Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : AF c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2023 TSS 1813

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale - section de la sécurité du revenu

Décision

Appelant : A. F.
Représentant : Serguey Logunov
Intimé : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision du ministre de l’Emploi
et du Développement social datée du 11 mai 2023
(communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : James Beaton
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 4 décembre 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentant de l’appelant
Date de la décision : Le 6 décembre 2023
Numéro de dossier : GP-23-886

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, A. F., n’a pas droit à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (RPC). J’explique dans la présente décision pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant a 27 ans. En décembre 2017, il a été agressé et volé en rentrant du travail. En août 2019, il a tenté de se suicider par surdose de Tylenol. Il n’a pas travaillé depuisNote de bas de page 1.

[4] L’appelant a demandé une pension d’invalidité du RPC le 23 juin 2022Note de bas de page 2. Il a fondé sa demande sur le trouble de stress post-traumatique (TSPT) lié à l’agression et sur la dépression et l’anxiété. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelant a interjeté appel de cette décision devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] Le ministre affirme que l’appelant n’a pas suivi les conseils des médecins et qu’il reste des traitements à mettre à l’essai. L’appelant affirme qu’il a suivi les conseils de ses médecins. Il estime que chaque fois qu’il n’a pas fait quelque chose qu’on lui a conseillé de faire, il avait une bonne raisonNote de bas de page 3.

[6] Je conclus que l’appelant n’a pas suivi les conseils des médecins de façon constante. Bien qu’il suive actuellement les conseils des médecins, il est trop tôt pour affirmer que son invalidité est prolongée.

Ce que l’appelant doit prouver

[7] Pour obtenir gain de cause, l’appelant doit prouver qu’il avait une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2021 et continue depuis. Cette date est fondée sur ses cotisations au RPCNote de bas de page 4.

[8] Le RPC définit les termes « grave » et « prolongée ».

[9] Une invalidité est grave si elle rend la partie appelante régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 5.

[10] Cela signifie que je dois examiner l’ensemble des problèmes de santé de l’appelant pour voir quel effet ils ont sur sa capacité de travailler. Je dois également examiner ses antécédents (notamment son âge, son niveau de scolarité, ses compétences linguistiques et son expérience professionnelle et personnelle). Ainsi, je pourrai obtenir un portrait réaliste de la gravité de son invalidité. Si l’appelant est régulièrement capable d’effectuer un travail qui lui permettrait de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[11] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 6.

[12] Cela signifie que l’invalidité de l’appelant ne peut être assortie d’une date prévue de rétablissement. Il faut s’attendre à ce que l’invalidité empêche l’appelant de travailler longtemps.

[13] L’appelant doit prouver qu’il a une invalidité grave et prolongée. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il soit invalide.

Questions que je dois examiner en premier

J’ai accepté des documents en retard

[14] Le ministre a présenté des documents après la date limite. L’appelant y a répondu avant que je puisse dire aux parties si je les acceptais. J’ai donc accepté à la fois les documents tardifs du ministre (page GD8) et la réponse de l’appelant (page GD9). Cela n’a pas causé d’injustice pour l’une ou l’autre des parties ni retardé le règlement de l’appelNote de bas de page 7.

Motifs de ma décision

[15] Je conclus que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2021 et de façon continue depuis.

L’invalidité de l’appelant était-elle grave?

[16] L’invalidité de l’appelant était grave en mai 2021. J’en suis arrivé à cette conclusion en tenant compte de plusieurs facteurs. J’explique ces facteurs ci‑après.

Les limitations fonctionnelles de l’appelant ont nui à sa capacité de travailler

[17] L’appelant a les problèmes de santé suivants :

  • TSPT ou trouble traumatiqueNote de bas de page 8
  • dépression
  • anxiété
  • trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH).

[18] Toutefois, je ne peux pas me concentrer sur les diagnostics de l’appelantNote de bas de page 9. Je dois plutôt me demander s’il a des limitations fonctionnelles qui l’empêchaient de recevoir une rémunérationNote de bas de page 10. Dans le cadre de cette démarche, je dois examiner tous les problèmes de santé de l’appelant (pas seulement le problème principal) et réfléchir à leur incidence sur sa capacité de travaillerNote de bas de page 11.

[19] Je conclus que l’appelant avait des limitations fonctionnelles en mai 2021.

Ce que l’appelant dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[20] L’appelant affirme que ses problèmes de santé ont entraîné des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travaillerNote de bas de page 12.

[21] Il dit composer avec la dépression et l’anxiété depuis au moins une décennie, et avec le TSPT depuis l’agression survenue en 2017. Il affirme qu’il a toujours eu un TDAH, bien qu’il n’ait été diagnostiqué que récemment.

[22] En raison de ces problèmes de santé, il éprouve des difficultés dans presque tous les aspects de sa vie quotidienne. Dans sa demande, il a mentionné qu’il avait de la difficulté à faire l’entretien ménager, à préparer les repas et à s’occuper de son hygiène personnelle. Jusqu’à tout récemment, il vivait avec sa mère, qui l’aidait à accomplir ces tâches. Il ne quitte la maison qu’une fois par mois puisqu’il n’aime pas se retrouver dans des lieux publics ou dans des situations en public. Il a témoigné qu’il passe souvent toute la journée au lit parce qu’il craint de blesser quelqu’un. Il ne maîtrise pas bien ses émotions, ce qui affecte ses interactions avec les autres. Il compose mal avec le changement.

[23] Il a témoigné qu’il a mal au dos à la suite d’un accident survenu lorsqu’il était enfant.

Ce que la preuve médicale révèle au sujet des limitations fonctionnelles de l’appelant

[24] L’appelant doit fournir une preuve médicale qui permet d’établir que ses limitations fonctionnelles nuisent à sa capacité de travaillerNote de bas de page 13.

[25] Il n’y a aucune preuve médicale à l’appui de limitations fonctionnelles causées par des maux de dos. Par ailleurs, la preuve médicale étaye les propos de l’appelant.

[26] La première preuve médicale remonte à août 2019, lorsque le Dr Sorinmade (un psychiatre) a vu l’appelant à la suite de sa tentative de surdoseNote de bas de page 14. Un formulaire d’indemnisation des accidents du travail de septembre 2019 documente l’hypervigilance, les flashbacks, l’anxiété et la difficulté de concentrationNote de bas de page 15. En mai 2020, l’appelant subissait des crises de panique quelques fois par semaineNote de bas de page 16.

[27] Les problèmes de santé de l’appelant se sont temporairement améliorés. En avril 2020, l’appelant a déclaré avoir de meilleures capacités d’adaptation. En outre, il a cessé de prendre ses médicaments parce qu’il se sentait mieuxNote de bas de page 17. Toutefois, l’appelant a dit à la Dre Lawrie (sa médecin de famille) qu’il ressentait de nouveau de l’anxiété en mai et en octobre 2021Note de bas de page 18.

[28] En avril 2022, le Dr Allibhai (psychiatre) a diagnostiqué à l’appelant un trouble consécutif aux traumas et des traits de personnalité limite. L’appelant lui a dit qu’il était irritable, enclin à des crises de colère, déprimé, émotif, peu motivé, peu concentré, hypervigilant et anxieux. Il ne dormait pas bienNote de bas de page 19. La Dre Lawrie a qualifié le diagnostic de l’appelant de [traduction] « complexe »Note de bas de page 20.

[29] La preuve médicale confirme que l’appelant est aux prises avec une combinaison de problèmes de santé mentale qui ont eu une incidence sur sa capacité de travailler depuis mai 2021.

[30] J’examinerai maintenant la question de savoir si l’appelant a suivi les conseils de ses médecins.

L’appelant n’a pas suivi les conseils de ses médecins de façon constante

[31] Pour recevoir une pension d’invalidité, une partie appelante doit suivre les conseils de ses médecinsNote de bas de page 21. Si elle ne le fait pas, elle doit avoir une explication raisonnable.Note de bas de page 22. Si elle n’a aucune explication raisonnable, je dois ensuite examiner l’effet, le cas échéant, que les conseils médicaux auraient pu avoir sur l’invalidité de la partie appelanteNote de bas de page 23.

[32] L’argument du ministre repose en grande partie sur la question de savoir si l’appelant a suivi les conseils des médecins. Je conclus que l’appelant n’a pas suivi les conseils des médecins de façon constante. La Dre Lawrie l’a souligné à plusieurs reprises à l’appelant, qui a reconnu qu’il n’avait pas fait tout ce qu’on lui avait dit de faireNote de bas de page 24. Cependant, je conclus aussi qu’il suit maintenant les conseils des médecins. J’aborderai la question de la conformité au traitement en discutant des divers types de conseils que l’appelant a reçus.

Médicaments

[33] L’appelant n’a pas toujours suivi les conseils de prendre des médicaments avant mai 2023.

[34] En janvier 2019, le Dr Sorinmade a prescrit de la sertraline (un antidépresseur), mais l’appelant n’a pas fait remplir l’ordonnance parce qu’il s’inquiétait des effets secondaires. Il croit que les antidépresseurs fonctionnent différemment pour les personnes atteintes de TDAHNote de bas de page 25. Il était déraisonnable de ne pas au moins essayer la sertraline pour voir si elle causerait des effets secondaires, ou de ne pas discuter de ses préoccupations au sujet du TDAH avec le Dr Sorinmade.

[35] En août 2019, il a commencé à prendre de la fluoxétine (un antidépresseur également prescrit par le Dr Sorinmade), mais il a cessé vers avril 2020. Il a dit au Dr Sorinmade qu’il avait arrêté parce qu’il pensait que ce médicament le mettait en colère. Il a ajouté qu’il se sentait mieux de toute façon. Cependant, il a dit à la Dre Lawrie qu’il avait arrêté parce qu’il accepterait d’en prendre seulement s’il pouvait aussi prendre Adderall, ce que la Dre Lawrie ne prescrirait pas.

[36] Le Dr Sorinmade et la Dre Lawrie l’ont encouragé à recommencer à prendre de la fluoxétine. On lui a donné la possibilité d’ajouter de la rispéridone s’il constatait qu’il devenait plus en colère. Même après que ses symptômes se soient de nouveau aggravés en mai 2021, il n’a pas essayé de nouveau la fluoxétine, ni commencé la rispéridone ou tout autre médicament, car, selon lui, sa sœur a développé un trouble cérébral causé par la médication. Il a dit au Dr Allibhai (psychiatre) en avril 2022 qu’il ne voulait toujours pas de médicamentsNote de bas de page 26.

[37] Il était déraisonnable de ne pas recommencer à prendre les médicaments recommandés par ses fournisseurs de soins de santé, compte tenu des effets de médicaments non précisés sur quelqu’un d’autre. La prise de médicaments comme ils ont été prescrits aurait probablement eu une incidence sur son invalidité. D’ailleurs, il a fait état de certains bienfaits de la fluoxétine en 2020Note de bas de page 27.

[38] En mai 2023, la Dre Lawrie a prescrit Vyvanse pour le TDAH une fois que l’appelant a reçu un diagnostic d’un spécialiste plus tôt ce mois-là. En juin, un autre médecin de la clinique de la Dre Lawrie a ajouté du Prazosin pour traiter le TSPT et a augmenté la dose de Vyvanse. La Dre Lawrie est d’accord avec la recommandationNote de bas de page 28. Cependant, l’appelant ne prend pas de Prazosin. Selon ce qu’il a déclaré, il croyait que ce médicament servait à traiter les cauchemars et il n’en avait pas. De plus, la Dre Lawrie n’a pas mentionné Prazosin à son dernier rendez-vous. Il n’y a aucune trace de son dernier rendez-vous dans la preuve documentaire. Toutefois, j’accepte son explication et je conclus qu’il a suivi les conseils de prendre des médicaments depuis mai 2023.

Usage de cannabis

[39] L’appelant a suivi les conseils des médecins de consommer moins de cannabis à compter de mai 2023. La Dre Lawrie a dit à l’appelant de réduire sa consommation de cannabis en octobre 2019, en septembre 2020 et en octobre 2021. Elle l’a prévenu que sa consommation pourrait aggraver son anxiété et mener à une psychoseNote de bas de page 29. Il a diminué sa consommation de cannabis en avril 2022 avant de l’augmenter en septembre 2022Note de bas de page 30. La Dre Lawrie a de nouveau discuté de la consommation de cannabis de l’appelant avec lui en octobre 2022 et il a diminué sa consommation en mai 2023Note de bas de page 31.

[40] Il a témoigné qu’il consommait plus de cannabis auparavant parce que c’était la seule chose qui l’aidait. Je ne considère pas cela comme une explication raisonnable, étant donné son refus de prendre des médicaments qui auraient pu aider.

Traitement psychiatrique

[41] Les antécédents de l’appelant en matière de traitement psychiatrique ne sont pas parfaits. Cependant, je crois qu’il a déployé des efforts suffisants dans ce domaine.

[42] Lors de sa première visite au Dr Sorinmade en août 2019, on lui a dit de prendre un rendez-vous de suivi. En octobre 2019, il ne l’avait pas encore fait. Il a finalement pris rendez-vous pour janvier 2020. Il a dit à la Dre Lawrie que le Dr Sorinmade était absent lorsqu’il s’est rendu à son rendez-vous en février (son rendez-vous de janvier n’est pas mentionné dans les notes). Toutefois, une lettre du Dr Sorinmade adressée à la Dre Lawrie le 18 février 2020 mentionne que l’appelant a manqué des rendez-vous en janvier et en février. Il a ensuite vu le Dr Sorinmade en mai et en octobre 2020. Il a cessé de voir le Dr Sorinmade parce qu’il le trouvait inutileNote de bas de page 32. L’appelant a déployé assez d’efforts pour voir le Dr Sorinmade.

[43] La Dre Lawrie a aiguillé l’appelant vers une autre psychiatre, la Dre Allibhai, pour obtenir des précisions sur le diagnostic d’avril 2022, et l’appelant a assisté à l’évaluationNote de bas de page 33. La Dre Lawrie l’a ensuite référé à un troisième psychiatre, le Dr Odubote, pour une prise en charge psychiatrique continue. L’appelant dit qu’il n’a jamais pu joindre le Dr OduboteNote de bas de page 34. Il est inscrit sur une liste d’attente pour consulter un psychiatre différentNote de bas de page 35.

Counseling et thérapie

[44] De même, les antécédents de l’appelant en matière de counseling et de thérapie ne sont pas constants. Je conclus qu’il n’a suivi avec diligence un traitement dans ce domaine que depuis septembre 2023.

[45] L’appelant a donné des dates très différentes du début de ses consultations auprès d’un conseiller, notamment en septembre 2019, octobre 2019, octobre 2020 et janvier 2021Note de bas de page 36. Il n’a fourni aucun dossier d’aucun conseiller. Je ne peux donc pas établir quand et à quelle fréquence il a vu un conseiller.

[46] Une fois épuisé le financement de l’indemnisation des accidents du travail, la Dre Lawrie a recommandé des consultations privées à l’appelant, soulignant qu’il pouvait se le permettreNote de bas de page 37. Malgré tout, rien ne prouve qu’il ait commencé à suivre des séances de counseling privé ou qu’il ait tenté de trouver un conseiller avant septembre 2023. Il a recommencé à suivre des séances de counseling au moyen de l’indemnisation des accidents du travail à ce moment-là, après avoir obtenu gain de cause en appel pour obtenir plus de financementNote de bas de page 38. Encore une fois, les conseillers n’ont présenté aucun dossier.

[47] Le défaut de l’appelant de suivre les recommandations concernant d’autres formes de thérapie vient consolider le fait qu’il n’a pas déployé assez d’efforts pour suivre un traitement avant septembre 2023.

[48] Par exemple, en août 2019, le Dr Sorinmade a recommandé un programme de traitement de jour par l’entremise de Kamloops Mental Health and Substance UseNote de bas de page 39. L’appelant a déclaré qu’il n’a assisté qu’à une séance de groupe parce qu’il est devenu émotif et qu’il ne voulait pas pleurer devant d’autres personnes. À l’audience, il a affirmé qu’il ne croyait pas que le programme lui convenait parce qu’il n’est pas toxicomane. Il n’est pas clair pour moi que le programme s’adressait strictement aux personnes aux prises avec des dépendances aux droguesNote de bas de page 40.

[49] En avril 2022, le Dr Allibhai l’a aiguillé vers un programme de tolérance à la détresse pour la régulation émotionnelle aux fins d’une thérapie comportementale dialectique. Les séances se dérouleraient virtuellement en groupe sur Zoom. Il n’a pas participé parce qu’il ne voulait assister à aucune séance de groupe. Il a dit à la Dre Lawrie que la thérapie de groupe ne fonctionnerait pasNote de bas de page 41.

[50] La décision de l’appelant de ne pas participer à une thérapie de groupe ou d’obtenir des conseils privés avant septembre 2023 était déraisonnable. Il avait la possibilité de suivre une thérapie de groupe gratuite ou de payer une thérapie individuelle privée (ce qu’il pouvait se permettre) s’il était mal à l’aise dans un contexte de groupe. Il a choisi de ne faire ni l’un ni l’autre jusqu’en septembre 2023. L’appelant affirme qu’il était difficile d’obtenir un rendez-vous avec des fournisseurs de traitement en général, surtout pendant la pandémie de COVID-19. Cependant, il n’existe aucune preuve qu’il a tenté de communiquer avec un psychologue avant septembre 2023. Les notes de la Dre Lawrie révèlent plutôt que l’appelant n’a pas donné suite à sa recommandationNote de bas de page 42.

[51] Ses fournisseurs de soins de santé estimaient que la thérapie et le counseling constituaient un élément important de son traitement. Ils auraient probablement eu une incidence sur son invalidité.

[52] Je dois maintenant décider si l’appelant est régulièrement en mesure d’effectuer d’autres types de tâches. Pour pouvoir être qualifiées de graves, les limitations fonctionnelles de l’appelant doivent l’empêcher de gagner sa vie dans n’importe quel type d’emploi, pas seulement dans son emploi habituelNote de bas de page 43.

L’appelant ne peut pas travailler dans un contexte réaliste

[53] Lorsque je décide si l’appelant peut travailler, je ne peux pas simplement examiner ses problèmes de santé et leur incidence sur ce qu’il peut faire. Je dois également tenir compte des facteurs suivants, notamment :

  • son âge
  • son niveau de scolarité
  • ses capacités linguistiques
  • son expérience professionnelle et personnelle.

[54] Ces facteurs m’aident à décider si l’appelant peut travailler dans un contexte réaliste, c’est‑à‑dire s’il est réaliste de dire qu’il peut travaillerNote de bas de page 44.

[55] L’appelant est jeune (actuellement âgé de 27 ans), parle couramment l’anglais et détient un diplôme de 12e année. Il a une certaine expérience de travail dans la vente de téléphones cellulaires et de voitures, et il s’est brièvement enrôlé dans l’arméeNote de bas de page 45. Bref, il présente toutes les caractéristiques de base pour être employable dans un contexte réaliste, y compris des études, une certaine expérience de travail et de nombreuses années devant lui avant l’âge normal de la retraite de 65 ans.

[56] Toutefois, ses problèmes de santé mentale l’affectent grandement. Il n’est même pas motivé à accomplir des activités quotidiennes. Il n’interagit pas bien avec les autres. Il ne peut pas maîtriser ses émotions. Ces limitations fonctionnelles font en sorte qu’il est peu probable qu’il puisse conserver un emploi.

[57] Je conclus que l’appelant ne peut pas travailler dans un contexte réaliste. Il est incapable de travailler depuis mai 2021. Entre avril 2020 et mai 2021 environ, il y a eu une amélioration sur le plan de ses affections.

L’invalidité de l’appelant était-elle prolongée?

[58] L’invalidité de l’appelant n’était pas prolongée.

[59] Bien que l’appelant ait éprouvé des symptômes de santé mentale depuis au moins 2017, il est trop tôt pour dire que son invalidité est susceptible d’être d’une durée indéfinie, car il n’a commencé à suivre systématiquement les conseils des médecins qu’en septembre 2023, soit il y a seulement quelques mois. Son traitement antérieur était sporadique et partiel. Par exemple, alors qu’il prenait de la fluoxétine en 2019 et 2020, il consommait encore trop de cannabis, selon la Dre Lawrie. Elle croyait que cela nuisait à sa santé mentale.

[60] Il a commencé à prendre du Vyvanse en mai 2023. En juin, il a déclaré avoir une meilleure maîtrise de son humeur et se sentir moins agité. Sa dose a été augmentée en juin (la dernière note clinique disponible)Note de bas de page 46. Il a également diminué sa consommation de cannabis en mai 2023. Il a commencé à consulter deux conseillers en septembre 2023. Il n’était pas en mesure de me dire leurs noms. Cela donne à penser qu’il ne les a pas assez vus pour établir un rapport avec eux ou pour réaliser des progrès dans la résolution de ce que la Dre Lawrie a décrit comme un ensemble complexe de problèmes de santé mentale.

[61] Il n’existe pas de règle fixe quant à la durée d’une invalidité avant qu’elle puisse être considérée comme longue, continue et indéfinie.

[62] La Dre Lawrie a donné un pronostic « inconnu » dans un rapport médical de septembre 2022Note de bas de page 47. C’était cependant avant que l’appelant commence à suivre les conseils des médecins.

[63] Dans un formulaire de crédit d’impôt canadien pour personnes handicapées datant de septembre 2023, le Dr Parhar du centre pour adultes ayant un TDAH a écrit que le TDAH [traduction] « est un problème de santé chronique qui aurait dû être diagnostiqué lorsque le patient avait 5 ans ». Il a coché « oui » à côté de : [traduction] « L’incapacité du patient à exécuter les fonctions mentales nécessaires à la vie quotidienne a-t-elle duré, ou devrait-elle durer, pendant une période continue d’au moins 12 mois? » Il a coché « non » à côté de : [traduction] « La déficience du patient dans l’exécution des fonctions mentales nécessaires à la vie quotidienne s’est-elle améliorée ou est-elle susceptible de s’améliorer à un point tel qu’elle ne serait plus affaiblie »Note de bas de page 48?

[64] J’accorde peu de poids à la prédiction du Dr Parhar parce qu’elle ne répond pas directement à la question de savoir si la gravité de l’invalidité de l’appelant sera indéfinie. Il ne suffit pas qu’un diagnostic dure toute la vie. Et une personne peut avoir une « déficience » sans avoir une invalidité grave en vertu du RPC. La gravité d’une invalidité est mesurée en fonction de la capacité de travailler. Je note que l’appelant a déclaré qu’il était généralement un bon élève à l’école malgré le fait qu’il avait un TDAH non diagnostiqué. Il a aussi déjà travaillé en ayant un TDAH. Cela laisse croire qu’il pourrait le faire à nouveau, avec un traitement approprié. De plus, le Dr Parhar n’a vu l’appelant qu’une seule fois et n’a supervisé son traitement à aucun moment.

Conclusion

[65] Je conclus que l’appelant n’a pas droit à une pension d’invalidité du RPC parce que son invalidité n’était pas grave et prolongée au 31 décembre 2021 et de façon continue depuis. Il n’y a que quelques mois qu’il a commencé à suivre des conseils de ses médecins en prenant des médicaments, en diminuant sa consommation de cannabis et en assistant à des séances de counseling. Il est trop tôt pour affirmer que son invalidité est prolongée.

[66] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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