Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

[TRADUCTION]

Citation : TB c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 689

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : T. B.
Représentante ou représentant : Therese Menard
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision rendue le 6 janvier 2022 par le
ministre de l’Emploi et du Développement social
(communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Lianne Byrne
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 18 avril 2024
Personnes présentes à l’audience : Appelant
Représentante de l’appelant
Représentante du ministre
Date de la décision : Le 17 juin 2024
Numéro de dossier : GP-22-83

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelant, T. B., est admissible à la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Les paiements commencent en janvier 2019. La présente décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

Aperçu

[3] En date du 31 décembre 2019, l’appelant avait 47 ans. Il a travaillé comme opérateur de grue, chauffeur d’autobus et chauffeur pour une entreprise de construction. Il affirme être incapable de travailler depuis novembre 2017 en raison de l’anxiété et de douleurs à l’aine.

[4] Le 6 septembre 2018, l’appelant a demandé la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelant a porté la décision du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[5] Le 8 avril 2021, le Tribunal a tenu une audience par vidéoconférence. Dans une décision datée du 31 mai 2021, le Tribunal a rejeté l’appel. L’appelant a porté cette décision en appel à la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale.

[6] Le 2 novembre 2021, la division d’appel a tenu une audience par téléconférence. Dans une décision rendue le 6 janvier 2022, la division d’appel a accueilli l’appel et a renvoyé l’affaire à la division générale pour réexamen.

[7] L’appelant affirme avoir une invalidité grave et prolongée. Son témoignage et la preuve médicale montrent qu’il était régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice au plus tard le 31 décembre 2019. Il n’a refusé aucun traitement de façon déraisonnable. Il a essayé de nombreux médicaments qui étaient inefficaces ou dont les effets secondaires étaient intolérables.

[8] Selon le ministre, la preuve n’appuie pas la conclusion voulant que l’appelant était invalide au plus tard le 31 décembre 2019. Rien n’indique que ses douleurs à l’aine sont liées à une limitation qui l’aurait empêché de travailler en général avant le 31 décembre 2019. Les symptômes d’anxiété qu’il a depuis très longtemps ne l’ont pas empêché d’obtenir et de conserver un emploi véritablement rémunérateur dans le passé. Aucun renseignement médical n’a été présenté pour rendre compte des soins qu’il a reçus de mai 2019 jusqu’à sa visite à l’urgence en juillet 2020. L’ensemble de la preuve ne démontre pas qu’il a tenté d’avoir de l’aide pour suivre le traitement recommandé pour ses symptômes psychologiques.

Ce que l’appelant doit prouver

[9] Pour gagner sa cause, l’appelant doit prouver qu’il avait une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2019. Autrement dit, la date limite est le 31 décembre 2019. Cette date est déterminée par les cotisations qu’il a versées au Régime de pensions du CanadaNote de bas de page 1. Il doit aussi prouver qu’il est toujours et encore invalideNote de bas de page 2.

[10] Le Régime de pensions du Canada définit les termes « grave » et « prolongée ».

[11] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 3.

[12] Ainsi, je dois examiner tous les problèmes de santé de l’appelant pour évaluer leur effet global sur sa capacité de travail. Je dois aussi regarder son passé (y compris son âge, son niveau d’instruction, ses antécédents de travail et son expérience de vie). Ces éléments dresseront un portrait réaliste de sa situation et me permettront de voir si son invalidité est grave. Si l’appelant est régulièrement capable de faire un travail qui lui permet de gagner sa vie, il n’a pas droit à la pension d’invalidité.

[13] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décèsNote de bas de page 4.

[14] Autrement dit, il ne faut pas s’attendre à ce que l’appelant se rétablisse à une certaine date. Il faut plutôt s’attendre à ce que l’invalidité le tienne à l’écart du marché du travail pendant longtemps.

[15] L’appelant doit prouver qu’il est atteint d’une invalidité grave et prolongée. Il doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. Cela veut dire qu’il doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’il est invalide.

Motifs de ma décision

[16] Je conclus que l’appelant était atteint d’une invalidité grave et prolongée dès septembre 2018. Il est toujours invalide. J’ai tiré cette conclusion après avoir examiné les questions suivantes :

  • L’invalidité de l’appelant était‑elle grave?
  • Était-elle prolongée?

L’invalidité était-elle grave?

[17] L’invalidité de l’appelant était grave. C’est ce que j’ai conclu après avoir considéré plusieurs éléments, que j’explique plus bas.

Les limitations fonctionnelles de l’appelant nuisaient à sa capacité de travail

[18] L’appelant a :

  • des douleurs aux deux côtés de l’aine;
  • un trouble anxieux généralisé;
  • un trouble d’anxiété sociale.

[19] Je ne peux cependant pas m’arrêter à ses diagnosticsNote de bas de page 5. Je dois plutôt me pencher sur la question de savoir s’il a des limitations fonctionnelles qui l’empêchent de gagner sa vieNote de bas de page 6. Dans cette optique, je dois examiner tous ses problèmes de santé (pas seulement le plus important) et je dois évaluer leurs effets sur sa capacité de travailNote de bas de page 7.

[20] Je conclus que l’appelant a des limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité de travail.

Ce que l’appelant dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[21] L’appelant affirme que ses problèmes de santé ont entraîné des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travail.

[22] Il a commencé à avoir des douleurs à l’aine au printemps 2016. Il les sentait surtout du côté droit. Elles irradiaient dans la jambe droite. On soupçonnait des hernies à l’aine des deux côtés. Cependant, une chirurgie exploratoire subie en 2016 n’a révélé aucune preuve d’hernie.

[23] Il a essayé de travailler malgré ses douleurs. En mai 2017, il a commencé à occuper un poste temporaire de chauffeur à temps plein. En novembre 2017, ses douleurs étaient atroces. Il a dû cesser de travailler avant la fin de son contrat.

[24] On lui a prescrit des antibiotiques. Il a essayé la physiothérapie. Il a perdu du poids. Mais rien de tout cela n’a aidé à soulager ses douleurs.

[25] Il a continué de croire que ses douleurs à l’aine étaient causées par des hernies aux deux côtés parce que c’était l’opinion d’un urologue. Cependant, sa médecin de famille et d’autres médecins n’étaient pas d’accord. Sa médecin de famille pensait que ses douleurs étaient d’origine psychologique.

[26] En date du 31 décembre 2019, il ne pouvait faire aucune tâche ménagère. Il utilisait des béquilles pour se déplacer. Il ne pouvait pas monter une pente, monter les escaliers, se tenir debout sur une échelle ou faire un mouvement stimulant la région abdominale. Il ne pouvait pas rester assis pendant de longues périodes. Il ne pouvait pas porter les objets lourds. Sa femme l’aidait à s’habiller. Il avait de la difficulté à conduire.

[27] En plus de ses douleurs, il a des problèmes de santé mentale depuis l’enfance. Il a reçu des diagnostics de trouble anxieux généralisé et de trouble d’anxiété sociale. Plus les choses vont vite autour de lui, plus c’est difficile pour lui. Il évite les autres. Il a de la difficulté à communiquer. Il n’ouvre la porte à personne et ne répond pas au téléphone. Il perd le souffle quand il parle.

[28] Il a consulté un psychiatre en 2017. Ce dernier lui a prescrit des médicaments, qu’il a commencé à prendre. Mais il s’est rendu compte qu’il était traité pour des idées délirantes. L’appelant a été très troublé par ce constat, car il croyait fermement que ses douleurs étaient causées par des hernies. Il a cessé de prendre les médicaments antipsychotiques. Il a continué de prendre ses autres médicaments, mais il les trouvait peu efficaces ou il ne tolérait pas les effets secondaires.

[29] En 2023, il a reçu un diagnostic de trouble de stress post-traumatique. Son diagnostic est récent, mais il dit que ses symptômes ont commencé en 2017 lorsqu’il essayait de faire comprendre aux gens que ses douleurs étaient causées par ses hernies. Il a dû se battre pour qu’on le croie, ce qui a engendré beaucoup de stress.

[30] Il a finalement trouvé un médecin à Sudbury qui a cru qu’il avait des hernies. Ce médecin a pratiqué une intervention chirurgicale en juillet 2023. Cela a permis de réduire un peu ses douleurs à l’aine. Mais il a encore des limitations fonctionnelles.

Ce que la preuve médicale révèle sur les limitations fonctionnelles de l’appelant

[31] L’appelant doit fournir des éléments de preuve médicale qui démontrent que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travail au plus tard le 31 décembre 2019Note de bas de page 8.

[32] La preuve médicale appuie les propos de l’appelant. La Dre Suzanne Shephard, médecin de famille, a rempli le rapport médical pour le Régime de pensions du Canada le 18 septembre 2018. Elle a écrit que l’appelant avait des diagnostics de trouble anxieux généralisé et de douleurs chroniques aux deux côtés de l’aine.

[33] La Dre Shephard a précisé que l’appelant est très limité par le trouble anxieux généralisé et le trouble d’anxiété sociale, de sorte qu’il s’investit peu auprès de sa famille et qu’il est anxieux à l’idée de quitter la maison.

[34] En ce qui concerne les douleurs à l’aine, les rapports au dossier montrent clairement le difficile parcours pour arriver à diagnostiquer les hernies de l’appelant. Voici les éléments dont j’ai tenu compte :

  • En septembre 2016, le Dr Diederick Jalink, chirurgien général, a effectué une cœliochirurgie. Il n’a toutefois pas trouvé de hernie.
  • En mars 2018, le Dr Thomas McGregor, urologue, pensait que les douleurs à l’aine étaient causées par une inflammation et une épididymite chronique. Il a recommandé à l’appelant d’essayer des antibiotiques lorsqu’il avait une poussée de symptômes.
  • En avril 2018, le Dr Singar, urologue, lui a diagnostiqué une tendinite et une élongation à l’aine.
  • Le 31 juillet 2018, le Dr Jalink a noté que le tomodensitogramme révélait de possibles lipomes aux deux aines sans hernie notable. Les douleurs de l’appelant n’avaient aucune origine organique claire.

[35] Durant son témoignage, l’appelant a dit que ses douleurs à l’aine et le chômage ont aussi entraîné des problèmes de santé mentale. Il a commencé à voir le Dr Moustafa Eid, psychiatre, en octobre 2018. Il a reçu un diagnostic de trouble anxieux généralisé et d’un trouble de nature sociale. Le Dr Eid lui a prescrit des médicaments.

[36] Le 8 novembre 2018, le Dr Eid pensait qu’un délire hypocondriaque faisait peut-être croire à l’appelant qu’il avait une hernie. Il a commencé à lui prescrire des médicaments antipsychotiques.

[37] Le 12 décembre 2018, le Dr Eid a écrit que l’appelant continue de présenter un trouble anxieux généralisé, des symptômes d’anxiété sociale ainsi que des idées hypocondriaques sur une maladie de l’aine non diagnostiquée.

[38] Le 4 janvier 2019, la Dre Shephard a écrit que l’appelant voulait un deuxième avis au sujet de son traitement psychiatrique parce qu’il avait l’impression que le Dr Eid ne l’écoutait pas. La Dre Shephard ne l’a toutefois pas envoyé voir une ou un autre psychiatre.

[39] Le 22 février 2019, le Dr Eid a écrit que l’appelant avait cessé de prendre les médicaments antipsychotiques. L’appelant entretenait l’idée fixe qu’il avait une hernie malgré l’absence de preuve médicale.

[40] Le 11 mars 2019, la Dre Shephard a écrit que l’appelant avait cessé de prendre ses médicaments depuis environ un mois. Il consommait de l’huile de cannabidiol (CBD) et de la marijuana. Il pensait surtout à ses douleurs et était peu conscient de son trouble anxieux généralisé.

[41] Le 5 avril 2019, le Dr Eid a observé que l’appelant était tendu et anxieux. Il a aussi noté des traits de personnalité paranoïdes et un trouble délirant de type somatique.

[42] D’avril 2019 à juillet 2020, il y a une lacune dans les renseignements médicaux. À l’audience, l’appelant a expliqué qu’il a déménagé pendant cette période. Il était aussi frustré parce qu’il n’avait pas l’impression que les médecins l’écoutaient.

[43] Le 15 mai 2019, la Dre Shephard a confirmé que l’appelant avait déménagé. Elle a ajouté que son anxiété sociale est importante, mais qu’il est réticent à recevoir un traitement. Il ressentait encore des douleurs physiques. La physiothérapie n’avait pas aidé à les soulager. Il était peu conscient de ses problèmes psychologiques, ce qui compliquait les choses pour le respect d’un traitement médical et le maintien en emploi.

[44] Bon nombre de rapports médicaux ont été produits après le 31 décembre 2019. En voici quelques‑uns :

  • Le 22 juillet 2020, Olivia Sullivan, infirmière autorisée, a écrit dans un rapport d’intervention en situation de crise que l’appelant se rendait à l’urgence pour de multiples plaintes chroniques, dont l’anxiété. Il ne voulait pas prendre de médicaments pour l’anxiété.
  • Le 6 août 2020, le Dr John Chisolm, médecin de famille, a déclaré qu’un rapport d’échographie révélait de petites hernies aux deux aines.
  • Le 27 janvier 2021, le Dr Eric Labelle a noté que l’appelant avait des douleurs chroniques à l’aine. L’examen n’avait révélé aucune preuve claire d’une hernie à l’aine. Il soupçonnait que l’anxiété était une composante importante de ses symptômes.
  • Le 26 avril 2021, Christine Contant, psychothérapeute, a écrit qu’il présentait un important trouble fonctionnel et des symptômes d’anxiété. Par le passé, il avait eu de la difficulté à obtenir le soutien des médecins qui le traitaient.
  • Le 6 mai 2021, le Dr B. Fortin-Langelier, psychiatre, a écrit qu’il y avait peut-être un processus psychotique à l’origine d’une partie de la détresse de l’appelant. Il émettait l’hypothèse que ce processus s’alignait avec un diagnostic de trouble délirant.
  • Le 31 août 2021, Mme Labine a écrit que l’appelant ne prenait pas les médicaments antipsychotiques prescrits par le Dr Fortin-Langelier parce qu’il ne croyait pas avoir d’idées délirantes. Il était très contrarié que le médecin lui prescrive un tel médicament.
  • Le 13 septembre 2021, Mme Labine a souligné qu’il était très difficile de traiter l’appelant parce qu’il n’était pas d’accord avec les diagnostics et les recommandations de traitement.
  • Le 28 septembre 2021, Mme Labine a écrit que l’appelant avait pris les médicaments antipsychotiques de façon constante depuis son dernier rendez-vous. Il avait l’impression que cela l’aidait peut-être un peu.
  • Le 31 janvier 2022, Mme Monfils-Harvey, infirmière praticienne, a écrit que l’appelant avait l’impression qu’on traitait les mauvais symptômes.
  • Le 11 février 2022, Mme St. Denis, travailleuse sociale, a écrit qu’il ressentait beaucoup d’anxiété et de détresse en raison de ses symptômes. Il allait commencer une thérapie comportementale dialectique.
  • Le 15 février 2022, Mme Monfils-Harvey a écrit que l’appelant pensait avoir un trouble complexe de stress post-traumatique. Il présentait certaines caractéristiques du trouble obsessionnel-compulsif.
  • Le 1er avril 2022, Mme St. Denis a écrit qu’il avait des problèmes de mémoire à long terme.
  • Le 14 avril 2022, Mme Monfils-Harvey a noté un changement dans les médicaments antipsychotiques de l’appelant.
  • Le 4 octobre 2022, le Dr A. Cheok, psychiatre, a vu l’appelant pour son anxiété et sa dépression. L’appelant présentait aussi des symptômes plus compatibles avec le trouble de stress post-traumatique.

[45] La preuve médicale confirme qu’en date du 31 décembre 2019, les douleurs et les symptômes psychologiques de l’appelant l’empêchaient de faire un travail exigeant sur le plan physique, y compris celui de conducteur.

[46] Je vais maintenant vérifier si l’appelant a suivi les conseils médicaux.

L’appelant n’a pas suivi tous les conseils médicaux

[47] Pour recevoir une pension d’invalidité, il faut suivre les conseils des médecinsNote de bas de page 9. Une personne qui ne suit pas les conseils médicaux doit fournir une explication raisonnableNote de bas de page 10.

[48] L’appelant n’a pas suivi les conseils médicaux. Il a cependant fourni une explication raisonnable.

[49] L’appelant a subi de nombreux traitements, y compris plusieurs chirurgies, l’essai de multiples médicaments, la physiothérapie et la consultation psychologique. Cependant, il est écrit à de nombreux endroits qu’il a cessé de prendre les médicaments qu’on lui a prescrits. Il explique avoir cessé de prendre les médicaments contre l’anxiété soit parce qu’ils étaient peu efficaces ou qu’ils causaient des effets secondaires, comme des maux de tête. Il a cessé de prendre les médicaments antipsychotiques parce qu’il ne croit pas avoir un trouble délirant.

[50] La Dre Sheppard et Mme Labine ont toutes deux noté qu’il était peu conscient de ses problèmes de santé. La Dre Sheppard a écrit que, comme l’appelant saisit mal ses problèmes de santé psychologiques, il a de la difficulté à suivre un traitement médical.

[51] Mme Labine a précisé que l’appelant est très difficile à traiter parce qu’il n’est pas d’accord avec les diagnostics et les recommandations de traitement. Il a plutôt l’impression d’être traité pour les mauvais symptômes.

[52] Les éléments de preuve produits par la Dre Sheppard et Mme Labine concordent avec le témoignage de l’appelant. Il s’est dit frustré parce qu’il avait l’impression que ses médecins ne l’écoutaient pas. Il croyait que les traitements visaient les mauvais symptômes.

[53] Le manque de compréhension de l’appelant joue un rôle dans sa résistance au traitement. Le fait que l’appelant n’ait pas suivi toutes les recommandations de traitement est donc raisonnable.

[54] L’appelant a expliqué de façon raisonnable pourquoi il n’a pas suivi les conseils de ses médecins. Par conséquent, il importe peu qu’il ne les ait pas suivis.

[55] Je dois maintenant décider si l’appelant est régulièrement capable de faire un autre type de travail. Pour être graves, ses limitations fonctionnelles doivent l’empêcher de gagner sa vie dans n’importe quel type d’emploi, et pas seulement dans son emploi habituelNote de bas de page 11.

L’appelant est incapable de travailler dans un contexte réaliste

[56] Pour décider si l’appelant est capable de travailler, je ne peux pas me contenter d’examiner ses problèmes de santé et leurs effets sur ses capacités. Je dois aussi tenir compte de caractéristiques comme :

  • son âge;
  • son niveau d’instruction;
  • ses aptitudes linguistiques;
  • ses antécédents de travail et son expérience de vie.

[57] Ces éléments m’aident à décider si l’appelant est capable de travailler dans un contexte réaliste, c’est-à-dire s’il est réaliste de dire qu’il peut travaillerNote de bas de page 12.

[58] Je juge que l’appelant est incapable de travailler dans un contexte réaliste. Il n’est plus capable de travailler depuis septembre 2018.

[59] Le 31 décembre 2019, l’appelant avait 47 ans. Il a un diplôme de technicien en bâtiment. Il a travaillé comme opérateur de grue, chauffeur d’autocar et chauffeur pour une entreprise de construction. Il parle couramment l’anglais.

[60] L’appelant a surtout occupé des emplois exigeants sur le plan physique et des postes de chauffeur. Il ne peut plus faire ce genre de travail en raison de ses limitations physiques, dont la difficulté à soulever des objets lourds, à marcher et à monter des escaliers. Il est assez jeune pour se recycler en vue de trouver un autre travail convenable, mais il a des problèmes de mémoire ainsi que de la difficulté à quitter son domicile, à communiquer et à interagir avec d’autres personnes.

[61] En date du 31 décembre 2019, ses symptômes physiques et psychologiques l’ont empêché de reprendre ses emplois précédents, d’essayer de faire un autre travail ou même de se recycler dans un autre domaine.

Je conclus que l’invalidité de l’appelant était grave dès septembre 2018.

L’invalidité était-elle prolongée?

[63] L’invalidité de l’appelant était prolongée.

[64] Ses problèmes de santé sont apparus en 2016. Il a toujours les mêmes problèmes de santé depuisNote de bas de page 13.

[65] J’ai tenu compte de l’opinion de la Dre Shepphard, qui pense que le pronostic de l’appelant est incertain. Les rapports mentionnent qu’il a depuis longtemps un trouble anxieux généralisé et un trouble d’anxiété sociale qui sont difficiles à traiter. Il a aussi des douleurs chroniques dont le pronostic d’amélioration est réservé.

[66] J’ai aussi tenu compte du témoignage de l’appelant voulant que ses douleurs se sont un peu améliorées depuis la chirurgie, mais qu’il continue d’avoir des limitations fonctionnelles. Son anxiété ne s’est pas améliorée au fil du temps malgré les traitements.

[67] Les problèmes de santé de l’appelant vont fort probablement durer indéfiniment.

[68] Je conclus donc que son invalidité est prolongée depuis septembre 2018.

Début du versement de la pension

[69] L’invalidité de l’appelant est devenue grave et prolongée en septembre 2018.

[70] Il y a une période d’attente de quatre mois avant le début des paiementsNote de bas de page 14. Ainsi, les paiements commencent en janvier 2019.

Conclusion

[71] Je conclus que l’appelant est admissible à la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada parce que son invalidité est grave et prolongée.

[72] Par conséquent, l’appel est accueilli.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.