Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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Contenu de la décision

[TRADUCTION]

Citation : TK c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 169

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : T. K.
Représentante ou représentant : D. K.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision datée du 15 novembre 2023 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Brianne Shalland-Bennett
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 19 février 2024
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentante de l’appelant, personne de soutien et témoin
Date de la décision : Le 23 février 2024
Numéro de dossier : GP-23-2028

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, T. K., ne peut pas avoir plus de temps pour demander au ministre de l’Emploi et du Développement social de réviser sa décision concernant la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada (RPC).

[3] Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[4] L’appelant a commencé à recevoir sa pension de retraite du RPC en janvier 2012. Il a demandé une prestation d’invalidité du RPC en janvier 2015Note de bas de page 1.

[5] Le ministre a rejeté sa demande en février 2015. Il a précisé que l’appelant avait demandé une prestation d’invalidité plus de 15 mois après avoir commencé à recevoir sa pension de retraite. Selon la loi, il ne peut pas recevoir une prestation d’invalidité pour cette raisonNote de bas de page 2.

[6] Le 19 juin 2023, l’appelant a demandé au ministre de réviser sa décision. Le ministre a rejeté sa demande et a dit qu’il l’a présentée trop tardNote de bas de page 3. L’appelant a fait appel de la décision du ministre devant le Tribunal de la sécurité sociale.

[7] L’appelant affirme que lorsqu’il a demandé une prestation d’invalidité, il ne savait pas qu’il n’y avait pas droit parce qu’il recevait déjà une pension de retraite.

[8] L’appelant affirme qu’il a présenté sa demande en retard en raison son état de santéNote de bas de page 4. Après avoir reçu la décision concernant sa demande de prestation d’invalidité du RPC, il a parlé à son député provincial, à une avocate et à Service Canada. Il dit avoir été avisé que peu importe le nombre de fois où il demande une révision, la décision restera la même.

[9] Récemment, l’appelant a parlé à une amie ou un ami qui se trouvait dans une situation semblable. Cette personne a reçu un autre type de prestation d’invalidité après avoir reçu sa pension de retraite. Il a également entendu parler de cette prestation aux nouvelles. Il a donc demandé à sa femme de l’aider à présenter une demande de révision en juin 2023.

Ce que je dois décider

[10] Le présent appel ne porte pas sur la question de savoir si l’appelant devrait recevoir une pension d’invalidité du RPC. En fait, il s’agit de savoir s’il a présenté sa demande de révision en retard. Dans l’affirmative, je dois examiner si le ministre aurait dû lui donner plus de temps pour demander une révision.

[11] D’abord, je dois décider si la demande de révision a été présentée en retard.

[12] Si c’est le cas, je dois décider si le ministre a agi de façon judiciaire (autrement dit, a rendu sa décision correctement) lorsqu’il a refusé de donner plus de temps à l’appelant pour demander une révisionNote de bas de page 5.

[13] Si je conclus que le ministre n’a pas rendu sa décision correctement, je dois faire une évaluation et décider si la demande de révision en retard de l’appelant devrait être accueillie. Il y a deux résultats possibles à cette évaluation :

  • Si je conclus que la demande devrait être accueillie, je dois renvoyer l’affaire au ministre en lui demandant de donner à l’appelant plus de temps pour présenter sa demande.
  • Si je conclus que la demande ne devrait pas être accueillie, je dois rejeter l’appel.

Motifs de ma décision

[14] La demande de révision de l’appelant a été présentée en retard.

[15] Le ministre n’a pas agi de façon judiciaire. L’appelant ne devrait pas avoir plus de temps pour demander une révision. J’explique les motifs de ma décision ci-dessous. 

La demande de révision de l’appelant est en retard

[16] Si une personne n’est pas d’accord avec une décision du ministre, elle peut lui demander de la réviser. Elle doit le faire dans les 90 jours après avoir été informée de la décision par écrit. Si elle le fait après ces 90 jours, la demande de révision est jugée en retardNote de bas de page 6.

[17] L’appelant a présenté sa demande de révision avec plus d’un an de retard. La décision du ministre a été rendue le 4 février 2015. L’épouse de l’appelant a déclaré qu’elle est la personne qui a parlé à Service Canada en son nom depuis qu’il a commencé à perdre la vue. Elle se souvient avoir parlé à Service Canada au sujet du refus et avoir reçu une lettre vers février 2015.

[18] Le ministre a reçu la demande de révision de l’appelant en juin 2023. Il a dépassé le délai de 90 jours pour déposer une demande de révision. Il a également plus d’un an de retard, ce qu’il ne conteste pas.

Le ministre n’a pas agi de façon judiciaire

[19] Le ministre n’a pas agi de façon judiciaire lorsqu’il a décidé de ne pas donner plus de temps à l’appelant pour demander une révision.

[20] Le ministre peut réviser une décision même si la demande de révision est en retard. Toutefois, il peut seulement le faire dans les cas Note de bas de page 7 :

  • il existe une explication raisonnable justifiant la demande de prolongation du délai;
  • la personne a manifesté l’intention constante de demander une révision.

[21] Si une partie appelante demande une révision plus d’un an après avoir reçu la décision (ce qui est le cas dans la présente affaire), le ministre doit aussi conclure queNote de bas de page 8 :

  • il y a une chance raisonnable de succès;
  • aucun préjudice ne serait causé au ministre ou à une partie.

[22] L’appelant ne peut pas avoir plus de temps pour sa demande s’il ne répond pas aux quatre critères.

[23] Lorsque le ministre examine ces facteurs, il doit agir de façon judiciaire. Cela signifie qu’il ne doit pasNote de bas de page 9 :

  • agir de mauvaise foi;
  • agir dans un but ou pour un motif irrégulier (pour la mauvaise raison);
  • prendre en compte un facteur non pertinent;
  • ignorer un facteur pertinent;
  • agir de manière discriminatoire à l’égard de l’appelant.

Le ministre a pris en compte des facteurs non pertinents

[24] Le ministre n’a pas agi de façon judiciaire parce qu’il a pris en compte des facteurs non pertinents. Il a appliqué le mauvais critère lorsqu’il a conclu que l’appelant n’avait pas d’explication raisonnable pour justifier son retard.

[25] Le ministre affirme que les renseignements fournis dans la demande de révision n’ont fourni aucune circonstance exceptionnelle ou atténuante qui aurait empêché l’appelant de présenter une demande révision à tempsNote de bas de page 10.

[26] La loi ne dit pas que l’explication de l’appelant doit constituer une circonstance exceptionnelle ou atténuante. Elle dit seulement que son explication doit être raisonnable.

[27] Le critère du ministre n’était pas fondé sur la loi. Je conclus donc que le ministre n’a pas agi de façon judiciaire parce qu’il a pris en compte des facteurs non pertinents.

[28] Je vais maintenant examiner si l’appelant aurait dû avoir plus de temps pour demander une révision en fonction des facteurs décrits ci-dessus.

L’appelant ne devrait pas avoir plus de temps pour demander une révision

[29] Comme le ministre n’a pas agi de façon judiciaire, je dois maintenant décider si l’appelant devrait avoir plus de temps pour demander une révision. Pour ce faire, je dois tenir compte des mêmes facteurs que le ministre devait prendre en compte. Autrement dit, l’appelant doit démontrer ce qui suit selon la prépondérance des probabilités (plus probable qu’improbable) :

  • Il a une explication raisonnable pour son retard.
  • Il avait l’intention constante de demander une révision.
  • Sa demande a une chance raisonnable de succès.
  • Le fait de lui donner plus de temps ne porterait pas préjudice au ministre.

L’appelant n’a aucune chance raisonnable de succès

[30] La demande de l’appelant n’a aucune chance raisonnable de succès.

[31] L’appelant ne peut pas recevoir une prestation d’invalidité parce qu’il a reçu une pension de retraite plus de 15 mois avant sa demande.

[32] Le RPC prévoit qu’une personne ne peut pas remplacer sa pension de retraite par une prestation d’invalidité lorsque la demande de celle-ci est présentée 15 mois ou plus après le début du versement de la pension de retraiteNote de bas de page 11.

[33] L’appelant a commencé à recevoir sa pension de retraite en janvier 2012. Il a demandé une prestation d’invalidité en février 2015. Cette demande a été présentée plus de 15 mois après qu’il a commencé à toucher sa pension de retraite. Par conséquent, il n’a pas droit à une prestation d’invalidité.

[34] Je ne peux pas prendre en compte d’autres circonstances lorsque j’examine si l’appelant aurait pu demander une prestation d’invalidité quand il recevait déjà une pension de retraite. Je ne peux pas examiner les motifs de compassion ou les circonstances atténuantes, comme le fait que l’appelant ne connaisse pas les règles. Je peux seulement interpréter et appliquer les lois du RPCNote de bas de page 12.

[35] L’appelant n’a pas non plus droit à une prestation d’invalidité après-retraite.

[36] L’appelant n’a pas expressément nommé la prestation. Cependant, on lui a parlé d’une [traduction] « nouvelle prestation » offerte aux personnes atteintes d’une invalidité qui ont déjà reçu leur pension de retraite. J’estime qu’il parlait probablement de la prestation d’invalidité après-retraite.

[37] La prestation d’invalidité après-retraite est une prestation qui peut être offerte aux personnes qui reçoivent une pension de retraite. Elle est entrée en vigueur le 1er janvier 2019. Voici les conditions requises que l’appelant doit remplirNote de bas de page 13 :

  • être âgé de moins de 65 ans;
  • recevoir une pension de retraite;
  • avoir versé des cotisations valides au RPC pendant sa période minimale d’admissibilitéNote de bas de page 14;
  • avoir une période minimale d’admissibilité qui a commencé après 2018;
  • être invalide au sens du RPCNote de bas de page 15.

[38] La prestation d’invalidité après-retraite n’est entrée en vigueur que le 1er janvier 2019. L’appelant a demandé une pension d’invalidité en février 2015, quatre ans avant l’entrée en vigueur de la loi. Par conséquent, la prestation ne s’applique pas à lui.

Conclusion

[39] Je conclus que l’appelant ne répondait pas à au moins un des quatre critères requis pour avoir plus de temps pour présenter sa demande. Je n’ai donc pas à évaluer le reste.

[40] Par conséquent, l’appelant ne peut pas avoir plus de temps pour demander une révision et l’appel est rejeté.

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