Régime de pensions du Canada (RPC) – invalidité

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[TRADUCTION]

Citation : CW c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2024 TSS 398

Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu

Décision

Partie appelante : C. W.
Représentante ou représentant : K. W.
Partie intimée : Ministre de l’Emploi et du Développement social

Décision portée en appel : Décision de révision du ministre de l’Emploi et du Développement social datée du 12 juillet 2022 (communiquée par Service Canada)

Membre du Tribunal : Brianne Shalland-Bennett
Mode d’audience : En personne
Date de l’audience : Le 14 décembre 2023
Personnes présentes à l’audience : Appelante
Représentant et témoin de l’appelante
Date de la décision : Le 9 janvier 2024
Numéro de dossier : GP-22-1710

Sur cette page

Décision

[1] L’appel est rejeté.

[2] L’appelante, C. W., n’a pas droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada.

[3] J’explique dans la présente décision pourquoi je rejette l’appel.

Aperçu

[4] L’appelante a 53 ans. Elle a terminé ses études secondaires et elle a ensuite fréquenté l’école des métiers. Elle a été mise à pied de son emploi de femme de ménage en octobre 2019. En effet, il n’y avait pas assez de travail. Elle devait reprendre le travail vers mars 2020, mais elle n’a pas été rappelée en raison de la pandémie de COVID-19.

[5] L’appelante a contracté la COVID-19 en mars 2020. Elle affirme qu’elle pouvait encore travailler malgré ses limitations pendant une certaine période après être tombée malade. Pendant cette période, elle affirme ne pas avoir pu obtenir de travail en raison des fermetures causées par la pandémie. En janvier ou février 2022, son état de santé (en raison de la COVID-19 de longue durée) s’est tellement détérioré qu’elle ne pouvait plus travailler.

[6] L’appelante a demandé une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada le 10 mars 2022. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande. Il affirme que l’invalidité n’était pas grave et prolongée au 31 décembre 2019Note de bas de page 1.

[7] L’appelante a porté en appel la décision du ministre devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale.

Questions que je dois examiner en premier

La date de fin de la période minimale d’admissibilité de l’appelante est le 31 décembre 2019

[8] La date de fin de la période minimale d’admissibilité de l’appelante est le 31 décembre 2019.

[9] Service Canada a utilisé les années de cotisations au Régime de pensions du Canada de l’appelante pour calculer sa période de protection. C’est ce qu’on appelle une « période minimale d’admissibilitéNote de bas de page 2 ».

[10] Le représentant de l’appelante affirme que la seule raison pour laquelle l’appelante n’a pas réalisé de gains après 2019 est attribuable aux fermetures forcées du gouvernement pendant la pandémie. Selon lui, elle ne devrait pas être punie pour avoir respecté les règles.

[11] Le représentant de l’appelante affirme également que la Loi sur les mesures d’urgence et la Loi sur les mesures de guerre remplacent le Régime de pensions du Canada. Il a déclaré que ces lois font en sorte que tout type de cotisations que l’appelante aurait versées (s’il n’y avait pas eu de fermetures) lui permettrait d’obtenir automatiquement un « supplément » au montant minimal de cotisations dont elle a besoin pour être admissible à une prestation d’invaliditéNote de bas de page 3.

[12] Le ministre affirme qu’aucune disposition de la loi ne lui permettrait de tenir compte des fermetures liées à la pandémie dans le calcul de la période minimale d’admissibilité de l’appelante. Il dit que la date de fin de la période minimale d’admissibilité de l’appelante est le 31 décembre 2019Note de bas de page 4.

[13] Je partage l’opinion du ministre. Je suis liée par les dispositions du Régime de pensions du Canada.

[14] Selon la loi, il incombe au ministre du Revenu national de communiquer les renseignements relatifs aux gains et aux cotisationsNote de bas de page 5. Sur cette base, le ministre prépare le registre des gains et d’autres renseignements qui servent à établir une période minimale d’admissibilité.

[15] Je n’ai pas le pouvoir de présumer de ce que les gains de l’appelante auraient pu être, sans les fermetures liées à la pandémie. Je dois me conformer à la loi. Après avoir examiné les gains et les cotisations de l’appelante joints au dossier, je conclus que la date de fin de sa période minimale d’admissibilité est le 31 décembre 2019.

Ce que l’appelante doit prouver

[16] Pour obtenir gain de cause, l’appelante doit prouver qu’elle avait une invalidité grave et prolongée au plus tard le 31 décembre 2019. Elle doit aussi prouver qu’elle continue d’être invalideNote de bas de page 6.

[17] Le Régime de pensions du Canada définit les termes « grave » et « prolongée ».

[18] Une invalidité est grave si elle rend la partie appelante régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératriceNote de bas de page 7.

[19] Cela signifie que je dois examiner l’ensemble des problèmes de santé de l’appelante pour voir quel effet ils ont sur sa capacité de travailler. Je dois également tenir compte de facteurs tels que son âge, son niveau de scolarité et son expérience professionnelle et personnelle. Ainsi, je pourrai obtenir un portrait réaliste de la gravité de son invalidité. Si l’appelante est régulièrement capable d’effectuer un travail qui lui permettrait de gagner sa vie, elle n’a pas droit à une pension d’invalidité.

[20] Une invalidité est prolongée si elle doit vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou doit entraîner vraisemblablement le décèsNote de bas de page 8.

[21] Cela signifie que l’invalidité de l’appelante ne peut être assortie d’une date de rétablissement prévue. Il faut s’attendre à ce que l’invalidité empêche l’appelante de travailler longtemps.

[22] L’appelante doit prouver qu’elle a une invalidité grave et prolongée. Elle doit le prouver selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie qu’elle doit démontrer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elle est invalide.

Motifs de ma décision

[23] Je conclus que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle avait une invalidité grave et prolongée au 31 décembre 2019. J’en suis arrivée à cette décision après avoir examiné les questions suivantes :

  • L’invalidité de l’appelante était-elle grave?
  • L’invalidité de l’appelante était-elle prolongée?

L’invalidité de l’appelante était-elle grave?

[24] L’invalidité de l’appelante n’était pas grave au 31 décembre 2019. J’en suis arrivée à cette conclusion en tenant compte de plusieurs facteurs. J’explique ces facteurs ci‑après.

Les limitations fonctionnelles de l’appelante

[25] L’appelante est atteinte de la COVID-19 de longue duréeNote de bas de page 9, de dépression et d’anxiété.

[26] Toutefois, je ne peux pas me concentrer sur les diagnostics de l’appelanteNote de bas de page 10. Je dois plutôt me demander si elle a des limitations fonctionnelles qui l’empêchaient de gagner sa vieNote de bas de page 11. Dans le cadre de cette démarche, je dois examiner tous les problèmes de santé de l’appelante (pas seulement le problème principal) et réfléchir à leur incidence sur sa capacité de travailler au 31 décembre 2019Note de bas de page 12.

[27] Je conclus que l’appelante a des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travailler maintenant. Elles n’ont pas nui à sa capacité de travailler au 31 décembre 2019.

Ce que l’appelante dit au sujet de ses limitations fonctionnelles

[28] L’appelante affirme qu’elle n’avait pas de limitations fonctionnelles qui nuisaient à sa capacité de travailler en date du 31 décembre 2019.

[29] L’appelante dit que ses limitations ont commencé lorsqu’elle a contracté la COVID-19 en mars 2020. Elle a commencé à se sentir mieux en juin 2020. Elle dit qu’elle pouvait encore travailler, même si elle ressentait de l’essoufflement et de la fatigue. Elle affirme que ses symptômes se sont aggravés progressivement en 2021. À cette époque, elle a commencé à ressentir des symptômes de dépression et d’anxiété. Elle dit qu’en janvier ou février 2022, elle ne pouvait plus travailler. Voici ce qu’elle dit au sujet de ses limitations depuis le 31 décembre 2019 :

  • Elle ne peut pas marcher ou se tenir debout plus de 15 à 20 minutes.
  • Elle a besoin d’une marchette pour se déplacer.
  • Elle ressent des étourdissements et une faiblesse tous les jours.
  • Elle s’essouffle au repos et en activité.
  • Elle se fatigue facilement et fait de l’insomnie.
  • Elle est de mauvaise humeur, anxieuse, et se sent bouleversée par sa situation.
  • Elle a un brouillard cérébral, une piètre concentration et une mémoire médiocre.
  • Elle éprouve des problèmes d’élocution et de la difficulté à communiquer.

Ce que la preuve médicale révèle au sujet des limitations fonctionnelles de l’appelante

[30] L’appelante doit fournir une preuve médicale démontrant que ses limitations fonctionnelles nuisaient à sa capacité de travailler au plus tard le 31 décembre 2019Note de bas de page 13.

[31] La preuve médicale ne démontre pas que l’appelante avait des limitations qui nuisaient à sa capacité de travailler en date du 31 décembre 2019.

[32] Le Dr Nagel (médecin de famille) affirme que ses notes montrent que l’appelante n’était pas exclue de tous les types de travail au 31 décembre 2019. Il affirme qu’elle était en bonne santé jusqu’en mars 2020Note de bas de page 14. Le témoignage du Dr Nagel concorde avec ce que dit l’appelante. Elle affirme que ses limitations ont commencé après qu’elle a contracté la COVID-19 en mars 2020Note de bas de page 15.

[33] Je reconnais que l’appelante a des limitations fonctionnelles qui nuisent à sa capacité de travailler maintenant. Toutefois, comme il a été mentionné précédemment, elle doit fournir une preuve médicale démontrant que ses limitations ont nui à sa capacité de travailler au plus tard le 31 décembre 2019.

[34] La preuve médicale ne démontre pas que l’appelante avait des limitations qui nuisaient à sa capacité de travailler à cette date. Par conséquent, elle n’a pas prouvé qu’elle avait une invalidité grave au 31 décembre 2019.

Pourquoi je n’ai pas tenu compte des caractéristiques personnelles de l’appelante

[35] Lorsque je décide si une invalidité est grave, je dois généralement tenir compte des caractéristiques personnelles de la partie appelante. Des facteurs comme son âge, son niveau de scolarité, ses capacités linguistiques et son expérience de travail et de vie antérieure peuvent influer sur le fait qu’une appelante puisse travailler dans le monde réelNote de bas de page 16.

[36] Cependant, je n’ai pas tenu compte des caractéristiques personnelles de l’appelante. En effet, une partie appelante ne peut pas être admissible à une pension d’invalidité en raison de ses seules caractéristiques personnelles. Il doit tout de même y avoir une preuve médicale à l’appui d’une conclusion d’invaliditéNote de bas de page 17.

[37] Dans le cas de l’appelante, il n’y a aucune preuve médicale à l’appui d’une conclusion d’invalidité au 31 décembre 2019. Comme il n’y a pas de preuve médicale pertinente, il n’y a aucune raison de tenir compte de ses caractéristiques personnelles.

Conclusion

[38] Je conclus que l’appelante n’a pas droit à une pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada parce que son invalidité n’était pas grave. Comme j’ai conclu que son invalidité n’était pas grave, je n’avais pas à me demander si elle était prolongée.

[39] Par conséquent, l’appel est rejeté.

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