. Elles m’ont demandé de préparer une décision qui reflète cet accord.

Accord

[8] L’accord des parties est rédigé comme suit :

[traduction]

Les parties conviennent que la division d’appel devrait accueillir le présent appel parce que la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de fait et de droit au sens du RPC et des articles 58(1)(b) et (c) des anciennes dispositions de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

La division générale a commis une erreur de droit en omettant d’appliquer l’article 68.1 du Règlement sur le Régime de pensions du Canada et en ignorant le fait que la prestataire avait touché un salaire dépassant le seuil véritablement rémunérateur en 2013, en 2014 et en 2015. Elle a conclu que la prestataire était invalide à compter de 2005. La division générale a également commis une erreur de fait sur ce point, car elle a conclu que la prestataire était invalide depuis 2005, malgré la preuve au dossier démontrant qu’elle avait une occupation véritablement rémunératrice de 2013 à 2015.

Donc, aux termes de l’article 39(1) des Règles de procédure du Tribunal de la sécurité sociale, des articles 59 et 64(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les parties demandent à la division d’appel de rendre une décision fondée sur les conditions suivantes :

  1. (a) La prestataire est réputée invalide au sens de l’article 42(2)(a) du RPC à compter de sa période minimale d’admissibilité calculée au prorata, soit octobre 2016.
  2. (b) La prestataire peut être réputée invalide au plus tôt en février 2018, le versement des prestations commençant en juin 2018 conformément à l’article 69(1) du RPC, car elle a présenté sa demande en mai 2019.
  3. (c) Procéder de cette façon est à la fois rentable et efficace pour les deux parties et conforme à l’article 8(1) des Règles de procédure du Tribunal de la sécurité sociale. Analyse

[9] J’accepte l’accord des parties pour les raisons suivantes.

[10] La preuve montre que la prestataire a touché les revenus suivants après la fin de sa période minimale d’admissibilité :

2013 — 14 695 $

2014 — 23 594 $

2015 — 39 253 $

2016 — 4 778 $Note de bas de page 4

La prestataire a déclaré qu’elle s’était forcée à travailler, à l’aide de médicaments, malgré la douleur, jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus le faireNote de bas de page 5.

[11] Comme le ministre l’a souligné, le Régime de pensions du Canada associe l’invalidité à un seuil de revenu. Selon l’article 68.1 du Règlement sur le Régime de pensions du Canada, les traitements ou salaires « véritablement rémunérateurs » sont égaux ou supérieurs à la somme annuelle maximale qu’une personne pourrait recevoir à titre de pension d’invalidité. Pendant trois des quatre années énumérées ci-dessus, les revenus de la prestataire ont dépassé cette somme.

[12] Dans sa décision, la division générale a mentionné en passant le seuil de revenu. Toutefois, elle n’a pas expliqué comment une personne incapable de travailler régulièrement en 2005 a pu occuper un emploi véritablement rémunérateur pendant 3 ans et demi une décennie plus tard. La division générale a commis une erreur de droit lorsqu’elle a omis d’appliquer l’article 68.1. Elle a aussi enfreint un principe de justice naturelle lorsqu’elle a omis d’aborder des renseignements particulièrement importants.

[13] Étant donné les raisons ci-dessus, la décision de la division générale doit être annulée. Je peux rendre la décision que la division générale aurait dû rendre. Je conclus que la prestataire est devenue invalide en octobre 2016; selon la disposition relative au calcul proportionnel, il s’agit du dernier mois au cours duquel elle bénéficiait d’une protection du RPC en cas d’invalidité.

Conclusion

[14] L’appel est accueilli conformément à l’accord conclu entre les parties. La division générale a commis une erreur lorsqu’elle a conclu que la prestataire avait une invalidité grave et prolongée en 2005.

[15] J’ai décidé de substituer ma décision à celle de la division générale et de déclarer la prestataire invalide à compter d’octobre 2016. Comme le ministre a reçu sa demande en mai 2019, la prestataire est réputée invalide à compter de février 2018Note de bas de page 6. La date de début de sa pension d’invalidité demeure donc juin 2018Note de bas de page 7.

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