Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : RN c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2023 TSS 42

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : R. N.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 26 avril 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Connie Dyck
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 16 janvier 2023
Personne présente à l’audience : Partie appelante
Date de la décision : Le 19 janvier 2023
Numéro de dossier : GP-21-2293

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, R. N., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant a travaillé à Postes Canada pendant 25 ans. Il triait et livrait le courrier. Il a cessé de travailler en avril 2016 pour les raisons suivantes :

  • fatigue;
  • dépression;
  • hypertension artérielle;
  • bronchopneumopathie chronique obstructive.

[4] L’appelant a demandé une pension d’invalidité du RPC le 12 septembre 2018Note de bas de page 1. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelant a fait appel de cette décision devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] L’appelant affirme qu’il ne peut pas satisfaire aux exigences de soulever des charges et demeurer debout à Postes CanadaNote de bas de page 2. Il est également essoufflé lorsqu’il fait un effort.

[6] Le ministre affirme que l’appelant ne peut probablement pas faire son travail habituel. Cependant, le ministre croit que l’appelante peut régulièrement faire un autre travail convenableNote de bas de page 3.

Ce que l’appelant doit prouver

[7] Pour gagner son appel, l’appelant doit prouver qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en date du 31 décembre 2019. Ses cotisations au RPC servent à établir cette dateNote de bas de page 4.

[8] Le Régime de pensions du Canada définit les adjectifs « grave » et « prolongée ».

[9] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 5.

[10] Cela signifie que pour décider si l’invalidité de l’appelant est grave, je dois examiner l’effet global de ses problèmes de santé sur sa capacité de travailler. Je dois aussi tenir compte de facteurs, comme son âge, son niveau de scolarité, son expérience de travail et son expérience personnelle. Ces facteurs me font voir sa situation de façon réaliste. Ils m’aident à décider si son invalidité est grave. Si l’appelant est régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permet de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[11] Une invalidité est prolongée si elle doit durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 6.

[12] Par conséquent, aucun rétablissement ne doit être prévu. Pour être prolongée, l’invalidité de l’appelant doit l’obliger à quitter le marché du travail pendant très longtemps.

[13] L’appelant doit prouver qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée selon la prépondérance des probabilités. En d’autres mots, il doit me convaincre qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est invalide.

Motifs de ma décision

[14] Je conclus que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en date du 31 décembre 2019.

L’invalidité de l’appelant était-elle grave?

[15] L’appelant n’était pas atteint d’une invalidité grave. J’ai basé ma conclusion sur plusieurs facteurs. Les voici.

Les limitations fonctionnelles de l’appelant n’ont aucune incidence sur sa capacité à occuper un emploi convenable

[16] L’appelant est atteint des problèmes de santé suivants :

  • affection respiratoire réactionnelle;
  • hypertension artérielle;
  • diverticulose chronique;
  • anxiété avec dépression.

[17] Toutefois, je ne peux pas me concentrer sur les diagnostics de l’appelantNote de bas de page 7. Je dois plutôt voir si des limitations fonctionnelles l’empêchaient de gagner sa vieNote de bas de page 8. Dans cette optique, je dois tenir compte de tous les problèmes de santé de l’appelant (pas juste du plus important) et de leur effet sur sa capacité à travaillerNote de bas de page 9.

[18] Je conclus que l’appelant n’a pas de limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité de travailler.

Ce que l’appelant dit de ses limitations fonctionnelles

[19] L’appelant a dit qu’il n’utilise pas de médicaments ou d’inhalateurs pour traiter son affection respiratoire réactionnelle (bronchopneumopathie chronique obstructive). Il m’a dit que ce problème de santé est le même aujourd’hui que lorsqu’il a cessé de travailler. Il a dit avoir de la difficulté à respirer quand il monte les escaliers. Il n’utilise ni déambulateur ni canne.

[20] Il prend trois médicaments différents pour son hypertension artérielle. Il a indiqué que sa médecin de famille (la Dre Begum) lui avait dit qu’il devait revenir seulement un an plus tard pour faire un suivi.

[21] L’appelant a dit que son problème digestif (diverticulose chronique) était un effet secondaire de sa hernie. Il m’a dit que ce problème s’améliore grandement avec le temps. Il y a une nette amélioration, mais il n’est toujours pas aussi à l’aise qu’avant l’intervention chirurgicale pour sa hernie.

[22] En ce qui concerne son anxiété et sa dépression, l’appelant a dit qu’il ne prend aucun antidépresseur. Il m’a dit que les médicaments lui donnaient mal à la tête et lui causaient des maux d’estomac. Il a dit à son médecin qu’il avait arrêté ses médicaments. Il ne voit pas de thérapeute et ne suit aucun autre traitement en santé mentale.

Ce que la preuve médicale révèle sur les limitations fonctionnelles de l’appelant

[23] L’appelant doit fournir des éléments de preuve médicale qui appuient le fait que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travail en date du 31 décembre 2019Note de bas de page 10. La preuve indique que l’appelant ne peut pas occuper un emploi physiquement exigeant. Cependant, elle montre qu’il peut faire un autre travail qui est convenable.

Les problèmes respiratoires de l’appelant ne l’empêcheraient pas d’occuper un emploi convenable

[24] L’appelant a cessé de travailler en avril 2016 en raison de difficultés respiratoires (bronchopneumopathie chronique obstructive)Note de bas de page 11. L’essoufflement était pire à l’effort, et lorsqu’il était exposé à des fumées et l’air froid. Il ne pouvait pas marcher plus de 10 minutes sans s’arrêter. Il pouvait rester debout pendant un maximum de cinq minutes. Il était incapable de grimper, de tendre le bras, de pousser et de tirer.

[25] L’appelant utilisait un vaporisateur nasal et, en février 2017, sa respiration s’améliorait. Sa toux n’était pas aussi grave ou fréquente et son thorax était dégagéNote de bas de page 12.

[26] Les symptômes de l’appelant se sont améliorés de 50 % en avril 2017Note de bas de page 13. Le pneumologue (le Dr Homik) a dit que c’était parce que l’appelant utilisait un vaporisateur stéroïdien nasal et un rinçage nasal salin. Il avait aussi réglé le problème de moisissure dans sa maison. L’appelant n’avait plus de graves crises de toux. C’était la meilleure façon dont il s’était senti depuis un an.

[27] L’appelant avait des limitations physiques, notamment lorsqu’il fallait transporter des objets, les soulever, pousser, tirer, se tenir debout et rester assis pendant plus de 30 minutes. Le médecin de famille de l’appelant (le Dr Kemkaren) croyait qu’il pouvait retourner au travail malgré ces restrictions physiques. Le médecin dit que l’appelant pouvait commencer à travailler en faisant deux quarts de travail consécutifs par semaine. Il était d’avis que ce serait une bonne chose pour l’appelantNote de bas de page 14.

[28] L’appelant a subi des examens physiques annuels en juillet 2019 et en mars 2022. La médecin de famille actuelle de l’appelant (la Dre Begum) n’a relevé aucune préoccupation concernant sa respiration. Il n’a reçu aucune prescription de médicament ou d’inhalateur. Il ne suit aucun traitement pour sa bronchopneumopathie chronique obstructive.

Les médicaments contrôlent la tension artérielle de l’appelant

[29] La Dre Begum a prescrit un médicament contre l’hypertension artérielle en juillet 2018Note de bas de page 15. En septembre de cette année-là, la tension artérielle de l’appelant se situait dans la plage normaleNote de bas de page 16. En mai 2019, sa tension était de 140/90. La Dre Begum a dit à l’appelant de faire un suivi si sa tension artérielle dépassait la plage viséeNote de bas de page 17. En juin 2019, sa tension artérielle est tombée à 130/80Note de bas de page 18. En mars 2022, la tension artérielle de l’appelant était de 160/100, mais il ne prenait aucun médicament. La Dre Begum a expliqué qu’il était important que l’appelant prenne ses médicaments, qu’il suive un régime pauvre en sel et fasse de l’exerciceNote de bas de page 19. La preuve médicale montre que lorsque l’appelant prend régulièrement ses médicaments, sa tension artérielle est bien gérée.

Le problème de diverticulose s’est considérablement amélioré

[30] L’appelant a subi une intervention chirurgicale pour sa hernie en février 2016Note de bas de page 20. Il avait des douleurs abdominales intermittentes. Ses intestins avaient habituellement une tendance à la constipationNote de bas de page 21. L’appelant a subi une coloscopie en septembre 2018. Elle a révélé une diverticulose modérément grave. Le gastroentérologue (le Dr Abej) a suggéré à l’appelant de passer une autre coloscopie trois ans plus tard. Il a également suggéré plus de fibres et un laxatifNote de bas de page 22.

[31] En juin 2019, l’appelant a dit au ministre que ses [traduction] « problèmes digestifs » étaient des plus préoccupants pour lui. Ils entraînaient des visites fréquentes aux toilettes, interrompaient son sommeil et créaient des besoins en apport alimentaireNote de bas de page 23.

[32] L’appelant m’a dit que ses problèmes digestifs étaient un effet secondaire de sa hernie. Cependant, avec le temps, ils s’améliorent grandement depuis juin 2019. Il a dit qu’il ne se sentait toujours pas aussi à l’aise qu’avant l’opération de la hernie, mais que les choses se sont beaucoup améliorées.

L’anxiété ou la dépression s’est améliorée

[33] L’appelant est atteint d’anxiété et de dépression. Il prenait du Wellbutrin en 2016. Il a fait quatre semaines de rééducation fonctionnelle en août 2017. L’appelant présentait une amélioration de ses symptômes de fatigue, de dépression et de douleurNote de bas de page 24.

[34] En juin 2018, l’appelant a cessé de prendre de la Venlafaxine. Son médecin de famille (le Dr Kemkaran) lui a demandé s’il prenait son Wellbutrin. L’appelant a passé un examen complet en juillet 2019 et en mars 2022Note de bas de page 25. Ses fonctions cognitives et motrices étaient complètement intactes. La Dre Begum n’a mentionné aucun symptôme d’anxiété ou de dépression. L’appelant m’a dit qu’il ne prenait pas d’antidépresseurs. Il ne consultait pas non plus de thérapeute et ne faisait pas de thérapie.

[35] La preuve médicale ne démontre pas que l’appelant avait des limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité d’occuper un emploi convenable en date du 31 décembre 2019. Par conséquent, il n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave.

L’appelant est capable de travailler dans un contexte réaliste

[36] Mon analyse ne peut pas s’arrêter aux problèmes médicaux et à leur effet fonctionnel. Pour décider si l’appelant est capable de travailler, je dois aussi tenir compte des facteurs suivants :

  • son âge;
  • son niveau de scolarité;
  • ses aptitudes linguistiques;
  • son expérience de travail et de vie.

[37] Ces facteurs m’aident à savoir si l’appelant est capable de travailler dans un contexte réaliste. Autrement dit, est-il réaliste de dire qu’il peut travaillerNote de bas de page 26?

[38] Je conclus que l’appelant est capable de travailler dans un contexte réaliste. En décembre 2018, il avait 57 ans. Il pourrait donc avoir de la difficulté à trouver un nouvel emploi, surtout s’il requiert une longue période de formation. Cependant, l’appelant a terminé sa 12e année. Il parle couramment l’anglais. Il a occupé plusieurs types d’emplois à Postes Canada, y compris le travail avec des machines automatisées. Il a des compétences limitées en informatique, mais tous les emplois n’exigent pas l’utilisation d’un ordinateur.

[39] L’appelant a certaines restrictions physiques, mais son médecin croyait qu’il avait la capacité de retourner faire un travail qui requiert des tâches légèresNote de bas de page 27.

L’appelant n’a pas essayé de trouver un emploi convenable et de le garder

[40] S’il est réaliste qu’il travaille, l’appelant doit montrer qu’il a essayé de trouver et de garder un emploi. Il doit aussi montrer que ses efforts ont échoué à cause de sa santé.Note de bas de page 28 Une personne fait des efforts pour trouver et garder un emploi si, par exemple, elle suit une nouvelle formation ou cherche un emploi adapté à ses limitations fonctionnellesNote de bas de page 29.

[41] Il dit qu’il ne peut pas retourner travailler à Postes Canada parce qu’il ne peut pas satisfaire aux exigences physiques. Il affirme être d’accord avec le ministre pour dire qu’il y a du travail qu’il est en mesure de faire. Cependant, il n’est pas motivé et son âge et ses compétences ne le favorisent pas.

[42] À l’audience, il a dit qu’il pouvait probablement faire un quart de travail de quatre heures s’il avait peu de stress et de mouvement, mais qu’il aurait besoin d’une pause. Il peut rester assis ou debout pendant 30 à 45 minutes avant de commencer à avoir mal au dos.

[43] Il m’a dit qu’il lui faudrait plusieurs mois pour acquérir l’endurance nécessaire pour travailler pendant cinq jours consécutifs. Il a expliqué qu’une fois qu’il aurait établi une routine, sa condition physique allait probablement augmenter. Mais il n’est pas motivé à essayer cela. Il m’a dit que s’il trouvait un emploi convenable, il l’accepterait. Cependant, il reçoit sa pension et il n’est pas motivé à aller acquérir de nouvelles compétences.

[44] L’appelant a déclaré qu’il n’a aucune raison de chercher du travail. Il a reçu une assurance de la Sun Life qui était satisfaisante et il touche maintenant une pension de retraite.Note de bas de page 30

[45] L’appelant n’a pas fait d’efforts pour travailler. Par conséquent, je ne peux pas conclure qu’il était atteint d’une invalidité grave en date du 31 décembre 2019.

Conclusion

[46] Je conclus que l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du RPC, car il n’était pas atteint d’une invalidité grave. Étant donné que l’invalidité doit obligatoirement être grave et prolongée, il ne sert à rien de décider si son invalidité était prolongée.

[47] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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