Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : KR c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 536

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : K. R.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision rendue le 24 janvier 2023 par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Wayne van der Meide
Mode d’audience : Vidéoconférence
Date de l’audience : Le 7 mai 2024
Personne présente à l’audience : Appelante
Date de la décision : Le 13 mai 2024
Numéro de dossier : GP-23-448

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Décision

[1] L’appel est accueilli.

[2] L’appelante, K. R., a droit à la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Les paiements commencent en avril 2022. La présente décision explique pourquoi j’accueille l’appel.

Aperçu

[3] L’appelante a 59 ans. Elle a fait sa 12e année et a donc obtenu son diplôme d’études secondaires. Elle a travaillé quelques années pendant sa vingtaine. Elle a ensuite cessé de travailler pendant plusieurs années. Elle travaille de façon continue depuis 1999 (elle avait alors 35 ans). Pendant 13 ans (de 2006 à 2019), elle a travaillé à temps plein dans une station-service avec dépanneur. Un jour, l’entreprise a changé de mains. L’appelante est partie en congé de maladie pendant six semaines. À son retour, les nouveaux propriétaires l’ont remplacée par une personne de leur famille. Ils lui ont dit qu’ils n’avaient aucun poste à lui offrir.

[4] Un mois plus tard, elle a obtenu un emploi à temps partiel dans une autre station-service avec dépanneur de la même chaîne. L’entreprise pouvait seulement lui offrir un horaire à temps partiel. Après un peu moins d’un an à cet endroit, l’entreprise a changé de propriétaire. Comme le nouveau propriétaire a refusé ses demandes salariales, elle n’a pas été embauchée.

[5] En novembre 2020, elle a commencé à toucher des prestations d’assurance-emploi. Elle en a reçu pendant environ un an.

[6] En décembre 2021, elle avait épuisé son assurance-emploi. Elle a trouvé un emploi dans un magasin général. Elle a seulement fait deux quarts de huit heures avant de démissionner. Elle a expliqué qu’après le premier quart de travail, elle avait des douleurs si atroces qu’elle est rentrée chez elle pour pleurer. Après le deuxième jour, elle a cessé de travailler. Elle n’a pas travaillé ni cherché du travail depuis.

[7] L’appelante a quelques problèmes de santé. Je reviendrai sur ce point plus loin. Elle dit qu’ils lui causent des douleurs constantes de la tête jusqu’aux épaules. Elle a aussi des faiblesses du côté gauche (elle est gauchère).

[8] Le 6 décembre 2021, l’appelante a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. L’appelante a porté la décision du ministre en appel à la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

[9] L’appelante affirme ne pas pouvoir travailler. Elle dit qu’en raison de ses douleurs, elle a beaucoup de difficulté à s’occuper d’elle-même et de sa maison. Ses limitations sont importantes.

[10] Elle affirme avoir consulté bon nombre de médecins et avoir décrit à maintes reprises l’intensité de ses douleurs. Elle raconte que les médecins ne prennent pas le temps de l’écouter. Elle doit attendre pendant des mois et parcourir de longues distances pour ses rendez-vous et ses tests médicaux. À l’audience, elle m’a rappelé que c’était encore pire durant la pandémie de COVID-19. Elle comprend qu’il n’y a pas beaucoup d’éléments de preuve médicale qui portent sur ses douleurs et ses autres limitations, mais elle dit que ce n’est pas de sa faute.

[11] Selon le ministre, la preuve médicale n’est pas suffisante pour prouver que l’appelante est atteinte d’une invalidité grave et prolongée. Il convient que la requérante a des problèmes de santé qui entraînent des limitations, mais il affirme qu’il faut plus d’éléments de preuve portant sur son traitement et son pronostic.

Ce que l’appelante doit prouver

[12] Pour gagner sa cause, l’appelante doit prouver qu’elle a une invalidité grave et prolongée au moins depuis le 31 décembre 2023. Autrement dit, la date limite est le 31 décembre 2023. Cette date est établie en fonction des cotisations qu’elle a versées au Régime de pensions du Canada Note de bas de page 1. Elle doit aussi prouver qu’elle est toujours et encore invalide Note de bas de page 2.

[13] Le Régime de pensions du Canada définit les termes « grave » et « prolongée ».

[14] Une invalidité est grave si elle rend la personne régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice Note de bas de page 3.

[15] Ainsi, je dois examiner tous les problèmes de santé de l’appelante pour évaluer leur effet global sur sa capacité de travail. Je dois aussi regarder son passé (y compris son âge, son niveau d’instruction, ses antécédents de travail et son expérience de vie). Ces éléments dresseront un portrait réaliste de sa situation et me permettront de voir si son invalidité est grave. Si l’appelante est régulièrement capable de faire un travail qui lui permet de gagner sa vie, elle n’a pas droit à la pension d’invalidité.

[16] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou si elle doit vraisemblablement entraîner le décès Note de bas de page 4.

[17] Autrement dit, il ne faut pas s’attendre à ce que l’appelante se rétablisse à une certaine date. Il faut plutôt s’attendre à ce que l’invalidité la tienne à l’écart du marché du travail pendant longtemps.

[18] L’appelante doit prouver qu’elle est atteinte d’une invalidité grave et prolongée. Elle doit en faire la preuve selon la prépondérance des probabilités. En d’autres termes, elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable (il y a plus de chances) qu’elle est invalide.

Question que je dois examiner en premier

L’opinion de l’ancienne avocate de l’appelante est peu convaincante

[19] L’appelante était représentée par une avocate de l’aide juridique seulement pour certaines choses : [traduction] « pour obtenir des éléments de preuve médicale » et « pour évaluer s’il y avait assez d’éléments de preuve pour que nous puissions continuer de représenter [l’appelante] à l’audience ». L’avocate m’a demandé de reporter la date limite du dépôt des documents de l’appelante. Quand j’ai refusé sa demande, l’avocate a écrit à l’appelante. Elle l’a informée qu’elle ne la représenterait pas à l’audience parce qu’elle ne croyait pas [traduction] « qu’il y ait assez d’éléments de preuve médicale à présenter au Tribunal pour pouvoir démontrer que [son] invalidité était à la fois grave et prolongéeNote de bas de page 5 ».

[20] Voici les observations du ministre au sujet de cette lettre : [traduction] « La représentante légale de l’appelante a fourni une lettre adressée à K. R. La lettre est datée du 13 février 2024. Elle précise ceci : “[…] nous ne croyons pas qu’il y ait assez d’éléments de preuve médicale à présenter au Tribunal pour pouvoir démontrer que votre invalidité était à la fois grave et prolongée au plus tard à la date de la fin de votre période minimale d’admissibilité, soit le 31 décembre 2023.” » Le ministre n’explique pas pourquoi cette lettre est pertinente.

[21] La pertinence de cette lettre est très limitée, voire inexistante. La seule chose qu’elle prouve est l’opinion d’une avocate. J’ai lu la lettre et elle ne mentionne pas ce qui est arrivé à l’appelante ni ce que cette dernière dit de son traitement et de ses limitations fonctionnelles. C’est un sujet que j’ai abordé brièvement et dont je parlerai plus en détail plus loin. De plus, la lettre ne présente aucune analyse permettant de savoir si l’appelante est atteinte d’une invalidité grave et prolongée. Elle analyse plutôt la question de savoir si un organisme financé par l’État voulait continuer à représenter l’appelante après que j’ai refusé de lui donner plus de temps.

Motifs de ma décision

[22] Je conclus que l’appelante était atteinte d’une invalidité grave et prolongée dès décembre 2021. Elle est toujours invalide. J’ai tiré cette conclusion après avoir examiné les questions suivantes :

  • L’invalidité de l’appelante était-elle grave?
  • Était-elle prolongée?

L’invalidité était-elle grave?

[23] L’invalidité de l’appelante était grave. C’est ce que j’ai conclu après avoir considéré plusieurs éléments, que j’explique plus bas.

Les limitations fonctionnelles de l’appelante nuisaient à sa capacité de travail

[24] L’appelante a les problèmes de santé suivants :

  • Discopathie dégénérative avec un grave rétrécissement (sténose) du canal rachidien entre les vertèbres C4-C5 et C5-C6. Cela entraîne une augmentation de l’intensité du signal de la moelle ou une myélomalacie des vertèbres C4 à C6 (elle a subi une chirurgie pour ce problème en avril 2023) et des douleurs sciatiques Note de bas de page 6.
  • Arthrose dans la partie lombaire (bas) de la colonne vertébrale et dans la hanche Note de bas de page 7.
  • Tumeur bénigne au cerveau accompagnée d’une vision floue, de maux de tête et, parfois, d’une vision double le soir Note de bas de page 8.

[25] L’appelante a subi une hystérectomie et elle a fait une crise cardiaque en raison d’une malformation au cœur, qui a été traitée par une chirurgie.

[26] Je ne peux cependant pas m’arrêter à ses diagnostics Note de bas de page 9. En fait, je dois surtout vérifier si ses limitations fonctionnelles l’ont empêchée de gagner sa vie Note de bas de page 10. Dans cette optique, je dois examiner tous ses problèmes de santé (pas seulement le plus important) et je dois évaluer leurs effets sur sa capacité de travail Note de bas de page 11.

[27] Je conclus que l’appelante a des limitations fonctionnelles qui ont nui à sa capacité de travail

Ce que l’appelante dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[28] L’appelante affirme que ses problèmes de santé ont entraîné des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travail. En termes simples, elle dit qu’elle ne peut pas exercer les emplois qu’elle pourrait trouver dans un contexte réaliste.

i) L’appelante est crédible

[29] Je juge que la façon dont l’appelante décrit ses limitations est crédible. Voici pourquoi.

[30] L’appelante décrit ses limitations et les périodes où elles ont commencé, puis empiré, d’une façon qui concorde avec la chronologie de ses emplois. Et cet historique de travail me dit que si elle pouvait travailler, elle le ferait.

[31] Pendant près de 20 ans, l’appelante a occupé des emplois dont le salaire était relativement bas. Lorsqu’elle a perdu son emploi dans des circonstances qui semblent injustes, elle en a trouvé un autre. Après avoir développé de graves problèmes de santé, fait une crise cardiaque et subi trois chirurgies, elle a persévéré : elle a obtenu un autre emploi au salaire relativement bas et elle a essayé de travailler.

[32] À l’audience, l’appelante a répondu à mes questions sans hésiter. Elle n’a pas non plus hésité à me donner plus de détails lorsque je lui en ai demandé.

[33] La version de l’appelante n’a pas changé. Elle concorde aussi avec la preuve médicale et le « portrait général » qu’elle a dressé à l’audience.

[34] Les détails qu’elle raconte sont logiques. Autrement dit, sa version des faits est plausible.

ii) Ce que l’appelante dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[35] L’appelante dit qu’elle ne peut plus faire le genre de travail qu’elle a fait pendant la plus grande partie de sa vie. Elle ne peut pas se tenir debout ni marcher très longtemps parce que cela provoque de grosses douleurs. Au mieux, l’intensité de la douleur se situe de 5 à 7 sur 10. Au pire, la douleur dépasse l’imagination, et c’est souvent le cas. Elle dit qu’elle a toujours mal à partir de la tête jusqu’aux épaules et dans le dos.

[36] L’appelante ajoute qu’elle peut marcher sur de courtes distances avec une canne et sur de plus longues distances avec une marchette. Mais elle dit aussi qu’elle a des étourdissements et qu’elle ne peut pas se tenir debout près d’un comptoir pour laver la vaisselle ou faire la cuisine pendant très longtemps. Elle doit s’asseoir pour passer l’aspirateur et le balai et elle utilise un plumeau extensible.

[37] Elle confirme que sa capacité à se tenir debout et à marcher s’est améliorée après sa chirurgie à la colonne vertébrale (en avril 2023). Elle ajoute cependant qu’elle a encore une faiblesse du côté gauche. Et elle est gauchère. Sa main est raide, alors elle ne peut pas tenir un crayon, taper au clavier ou attacher ses lacets correctement (elle doit faire un nœud).

Ce que la preuve médicale révèle sur les limitations fonctionnelles de l’appelante

[38] L’appelante doit fournir des éléments de preuve médicale qui démontrent que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travail au plus tard le 31 décembre 2023 Note de bas de page 12.

[39] La preuve médicale appuie les propos de l’appelante.

i) Éléments de preuve médicaledans un contexte réaliste

[40] À l’audience, j’ai posé plusieurs questions à l’appelante au sujet de la preuve médicale. Je lui ai demandé, entre autres choses, pourquoi il n’y avait pas plus d’éléments médicaux qui prouvaient que ses limitations fonctionnelles sont telles qu’elle les décrit. Je ne l’ai pas contre-interrogée, mais j’ai vérifié ses déclarations.

[41] Elle a dit plusieurs choses qui sont pertinentes pour l’interprétation de la preuve médicale dans la présente affaire :

  • Elle vit dans une petite ville. Il faut beaucoup de temps (de 6 à 12 mois) pour passer des tests et avoir accès aux spécialistes. Elle a fait remarquer que c’était encore pire pendant la pandémie.
  • Elle doute que sa médecin de famille lui offre des soins de qualité. On lui a dit plus d’une fois qu’elle peut aborder un seul problème à ses rendez-vous. Ceux-ci durent seulement 15 minutes. Une fois, elle s’est fâchée et elle a été réprimandée par le personnel de la clinique. Elle a pensé à se plaindre de sa médecin de famille, mais elle craint que son nom soit « sur la liste noire » de sa petite collectivité.
  • Son chirurgien cherche plus à savoir si elle peut se tenir debout et marcher, et non pas si cela lui fait mal.
  • Elle a parlé de ses douleurs à sa médecin de famille à plusieurs reprises. Elle a l’impression qu’essayer de diagnostiquer le problème pour l’aider ne l’intéresse pas. Elle l’oriente vers des spécialistes, c’est tout.
  • Elle veut consulter des spécialistes de la douleur. Elle a déjà demandé à sa médecin de famille de l’envoyer dans une clinique spécialisée, mais elle ne sait pas si sa médecin fait quoi que ce soit à ce sujet.
  • Le chirurgien orthopédiste et son équipe ne semblent pas vouloir évaluer ou même écouter ce qu’elle dit au sujet de ses limitations (en particulier, ses douleurs). Ils ont fait une intervention chirurgicale d’urgence et ont vérifié si les résultats étaient conformes aux attentes.
ii) La preuve médicale appuie ce que l’appelante dit au sujet de ses limitations

[42] L’appelante doit fournir des éléments de preuve médicale qui démontrent que ses limitations fonctionnelles ont nui à sa capacité de travail au plus tard le 31 décembre 2023 Note de bas de page 13.

[43] La preuve médicale appuie les propos de l’appelante.

[44] Le rapport médical rédigé par la médecin de famille de l’appelante mentionne un certain nombre de limitations, entre autres, des étourdissements, un manque de stabilité et d’équilibre, des titubations lorsqu’elle marche et, depuis 2020, des douleurs au bas du dos accompagnées de douleurs sciatiques lorsqu’elle marche ou se tient debout pendant de longues périodes Note de bas de page 14. L’appelante affirme que ces symptômes se sont aggravés après la rédaction du rapport en avril 2022. Le ministre et l’ancienne avocate de l’appelante ont tenté sans succès d’obtenir une mise à jour de la médecin de famille de l’appelante.

[45] En janvier 2023, une imagerie par résonance magnétique de la colonne vertébrale a révélé une faiblesse du côté gauche et une diminution de la sensibilité Note de bas de page 15. Elle a reçu un diagnostic de changements dégénératifs à plusieurs endroits sur la colonne cervicale ainsi qu’une grave sténose du canal rachidien entre les vertèbres C4-C5 et C5-C6. Cela entraînait une augmentation de l’intensité du signal de la moelle ou une myélomalacie des vertèbres C4 à C6. Elle avait aussi une grave sténose foraminale des deux côtés aux vertèbres C4-C5 et C5-C6. La sténose comprimait les racines des nerfs sortants. Une consultation urgente en neurochirurgie a été recommandée.

[46] L’appelante a subi une intervention chirurgicale en mai 2023. Après l’opération, le chirurgien orthopédiste et son équipe ont rédigé deux rapports : l’un en mai et l’autre en octobre 2023 Note de bas de page 16. Dans le deuxième rapport, on peut lire ceci Note de bas de page 17 :

[traduction]
Dans l’ensemble, elle se porte bien. Elle a remarqué une amélioration lorsqu’elle marche, elle ne chute plus, elle a un meilleur équilibre et elle voit une certaine amélioration à l’usage de la main. Elle ressent encore de l’inconfort au cou et à l’épaule du côté gauche… Elle se déplace bien. Les incisions ont bien guéri. Toutes les forces sont à 5/5 dans les membres supérieurs et inférieurs, sauf en T1 à gauche presque +4/5… J’ai l’impression qu’elle progresse bien avec une bonne amélioration de l’équilibre et de la motricité fine.

[47] Ce rapport n’entend pas évaluer toutes les limitations fonctionnelles de l’appelante. Il ne précise pas si le médecin pense qu’elle peut travailler. Tout ce qu’il me dit, c’est que l’opération s’est bien déroulée et qu’en conséquence, certaines des limitations de l’appelante ont diminué. Il ne me donne aucune information sur ses douleurs, sauf pour ce qui est, à mon avis, d’un commentaire rapide sur l’« inconfort ».

[48] La loi n’exige pas qu’on fasse la preuve d’un diagnostic précis confirmant la présence de douleurs chroniquesNote de bas de page 18. Par ailleurs, d’autres éléments de preuve médicale montrent que l’appelante avait des limitations qui nuisaient à sa capacité de travail avant le 31 décembre 2023Note de bas de page 19 :

  • en mars 2021, elle a reçu un diagnostic de discopathie dégénérative et d’arthrose facettaire à la colonne lombaire Note de bas de page 20;
  • en février 2022, elle a signalé que, depuis un à deux ans, elle avait un manque de stabilité et d’équilibre, elle ne pouvait pas bouger rapidement, elle avait des maux de tête et elle voyait double Note de bas de page 21.

[49] J’ai aussi tenu compte de la preuve de l’appelante sur son expérience avec les médecins et le système de santé. Son témoignage m’explique pourquoi il n’y a pas plus d’éléments de preuve médicale.

[50] Je juge que la preuve médicale appuie l’affirmation de l’appelante voulant qu’elle ressent des douleurs chroniques qui l’empêchent d’occuper un emploi depuis décembre 2021. C’est à cette époque-là qu’elle a essayé de retourner au travail, mais qu’elle a démissionné après deux jours parce que ses douleurs étaient, selon ses dires, trop intenses.

[51] Je vais maintenant vérifier si l’appelante a suivi les conseils médicaux.

L’appelante a suivi les conseils médicaux

[52] Pour recevoir une pension d’invalidité, il faut suivre les conseils des médecins Note de bas de page 22. Rien ne prouve que l’appelante n’a pas suivi les conseils médicaux. En fait, la preuve montre très clairement qu’elle fait beaucoup d’efforts pour recevoir un traitement. L’appelante a suivi les conseils des médecins Note de bas de page 23.

[53] Je dois maintenant décider si l’appelante est régulièrement capable de faire un autre type de travail. Pour être graves, ses limitations fonctionnelles doivent l’empêcher de gagner sa vie dans n’importe quel type d’emploi, pas seulement dans son emploi habituel Note de bas de page 24.

L’appelante est incapable de travailler dans un contexte réaliste

[54] Pour décider si l’appelante est capable de travailler, je ne peux pas me contenter d’examiner ses problèmes de santé et leurs effets sur ses capacités. Je dois aussi tenir compte de caractéristiques comme :

  • son âge;
  • son niveau d’instruction;
  • ses aptitudes linguistiques;
  • ses antécédents de travail et son expérience de vie.

[55] Ces éléments m’aident à décider si elle est capable de travailler dans un contexte réaliste, c’est-à-dire s’il est réaliste de dire qu’elle peut travaillerNote de bas de page 25.

[56] Je juge que l’appelante est incapable de travailler dans un contexte réaliste. Elle n’est pas en mesure de travailler depuis décembre 2021.

[57] L’appelante admet qu’elle peut habituellement rester assise pendant un certain temps sans avoir de douleurs intenses. Alors, je lui ai demandé pourquoi elle ne pouvait pas faire un travail sédentaire, c’est-à-dire avoir un emploi où elle serait assise la majeure partie du temps.

[58] L’appelante a expliqué qu’elle n’a aucune expérience dans ce genre d’emploi. Elle a dit qu’elle a presque 60 ans. Elle a fait sa 12e année seulement. Il faudrait qu’elle retourne au collège pendant au moins un an avant d’essayer de trouver un emploi pour lequel elle n’aurait aucune expérience et qu’elle pourrait faire malgré ses limitations physiques. Elle croit que personne ne voudrait l’embaucher. Je pense qu’elle a raison.

[59] L’appelante a bel et bien tenté de travailler en décembre 2021. C’était un emploi qu’elle pouvait obtenir. Physiquement, elle était incapable de faire le travail.

[60] Je conclus que l’invalidité de l’appelante était grave dès décembre 2021. C’est à cette époque-là qu’elle a essayé de travailler, mais sans succès en raison des douleurs intenses provoquées par l’exécution de ses tâches. Elle a démissionné après deux jours.

L’invalidité était-elle prolongée?

[61] L’invalidité de l’appelante était prolongée.

[62] La preuve médicale montre que l’appelante a commencé à avoir des étourdissements et des douleurs au bas du dos en 2020Note de bas de page 26. Avec la chirurgie, sa mobilité s’est améliorée, mais ses douleurs n’ont pas diminué. Au contraire, l’appelante a affirmé qu’elles empirent.

[63] Les limitations de l’appelante vont fort probablement durer indéfiniment.

[64] Je conclus donc que son invalidité était prolongée dès le 31 décembre 2021.

Début du versement de la pension

[65] L’invalidité de l’appelante est devenue grave et prolongée en décembre 2021.

[66] Il y a une période d’attente de quatre mois avant le début des paiements Note de bas de page 27. Ainsi, les paiements commencent en avril 2022.

Conclusion

[67] Je conclus que l’appelante est admissible à la pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada parce que son invalidité était grave et prolongée.

[68] Par conséquent, l’appel est accueilli.

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