Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : DP c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2022 TSS 1779

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : D. P.
Représentante ou représentant : S. T.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 22 janvier 2021 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : James Beaton
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 22 août 2022
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentante de l’appelant
Date de la décision : Le 13 septembre 2022
Numéro de dossier : GP-21-1409

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, D. P., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. La décision qui suit explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada à quatre reprises. Le présent appel porte sur la troisième demande de l’appelant.

[4] Le 20 avril 2015, l’appelant a présenté sa première demandeNote de bas page 1. Le ministre de l’Emploi et du Développement social l’a refusée. L’appelant a porté la décision du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Celui-ci a tenu une audience le 15 février 2018. Le 19 mars 2018, il a décidé de rejeter l’appelNote de bas page 2.

[5] Avant que l’appelant ne reçoive cette décision, il a présenté sa deuxième demande le 24 septembre 2015Note de bas page 3. Lorsque le Tribunal a tranché sa première demande, il a tenu compte de la preuve dans sa deuxième demande parce qu’elle était pertinenteNote de bas page 4. Après que le Tribunal a tranché la première demande de l’appelant, le ministre a rejeté sa deuxième demandeNote de bas page 5.

[6] Le 8 septembre 2020, l’appelant a présenté sa troisième demandeNote de bas page 6. Le ministre l’a rejetée. L’appelant a demandé au ministre de réviser sa décision. Le 22 janvier 2021, il a de nouveau rejeté la demande de l’appelantNote de bas page 7. Celui-ci a fait appel au Tribunal.

[7] Le 24 décembre 2021, l’appelant a présenté sa quatrième demandeNote de bas page 8. Le ministre le tranchera maintenant que le Tribunal a tranché le présent appel, qui porte sur la troisième demandeNote de bas page 9.

[8] Le ministre soutient que je dois rejeter l’appel parce que le Tribunal a déjà décidé que l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité. Le ministre affirme que la décision du Tribunal était définitiveNote de bas page 10.

Ce que dit la loi

[9] Il existe une règle de droit appelée res judicata.Ce terme latin signifie « chose jugée ». La règle prévoit que lorsqu’une personne fait appel plus d’une fois, le Tribunal ne peut pas trancher une question qui a déjà été tranchée. Elle s’applique lorsque les trois conditions suivantes sont remplies :

  1. a) La question en litige dans le présent appel est la même que la question en litige dans un appel antérieur.
  2. b) Les parties sont les mêmes dans les deux appels.
  3. c) La décision rendue dans l’appel antérieur était définitive.

[10] Même si cette règle s’applique, le Tribunal peut quand même juger l’appel en cours, mais seulement s’il est injuste de ne pas le faire. Par exemple, il pourrait être injuste de ne pas entendre l’appel :

  • si l’audience antérieure était inéquitable;
  • si l’objet, le processus ou les enjeux du présent appel sont différents de ceux de l’appel antérieur

[11] Dans de telles situations, le Tribunal pourrait décider d’instruire l’appel, même si la règle de la chose jugées’applique.

[12] Ce ne sont là que deux exemples. Il n’y a pas une liste d’éléments que je dois prendre en considération pour décider s’il serait injuste de ne pas instruire l’appel actuelNote de bas page 11.

[13] Je l’ai expliqué dans une lettre adressée à l’appelant le 14 juillet 2022. Je lui ai dit que son audience serait l’occasion de me dire :

  • pourquoi la règle de la chose jugée ne s’applique pas à son appel;
  • pourquoi je devrais instruire son appel même si la règle de la chose jugée s’applique.

[14] Je lui ai également dit que je tiendrais une autre audience si je décidais que son appel pouvait aller de l’avantNote de bas page 12.

[15] Comme j’ai décidé que son appel ne peut pas aller de l’avant, il n’y aura pas d’autre audience. L’appel de l’appelant prend fin ainsi.

Motifs de ma décision

[16] J’ai décidé que la règle de la chose jugée s’applique à l’appel de l’appelant. J’ai également décidé qu’il n’est pas injuste de décider de ne pas l’entendre de toute façon. Je vais maintenant expliquer pourquoi.

La question en litige dans le présent appel a déjà été tranchée

[17] La question en litige dans le présent appel a déjà été tranchée. Cela signifie que la règle de la chose jugée s’applique et que l’appel ne peut pas aller de l’avant. La règle s’applique parce que les trois conditions du principe de la chose jugée sont remplies.

[18] Premièrement, les questions en litige dans les deux appels sont les mêmes. L’appel précédent portait sur la question de savoir si l’appelant avait une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2015Note de bas page 13. C’est à ce moment-là que sa période de protection, appelée la « période minimale d’admissibilité », a pris fin. La période minimale d’admissibilité d’une personne est fondée sur ses cotisations au Régime de pensions du Canada (Régime). Après la décision du Tribunal de 2018, l’appelant a cotisé au Régime en 2019. Cependant, ces cotisations n’étaient pas suffisantes pour modifier sa période minimale d’admissibilitéNote de bas page 14. Cela signifie que le présent appel porte toujours sur la question de savoir si l’appelant avait une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2015.

[19] Deuxièmement, les parties sont les mêmes. Il s’agit toujours de l’appelant et du ministre.

[20] Troisièmement, la décision du Tribunal de 2018 était définitive. L’appelant pouvait seulement en faire appel à la division d’appel du Tribunal. Il avait 90 jours pour ce faireNote de bas page 15, mais il ne l’a pas fait.

[21] Puisque la règle de la chose jugée s’applique, je dois maintenant décider si je dois quand même instruire l’appel de l’appelant. Je peux le faire seulement s’il est injuste de ne pas entendre son appel.

Il n’est pas injuste de décider de ne pas instruire l’appel de l’appelant

[22] Je juge qu’il n’est pas injuste de décider de ne pas instruire l’appel de l’appelant. J’explique mes motifs ci-dessous.

L’audience de 2018 était équitable

[23] L’audience de 2018 a été équitable. Même si elle ne l’avait pas été, il ne s’agit qu’un des facteurs à prendre en considération. Je dois aussi tenir compte du fait que l’appelant a choisi de ne pas faire appel à la division d’appel. Celle-ci peut examiner une décision de la division générale pour voir si l’audience a été équitableNote de bas page 16.

[24] L’épouse de l’appelant fait valoir que l’audience de 2018 n’a pas été équitable pour les raisons suivantes :

  • elle n’a pas été autorisée à témoigner;
  • elle n’était pas autorisée à se rendre dans la salle d’audience pour aider l’appelant à répondre aux questions;
  • l’avocat de l’appelant avait de la difficulté à se connecter à l’audienceNote de bas page 17.

[25] Premièrement, l’épouse de l’appelant a témoignéNote de bas page 18. La membre du Tribunal a fait référence au témoignage de l’épouse dans sa décisionNote de bas page 19.

[26] Deuxièmement, il est vrai que l’épouse de l’appelant a dû sortir de la salle d’audience pendant son témoignage. Le membre du Tribunal et l’avocate de l’appelant avaient accepté cette décisionNote de bas page 20. Les membres du Tribunal font souvent témoigner les témoins individuellement, sans entendre ce que l’appelant ou d’autres témoins ont dit. Cela empêche le témoignage d’une personne d’influencer le témoignage d’une autre personne.

[27] Dans la présente affaire, la membre du Tribunal a demandé si l’appelant avait besoin que son épouse soit là pour lui offrir du « soutien moral »Note de bas page 21. Il a dit que non. Son avocat et le membre du Tribunal lui ont ensuite posé des questions, auxquelles il a répondu.

[28] Rien ne prouve que l’appelant avait de la difficulté à comprendre les questions. Même s’il avait peut-être eu de la difficulté à se souvenir des détails, il était quand même important qu’il témoigne sans que son épouse soit présente. Si l’appelant ne se souvenait pas de quelque chose, son avocat aurait pu demander à l’épouse de l’appelant de fournir plus de détails lors de son témoignage (elle a témoigné après l’appelant).

[29] Troisièmement, l’enregistrement de l’audience montre que des problèmes techniques sont survenus environ cinq minutes après le début de l’audience. Cependant, ils ont été réglés. La membre du Tribunal a répété ce que l’avocat avait manqué et l’audience s’est poursuivieNote de bas page 22. La preuve ne démontre pas que les problèmes techniques ont fait en sorte que l’audience a été inéquitable.

L’objet, le processus et les enjeux des deux appels sont les mêmes

[30] Il est juste d’utiliser la décision de 2018 du Tribunal pour empêcher l’appelant de faire appel maintenant. En effet, l’objet, le processus et les enjeux du présent appel sont les mêmes que ceux de l’appel précédentNote de bas page 23.

[31] L’objet du présent appel est de décider si l’appelant avait une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2015. Il s’agissait aussi de l’objet de l’appel précédent.

[32] Le processus est le même dans les deux appels. Si j’avais décidé que l’appel actuel pouvait aller de l’avant, il y aurait eu une autre audience, tout comme il y a eu une audience pour l’appel précédent.

[33] Les enjeux du présent appel sont l’admissibilité de l’appelant à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Les enjeux étaient les mêmes dans l’appel précédent.

Conclusion

[34] L’appel de l’appelant ne peut pas aller de l’avant. Le Tribunal a déjà décidé que l’appelant n’était pas atteint d’une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2015. La règle de la chose jugée s’applique. Il n’est pas injuste de décider de ne pas entendre son appel.

[35] Par conséquent, l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

[36] Ainsi, l’appel est rejeté.

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