Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : MS c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2023 TSS 1283

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : M. S.
Représentante ou représentant : R. J.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 15 novembre 2021 (communiqué par Service Canada)

Membre du Tribunal : Lianne Byrne
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 3 avril 2023
Personnes présentes à l’audience : Partie appelante
Représentant de l’appelante
Date de la décision : Le 22 mai 2023
Numéro de dossier : GP-21-2570

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelante, M. S., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC). Cette décision explique pourquoi je rejette son appel.

Aperçu

[3] L’appelante a 49 ans. Elle était opératrice de machine quand elle a cessé de travailler en avril 2020, à cause de fibromes utérins et de saignements vaginaux, pour lesquels elle a dû être opérée. Elle n’a pas repris le travail depuis, en raison de douleurs au dos et aux genoux, d’hypertension artérielle et d’une dépression.

[4] Le 15 juin 2021, l’appelante a demandé une pension d’invalidité du RPC. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelante a fait appel de la décision du ministre devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[5] L’appelante affirme qu’elle souffre de graves problèmes de santé physique et mentale. Sa formation, son expérience professionnelle et ses compétences en anglais sont limitées. Elle ne pourrait pas obtenir un emploi supposant des tâches légères.

[6] La ministre dit que ses saignements vaginaux, ses fibromes utérins et son anémie ont été réglés grâce à l'opération. Bien que l’appelante se plaigne de certaines douleurs au ventre, aux genoux et au dos, les renseignements médicaux ne recèlent aucun résultat clinique ni résultat d’examens corroborant une invalidité grave et prolongée. Son hypertension est légère et contrôlée de façon conservatrice par des médicaments. 

Ce que l’appelante doit prouver

Pour gagner son appel, l’appelante doit prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée au plus tard le jour de l’audienceNote de bas de page 1.

[7] Le Régime de pensions du Canada définit les adjectifs « grave » et « prolongée ».

[8] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 2.

[9] Pour décider si l’invalidité de l’appelante est grave, je dois examiner l’effet global de ses problèmes de santé sur sa capacité de travailler. Je dois aussi tenir compte de facteurs, comme son âge, son niveau de scolarité, ses aptitudes linguistiques, son expérience de travail et son expérience personnelle. Ces facteurs me font voir sa situation de façon réaliste. Ils m’aident à décider si son invalidité est grave. Si l’appelante est régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permet de gagner sa vie, elle n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[10] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 3.

[11] Autrement dit, aucun rétablissement ne doit être prévu. Pour être prolongée, l’invalidité de l’appelante doit l’obliger à rester à l’écart du marché du travail pendant très longtemps.

[12] L’appelante doit prouver qu’elle a une incapacité grave et prolongée. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit montrer qu’elle est plus susceptible qu’elle ne l’est d’être handicapée. L’appelante doit prouver qu’elle est atteinte d’une invalidité grave et prolongée selon la prépondérance des probabilités. En d’autres mots, elle doit me convaincre qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle est invalide.

Motifs de ma décision

[13] Je conclus que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée en date de l’audience.

L’invalidité de l’appelante est-elle grave?

[14] L’appelante n’est pas atteinte d’une invalidité grave. J’ai basé ma conclusion sur plusieurs facteurs. Les voici.

Les limitations fonctionnelles de l’appelante ne nuisent pas à sa capacité de travailler

[15] L’appelante a :

  • des antécédents de fibromes utérins, de saignements vaginaux et d’anémie;
  • une douleur à l’abdomen, aux genoux et au dos;
  • de l’hypertension artérielle;
  • une dépression réactionnelle.

[16] Toutefois, un diagnostic ne suffit pas à régler la question de son invaliditéNote de bas de page 4. Je dois plutôt voir si des limitations fonctionnelles l’empêchent de gagner sa vieNote de bas de page 5. Dans cette optique, je dois tenir compte de tous ses problèmes de santé (pas juste du plus important) et de leur effet sur sa capacité à travaillerNote de bas de page 6.

[17] Je conclus que l’appelante n’a pas de limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travailler.

Ce que l’appelante dit de ses limitations fonctionnelles

[18] L’appelante affirme que ses problèmes de santé lui causent des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travailler. Elle avait occupé un emploi d’opératrice de machine du 6 mai 2019 au 29 avril 2020. Son travail supposait notamment de conduire une machine pour emballer, soulever et déposer des boîtes, et de déplacer des boîtes sur palettes. Elle travaillait debout et devait soulever de lourdes charges. 

[19] À la fin de 2018, elle a commencé à avoir des saignements vaginaux. Des médicaments lui ont été prescrits, mais son état s’est aggravé avec le temps. Son médecin de famille lui a conseillé de cesser de travailler. Elle a subi une hystérectomie totale en mars 2021, ce qui a permis d’arrêter les saignements.

[20] Ensuite, vers août ou septembre 2021, une douleur est apparue dans l’ensemble de ses articulations. Ses genoux étaient enflés et elle ne pouvait pas les plier. On lui a conseillé d’essayer la physiothérapie et de prendre des analgésiques. Les médicaments antidouleurs l’aidaient pendant 30 à 60 minutes. Une intervention chirurgicale pourrait être nécessaire dans le futur. 

[21] Vers novembre ou décembre 2021, l’appelante a commencé à présenter des symptômes d’anxiété et de dépression. Son stress lui causait des maux de tête. On lui a donné des médicaments et on lui a dit de se reposer. Elle ne trouve pas que les médicaments l’aident. Elle n’a pas essayé la psychothérapie parce qu’elle n’a pas envie de parler. Elle doit voir un psychiatre en mai 2023. 

[22] Elle éprouve une douleur constante dans tout son corps. Elle fait aussi de l’hypertension qui, selon elle, ne serait pas contrôlée malgré les médicaments.

[23] Elle passe la majeure partie de ses journées allongée sur le canapé. Elle peut rester assise de 10 à 15 minutes avant d’avoir mal aux genoux, aux pieds, aux chevilles et au dos. Elle est incapable de se tenir debout, de marcher, de soulever ou de porter des objets et de se plier. Elle est incapable de faire des tâches ménagères. Elle est capable de se doucher et de s’occuper d’elle-même, mais elle devient fatiguée après 10 à 15 minutes.

Ce que la preuve médicale révèle sur les limitations fonctionnelles de l’appelante

[24] L’appelante doit soumettre des éléments de preuve médicale qui montrent que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travailler au plus tard le jour de l’audienceNote de bas de page 7.

[25] La preuve médicale ne permet pas de conclure que l’appelante est atteinte d’une invalidité grave. Le docteur Gurpal Mand, médecin de famille, a rempli le rapport médical du RPC en date du 10 mai 2021. Selon ce rapport, l’appelante présentait des symptômes de saignements vaginaux et de fibromes utérins depuis juillet 2020. Elle était incapable de travailler en raison d’une faiblesse et d’une dyspnée d’effort. Sa capacité fonctionnelle était altérée. Le docteur Mand a noté que son état allait sûrement s’améliorer. 

[26] L’appelante a témoigné que son état s’était effectivement amélioré après l’opération de mars 2021. Ce propos a été confirmé par le docteur Rasheed Anjola qui, le 14 avril 2022, a noté que l'appelante s'était rétablie sans incident après l’opération. Bien qu’elle se plaigne d’une douleur au flanc droit et au haut de l’abdomen, un examen de son abdomen n’a rien révélé d'anormal. Elle a aussi confirmé ne pas avoir de pertes vaginales. Le dossier ne contient aucun rapport qui révélerait une aggravation de son état. 

[27] En ce qui concerne sa dépression et son anxiété, le docteur Mand a noté chez l’appelante une dépression réactionnelle. Toutefois, il n’existe aucun rapport qui indiquerait des limitations fonctionnelles dues à sa dépression ou à son anxiété qui diminueraient sa capacité de travailler. 

[28] De même, l’appelante a témoigné qu’elle souffrait de douleur chronique. L’imagerie diagnostique d’octobre 2022 révélait la présence d’une discopathie dégénérative légère à modérée, et d’arthrose légère très précoce aux genoux. Cependant, aucun rapport ne précise que ces problèmes de santé entraînaient des limitations fonctionnelles nuisant à sa capacité de travailler.

[29] L’appelante a témoigné qu’elle était atteinte d’hypertension artérielle et de maux de tête. En avril 2022, le docteur Anjola a noté que des médicaments avaient été prescrits à l’appelante pour contrôler son hypertension artérielle. En novembre 2022, sa pression artérielle était de 140/82. Aucun rapport ne précise que cette affection lui causait des limitations fonctionnelles ayant une incidence sur sa capacité de travail. 

[30] La preuve médicale ne démontre pas que l’appelante a des limitations fonctionnelles nuisant à sa capacité de travailler à la date de l’audience. Par conséquent, l’appelante n’a pas prouvé qu’elle était atteinte d’une invalidité grave.

[31] À présent, je dois chercher à savoir si l’appelante est régulièrement capable de faire d’autres types de travail. Pour être graves, ses limitations fonctionnelles doivent l’empêcher de gagner sa vie, peu importe l’emploi, et pas seulement la rendre incapable d’occuper son emploi habituelNote de bas de page 8.

L’appelante est capable de travailler dans un contexte réaliste

[32] Mon analyse ne peut pas s’arrêter aux problèmes médicaux et à leur effet fonctionnel. Pour décider si l’appelante est capable de travailler, je dois aussi tenir compte des facteurs suivants :

  • son âge;
  • son niveau d’instruction;
  • ses aptitudes linguistiques;
  • son expérience de travail et de vie.

[33] Ces facteurs m’aident à savoir si l’appelante est capable de travailler dans un contexte réaliste. Autrement dit, est-il réaliste de dire qu’elle peut travaillerNote de bas de page 9?

[34] L’appelantea 49 ans. Elle a terminé des études secondaires en Inde. Elle a principalement travaillé en usine au Canada, mais a aussi travaillé brièvement comme boulangère. Elle comprend l’anglais, mais ne le parle pas très bien. Elle est capable de lire et d’écrire en anglais. 

[35] Malgré les limites de ses compétences en anglais et de ses antécédents professionnels, l’appelante est capable de tenter un retour au travail, de chercher un autre emploi ou de se recycler pour un emploi plus léger. J’estime que l’appelante est capable de travailler dans un contexte réaliste.

L’appelante n’a pas essayé de trouver et de conserver un emploi convenable

[36] S’il est réaliste qu’elle travaille, l’appelante doit montrer qu’elle a essayé de trouver et de garder un emploi. Elle doit aussi montrer que ses efforts ont échoué à cause de sa santéNote de bas de page 10. Une personne fait des efforts pour trouver et garder un emploi si, par exemple, elle suit une nouvelle formation ou cherche un emploi adapté à ses limitations fonctionnellesNote de bas de page 11.

[37] L’appelante n’a pas fait d’efforts pour travailler. Elle n’a pas tenté de reprendre son emploi habituel ni cherché un emploi adapté. Elle ne s’est pas recyclée et n’a pas essayé d’améliorer ses compétences en anglais. 

[38] Par conséquent, je ne peux pas conclure qu’elle était atteinte d’une invalidité grave à la date de l’audience.

Conclusion

[39] Je conclus que l’appelante n’est pas atteinte d’une invalidité grave et qu’elle n’est donc pas admissible à une pension du RPC. Étant donné que l’invalidité doit obligatoirement être grave et prolongée, il ne sert à rien de décider si son invalidité est prolongée.

[40] L’appel est donc rejeté.

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