Contenu de la décision
[TRADUCTION]
Citation : SC c Ministre de l’Emploi et du Développement social, 2025 TSS 472
Tribunal de la sécurité sociale du Canada
Division générale, section de la sécurité du revenu
Décision
Partie appelante : | S. C. |
Partie intimée : | Ministre de l’Emploi et du Développement social |
Décision portée en appel : | Décision de révision datée du 3 octobre 2024 rendue par le ministre de l’Emploi et du Développement social (communiquée par Service Canada) |
Membre du Tribunal : | Selena Bateman |
Mode d’audience : | Téléconférence |
Date de l’audience : | Le 18 mars 2025 |
Personne présente à l’audience : | Appelante |
Date de la décision : | Le 24 mars 2025 |
Numéro de dossier : | GP-24-1900 |
Sur cette page
Décision
[1] L’appel est rejeté.
[2] L’appelante, S. C., ne peut pas avoir plus de temps pour demander la révision de la décision concernant sa demande de pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada.
[3] Cette décision explique pourquoi je rejette l’appel.
Aperçu
[4] L’appelante a demandé une pension d’invalidité du Régime en juillet 2022. Le ministre de l’Emploi et du Développement social a rejeté sa demande le 29 mars 2023.
[5] Le 5 août 2024, l’appelante a demandé au ministre de réviser sa décision. Le 3 octobre 2024, le ministre a rejeté la demande de révision présentée en retard. L’appelante a fait appel au Tribunal de la sécurité sociale.
[6] Le présent appel ne vise pas à décider si l’appelante devrait recevoir une pension d’invalidité du Régime. Il s’agit de décider si elle a présenté sa demande de révision en retard. Si c’est le cas, il s’agit aussi de décider si le ministre aurait dû lui donner plus de temps pour demander une révision.
Ce que je dois décider
[7] D’abord, je dois décider si la demande de révision de l’appelante a été présentée en retard.
[8] Si c’est le cas, je dois décider si le ministre a agi de façon judiciaire lorsqu’il a refusé de donner à l’appelante plus de temps pour demander une révision.
[9] Si je décide que le ministre n’a pas agi de façon judiciaire, je dois décider si l’appelante devrait avoir plus de temps pour demander une révision.
Motifs de ma décision
[10] La demande de révision de l’appelante a été présentée en retard. Le ministre n’a pas agi de façon judiciaire. L’appelante ne devrait pas avoir plus de temps pour demander une révision.
La demande de révision de l’appelante est en retard
[11] Si une personne n’est pas d’accord avec la décision du ministre de rejeter sa demande de pension d’invalidité du Régime, elle peut lui demander une révision. Elle doit le faire dans les 90 jours suivant le jour où elle a été avisée de la décision par écrit. Si elle demande une révision après le délai de 90 jours, sa demande est en retard Note de bas de page 1.
[12] La demande de révision de l’appelante est en retard.
[13] La décision initiale du ministre est datée du 29 mars 2023 Note de bas de page 2. L’appelante affirme avoir reçu cette lettre en mars 2023.
[14] L’appelante disposait de 90 jours pour demander une révision. Elle n’a pas demandé de révision avant le 5 août 2024. C’est plus d’un an après le délai de 90 jours.
Le ministre n’a pas agi judiciairement
[15] Le ministre n’a pas agi de façon judiciaire lorsqu’il a refusé de donner plus de temps à l’appelante pour demander une révision.
Ce dont le ministre doit tenir compte lorsqu’une demande de révision est présentée en retard
[16] Si une personne présente sa demande de révision en retard, le ministre peut prolonger le délai. Pour ce faire, le ministre doit être convaincu que :
- il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande en retard;
- la personne a manifesté l’intention constante de demander la révision Note de bas de page 3.
Si le retard de la demande de révision excède 365 jours, le ministre doit également être convaincu que :
- la demande de révision a des chances raisonnables de succès;
- le fait d’accueillir la demande ne porterait pas préjudice (désavantage injuste) au ministre Note de bas de page 4;
[17] L’appelante a présenté sa demande avec plus de 365 jours en retard. Le ministre devait donc être convaincu que ces quatre facteurs étaient présents Note de bas de page 5.
Le ministre doit agir judiciairement lorsqu’il examine ces facteurs
[18] La décision du ministre d’accorder plus de temps à une personne est discrétionnaire. Autrement dit, le ministre fait appel à son jugement pour prendre une décision Note de bas de page 6. Cependant, il doit agir de façon judiciaire lorsqu’il prend sa décision.
[19] Par conséquent, le ministre ne doit pas avoir :
- agi de mauvaise foi;
- agi dans un but ou pour un motif irrégulier (mauvaise raison);
- pris en compte un facteur non pertinent;
- ignoré un facteur pertinent;
- agi de manière discriminatoire contre l’appelante Note de bas de page 7.
Le ministre n’a pas agi judiciairement
[20] Le ministre n’a pas agi de façon judiciaire parce qu’il a pris en compte un facteur non pertinent. Il a appliqué le mauvais critère lorsqu’il a décidé que l’appelante n’avait pas d’explication raisonnable pour son retard.
[21] Selon le ministre, l’explication de l’appelante n’est pas raisonnable parce qu’il ne s’agit pas d’une « circonstance atténuante » inhabituelle, inattendue ou indépendante de sa volonté et liée à son état de santé Note de bas de page 8.
[22] La loi n’exige pas que l’appelante réponde à ce critère. Elle dit seulement que son explication doit être raisonnable. Le critère du ministre était trop strict et n’était pas fondé sur la loi. Par conséquent, le ministre a pris en compte un facteur non pertinent.
[23] Ensuite, je dois décider si l’appelante devrait avoir plus de temps pour demander une révision.
L’appelante ne devrait pas avoir plus de temps pour demander la révision
[24] Pour décider si l’appelante devrait avoir plus de temps pour demander une révision, je dois tenir compte des mêmes facteurs que ceux dont le ministre devait tenir compte. L’appelante doit démontrer ce qui suit selon la prépondérance des probabilités :
- elle a une explication raisonnable pour son retard;
- elle a manifesté l’intention constante de demander la révision;
- sa demande de révision a des chances raisonnables de succès;
- le fait de lui accorder plus de temps ne porterait pas préjudice au ministre.
[25] L’appelante doit prouver que ces quatre facteurs sont présents Note de bas de page 9.
L’appelante n’a pas d’explication raisonnable pour son retard
[26] L’appelante n’a pas d’explication raisonnable pour son retard. Pour cette raison, je n’ai pas besoin d’examiner les trois autres facteurs.
[27] L’appelante a dit qu’elle n’avait pas lu la lettre de refus en détail Note de bas de page 10. Elle dit qu’elle ne sait pas pourquoi elle a ignoré la lettre. Deuxièmement, elle a dit qu’elle ne savait pas qu’elle pouvait demander une révision et qu’il y avait un délai. Elle a dit avoir appris qu’elle pouvait demander une révision après avoir relu la lettre. À ce moment-là, elle a demandé au ministre de réviser sa décision.
[28] J’ai décidé que cette explication n’était pas raisonnable.
[29] L’appelante n’a pas fourni d’explication raisonnable pour expliquer pourquoi elle a cessé de lire la lettre après la première page. La lettre de décision initiale n’était pas longue ou trop compliquée. Elle faisait un peu plus de deux pages. Elle comprenait une pièce jointe de deux pages sur la façon de demander une révision Note de bas de page 11. Dans ces quatre pages, il est mentionné à deux reprises que la demande de révision doit être présentée par écrit dans les 90 jours. La lettre énonçait clairement les directives relatives à ce qui suit : ce qu’est une demande de révision, les façons d’en présenter une et les moyens de communiquer avec Service Canada.
[30] J’ai également tenu compte de la situation personnelle et des problèmes de santé de l’appelante pour décider si son explication était raisonnable. La preuve médicale ne confirme pas qu’elle a des problèmes de santé qui ont une incidence sur son fonctionnement cognitif. Par exemple, le rapport médical n’énumère pas de limitations cognitives. De plus, elle ne prétend pas en avoir Note de bas de page 12. Elle a dit qu’elle comprenait le contenu de la lettre. Elle n’a pas besoin de l’aide d’autres personnes pour comprendre l’anglais.
Conclusion
[31] Je conclus que l’appelante ne peut pas avoir plus de temps pour demander la révision de la demande de pension d’invalidité du Régime présentée le 23 juillet 2022.
Par conséquent, l’appel est rejeté.