Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : NS c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 93

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : N. S.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision datée du 22 juillet 2022 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Michael Medeiros
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 9 janvier 2024
Personne présente à l’audience : Appelant
Date de la décision : Le 29 janvier 2024
Numéro de dossier : GP-23-554

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelant, N. S., est admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Le versement de la pension doit commencer en janvier 2021. La présente décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant a 38 ans. Il a cessé de travailler en novembre 2018 pour être opéré à la thyroïde et à la bouche. En juillet 2019, durant sa convalescence, une greffe de côte qu’il avait subie au nez en 2016 a mal tourné. Les choses les plus simples, comme respirer ou avaler, sont depuis devenues difficiles pour lui.

[4] L’appelant a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada le 5 décembre 2021. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelant a porté en appel la décision du ministre devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] L’appelant affirme être atteint d’une invalidité grave et prolongée. Ses symptômes sont accablants. Le peu de choses qu’il demeure capable de faire lui demande beaucoup de temps et d’énergie. Après trois ans d'attente pour une intervention chirurgicale correctrice, il a récemment appris qu’il lui faudrait trouver un autre chirurgien. Il ne dispose actuellement d’aucun plan de traitement réaliste pour son problème de santé.

[6] Selon le ministre, la preuve ne montre pas que l’appelant est incapable d’occuper un emploi adapté à ses limitations. Son médecin de famille a parlé de la possibilité qu’il soit capable de faire chez lui un travail sédentaire à temps partiel. Son âge et ses études ne sont pas des obstacles à un autre emploi. L’opération, même si elle a été retardée, est censée améliorer ses symptômes et lui permettre de reprendre le travail après sa convalescence.

Ce que l’appelant doit prouver

[7] Pour gagner son appel, l’appelant doit prouver qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en date du 31 décembre 2021, soit au plus tard le 31 décembre 2021. Cette date est établie en fonction des cotisations qu’il a versées au Régime de pensions du CanadaNote de bas de page 1. L’appelant doit aussi prouver qu’il est encore invalideNote de bas de page 2.

[8] Le Régime de pensions du Canada définit les adjectifs « grave » et « prolongée ».

[9] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 3.

[10] Pour décider si l’invalidité de l’appelant est grave, je dois examiner l’effet global de ses problèmes de santé sur sa capacité de travailler. Je dois aussi tenir compte de facteurs comme son âge, son niveau de scolarité, ses aptitudes linguistiques, son expérience de travail et son expérience personnelle. Ces facteurs me font voir sa situation de façon réaliste. Ils m’aident à décider si son invalidité est grave. Si l’appelant est régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permet de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[11] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 4.

[12] Autrement dit, aucun rétablissement ne doit être prévu. Pour être prolongée, l’invalidité de l’appelant doit l’obliger à rester à l’écart du marché du travail pendant très longtemps.

[13] L’appelant doit prouver qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée selon la prépondérance des probabilités. En d’autres mots, il doit me convaincre qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est invalide.

Motifs de ma décision

[14] Je conclus qu'une invalidité grave et prolongée est apparue chez l'appelant entre juillet et septembre 2019, à l'époque où sa greffe au nez a mal tourné. L'appelant est toujours invalide. J’ai tiré cette conclusion après avoir examiné les questions suivantes :

  • L’invalidité de l’appelant était-elle grave?
  • L’invalidité de l’appelant était-elle prolongée?

L’invalidité de l’appelant était-elle grave?

[15] L’appelant est atteint d’une invalidité grave. J’ai basé ma conclusion sur plusieurs facteurs. Les voici.

Les limitations fonctionnelles de l’appelant nuisaient à sa capacité de travail

[16] Voici les problèmes de santé diagnostiqués chez l’appelant :

  • malformation nasale acquise (effondrement de la cavité sinusale);
  • trouble obsessionnel compulsif (TOC);
  • trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH);
  • dépression;
  • trouble somatoforme.

[17] Toutefois, un diagnostic ne suffit pas à régler la question de son invaliditéNote de bas de page 5. Je dois plutôt voir si des limitations fonctionnelles l’empêchent de gagner sa vieNote de bas de page 6. Dans cette optique, je dois tenir compte de tous ses problèmes de santé (pas juste du plus important) et de leur effet sur sa capacité à travaillerNote de bas de page 7.

[18] Je conclus que l’appelant a des limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité de travail.

Ce que l’appelant dit de ses limitations fonctionnelles

[19] L’appelant affirme que des limitations fonctionnelles causées par ses problèmes de santé nuisent à sa capacité de travailler. Le peu qu’il peut faire prend beaucoup de temps et l’épuise énormément. L’appelant a dit que [traduction] « chaque seconde de chaque jour est une bataille pour [lui] à ce stadeNote de bas de page 8 ».

[20] L’appelant a de la difficulté à respirer depuis l’enfance. Il a été opéré au nez en 2003 pour régler ce problème. Bien que l’opération ait d’abord été bénéfique, les problèmes affectant sa respiration et ses sinus ont repris de plus belle.

[21] En 2016, il a subi une autre opération au nez comprenant une greffe de côte. À la suite de cette opération, il s'est mis à avoir régulièrement des infections aux sinus. Il s’absentait souvent du travail. Il avait aussi de la difficulté à avaler. Il a consulté divers médecins pour ses problèmes. Ils ont fini par découvrir une tumeur bénigne ainsi qu’une dent infectée, qui ont toutes deux nécessité une intervention chirurgicale.

[22] L’appelant a cessé de travailler comme messager en novembre 2018 pour subir une opération à thyroïde et à la bouche. Il a subi trois opérations, dont la dernière en mai 2019. Pendant sa convalescence, ses problèmes de déglutition ont refait leur apparition. Sa respiration est devenue problématique. Il était étourdi toute la journée et n’avait pas d’énergie. Il composait avec des pertes et de l’obstruction nasales à longueur de journée. Quelques semaines plus tard (vers juillet 2019, selon ses estimations), il a remarqué que la greffe de côte dans son nez était désormais tordue et que sa narine droite s’était visiblement effondrée.

[23] Comme toujours, l’appelant a essayé de trouver des réponses à ses problèmes de santé. Il a fini par être dirigé vers le docteur Ansari. L’attente était longue pour le voir. En juillet 2020, le docteur Ansari a recommandé une intervention chirurgicaleNote de bas de page 9. L’appelant a été mis sur une liste d’attente à cet effet. Tout en disant à l’appelant qu'il ne s'agissait pas d'une opération facile, le docteur Ansari croyait pouvoir, au minimum, rétablir sa respiration de façon à ce qu'il vive une vie normale.

[24] L’appelant est resté sur la liste d’attente jusqu’au 26 juin 2023. C'est alors que le bureau du docteur Ansari l’a informé qu’il ne pourrait pas l’opérerNote de bas de page 10. L’appelant n’a pas été dirigé vers un autre chirurgien.

[25] Les symptômes de l'appelant n'ont pas tardé à se manifester quand sa greffe a mal tourné (entre juillet 2019 et septembre 2019). Ils se sont aggravés depuis. Depuis au moins septembre 2019, les problèmes touchant les aspects suivants de sa santé lui causent des limitations :

  • Respiration – Il a de la difficulté à bien respirer. Il ne peut pas faire d’effort physique. Il lui est devenu quasi impossible de déboucher son nez. Il passe la majeure partie de son temps à essayer de déboucher ses sinus en passant par l’arrière, soit par sa gorge. Il doit nettoyer ses sinus toutes les heures, sinon, il devient encore plus difficile d'enlever les sécrétions accumulées qui bloquent sa respiration.
  • Alimentation – À cause du blocage constant à l’arrière de sa gorge, il s’étouffe souvent en mangeant. Il doit manger très lentement. Il lui faut jusqu’à 90 minutes pour manger un repas. Manger l'épuise et il doit se reposer après avoir mangé.
  • Énergie – Il n’en a pas. Il se sent fatigué toute la journée.
  • Sommeil – Il n’a pas bien dormi depuis la défaillance de sa greffe au nez. Il doit dormir assis. Il a trop de difficulté à respirer lorsqu’il est allongé. Il tombe de sommeil toute la journée.
  • Activité quotidienne – Il a beaucoup de mal à accomplir des tâches. Il peut seulement conduire sur de courtes distances. Il lui faut des heures pour se préparer à quitter la maison. Il lui est difficile de prendre sa douche et de se raser. Il ne peut pas faire de tâches ménagères ni rien de physique. Il dépend de l’aide de ses parents.
  • Concentration – Il perd sa concentration après environ 20 à 30 minutes. N'importe quelle tâche lui prend beaucoup de temps.
  • Travail à l’ordinateur – Après seulement 30 minutes devant un écran d’ordinateur, il attrape des maux de tête et devient étourdi.
  • Interactions sociales – Il quitte rarement la maison. Lorsqu’il le fait, il lui faut beaucoup de temps pour se préparer. Il lui est difficile d’être avec d’autres personnes parce qu’il doit toujours déboucher ses sinus. Il a du mal à avoir une conversation parce qu’il bouge et renifle beaucoup.
  • Humeur – Ses limitations le rendent de plus en plus déprimé. Il est sans espoir depuis la dernière opération, qui n’a pas porté fruit.

[26] L’appelant n’a pas d'emploi depuis novembre 2018Note de bas de page 11. Il a un peu travaillé le week-end comme barman au restaurant de ses parents, pour les aider quelques mois à la fin de 2019 au début de 2020Note de bas de page 12. Il lui fallait toute la journée pour se préparer. Ses quarts de travail comptaient quatre heures, mais il passait la moitié du temps en arrière à déboucher ses sinus. Parfois, il n’arrivait pas à se présenter au restaurant. Il n’était pas payé. Il l’avait seulement fait pour sortir de la maison et composer avec sa dépression.

Ce que la preuve médicale révèle sur les limitations fonctionnelles de l’appelant

[27] L’appelant doit soumettre des éléments de preuve médicale qui montrent que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travailler en date du 31 décembre 2021Note de bas de page 13.

[28] La preuve médicale confirme la version des faits de l’appelant.

[29] Son médecin de famille de l’époque, le docteur Fowler, a confirmé une malformation nasale acquise (nez en lorgnette), accompagnée d’une importante perforation nasale depuis novembre 2017Note de bas de page 14. Le docteur Fowler a noté les limitations et les symptômes suivants :

  • obstruction nasale bilatérale avec essoufflement et difficulté à respirer moyennant un léger effort;
  • difficulté à avaler et épisodes d’étouffement fréquents – doit manger lentement;
  • fatigue rapide.

[30] Le 19 novembre 2018, le docteur Fowler a recommandé que l’appelant cesse de travaillerNote de bas de page 15. Il lui a écrit des lettres d’absence pour la période allant de novembre 2018 à juillet 2019, pour qu’il puisse subir ses opérations à la thyroïde et à la boucheNote de bas de page 16. Sa dernière opération remonte à mai 2019, et sa convalescence avait duré jusqu’en juillet 2019Note de bas de page 17.

[31] Dans ses notes, le docteur Fowler décrit un rendez-vous de septembre 2019 et note que la cloison nasale de l’appelant s’était effondrée et avait dévié vers la droite au cours des dernières semainesNote de bas de page 18. Il avait de la difficulté à respirer du côté droit.

[32] L’appelant a fini par être dirigé vers un chirurgien spécialisé, le docteur Ansari, qui a d’abord accepté de procéder à une intervention chirurgicale correctriceNote de bas de page 19. En examinant l’appelant en mars 2021, le docteur Ansari a noté une pointe du nez tombante prononcéeNote de bas de page 20. La narine droite de l’appelant s’était complètement effondrée et sa narine gauche s’était effondrée à près de 75 %. Le docteur Ansari a déclaré qu’il serait difficile pour l’appelant de faire l’activité physique intense nécessaire à son emploi de livreur.

[33] Des preuves médicales témoignent aussi de problèmes de santé mentale. En septembre 2019, le docteur Fowler a noté chez l’appelant de tels problèmes, notamment sa déprime, son retrait et ses difficultés à quitter sa maisonNote de bas de page 21. On lui a prescrit de l’escitalopram. Il a aussi été dirigé vers un psychiatre, le docteur Atigari, qui a diagnostiqué en janvier 2020 un trouble somatoforme et un trouble dépressif persistantNote de bas de page 22. En septembre 2020, l’appelant a subi une autre évaluation psychiatrique par le docteur Pierson, qui a plutôt diagnostiqué un TOC (obsession chronique de déboucher ses sinus) et un TDAHNote de bas de page 23.

[34] En mars 2021, le docteur Fowler a déclaré que l’appelant pourrait être capable d’occuper un poste sédentaire à temps partiel de la maison, avec des heures flexiblesNote de bas de page 24. Il n’était pas capable de travailler ailleurs que chez lui ni à temps plein ni de faire un emploi qui exige un effort physique. En date de janvier 2022, le docteur Fowler s’attendait à ce que l’appelant recommence à travailler dans les 12 à 24 prochains moisNote de bas de page 25. Il devait encore subir une intervention chirurgicale correctrice. Celle-ci avait été retardée à cause de la pandémie de COVID-19.

[35] La preuve médicale confirme que les limitations fonctionnelles de l'appelant nuisaient à sa capacité de travailler.

[36] Je vais maintenant voir si l’appelant a suivi les conseils médicaux.

L’appelant a raisonnablement suivi les conseils médicaux

[37] Pour avoir droit à une pension d’invalidité, une personne doit suivre les traitements recommandésNote de bas de page 26. Si les conseils des médecins n’ont pas été suivis, une explication raisonnable doit être fournieNote de bas de page 27.

[38] L’appelant a raisonnablement suivi les conseils médicaux.Note de bas de page 28 Il a consulté de nombreux médecins pour traiter ses symptômes. Il a pris les médicaments prescrits. Il est prêt à subir une intervention chirurgicale correctrice. Il a fait de la thérapie pour sa santé mentale, mais a arrêté à défaut de l'avoir jugée utile.

[39] Je conclus que l’appelant a une explication raisonnable pour ne pas avoir poursuivi la psychothérapie. Il a essayé, mais s’en est senti plus déprimé. Il a vu un thérapeute pendant plusieurs mois, jusqu’en octobre 2019Note de bas de page 29. Il a ensuite été dirigé vers le docteur Antigari en janvier 2020, mais cette expérience n'a pas été positive. On lui a fait sentir que ses symptômes étaient dans sa tête. Il croyait pourtant que le docteur Ansari avait confirmé ses impressions. Il a ensuite vu le docteur Pierson en septembre 2020. Cette expérience lui a plu davantage, mais il ne l'a quand même pas trouvée très utile. L’appelant croit que ses problèmes de santé mentale sont liés à ses problèmes de sinus, et que son état mental s’améliorera une fois qu'ils seront adéquatement traités.

[40] À présent, je dois chercher à savoir si l’appelant est régulièrement capable d’occuper d’autres types d’emplois. Pour être graves, ses limitations fonctionnelles doivent l’empêcher de gagner sa vie, peu importe l’emploi, et pas seulement le rendre incapable d’occuper son emploi habituelNote de bas de page 30.

L’appelant est incapable de travailler dans un contexte réaliste

[41] Mon analyse ne peut pas s’arrêter aux problèmes médicaux et à leur effet fonctionnel. Pour décider si l’appelant est capable de travailler, je dois aussi tenir compte des facteurs suivants :

  • son âge;
  • son niveau de scolarité;
  • ses aptitudes linguistiques;
  • son expérience de travail et de vie.

[42] Ces facteurs m’aident à savoir si l’appelant est capable de travailler dans un contexte réaliste. Autrement dit, est-il réaliste de dire qu’il peut travaillerNote de bas de page 31?

[43] S’il est réaliste qu’il travaille, l’appelant doit montrer qu’il a essayé de trouver et de garder un emploi. Il doit aussi montrer que ses efforts ont échoué à cause de sa santéNote de bas de page 32. Une personne fait des efforts pour trouver et garder un emploi si, par exemple, elle suit une nouvelle formation ou cherche un emploi adapté à ses limitations fonctionnellesNote de bas de page 33.

[44] Je conclus que l’appelant est incapable de travailler dans un contexte réaliste. Il est incapable de travailler depuis au moins septembre 2019, quand la défaillance de sa greffe a exacerbé ses symptômes au nez. Je ne suis pas d’accord avec le ministre pour dire que l’appelant a la capacité d’occuper un emploi véritablement rémunérateur. Certes, il est jeune, a de l’expérience de travail dans divers domaines et a fait trois ans d’études collégiales. Ces facteurs pourraient l’aider à trouver un emploi. Toutefois, ils ne pallient pas ses graves limitations qui l’empêchent d’occuper un emploi véritablement rémunérateur.

[45] Voici comment ses problèmes de santé limitent sérieusement ses capacités fonctionnelles depuis au moins septembre 2019 :

  • Tâches physiques – Il est constamment fatigué. Il ne peut pas faire d’effort physique. Ses parents l’aident à faire la plupart des tâches quotidiennes.
  • Tâches sédentaires Il ne peut se concentrer plus de 30 minutes à la fois, y compris à l’ordinateur. S’il se pousse trop, il en fait les frais plus tard.
  • Vie sociale Il quitte rarement la maison. Il a de la difficulté à interagir avec les autres.
  • Respect d’un horaire Il lui faut des heures pour se préparer avant de quitter la maison, et il lui arrive quand même d’être en retard à des rendez-vous. Il lui faut beaucoup de temps pour faire quoi que ce soit. Il doit se reposer fréquemment tout au long de la journée.

[46] Je ne suis pas d’accord avec le ministre pour dire que la preuve confirme une capacité de travail sédentaire. Le docteur Fowler a déclaré en mars 2021 que l’appelant [traduction] « pourrait être capable d’occuper un poste sédentaire à temps partiel de la maison, avec un horaire flexible ». Il n’avait pas dit qu’il en était capable ou probablement capableNote de bas de page 34. En outre, la preuve de l’appelant corrobore fortement une incapacité à faire tout type d’emploi.

[47] Sa seule « tentative » de travail avait consisté à travailler gratuitement comme barman au restaurant de ses parents le week-end, et cette expérience n’avait fait que confirmer qu’il ne pouvait pas faire un travail véritablement rémunérateur. Il passait la moitié de ses quarts de travail à s’occuper de son nez. Il trouvait cette situation épuisante mentalement et physiquement. Il avait dû arrêter après quelques mois.

[48] À mon avis, un travail véritablement rémunérateur est irréaliste, même à temps partiel à la maison. J’accepte la preuve de l’appelant quant aux limitations importantes qu’il vit au quotidien. Le peu qu’il peut faire prend beaucoup de temps et l’oblige à faire de nombreuses pauses, et parfois même à dormir. On ne peut pas s’attendre à ce qu’il quitte la maison, travaille à l’ordinateur ou soit productif de quelque façon que ce soit. Il est difficile d’imaginer un emploi véritablement rémunérateur qui pourrait convenir à ces limitations importantes.

[49] Je conclus que l’invalidité de l’appelant était grave en septembre 2019.

L’invalidité de l’appelant était-elle prolongée?

[50] L’appelant est atteint d’une invalidité prolongée.

[51] Les problèmes de santé de l’appelant ont commencé peu de temps après la défaillance de sa greffe au nez, au maximum en septembre 2019. Ces problèmes ont persisté depuisNote de bas de page 35 et ses symptômes n’ont fait que s’aggraver. Bien qu’une intervention chirurgicale correctrice soit porteuse d’espoir, l'appelant n’a toujours pas pu en bénéficier.

[52] Il est plus que probable que les problèmes de santé de l’appelant durent indéfiniment. Les éléments de preuve suivants confirment l’absence d’une solution raisonnablement prévisible à son problème au nez :

  • Il n’est plus sur une liste d’attente pour l’opération – L’appelant a été informé en juin 2023 que le docteur Ansari avait examiné son dossier et décidé de le diriger vers un autre chirurgienNote de bas de page 36.
  • Il n’a pas de chirurgien – L’appelant n’a pas été dirigé vers un autre chirurgien. Aucun autre chirurgien en Alberta ou en Colombie-Britannique ne possède le niveau d’expertise requisNote de bas de page 37. Deux chirurgiens en Ontario et un aux États-Unis avaient été recommandés par le bureau du docteur Ansari, mais l’appelant n’a pas les moyens d'explorer ces options.
  • L’opération est complexe – Le docteur Ansari ne croyait pas avoir l’expérience ou le niveau de compétence nécessaire pour traiter les [traduction] « problèmes complexes au nez » de l’appelantNote de bas de page 38. Je suis d’avis que la complexité de son problème de santé limite non seulement les spécialistes pouvant l’opérer, mais aussi les chances de succès de l’opération. Ses opérations passées ne sont pas parvenues à régler ses problèmes au nez.

[53] Je conclus que l’invalidité de l’appelant est prolongée depuis septembre 2019. À l’heure actuelle, on ignore combien de temps il devra attendre avant d’être opéré. Il avait été sur une liste d’attente pendant près de trois ans avant que le docteur Ansari décide qu’il ne pourrait pas l’opérer. On peut donc anticiper que l’attente sera longue à nouveau – encore faudra-t-il qu’il trouve un chirurgien capable de l’opérer et disposé à le faire. Et même s’il trouve un chirurgien, le succès d’une opération d'une telle complexité demeure hypothétique.

Début du versement de la pension

[54] L’appelant était atteint d’une invalidité grave et prolongée en septembre 2019.

[55] Cela étant dit, une personne ne peut pas être considérée comme invalide plus de 15 mois avant la date où le ministre a reçu sa demande de pension, conformément au Régime de pensions du CanadaNote de bas de page 39. Il y a ensuite un délai d’attente de quatre mois avant le versement de la pensionNote de bas de page 40.

[56] Étant donné que le ministre a reçu la demande de l’appelant en décembre 2021, l’appelant est considéré comme invalide depuis septembre 2020.

[57] Le versement de sa pension commence en janvier 2021.

Conclusion

[58] Je conclus que l’appelant est atteint d’une invalidité grave et prolongée et qu’il est donc admissible à une pension d’invalidité du RPC.

[59] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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