Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : SC c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2023 TSS 1820

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : S. C.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision datée du 16 novembre 2022 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Anne S. Clark
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 31 octobre 2023
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 20 novembre 2023
Numéro de dossier : GP-23-379

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, S. C., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant avait 59 ans lorsqu’il a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Il dit avoir des problèmes de santé physique et mentale qui le rendent incapable de travailler. Il a terminé une 10e année et n’a pas fait d'études ou de formations subséquentes. Il dit avoir toujours occupé des emplois de nature physique. Il affirme qu’il est incapable de travailler depuis 2002.

[4] La dernière demande de pension d’invalidité de l’appelant remonte au 5 mai 2020Note de bas page 1. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelant a porté la décision du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] L’appelant affirme avoir été gravement brûlé dans un camion en feu le 29 août 1990. Il avait été opéré et hospitalisé pendant plusieurs semaines. Il avait ensuite eu besoin de thérapie pour retrouver sa force avant de pouvoir reprendre le travail. Il a dit qu’il ne se souvenait plus de la date de son retour au travail. Il avait toutefois occupé différents emplois quelques années après avoir été brûlé.

[6] L’appelant affirme qu’il est incapable d’obtenir des preuves concernant ses blessures et ses problèmes de santé vers 1997. L’un de ses médecins était décédé et l’hôpital ne conserve pas de dossiers aussi longtemps. Il dit que l’incendie dans le camion lui a causé un trouble de stress post-traumatique (TSPT). Au début, il n’avait pas voulu être traité et n’en ressentait pas le besoin. Il a seulement mentionné ses symptômes de TSPT à son médecin il y a sept ou huit ans.

[7] L’appelant s’est blessé au genou en 2012 et a dû subir une intervention chirurgicale. Il pense que cet incident marque le moment où il a complètement cessé d’essayer de travailler. Il a aussi fait une crise cardiaque et a dû être opéré au cœur en 2016.

[8] Selon le ministre, rien ne permet de conclure que l’appelant était invalide en date du 31 décembre 1997. Le ministre a dit qu’il lui avait été impossible d’obtenir des preuves datant de cette époque, malgré ses nombreuses tentatives. L’appelant a travaillé après 1997, mais le ministre n’a pas pu obtenir d'informations détaillées sur ses emplois.

[9] Le ministre affirme que l’appelant n’a pas démontré qu’il était atteint d’une invalidité grave en date du 31 décembre 1997.

Ce que l’appelant doit prouver

[10] Pour avoir gain de cause, l’appelant doit prouver qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en date du 31 décembre 1997. Cette date est établie en fonction des cotisations qu’il a versées au Régime de pensions du CanadaNote de bas page 2.

[11] Le Régime de pensions du Canada définit les termes « grave » et « prolongée ».

[12] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas page 3.

[13] Pour décider si l’invalidité de l’appelant est grave, je dois examiner l’effet global de ses problèmes de santé sur sa capacité de travailler. Si l’appelant est régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permet de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[14] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit vraisemblablement entraîner le décèsNote de bas page 4.

[15] Autrement dit, aucun rétablissement ne doit être prévu. Pour être prolongée, l’invalidité de l’appelant doit l’obliger à quitter le marché du travail pendant très longtemps.

[16] L’appelant doit prouver qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en date du 31 décembre 1997, selon la prépondérance des probabilités. En d’autres mots, il doit me convaincre qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est invalide.

Questions que je dois examiner en premier

L’appelant avait besoin de plus de temps pour se préparer à l’audience

[17] La preuve au dossier traite très peu de la santé de l’appelant en date du 31 décembre 1997. Le ministre a dit avoir été incapable d’obtenir des documents de l’époque relatifs à sa santé et à son emploi. L’appelant n’a déposé aucun élément de preuve, mais affirme qu’il est atteint d’une invalidité grave depuis 1990.

[18] J’ai invité les parties à prendre part à une conférence préparatoire pour discuter des règles qui entourent l’appel et de l’importance de preuves pertinentes. L’appelant a dit qu’il lui fallait plus de temps pour tenter d’obtenir des éléments de preuve pertinents. Le représentant du ministre ne s’est pas opposé à ce qu’il ait plus de temps pour tenter de mettre la main sur une preuve médicaleNote de bas page 5.

[19] Le 13 septembre 2023, l’appelant a déclaré ne plus avoir d’éléments de preuve à fournir et être prêt à procéder.

Motifs de ma décision

[20] Je conclus que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en date du 31 décembre 1997.

L’invalidité de l’appelant était-elle grave?

[21] L’appelant n’était pas atteint d’une invalidité grave. J’ai tiré cette conclusion en examinant plusieurs facteurs. Les voici.

Les limitations fonctionnelles de l’appelant ne nuisaient pas à sa capacité de travail en date du 31 décembre 1997

[22] L’appelant dit avoir les problèmes de santé suivants :

[23] Toutefois, un diagnostic ne suffit pas à régler la question de son invaliditéNote de bas page 10. Je dois plutôt voir si des limitations fonctionnelles l’empêchent de gagner sa vieNote de bas page 11. Dans cette optique, je dois tenir compte de tous ses problèmes de santé (pas juste du plus important) et de leur effet sur sa capacité à travailler en date du 31 décembre 1997Note de bas page 12.

[24] Je conclus que l’appelant n’avait pas de limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité de travail en date du 31 décembre 1997.

Ce que l’appelant dit de ses limitations fonctionnelles

[25] L’appelant affirme qu’il a des problèmes de santé qui causent des limitations fonctionnelles nuisant à sa capacité de travail. Il dit avoir été gravement brûlé en 1990. Il a des symptômes de TSPT depuis cet incident. Il a seulement cherché à être traité pour ces symptômes il y a de cela sept ou huit ansNote de bas page 13.

[26] L’appelant a déclaré avoir pu travailler pendant quelques années après avoir été brûlé. Il ne se souvient pas de tous ses emplois ni de leurs dates. Il se souvient que ses emplois manuels avaient aggravé tous ses symptômes. En 2011, il a commencé à avoir de la difficulté avec les interactions sociales. Une certaine paranoïa s’est installée chez lui et il a commencé à bégayer. Il est devenu très difficile pour l’appelant d’essayer de travailler. Il a dû être opéré pour une blessure au genou en 2012, et au dos en janvier 2021, tant son état s’était détérioré.

Ce que la preuve médicale révèle sur les limitations fonctionnelles de l’appelant

[27] L’appelant doit fournir des éléments de preuve médicale qui montrent que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travailler en date du 31 décembre 1997Note de bas page 14.

[28] La preuve médicale ne corrobore pas ce que dit l’appelant. Les rapports médicaux et son témoignage confirment que la plupart des problèmes de santé pouvant nuire à sa capacité de travail sont apparus des années après 1997. Il n’y a aucune preuve médicale qui montre que ses problèmes de santé l’empêchaient de travailler en date du 31 décembre 1997. Certaines notes précisent que l’appelant avait subi de graves brûlures lors d’un feu dans un camion, en 1990. Ces notes ne font toutefois mention d’aucune limitation fonctionnelle qui aurait pu être causée par ces brûluresNote de bas page 15.

[29] Le docteur Smith, le médecin de famille de l’appelant, a diagnostiqué chez lui un TSPT lié au feu de 1990. Il n’a pas expliqué quand ces symptômes seraient apparus ni quand ils auraient pu nuire à la capacité de l’appelant de travailler. Il affirme toutefois que le TSPT est lié au feu de 1990 et qu’il amoindrit les capacités de l’appelant.

[30] L’appelant a seulement vu le docteur Smith en 2009. Il a dit qu’il lui avait seulement parlé de ses symptômes de TSPT plusieurs années plus tard (pas avant 2012). Les notes du docteur Smith confirment que l’appelant avait subi des blessures et qu’il est atteint d’un TSPT. L’effet du TSPT sur ces capacités n’est toutefois pas précisé. Il est difficile de comprendre comment le docteur Smith pourrait, sans aucune information, produire une preuve sur la santé de l’appelant en 1997. Il a dit qu’il n’avait accès à aucun dossier médical et qu’il avait commencé à traiter l’appelant en 2009. Je remarque aussi que le docteur Smith a dit que l’appelant avait travaillé jusqu’en 2001 ou 2002. Il a dit qu’il lui avait recommandé de cesser de travailler en 2002. Il a aussi dit que l’invalidité de l’appelant est [traduction] « aujourd’hui » (2016) attribuable à ses douleurs au genou et au bas du dosNote de bas page 16.

[31] Il y a des preuves montrant que les brûlures ont eu lieu en 1990 et qu’elles pourraient avoir entraîné des symptômes du TSPT. Cependant, aucune preuve médicale ne montre quand ou comment les symptômes de TSPT (ou les brûlures) ont nui à la capacité de travail de l’appelant. Cela concorde d’ailleurs avec le fait que la preuve disponible et le témoignage de l’appelant révèlent qu’il a continué de travailler jusqu’en 2002, au minimumNote de bas page 17.

[32] La preuve médicale ne démontre pas que l’appelant avait des limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité de travailler en date du 31 décembre 1997. Par conséquent, l’appelant n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave.

Pourquoi je n’ai pas tenu compte des caractéristiques personnelles de l’appelant

[33] Pour décider si une invalidité est grave, je dois normalement tenir compte des caractéristiques personnelles de l’appelant. En effet, des facteurs comme son âge, son éducation, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de vie peuvent avoir une incidence sur sa capacité de travailler dans un contexte réalisteNote de bas page 18.

[34] Ici, je n’ai pas examiné les caractéristiques personnelles de l’appelant. En effet, ces caractéristiques ne peuvent à elles seules le rendre admissible à une pension d’invalidité. Une preuve médicale demeure essentielle pour confirmer une invaliditéNote de bas page 19.

[35] L’appelant n’a pas fourni de preuve démontrant qu’il était invalide en date du 31 décembre 1997. En l’absence d’une preuve médicale pertinente, il est inutile d’examiner ses caractéristiques personnelles.

[36] L’appelant n’a pas prouvé qu’il avait des limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité de travail en date du 31 décembre 1997. Par conséquent, il n’a pas prouvé qu’il avait une invalidité grave dans le délai nécessaireNote de bas page 20.

Conclusion

[37] Je conclus que l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada puisqu’il n’était pas atteint d’une invalidité grave. Étant donné que l’invalidité doit obligatoirement être grave et prolongée, il ne sert à rien de décider si son invalidité était prolongée.

[38] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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