Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : JD c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2019 TSS 1766
Numéro de dossier du Tribunal : GP-19-236

ENTRE :

J. D.

Requérante (appelante)

et

Ministre de l’Emploi et du Développement social

Ministre


DÉCISION DU TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Division générale – Sécurité du revenu


Décision rendue par :

Kelley Sherwood

Date de l’audience par téléconférence :

Le 25 juin 2019

Date de la décision :

Le 17 juillet 2019

Sur cette page

Décision

[1] La requérante n’a pas droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

Aperçu

[2] La requérante a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Elle affirme qu’elle ne pouvait plus travailler en raison d’une lésion due aux mouvements répétitifs à la main droite et au poignet droit ainsi que d’une tendinite à l’épaule droite. Le ministre a reçu la demande le 26 février 2018. Il a rejeté la demande une première fois, puis une seconde fois après révision. La requérante a porté la décision de révision en appel au Tribunal de la sécurité sociale.

[3] Pour avoir droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, la requérante doit remplir les conditions énoncées dans le Régime de pensions du Canada. Plus précisément, la requérante doit être déclarée invalide au sens du Régime de pensions du Canada au plus tard à la fin de la période minimale d’admissibilité. Le calcul de la période minimale d’admissibilité est fondé sur les cotisations que la requérante a versées au Régime de pensions du Canada. La période minimale d’admissibilité de la requérante se termine le 31 décembre 2020.

Questions en litige

[4] Les blessures de la requérante à l’extrémité supérieure droite ont-elles entraîné chez elle une invalidité grave? Autrement dit, était-elle régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice à la date de l’audience étant donné que sa période minimale d’admissibilité prenait fin dans l’avenir?

[5] Si oui, l’invalidité de la requérante devait-elle aussi durer pendant une période longue, continue et indéfinie?

Analyse

[6] Pour être considérée comme invalide, la personne doit être atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongéeNote de bas de page 1. Une personne est considérée comme ayant une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décès. La personne doit prouver selon la prépondérance des probabilités que son invalidité répond à ces deux volets du critère, ce qui signifie que si la requérante satisfait seulement à un volet, elle n’est pas admissible aux prestations d’invalidité.

Invalidité grave

La requérante croit sincèrement qu’elle est invalide

[7] La requérante travaillait comme employée de la production. Elle s’est blessée à la main droite et au poignet droit sur son lieu de travail. À la suite de cette blessure, elle a été en congé d’invalidité de courte durée. Lorsqu’elle est retournée travailler, elle faisait son quart de travail habituel de l’après-midi et du soir, mais ses tâches avaient été modifiées. Elle devait réduire ses efforts physiques. Elle ne pouvait plus utiliser les machines. Elle pouvait seulement soulever des boîtes légères qui pesaient quelques grammes. Finalement, elle ressentait trop de douleur en travaillant, même si ses tâches avaient été modifiées. La douleur s’était répandue de tout son bras à son épaule. Elle a cessé de travailler en mars 2017.

[8] La requérante a décrit des douleurs à l’épaule, au bras, à la tête, aux doigts et au cou. Ses muscles lui font constamment mal. Ses douleurs sont fulgurantes et imprévisibles. Elle prend des médicaments tous les jours, dont de la prégabaline, du Tylenol No 3 et de la sertraline. Elle continue de faire de la physiothérapie deux fois par semaine. Ses traitements l’aident un peu, mais ne lui enlèvent pas la douleur. La physiothérapie aide à réduire sa raideur. Ses douleurs nuisent à son sommeil. Elle se réveille la nuit en raison de douleurs. Elle se sent toujours fatiguée.

[9] Dans sa demande de prestations du Régime de pensions du Canada datée de février 2018Note de bas de page 2, elle a aussi déclaré des douleurs et une enflure à la main, au pouce, au poignet et à l’épaule du côté droit. Elle avait des limitations qui nuisaient à sa capacité de marcher et de soulever, de transporter ou d’atteindre des objets. Elle ressentait de la douleur en se lavant les cheveux ou en faisant des tâches ménagères. Elle ne pouvait pas dormir du côté droit. Lorsqu’elle conduisait, la douleur commençait après 20 à 30 minutes. Elle portait une orthèse de poignet.

[10] Je crois la requérante lorsqu’elle dit qu’elle souffre en raison de ses problèmes de santé. En fait, un certain nombre de médecins, dont la Dre KekoszNote de bas de page 3, physiatre, documentent les déficiences de la requérante. La Dre Kekosz était d’avis que la requérante avait une déficience permanente du poignet droit et de la main droite en raison d’une lésion due aux mouvements répétitifs. Elle a confirmé la douleur et la sensibilité décrites par la requérante. Toutefois, la souffrance de la requérante n’est pas un élément sur lequel repose le critère de l’invalidité. Je dois être convaincue que la requérante est atteinte d’une invalidité qui, dans un contexte réaliste, la rend régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 4.

La requérante n’a pas démontré qu’elle était incapable d’occuper un emploi convenable

[11] Pour évaluer si une invalidité est « grave », la question n’est pas de savoir si la requérante a des déficiences graves. Il faut que l’invalidité l’empêche de gagner sa vie. La question n’est pas non plus de savoir si elle est incapable d’effectuer son travail habituel. La requérante doit être incapable d’effectuer un quelconque travail véritablement rémunérateurNote de bas de page 5.

[12] Je reconnais que, selon la preuve médicale au dossier, la requérante ne peut pas effectuer son travail habituel. Toutefois, ses médecins n’excluent pas la possibilité qu’elle puisse effectuer un autre travail qui respecte ses limitations. En rendant ma décision, j’ai accordé beaucoup d’importance aux rapports de la Dre Kekosz et du Dr Thakkar. Les deux précisent que l’incapacité de la requérante l’empêche d’effectuer son travail d’employée de la production.

[13] Par exemple, la Dre Kekosz a documenté une conversation qu’elle a eue avec la requérante après que celle-ci a cessé de travailler en mars 2017Note de bas de page 6. Pendant cette conversation, la requérante a affirmé s’inquiéter de devoir composer avec les mêmes problèmes si elle retournait travailler après sa période de convalescence. Après avoir constaté que la requérante n’avait pas répondu à un traitement régulier, la Dre Kekosz a conclu qu’elle ne pouvait pas reprendre son emploi précédent en raison de sa nature répétitiveNote de bas de page 7. Le Dr Thakkar était également de cet avis, comme il l’a indiqué dans le rapport médical du Régime de pensions du Canada daté de février 2018Note de bas de page 8. Plus précisément, il a indiqué qu’elle était incapable de reprendre son emploi en raison d’une lésion due aux mouvements répétitifs. Dans une lettre datée de novembre 2018Note de bas de page 9, il a répété qu’en raison de douleurs persistantes à l’épaule droite et à la main droite, la requérante ne pouvait pas reprendre son emploi habituel. Il a ajouté qu’elle devait éviter tout travail nécessitant des mouvements répétitifs de la main droite, de l’épaule droite et du cou.

[14] J’ai pris note que le Dr Thakkar a écrit dans le rapport médical du Régime de pensions du Canada que le pronostic de la requérante d’un retour à un emploi rémunérateur était réservé en raison de ses douleurs. De plus, il a donné suite à cette opinion en janvier 2019Note de bas de page 10, lorsqu’il a de nouveau écrit que le pronostic d’un retour à un emploi rémunérateur était réservé en raison de la chronicité de ses douleurs. Cependant, dans la même lettre, il a ajouté qu’elle pouvait [traduction] « essayer de suivre un programme de rétablissement des capacités fonctionnelles qui lui permettrait d’éviter tout mouvement répétitif du cou, du bras droit et de l’épaule droite ». J’ai conclu que les commentaires du Dr Thakkar appuient davantage le fait que la requérante pouvait tenter de travailler en respectant ces restrictions.

[15] Même si la requérante croit qu’elle a trop de douleur pour travailler, elle n’a pas fait de réelles démarches pour trouver et conserver un autre emploi qui respecte ces restrictions. Par conséquent, elle n’a pas démontré qu’elle n’avait pas la capacité de travailler et de détenir un emploi véritablement rémunérateurNote de bas de page 11.

[16] À l’audience, le mari de la requérante a soulevé un nouveau problème de santé. Il a dit que le Dr Thakkar pense que la requérante pourrait faire une dépression. Elle doit aller consulter en psychiatrie. Bien que je reconnaisse qu’une investigation est possiblement en cours concernant ce problème de santé, à part la prise d’un antidépresseur (sertraline), le dossier médical ne documente pas ce problème de santé de façon substantielle. Par conséquent, j’estime que la preuve médicale matérielle n’appuie pas les allégations de dépression graves à l’audienceNote de bas de page 12.

Toutes les personnes atteintes d’un problème de santé n’ont pas nécessairement droit à une pension d’invalidité

[17] Je dois évaluer le volet « grave » du critère dans un contexte réalisteNote de bas de page 13. Cela signifie que pour décider si l’invalidité de la requérante est grave, je dois tenir compte de certains facteurs, dont l’âge, le niveau d’éducation, les aptitudes linguistiques, l’expérience de travail et l’expérience personnelle. Toutefois, toutes les parties requérantes ayant un problème de santé n’ont pas nécessairement droit à une pension d’invalidité. La requérante doit tout de même démontrer qu’elle est atteinte d’une invalidité grave et prolongée, qui l’empêche de travailler. Il faut des preuves médicales, et elle doit prouver qu’elle a fait des démarches pour trouver un autre emploi et qu’elle a envisagé d’autres possibilités d’emploi.

[18] La requérante a 47 ans. Elle a terminé ses études secondaires en Inde. Une fois arrivée au Canada, elle a suivi des cours d’anglais langue seconde. La requérante parle peu l’anglais. Elle a eu besoin de services d’interprétation pour l’audience. Son mari a écrit les lettres qui figurent au dossier et il l’a aidée à présenter sa demande de prestations du Régime de pensions du Canada. Elle ne pourrait pas écrire une lettre en anglais ni comprendre les formulaires sans aide. Elle a travaillé dans une usine, dans une pépinière et dans une fabrique de conserves. Elle n’a jamais occupé un emploi de bureau ou un emploi exigeant des compétences en informatique.

[19] Même si je reconnais qu’elle fait face à certains obstacles au travail, elle a néanmoins été en mesure de cotiser au Régime de pensions du Canada pendant 25 ans, malgré ses barrières linguistiques et ses obstacles liés à l’alphabétisation. Comme le Dr Thakkar l’a documenté, elle ne peut pas occuper un emploi nécessitant des mouvements répétitifs du cou, du bras droit et de l’épaule droite. Toutefois, la requérante n’a pas démontré qu’elle avait fait des démarches pour trouver un emploi qui respecterait ces restrictions. De plus, le ministre n’est pas responsable de déterminer le type d’emploi que la requérante est capable d’exercerNote de bas de page 14. C’est à la requérante qu’incombe cette responsabilité.

[20] Par conséquent, je conclus que la requérante n’a pas démontré que son invalidité était grave au sens du Régime de pensions du Canada à la date de l’audience.

Conclusion

[21] L’appel est rejeté.

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