Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Citation : KH c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 220

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division d’appel

Décision

Partie appelante : K. H.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social
Représentante ou représentant : Yanick Bélanger

Décision portée en appel : Décision de la division générale datée du
23 mai 2023 (GP-21-2445)

Membre du Tribunal : Jude Samson
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 31 janvier 2024
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant de l’intimé
Date de la décision : Le 5 mars 2024
Numéro de dossier : AD-23-794

Sur cette page

Décision

[1] Je rejette l’appel de la requérante, K. H. Elle n’est pas admissible à une pension d’invalidité au titre du Régime de pensions du Canada.

Aperçu

[2] La requérante a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Elle affirme être incapable de travailler parce qu’elle est atteinte de fibromyalgie, de fatigue et de dépression. Elle fait aussi des crises d’anxiété et a des migraines. De plus, elle a des idées suicidaires, et elle est atteinte d’agoraphobie, d’arthrite et d’arthrose ainsi que de la maladie de Raynaud.

[3] Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté la demande de la requérante. Il a jugé qu’elle n’était pas atteinte d’une invalidité grave et prolongée au titre du Régime de pensions du Canada en date du 30 septembre 2013.

[4] La requérante a porté la décision du ministre en appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale. Celle-ci a rejeté l’appel.

[5] La requérante a ensuite porté la décision de la division générale en appel devant la division d’appel. J’ai accordé la permission de faire appel à la requérante et j’ai jeté un regard neuf sur l’affaireNote de bas page 1. Cependant, j’estime que la requérante n’est pas admissible à une pension d’invalidité.

Question en litige

[6] La requérante avait-elle une invalidité grave et prolongée au plus tard le 30 septembre 2013?

Analyse

[7] Pour être admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada, une personne doit prouver qu’elle était atteinte d’une invalidité grave et prolongée avant la date marquant la fin de sa période minimale d’admissibilité. La période minimale d’admissibilité de la requérante se termine en décembre 2012 avec une possibilité de prolongation jusqu’au 30 septembre 2013Note de bas page 2.

[8] Une personne est considérée comme étant atteinte d’une invalidité grave si elle est régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Le critère de gravité doit faire l’objet d’une analyse dans un contexte réalisteNote de bas page 3 . Cela signifie qu’au moment de décider si l’invalidité d’une personne est grave, je dois tenir compte de son état global et d’éléments comme son âge, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de vieNote de bas page 4.

[9] Je souligne également les renseignements importants suivants de la Cour d’appel fédérale :

  • la gravité de l’invalidité n’est pas fondée sur l’incapacité de la partie demanderesse d’occuper son emploi régulier, mais plutôt sur son incapacité de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas page 5;
  • c’est la capacité de travailler et non le diagnostic ou la description de la maladie qui détermine la gravité de l’invalidité au titre du Régime de pensions du CanadaNote de bas page 6;
  • dans les cas où il y a des éléments de preuve de capacité de travail, la partie demanderesse doit démontrer qu’elle a fait des efforts pour trouver un emploi et le conserver, mais que ses efforts ont été infructueux pour des raisons de santéNote de bas page 7.

La requérante n’était pas atteinte d’une invalidité grave au plus tard le 30 septembre 2013

[10] Il est évident que la requérante a eu des problèmes de santé pendant une grande partie de sa vie. De plus, il est certain que ces problèmes de santé ont eu une incidence sur sa capacité à gagner sa vie. J’ai beaucoup de sympathie pour la requérante et les difficultés qu’elle a rencontrées pour contribuer aux finances de sa famille.

[11] Bien que l’état de santé de la requérante se soit détérioré au fil du temps, la requérante a déclaré lors de l’audience qu’en septembre 2013, elle avait déjà de graves limitations fonctionnelles qui l’empêchaient de travailler. À ce sujet, la requérante a mis l’accent sur ses problèmes de santé qui existaient avant le 30 septembre 2013, soit la dépression, les douleurs chroniques, la fibrillation auriculaire (battements de cœurs irréguliers et souvent très rapides), l’apnée du sommeil, et l’hypertension artérielle.

[12] Je reconnais que la requérante avait des limitations fonctionnelles en 2013. Cependant, je ne peux pas conclure qu’elle avait une invalidité grave à ce moment-là.

[13] La présence de certaines conditions ne signifie pas qu’une personne est incapable de travailler. Au contraire, la requérante a travaillé en 2014 et en 2016. De plus, les preuves montrent que sa santé s’est détériorée plus rapidement en 2016. C’est à ce moment-là que l’invalidité de la requérante aurait pu devenir grave.

La requérante avait une occupation véritablement rémunératrice en 2014

[14] Le fait que la requérante ait occupé une occupation véritablement rémunératrice en 2014 est incompatible avec la présence d’une invalidité grave en septembre 2013Note de bas page 8.

[15] La requérante a travaillé pour le gouvernement provincial de novembre 2013 jusqu’en décembre 2014. Selon elle, ce travail était intermittent. Elle affirme qu’elle a pu effectuer ce travail parce qu’il s’agissait d’un travail très léger, qu’elle bénéficiait de nombreuses mesures d’adaptation et qu’elle avait le temps de récupérer entre les périodes de travail.

[16] Le relevé des heures travaillées pendant cette période confirme le caractère intermittent du travail de la requéranteNote de bas page 9. Cependant, il montre également que ses heures de travail s’élevaient souvent à plus de 40 heures par semaineNote de bas page 10. Aussi, bien qu’une superviseure confirme qu’elle a bénéficié de mesures d’adaptation importantes au travail en 2016, il n’y a pas de preuve équivalente pour le travail qu’elle a effectué en 2013 et 2014Note de bas page 11.

[17] Pour évaluer si la requérante avait une invalidité grave, je dois tenir compte de sa capacité d’effectuer des tâches modifiées à son lieu de travail habituel ainsi que le travail à temps partiel, le travail sédentaire, et le travail saisonnierNote de bas page 12. J’accorde alors beaucoup d’importance au travail que la requérante a accompli en 2014 et 2016, car ces années sont parmi celles où elle a gagné le plus de revenus de sa vieNote de bas page 13.

La preuve médicale ne démontre pas une invalidité grave en septembre 2013

[18] Il est évident que la requérante avait plusieurs problèmes de santé en 2013 et 2014. Cependant, il est également clair qu’elle a pu faire face à ces problèmes dans une certaine mesure pendant de nombreuses années et qu’elle a même pu travailler de temps en temps.

[19] Les notes cliniques révèlent que la requérante a consulté son médecin de famille à quelques reprises en 2013 et 2014. Elle se plaignait principalement de symptômes comme la fatigue, les bouffées de chaleur, des battements irréguliers du cœur, des douleurs sciatiques occasionnelles et des douleurs musculairesNote de bas page 14. Cependant, ceux-ci ne révèlent pas de limitations fonctionnelles qui empêcheraient la requérante d’effectuer un travail véritablement rémunérateur.

[20] En revanche, la preuve médicale révèle une détérioration importante de l’état de santé de la requérante en 2016. Par exemple, la requérante a fait l’objet d’une évaluation psychiatrique en 2018, au cours de laquelle elle a signalé qu’elle vivait des moments difficiles depuis l’hiver 2016Note de bas page 15.

[21] De plus, la requérante a signalé à son infirmière praticienne une augmentation de ses douleurs en novembre 2018Note de bas page 16. Elle a ensuite consulté un rhumatologue en 2019, date à laquelle on lui a posé un diagnostic de fibromyalgieNote de bas page 17.

[22] En effet, les preuves de la requérante sont conformes aux preuves médicales. Elle n’a pas travaillé depuis 2016. Dans son formulaire de demande, elle a déclaré être invalide depuis août 2016Note de bas page 18. Puis, au cours de l’audience, la requérante a confirmé que son état de santé s’était considérablement détérioré depuis 2016.

[23] L’âge de la requérante, son niveau d’instruction, ses aptitudes linguistiques, ses antécédents de travail et son expérience de vie ne faisaient pas obstacle à sa capacité de travailler en septembre 2013.

[24] En somme, j’estime que la requérante n’avait pas une invalidité grave en septembre 2013 et qu’elle n’est pas non plus admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

[25] Compte tenu de cette conclusion, je n’ai pas à vérifier si l’invalidité de la requérante était prolongée.

[26] Je sympathise avec la situation de la requérante. Elle a manifestement besoin d’aide. Cependant, je n’ai d’autre choix que d’appliquer la définition très restrictive du Régime de pensions du Canada concernant le critère d’une invalidité grave. Malheureusement, cette définition ne regroupe pas toutes les personnes atteintes de déficiences sérieuses et prolongéesNote de bas page 19.

[27] Avant de conclure, je mentionnerai simplement que le Parlement a adopté une nouvelle loi créant la prestation canadienne pour les personnes handicapées. Cette prestation ne peut arriver assez tôt pour les personnes comme la requérante (en supposant qu’elle y sera admissible).

Conclusion

[28] Je rejette l’appel de la requérante. Elle n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

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