Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : TM c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 360

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : T. M.
Représentante ou représentant : Angelo Consiglio
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision découlant de la révision du ministre de l’Emploi et
du Développement social datée du 24 mai 2022
(communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Adam Picotte
Mode d’audience : Téléconférence
Date de l’audience : Le 12 avril 2024
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant de l’appelant
Date de la décision : Le 13 avril 2024
Numéro de dossier : GP-23-890

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelant, T. M., n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. La présente décision explique pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[3] L’appelant est un ancien ouvrier et il a travaillé régulièrement en Ontario jusqu’à ce qu’il subisse une fracture de la colonne thoracique en 2000. À la suite de cette blessure, l’appelant a fait une demande d’indemnisation des accidents de travail et il a été en arrêt de travail jusqu’en 2002. Il est ensuite retourné travailler chez l’employeur pour lequel il travaillait au moment de l’accident jusqu’en mars 2005, date à laquelle son médecin de famille lui a conseillé d’arrêter de travailler.

[4] L’appelant a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada à plusieurs reprises. Plus récemment, il a présenté une demande de prestations le 27 juillet 2021. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelant a porté la décision du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] L’appelant affirme être incapable de travailler à quelque titre que ce soit depuis mars 2005. Il dit que ses douleurs chroniques au dos et les déficiences qui en résultent l’empêchent de détenir une occupation véritablement rémunératrice.

[6] Le ministre affirme que l’appelant n’a présenté aucune preuve d’invalidité qui lui permettrait de recevoir des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

Ce que l’appelant doit prouver

[7] Pour obtenir gain de cause, l’appelant doit prouver qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2006. Autrement dit, pas plus tard que le 31 décembre 2006. Cette date est établie en fonction des cotisations qu’il a versées au Régime de pensions du Canada Note de bas de page 1. Il doit aussi prouver qu’il est toujours invalide Note de bas de page 2.

[8] Le Régime de pensions du Canada définit les termes « grave » et « prolongée ».

[9] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice Note de bas de page 3.

[10] Cela signifie que je dois examiner l’ensemble des problèmes de santé de l’appelant pour voir leur effet global sur sa capacité de travail. Je dois aussi tenir compte de ses antécédents (y compris son âge, son niveau de scolarité, ses antécédents de travail et son expérience de vie). Ces éléments me permettent de voir de façon réaliste si son invalidité est grave ou non. Si l’appelant est régulièrement capable de faire un travail quelconque qui lui permet de gagner sa vie, il n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[11] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décès Note de bas de page 4.

[12] Par conséquent, l’invalidité de l’appelant ne peut pas avoir une date de rétablissement prévue. Il faut s’attendre à ce que l’invalidité tienne l’appelant à l’écart du marché du travail pendant longtemps.

[13] L’appelant doit prouver qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée. Il doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’il est invalide.

Motifs de ma décision

[14] Je conclus que l’appelant n’a pas prouvé qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2006 et de façon continue par la suite. Je suis arrivé à cette décision après avoir examiné les questions suivantes :

  • L’invalidité de l’appelant était-elle grave?
  • L’invalidité de l’appelant était-elle prolongée?

L’invalidité de l’appelant était-elle grave?

[15] L’invalidité de l’appelant n’était pas toujours grave. J’ai tiré cette conclusion en examinant plusieurs facteurs. J’explique ces facteurs ci-dessous.

Les limitations fonctionnelles de l’appelant nuisaient à sa capacité de travail

[16] Voici une liste des problèmes de santé de l’appelant :

  • Compression de la colonne thoracique
  • Douleurs chroniques
  • Maux de tête
  • Engourdissements

[17] Cependant, je ne peux pas me concentrer uniquement sur les diagnostics de l’appelant Note de bas de page 5. Je dois plutôt me concentrer sur la question de savoir s’il a des limitations fonctionnelles qui l’empêchent de gagner sa vie Note de bas de page 6. Pour ce faire, je dois examiner tous les problèmes de santé de l’appelant (pas seulement le plus important) et je dois évaluer leurs effets sur sa capacité de travail Note de bas de page 7.

[18] Je conclus que l’appelant a des limitations fonctionnelles qui ont nui à sa capacité de travail.

Ce que l’appelant dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[19] L’appelant affirme que ses problèmes de santé ont entraîné des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travail. Il dit avoir les limitations fonctionnelles suivantes :

  • Socialiser avec ses amis et sa famille – L’appelant n’avait pas envie de socialiser en raison de la douleur qu’il éprouvait.
  • Loisirs – L’appelant m’a dit qu’un de ses loisirs était d’aller à la pêche, mais qu’il avait dû arrêter d’y aller en raison de sa douleur. Il m’a dit qu’il avait été capable de continuer à y aller jusqu’en 2007, mais qu’à ce moment-là, il se poussait à continuer.
  • Soins personnels – L’appelant m’a dit qu’en 2006, il dépendait de sa conjointe de fait pour l’aider à s’habiller le matin.
  • Marcher L’appelant m’a dit qu’il pouvait marcher un pâté de maisons et demi sans avoir à s’arrêter et à se reposer.
  • S’asseoir – L’appelant m’a dit qu’il pouvait rester assis pendant 15 minutes avant d’avoir à changer de position en raison de la douleur.
  • Sommeil – L’appelant m’a dit que depuis 2000, il n’arrive pas à bien dormir. Il se réveille environ aux deux heures. Cela fait qu’il n’a pas d’énergie.

Ce que la preuve médicale révèle sur les limitations fonctionnelles de l’appelant

[20] L’appelant doit fournir des éléments de preuve médicale qui démontrent que ses limitations fonctionnelles ont nui à sa capacité de travailler au plus tard le 31 décembre 2006 Note de bas de page 8.

[21] La preuve médicale appuie les propos de l’appelant.

[22] Le Dr Ogundimu, neurochirurgien, a déclaré que l’appelant avait eu un accident en mars 2000 lorsqu’un arbre mort est tombé sur sa tête au travail. Il a précisé que les radiographies de l’appelant montraient une légère fracture par compression de la T9. Il a écrit que l’état de santé de l’appelant entraînait aussi des engourdissements intermittents à l’extrémité des doigts Note de bas de page 9.

[23] En janvier 2001, une imagerie par résonance magnétique a révélé une fracture, mais aucun problème avec l’os et aucun gonflement des tissus mous Note de bas de page 10.

[24] En janvier 2002, le Dr Tait a précisé que l’appelant présentait divers symptômes au dos et à la colonne thoracique. Il a écrit que ces symptômes empiraient avec l’activité. L’appelant avait des maux de tête et des engourdissements aux bras et aux jambes lorsqu’il soulevait des objets Note de bas de page 11.

[25] En décembre 2005, le Dr Tait a précisé que l’appelant était en arrêt de travail depuis le 23 mars 2005 en raison de douleurs au dos, à l’épaule droite et à la région de la cage thoracique Note de bas de page 12.

[26] En février 2006, le Dr Wentzell a écrit que l’appelant avait des limitations en ce qui concerne le fait de soulever des objets lourds, de pousser, de tirer, de faire des activités au niveau des épaules ou au-dessus de celles-ci, de faire des torsions répétitives ou soutenues, de se pencher et d’adopter des postures statiques prolongées Note de bas de page 13.

[27] En avril 2006, la Dre Naigamwalla a écrit que l’appelant avait subi de multiples fractures de la colonne thoracique, des changements arthritiques et des douleurs au cou. Il a ajouté que l’appelant avait des douleurs chroniques aux genoux et que cela nuisait à son niveau fonctionnel Note de bas de page 14.

[28] Divers dossiers médicaux, datant de 2007 à 2021. Ces dossiers démontrent une persistance de la douleur et d’autres problèmes de santé connexes qui ont entraîné des déficiences fonctionnelles chez l’appelant.

[29] Par exemple, la Dre Schamp, une nouvelle médecin de famille, a écrit qu’en raison de ses douleurs chroniques au cou, l’appelant avait de la difficulté à soulever des objets, qu’il ressentait des engourdissements et des picotements, et qu’il avait de la difficulté à rester dans une position statique Note de bas de page 15.

[30] La preuve médicale appuie le fait que les problèmes de santé de l’appelant ont entraîné des déficiences qui ont nui à sa capacité de détenir une occupation véritablement rémunératrice. Il était incapable de faire diverses activités quotidiennes nécessaires pour fonctionner dans un milieu de travail. Il ne pouvait pas, entre autres, pousser, tirer, ou soulever des objets ni faire des activités répétitives soutenues.

[31] Je vais maintenant vérifier si l’appelant a suivi les conseils médicaux.

L’appelant a suivi les conseils médicaux

[32] Pour recevoir une pension d’invalidité, une partie appelante doit suivre les conseils médicaux Note de bas de page 16.

[33] L’appelant a suivi les conseils médicaux Note de bas de page 17. Le ministre n’a pas affirmé qu’il n’avait pas suivi les conseils médicaux et je n’ai vu aucune preuve dans les documents au dossier qui laisse entendre le contraire. Par conséquent, je suis convaincu que l’appelant l’a fait.

[34] Je dois maintenant décider si l’appelant est régulièrement capable d’effectuer d’autres types de travail. Pour être graves, les limitations fonctionnelles de l’appelant doivent l’empêcher de gagner sa vie dans n’importe quel type d’emploi, et pas seulement dans son emploi habituel Note de bas de page 18.

L’appelant a été capable de travailler dans un contexte réaliste après sa période minimale d’admissibilité

[35] Pour décider si l’appelant est capable de travailler, je ne peux pas me contenter d’examiner ses problèmes de santé et leurs effets sur ce qu’il peut faire. Je dois aussi tenir compte des facteurs suivants :

  • son âge;
  • son niveau de scolarité;
  • ses aptitudes linguistiques;
  • ses antécédents de travail et son expérience de vie.

[36] Ces éléments m’aident à décider si l’appelant est capable de travailler dans un contexte réaliste, c’est-à-dire s’il est réaliste de dire qu’il peut travaillerNote de bas de page 19.

[37] Je conclus que l’appelant n’était pas invalide de façon continue au plus tard à la fin de sa période minimale d’admissibilité en raison de sa capacité de travail de juin 2011 à novembre 2013. Il était toujours capable de travailler pendant cette période.

[38] Dans sa demande de novembre 2019, l’appelant a écrit qu’il avait travaillé à temps partiel de juin 2011 à novembre 2013. Pendant cette période, il travaillait de 5 à 8 heures par jour, de 2 à 3 jours par semaine.

[39] Au cours de l’audience orale, j’ai demandé à l’appelant de confirmer si c’était exact. Il m’a dit que oui.

[40] J’ai également demandé à l’appelant ce qu’il gagnait à l’heure durant cette période. Il n’était pas certain, mais il croyait que le montant gagné se situait entre 15 $ et 17 $ l’heure. L’appelant a confirmé que son travail consistait à ratisser du gravier et à décharger un camion à benne à la décharge. L’appelant m’a dit qu’il s’agissait d’un travail significatif, dont le but était de construire des marches de ciment sur des chantiers de construction. Étant donné que le travail de l’appelant était significatif et qu’il n’a pas été adapté en fonction de ses limitations, je suis convaincu que l’employeur n’était pas bienveillant Note de bas de page 20.

[41] J’ai demandé à l’appelant quel était son salaire parce que son registre des gains montrait une certaine rémunération, mais pas une rémunération correspondant au nombre d’heures travaillées au taux de rémunération qu’il affirmait Note de bas de page 21. L’appelant m’a dit qu’il n’était pas certain s’il avait été payé en argent comptant ou si toute sa rémunération avait été déclarée correctement à l’Agence du revenu du Canada.

[42] La preuve au dossier est manifestement conflictuelle. Afin d’expliquer cette situation, j’ai accordé de l’importance à l’information fournie par l’appelant en 2019. Elle datait d’une période plus près de la date de travail. Cette affirmation est appuyée par la preuve présentée par l’appelant lors de l’audience orale, qui démontrait qu’il avait travaillé de 2011 à 2013.

[43] Compte tenu de la durée de l’emploi et de la rémunération en ayant résulté (de 7 800 $ à 21 000 $ Note de bas de page 22), je suis convaincu que l’appelant avait une certaine capacité résiduelle à détenir une occupation véritablement rémunératrice après sa période minimale d’admissibilité.

Conclusion

[44] Je conclus que l’appelant n’est pas admissible à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada parce que son invalidité n’était pas grave. Comme j’ai conclu que son invalidité n’était pas grave, je n’ai pas eu à vérifier si elle était prolongée.

[45] Ainsi, l’appel est rejeté.

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