Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : NK c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2023 TSS 1255

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : N. K.
Représentante ou représentant : M. K.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentante ou représentant : Andrew Kirk

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du 23 septembre 2022 (GP-21-722)

Membre du Tribunal : Neil Nawaz
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 11 octobre 2023

Personnes présentes à l’audience :

Appelante
Représentant de l’appelante
Représentant de l’intimé

Date de la décision : Le 10 novembre 2023
Numéro de dossier : AD-23-10

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel. L’appelante n’a pas droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

Aperçu

[2] L’appelante a 67 ans. Elle a immigré du Pakistan pour vivre au Canada il y a de cela 23 ans. Pendant cette période, elle a occupé plusieurs emplois, dont le plus récent comme commis aux postes dans une pharmacie. Elle a quitté cet emploi en août 2009 après avoir éprouvé ce qu’elle a décrit comme de graves douleurs aux jambes.

[3] L’appelante a demandé une pension d’invalidité du RPC en janvier 2020. Elle a affirmé ne plus pouvoir faire aucun type de travail en raison des douleurs intenses causées par l’arthrose et ses varices aux deux jambesNote de bas de page 1. Le ministre a rejeté cette demande après avoir conclu que l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave et prolongée le 31 décembre 2009, soit à la date la plus récente où elle bénéficiait encore de la protection offerte par le RPC pour l’invalidité.

[4] L’appelante a porté le refus du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. La division générale a tenu une audience par téléconférence et rejeté l’appel. Elle a conclu que la preuve était insuffisante pour démontrer que l’appelante était régulièrement incapable d’occuper un emploi véritablement rémunérateur pendant sa période de protection.

[5] L’appelante a ensuite demandé la permission de faire appel à la division d’appel. Plus tôt cette année, un de mes collègues de la division d’appel a accordé à l’appelante la permission de faire appel. Le mois dernier, j’ai tenu une audience avec pour discuter en détail de sa demande de pension d’invalidité.

[6] Après avoir examiné les observations des deux parties, j’ai conclu que l’appelante n’a pas démontré qu’elle est admissible à une pension d’invalidité du RPC. La preuve montre que l’appelante, bien que sujette à certaines limitations fonctionnelles, n’était pas atteinte d’une invalidité grave à la fin de 2009 ni par la suite.

Question préliminaire

[7] En décembre 2022, la loi régissant les appels au Tribunal de la sécurité sociale a été modifiéeNote de bas de page 2. Selon les nouvelles règles, quand la division d’appel donne la permission à un appel d’être entendu, elle doit désormais tenir une audience de novo (une nouvelle audience). Elle doit ainsi se prononcer sur les mêmes questions que celles dont la division générale avait été saisieNote de bas de page 3. Comme je l’ai expliqué au début de l’audience, il s’ensuit que les conclusions de la division générale ne sont pas contraignantes pour moi. J’ai également précisé que j’examinerais tous les éléments de preuve disponibles, y compris les nouveaux éléments de preuve, afin de décider si l’appelante était devenue invalide durant sa période de protection.

Question en litige

[8] Pour avoir gain de cause, l’appelante devait prouver qu’il était plus probable qu’improbable qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée pendant sa période de protection. Les parties ont convenu que la protection de l’appelante a pris fin le 31 décembre 2009Note de bas de page 4.

[9] Une invalidité est grave si elle rend une personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 5. Une personne n’a pas droit à une pension d’invalidité si elle est régulièrement capable de faire un travail lui permettant de gagner sa vie.

[10] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décèsNote de bas de page 6. Il faut s’attendre à ce que l’invalidité garde la personne à l’écart du marché du travail pendant longtemps.

[11] Dans le présent appel, il me fallait décider si l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée avant le 31 décembre 2009.

Analyse

[12] J’ai appliqué la loi à la preuve disponible et conclu que l’appelante n’était pas atteinte d’une invalidité grave et prolongée en date du 31 décembre 2009. Je suis convaincu que les problèmes de santé qu’elle éprouvait alors ne l’empêchaient pas régulièrement d’occuper un emploi véritablement rémunérateur.

L’appelante n’est pas atteinte d’une invalidité grave

[13] Il revient aux personnes qui demandent une pension d’invalidité de prouver qu’elles ont une invalidité grave et prolongéeNote de bas de page 7. J’ai examiné le dossier et conclu que l’appelante n’a pas rempli cette obligation, selon le critère établi par le Régime de pensions du Canada. Malgré la présence possible de déficiences pendant sa période de protection, les éléments de preuve ne suffisent pas à montrer qu’elles rendaient l’appelante incapable de travailler.

[14] Dans sa demande de pension, l’appelante a déclaré que son arthrite grave et ses varices aux deux jambes la rendaient invalide. Elle a dit que ces problèmes de santé l’empêchaient de rester debout ou de marcher continuellement pendant plus d’une demi-heure et de monter les escaliers sans aide. Elle a aussi dit souffrir d’une perte auditive, de troubles visuels et d’une incapacité à se concentrerNote de bas de page 8.

[15] À l’audience, l’appelante a déclaré que ses varices étaient apparues il y a plus de 20 ans, aux environs de son arrivée au Canada. Elle a dit que la situation s'est aggravée en 2009 alors qu’elle travaillait au comptoir postal d’un Pharmaprix. Cet emploi l’obligeait à être debout en tout temps, ce qui rendait ses jambes extrêmement enflées et douloureuses.

[16] Bien que l’appelante puisse avoir l’impression d’être invalide depuis 14 ans, ma décision ne peut pas seulement reposer sur sa vision subjective de sa capacité de l’époqueNote de bas de page 9. La preuve au dossier, considérée dans son ensemble, ne laisse pas croire à une déficience grave qui l’aurait empêchée d’occuper un travail convenable avant le 31 décembre 2009.

[17] Je fonde ma conclusion sur les facteurs qui suivent.

La preuve médicale datant de la période de protection de l’appelante ne révèle pas une invalidité grave

[18] L’appelante a soumis une quantité importante d’éléments de preuve à l’appui de sa demande de pension d’invalidité. Le problème, c’est que la plupart datent d’après sa période de protection. Bien que l’appelante soit peut-être invalide maintenant, l’important est de savoir si elle l’était en 2009. La pertinence de tout rapport ultérieur à 2009 sera limitée pour évaluer la capacité de travail de l’appelante.

[19] À mon avis, aucun des rapports médicaux avoisinant sa période de protection n’indique une invalidité de façon convaincante.

[20] À l’appui de sa demande, le médecin de famille de l’appelante a écrit qu’il traitait depuis 2004 son problème de santé principal, à savoir ses varices, et son problème de santé secondaire depuis 2013, à savoir sa perte auditive du côté droit. Il a écrit que l’appelante avait des douleurs modérées à graves aux deux jambes, à cause desquelles elle avait du mal à rester debout et à marcher, peu importe la duréeNote de bas de page 10.

[21] Évidemment, ce rapport a été rédigé près de 11 ans après la fin de sa période de protection. Il est vrai que ce médecin traitait effectivement l’appelante depuis 2000. Toutefois, son rapport ne laisse aucunement croire qu’il avait pour objet l’état de santé de sa patiente durant la période véritablement en cause pour sa pension d’invalidité du RPCNote de bas de page 11. En examinant les quelques rapports datant des environs de sa période de protection, je ne trouve aucune preuve convaincante que l’appelante était régulièrement incapable d’occuper un emploi véritablement rémunérateur.

[22] Le tout premier rapport est une échographie de son genou gauche faite en juillet 2009. Il révélait un petit épanchement articulaire, possiblement causé par une légère entorseNote de bas de page 12. En octobre 2009, juste avant la fin de sa période de protection, l’appelante avait été examinée par un spécialiste en orthopédie. Il a dit l’avoir vue parce que son genou gauche était enflé et douloureux depuis deux mois. La spécialiste a noté que la douleur s’installait — la douleur la réveillait la nuit, [traduction] « sans toutefois diminuer sa tolérance pour la marcheNote de bas de page 13 ».

[23] En décembre 2009, une IRM de son genou gauche a révélé une lésion méniscale dégénérative complexe sur le versant interne, avec des lésions au cartilage [traduction] « modérées à gravesNote de bas de page 14 ». Il est difficile de savoir si ce rapport révélait une détérioration croissante de son genou, ou si cette lésion méniscale avait toujours été présente sans avoir été détectée par les imageries passées. Quoi qu’il en soit, je ne considère pas que sa blessure au genou soit en soi une preuve d’invalidité. En effet, l’appelante n’a jamais suivi le traitement recommandé et a cherché d’autres emplois qui auraient pu convenir à son état.

[24] En octobre 2010, après la fin de sa période de protection, l’appelante a consulté un spécialiste des maladies vasculaires. Il a écrit qu’il l’avait déjà vue pour des varices et qu’à ce moment-là, il était prêt à les traiter par chirurgie. Cependant, il a dit que l’appelante ne l’avait jamais rappelé. Il a ajouté ceci :

[traduction]
Aujourd’hui, elle est ennuyée par sa jambe gauche. Je comprends qu’elle a un problème au ménisque gauche, qui doit être réglé par une chirurgie arthroscopique. L’IRM faite comme test laisse croire à la présence de varices à la jambe gauche. Elle craint que sa douleur soit attribuable à ces veines, ou que celles-ci interfèrent avec l’intervention orthopédique. J’ai infirmé ses craintes dans les deux cas. La patiente a ensuite voulu parler de sa jambe droite et de son traitement. Je lui ai recommandé de commencer par soigner son genou gauche, comme il lui cause des symptômes, et de discuter plus tard de sa jambe droite. Elle était d’accordNote de bas de page 15. [c’est moi qui souligne]

[25] Ce passage me montre que, neuf mois après la fin de sa période de protection, la spécialiste ne croyait pas que les varices de l'appelante lui causaient de la douleur à la jambe gauche. Il me montre aussi que ses varices ne l’empêchaient pas de subir une chirurgie arthroscopique au genou gauche.

[26] En ce qui concerne la déficience auditive de l’appelante, la preuve médicale disponible laisse croire que ce problème est seulement devenu important après sa période de protection. Son médecin de famille a dit avoir seulement commencé à traiter sa perte auditive du côté droit en 2013. Cette déficience figure aussi une première fois dans le dossier cette année-là, alors que des examens audiométriques ont révélé une perte auditive grave à basse fréquence, et une perte légère à grave à moyenne fréquenceNote de bas de page 16. Même si l’appelante avait une certaine perte auditive durant sa période de protection, il n’est pas évident qu’elle aurait contribué à une invalidité, d’après les résultats des examens.

[27] Dans son ensemble, la preuve médicale précédant 2010 laisse croire que l’appelante avait à l’époque des problèmes de santé, sans toutefois avoir une invalidité grave. Malgré le diagnostic de varices, la douleur qu’elles causaient demeure incertaine. L’appelante avait une lésion au ménisque du genou gauche, mais il semble qu’elle aurait pu être traitée par une intervention chirurgicale. L’ensemble de la preuve disponible révèle que sa perte auditive n’était pas un problème important pendant sa période de protection, l’eût-il été autrement.

L’appelante n’a pas recouru à toutes les options de traitement raisonnables

[28] Comme nous l’avons vu, la preuve médicale ne révèle pas une invalidité grave pendant la période de protection de l’appelante. Cela dit, d’autres raisons expliquent aussi pourquoi elle n’a pas droit à une pension d’invalidité du RPC.

[29] Les personnes demandant une pension d’invalidité doivent démontrer qu’elles ont essayé d’améliorer leur état de santé. La Cour d’appel fédérale a clairement établi qu’elles n’ont pas droit à une pension d’invalidité du RPC à moins d’avoir fait tout ce qui est raisonnablement possible pour atténuer leurs déficiencesNote de bas de page 17. La Cour a également affirmé qu’elles sont entièrement responsables d’en faire la preuveNote de bas de page 18 . Autrement dit, il revient à l’appelante de fournir la preuve des traitements qu’elle a suivis.

[30] Dans Brown, une cause récente, la Cour d’appel fédérale a confirmé que les demandeurs doivent, « dans la mesure du possible, faire des efforts pour traiter [leur] invalidité et chercher un emploi qui tienne compte de [leurs] limitationsNote de bas de page 19. » La Cour a conclu que le Tribunal, dans cette affaire, avait été en droit de conclure que le demandeur n’avait pas de bonne excuse pour ne pas avoir suivi les recommandations de ses médecins, soit de faire de l’exercice et de perdre du poids.

[31] Dans la présente affaire, la preuve montre que l’appelante n’avait pas donné suite à la recommandation voulant qu’elle soit opérée pour traiter ses varices. Comme je l’ai mentionné plus tôt, son chirurgien vasculaire était prêt en 2008 à procéder à une crossectomie saphénofémorale du côté droit et à de multiples phlébectomies. Il est cependant resté sans nouvelles de l’appelanteNote de bas de page 20. Lors des audiences devant la division générale et la division d’appel, l’appelante a affirmé ne jamais avoir fait l’opération parce qu’elle en craignait les effets secondaires potentiels et que, de toute façon, les bas de compression suffisaient parfois à contrôler le problème.

[32] Selon moi, ces explications ne sont pas raisonnables. Le chirurgien vasculaire de l’appelante est un professionnel qualifié. On peut donc croire qu’il ne lui aurait pas recommandé cette opération à moins d’être convaincu que les avantages possibles dépassaient sûrement les risques. L’appelante a fait valoir qu’une opération n’était pas nécessaire puisque les bas de compression suffisaient [traduction] « parfois » à l’aider. Néanmoins, cela signifie aussi que, « parfois », les bas de compression ne suffisaient pas à l’aider. L’appelante prétend que ses varices l’ont rendue presque immobile. Cette affirmation permet de douter de l’efficacité de la compression, et me laisse perplexe quant aux raisons pour lesquelles elle n’aurait pas essayé une procédure qui aurait pu être bénéfique par rapport aux mesures relativement conservatrices qu’elle utilisait déjà.

[33] L’appelante n’a toujours pas subi de chirurgie vasculaire, plus de 15 ans depuis la première recommandation à cet effet. Je constate une tendance semblable en ce qui concerne son genou gauche. Elle avait approché son chirurgien vasculaire en 2010, parce qu’elle envisageait une chirurgie arthroscopique pour sa lésion méniscale et voulait être sûre que ses varices ne nuiraient pas aux bienfaits de l’opération. Toutefois, le dossier ne révèle aucune chirurgie arthroscopique à ce jour, même si son chirurgien vasculaire lui avait donné le feu vert.

[34] En 2014, l’appelante a vu un chirurgien orthopédiste pour ses genoux. Elle lui a dit que ses symptômes touchaient surtout son genou gauche et qu’elle avait aussi une douleur liée à ses varices. L’examen a révélé que l’appelante avait une bonne amplitude de mouvement dans les hanches et une légère diminution de la flexion des genoux, bien qu’ils soient stables. Les radiographies ont révélé une arthrose modérée aux deux genoux. Le chirurgien orthopédiste n’a pas mentionné la chirurgie arthroscopique, mais a précisé qu’une arthroscopie totale du genou pourrait devenir une option. Entre-temps, on lui avait conseillé de faire de l’exercice et de reprendre la physiothérapie.

[35] Les gens demandant une pension d’invalidité du RPC ne sont pas tenus de suivre irréprochablement chacune des recommandations de leurs prestataires de soins. Toutefois, si les recommandations ne sont pas suivies, une explication raisonnable doit absolument être fournie. D’après ce que je peux voir, les opérations recommandées par les chirurgiens vasculaire et orthopédique de l’appelante avaient de bonnes chances d’améliorer son état de santé. Comme l’appelante n’y a pas donné suite, je dois conclure qu’elle a manqué à son obligation de suivre des traitements raisonnables.

La situation particulière et les caractéristiques personnelles de l’appelante n’avaient pas une forte incidence sur son employabilité

[36] D’après la preuve médicale, je conclus que l’appelante avait une capacité de travail. Cette conviction est renforcée par son employabilité globale.

[37] L’arrêt Villani, qui est l’arrêt clé pour l’interprétation du terme « grave », oblige le Tribunal à examiner « dans son ensemble » et dans un contexte réaliste toute personne qui demande une pension d’invalidité afin de juger de son invalidité Note de bas de page 21 . L’employabilité ne doit pas être évaluée de façon abstraite, mais à la lumière de « toutes les circonstances ».

[38] Ainsi, ma décision sur la capacité de travail de l’appelante ne peut pas strictement reposer sur ses problèmes médicaux. Je dois aussi tenir compte de facteurs comme son âge, son niveau de scolarité, ses aptitudes linguistiques, son expérience de travail et son expérience personnelle. Ces facteurs m’aident à savoir s’il était réaliste que l’appelante travaille durant sa période de protection.

[39] L’appelante avait 54 ans lorsqu’a pris fin sa protection aux fins d’une pension d’invalidité du RPC. Elle est immigrante et l’anglais est sa langue seconde. Aucun de ces facteurs ne lui confère un avantage sur le marché du travail canadien. Elle possède néanmoins plusieurs atouts personnels qui auraient joué en sa faveur dans la recherche d’un emploi.

[40] Premièrement, l’appelante a fait des études et a démontré qu’elle est capable d’apprendre. Elle a terminé l’équivalent d’un diplôme d’études secondaires au Pakistan et a ensuite obtenu un baccalauréat en pharmacie. Des années plus tard, après son arrivée au Canada, elle a tenté de remplir les conditions requises pour devenir pharmacienne agréée au pays. Ce processus nécessitait de faire deux examens d'équivalence canadiens, à l’Université de Toronto. Elle a réussi le premier examen en 2004, mais pas le deuxième. L’appelante a de nouveau essayé le second examen en 2010, mais a échoué de nouveau. Pourtant, l’appelante prétend qu’elle souffrait déjà d’une douleur débilitante à cette époque. À peu près au même moment, elle a aussi suivi des cours d’informatique dans un centre d’apprentissage pour adultes d’Oakville.

[41] L’appelante a une expérience de travail variée. Comme je l’ai dit plus tôt, son dernier emploi avait été dans le service à la clientèle, comme commis des postes dans un Pharmaprix. Cependant, elle a aussi occupé d’autres emplois au Canada, notamment comme assistante en pharmacie chez Walmart, emballeuse chez X et inspectrice en l’assurance de la qualité chez X. Les deux derniers emplois lui permettaient d’être assise la plupart du temps.

[42] Même si sa langue maternelle est l’ourdou, l’appelante avait été capable de décrocher ces emplois et, on peut le présumer, de bien s’acquitter de ses fonctions. Elle dit qu’elle parle anglais, mais pas parfaitement, et qu’elle avait pu décrocher ces emplois parce qu’elle se débrouillait mieux à l’écrit qu’à l’oral en anglais.

[43] Somme toute, je suis convaincu que l’appelante, malgré sa situation particulière, était outillée pour percer le marché du travail canadien durant sa période de protection. Bien qu’elle n’était pas jeune à l’époque, elle était scolarisée et avait une grande expérience de travail en milieu anglophone. En dépit de ses problèmes de santé, l’appelante aurait été capable d’essayer au moins un certain nombre d’emplois, comme des postes administratifs ou semi-spécialisés, en entrée de données, ou en service à la clientèle.

L’appelante n’a pas essayé d’autres emplois

[44] Dans sa décision Inclima, la Cour d’appel fédérale a affirmé qu’une personne qui demande une pension d’invalidité doit faire son possible pour trouver un autre emploi qui soit mieux adapté à ses déficiences :

En conséquence, un demandeur qui dit répondre à la définition d’incapacité grave doit non seulement démontrer qu’il (ou elle) a de sérieux problèmes de santé, mais dans des affaires comme la présente, où il y a des preuves de capacité de travail, il doit également démontrer que les efforts pour trouver un emploi et le conserver ont été infructueux pour des raisons de santéNote de bas de page 22.

[45] Ce passage donne à penser que, dans la mesure où une personne conserve une certaine capacité de travail, la division générale doit chercher à savoir i) si elle a tenté de trouver un autre emploi et, ii) si oui, si ses déficiences l’ont empêchée d’obtenir et de conserver cet emploi.

[46] De plus, une personne qui demande la pension d’invalidité doit faire de réels efforts pour retourner au travailNote de bas de page 23. Sa recherche d’emploi ne peut pas se limiter au type de travail qu’elle faisait avant sa perte de capacité. En effet, elle doit démontrer qu’elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 24. Une personne peut être jugée inadmissible à la pension si elle n’a pas essayé d’obtenir un autre type emploi.

[47] Dans la présente affaire, l’appelante avait au moins conservé une certaine capacité de travail, suffisante pour susciter la recherche d’un emploi qui aurait pu être mieux adapté à ses limitations. Toutefois, l’appelante n’a plus jamais travaillé après avoir quitté Pharmaprix en août 2009. À l’audience, elle a déclaré que son dernier emploi l’obligeait à être debout tout le temps. Je lui ai demandé si elle avait essayé de trouver un emploi moins exigeant pour ses jambes. Elle a dit qu’elle avait essayé, mais qu’aucun poste permettant d’être assis n’était disponible. Elle a ajouté que, même si un tel poste avait été disponible, elle n’aurait pas pu rester assise longtemps et confortablement à cause de ses varices.

[48] Je juge cette explication peu convaincante. L’appelante avait déjà occupé des emplois où elle avait principalement été assise. De plus, comme nous l’avons vu, la preuve médicale datant de la période pertinente révèle que la plupart des problèmes lui causant de la douleur aux jambes étaient traitables, mais qu’elle ne les avait pas traités. Quoi qu’il en soit, le dossier contient très peu de preuves laissant croire que la lésion à son genou gauche ou ses varices l’empêchaient de rester assise de façon prolongée durant sa période de protection.

[49] En fin de compte, je n’ai pas pu évaluer la gravité de l’état de l’appelante en date du 31 décembre 2009. En effet, elle n’a pas fait de réels efforts pour trouver un emploi mieux adapté à ses limitations fonctionnelles. Si elle avait tenté d’occuper un emploi où elle aurait principalement été assise, l’appelante pourrait avoir pu continuer de travailler et, ce faisant, de gagner un revenu véritablement rémunérateur.

Je n’ai pas à vérifier si l’appelante était atteinte d’une invalidité prolongée

[50] L’invalidité doit obligatoirement être grave et prolongéeNote de bas de page 25. Comme l’appelante n’a pas prouvé qu’elle est atteinte d’une invalidité grave, il ne sert à rien de décider si l’invalidité est prolongée.

Conclusion

[51] Même si l’appelante a aujourd’hui d’importants problèmes de santé, la preuve disponible révèle qu’ils l’ont seulement empêchée de travailler plusieurs années après la fin de sa période de protection. De plus, l’appelante n’a pas fait de démarches raisonnables pour traiter ses jambes ni fait de réels efforts pour trouver un autre emploi. Pour ces raisons, je ne suis pas convaincu que son état de santé correspondait à une invalidité grave en date du 31 décembre 2009. Rien ne me laisse croire que l’appelante était régulièrement incapable, à l’époque, d’occuper un emploi véritablement rémunérateur.

[52] L’appel est rejeté.

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