Assurance-emploi (AE)

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Comparutions

S. N., le prestataire, n’a pas participé à l’audience par vidéoconférence.

Décision

[1] Le Tribunal de la sécurité sociale conclut que, conformément à l’article 35 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement sur l’AE), le prestataire a touché une rémunération grâce à un emploi entre le 13 février et le 3 juin 2012, et que cette rémunération a bien été répartie conformément à l’article 36 du Règlement sur l’AE.

[2] Le Tribunal conclut que le prestataire a sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses à la Commission de l’assurance-emploi du Canada et qu’une pénalité doit lui être imposée en vertu de l’article 38 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

[3] Le Tribunal conclut qu’il y a eu violation de la part du prestataire conformément à l’article 7.1(4) de la Loi sur l’AE.

Introduction

[4] Le prestataire était au chômage depuis le 23 janvier 2012. Il a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi le 26 janvier 2012. Une période de prestations initiale débutant le 22 janvier 2012 a été établie. Grâce à une enquête sur l’intégrité, la Commission a découvert que le prestataire travaillait alors qu’il touchait des prestations d’assurance-emploi. Cette découverte a donné lieu à un trop-payé, une pénalité et une violation. Le prestataire a demandé une révision de la décision de la Commission. Dans une lettre datée du 17 septembre 2013, la Commission a cependant signifié le maintien de sa décision. Le prestataire a donc fait appel au Tribunal de la sécurité sociale.

[5] Une audience téléphonique devait avoir lieu le 9 janvier 2014. Avant l’audience, l’avis d’audience est revenu, non réclamé. Le prestataire a ensuite été joint, ce qui a permis d’apprendre qu’il avait déménagé. Une nouvelle audience a été fixée pour le 23 janvier 2014.

[6] Avant l’audience prévue le 23 janvier 2014, la Commission a soumis des renseignements supplémentaires. L’audience a été ajournée de nouveau, pour donner au prestataire la chance d’examiner l'information. Un avis d’audience daté du 24 janvier 2014 a ensuite été envoyé au prestataire pour l’informer d’une audience qui serait tenue en personne le 12 février 2014.

[7] Dans une télécopie datée du 11 février 2014, le prestataire a signalé qu’il n’avait reçu aucune correspondance sur l’audience qui devait avoir lieu le 12 février 2014. Un avis d’audience daté du 3 mars 2014 lui a été envoyé par courrier ordinaire, pour l’informer d’une vidéoconférence prévue pour le 25 mars 2014. Une deuxième lettre, datée du 13 mars 2014, lui a aussi été envoyée par courrier ordinaire. Cette lettre, envoyée en guise de rappel, lui expliquait aussi comment trouver le centre où aurait lieu la vidéoconférence.

[8] Le prestataire ne s’est pas présenté à l’audience du 25 mars 2014. Aucune lettre n’a été non livrée ou retournée au Tribunal.

[9] Aux termes de l’article 19(2) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (Règlement sur le TSS), tout document envoyé par le Tribunal est présumé avoir été communiqué à la partie le 10e jour suivant celui de sa mise à la poste, si elle est transmise par la poste ordinaire.

[10] En vertu de l’article 12(1) du Règlement sur le TSS, si une partie omet de se présenter à l’audience, le Tribunal peut procéder en son absence, s’il est convaincu qu’elle a été avisée de la tenue de l’audience.

[11] Le Tribunal est convaincu que le prestataire a été avisé de la tenue de l’audience.

Mode d’audience

[12] L’audience devait être faite par vidéoconférence pour les raisons indiquées dans l’avis d’audience du 10 décembre 2014.

Questions en litige

[13] Les questions à trancher consistent à savoir si :

  1. le prestataire a une rémunération qui doit être répartie pendant une partie de sa période de prestations, conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur AE;
  2. une pénalité doit être imposée au prestataire, en vertu de l’article 38 de la Loi sur l’AE, parce qu’il a sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses à la Commission;
  3. une pénalité pour une infraction dite très grave doit être infligée au prestataire, en application de l’article 7.1 de la Loi sur l’AE.

Droit applicable

Rémunération et répartition de la rémunération

[14] Le revenu, au sens de l’article 35 du Règlement sur l’AE, correspond à « [t]out revenu en espèces ou non que le prestataire reçoit ou recevra d’un employeur ou d’une autre personne, notamment un syndic de faillite. » 

[15] L’article 35(2) de la Loi sur l’AE explique notamment que la rémunération qu’il faut prendre en compte pour vérifier s’il y a eu l’arrêt de rémunération visé à l’article 14 et fixer le montant à déduire des prestations à payer en vertu de l’article 19, des paragraphes 21(3), 22(5), 152.03(3) ou 152.04(4), ou de l’article 152.18 de la Loi, ainsi que pour l’application des articles 45 et 46 de la Loi, est le revenu intégral du prestataire provenant de tout emploi, notamment.

[16] L’article 36(1) du Règlement sur l’AE prévoit que la rémunération, déterminée conformément à l’article 35, est répartie de la manière prévue dans cet article.

[17] Selon l’article 36(4) du Règlement sur l’AE, la rémunération payable au prestataire aux termes d’un contrat de travail en échange des services rendus est répartie sur la période pendant laquelle ces services ont été fournis.

[18] Aux termes de l’article 36(9) du Règlement sur l’AE, toute rémunération payée ou payable au prestataire en raison de son licenciement ou de la cessation de son emploi est, abstraction faite de la période pour laquelle elle est présentée comme étant payée ou payable, répartie sur un nombre de semaines qui commence par la semaine du licenciement ou de la cessation d’emploi, de sorte que la rémunération totale tirée par lui de cet emploi dans chaque semaine consécutive, sauf la dernière, soit égale à sa rémunération hebdomadaire normale provenant de cet emploi.

Pénalité

[19] En vertu de l’article 38 (1) de la Loi sur l’AE, lorsqu’elle prend connaissance de faits qui, à son avis, démontrent que le prestataire ou une personne agissant pour son compte a perpétré l’un des actes délictueux suivants, la Commission peut lui infliger une pénalité pour chacun de ces actes :

  1. à l’occasion d’une demande de prestations, faire sciemment une déclaration fausse ou trompeuse;
  2. étant requis en vertu de la présente loi ou des règlements de fournir des renseignements, faire une déclaration ou fournir un renseignement qu’on sait être faux ou trompeurs;
  3. omettre sciemment de déclarer à la Commission tout ou partie de la rémunération reçue à l’égard de la période déterminée conformément aux règlements pour laquelle il a demandé des prestations;
  4. faire une demande ou une déclaration que, en raison de la dissimulation de certains faits, l’on sait être fausse ou trompeuse;
  5. sciemment négocier ou tenter de négocier un mandat spécial établi à son nom pour des prestations au bénéfice desquelles on n’est pas admissible;
  6. omettre sciemment de renvoyer un mandat spécial ou d’en restituer le montant ou la partie excédentaire comme le requiert l’article 44;
  7. dans l’intention de léser ou de tromper la Commission, importer ou exporter, ou faire importer ou exporter, un document délivré par elle;
  8. participer, consentir ou acquiescer à la perpétration d’un acte délictueux visé à l’un ou l’autre des alinéas a) à g).

[20] Dans Mootoo (2003 CAF 206), la Cour d’appel fédérale a confirmé le principe établi dans Gates (A-600-94) voulant que le prestataire doit savoir objectivement que sa déclaration était fausse afin de conclure, selon la prépondérance des probabilités, qu’il a fait une telle déclaration et lui imposer une pénalité.

Violation

[21] L’article 7.1(2) de la Loi sur l’AE édicte, en partie, qu’il y a violation lorsque le prestataire se voit infligé une pénalité en application de l’article 38 de la Loi sur l’AE.

[22] Dans Gill (2010 CAF 182), la Cour d’appel fédérale, tout en reconnaissant que la Commission a le pouvoir discrétionnaire de donner un avis de violation, a établi que l’imposition d’un tel avis n’est ni obligatoire ni automatique selon l’article 7.1(4) de la Loi sur l’AE. La Commisson doit exercer ce pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.

Preuve

[23] Voici la preuve au dossier :

  1. Le prestataire a soumis neuf déclarations faites en ligne pour la période allant du 12 février 2012 au 16 juin 2012. Il y affirme n’avoir ni travaillé ni touché de rémunération pour chacune des périodes visées par ces déclarations (pages GD3-17 à GD3-62).
  2. Un relevé d’emploi au dossier (page GD3-68) révèle que le prestataire avait commencé un nouvel emploi le 13 février 2012, et qu’il avait travaillé à temps plein jusqu’au 3 juin 2012. Au terme de cet emploi, le prestataire a reçu une indemnité de vacances de 899,80 $ ainsi qu’une indemnité de préavis de 2 673,60 $ (page GD3-68).
  3. Le prestataire a été joint le 24 octobre 2012. Il convenait qu’il avait travaillé pour cet employeur pour la période en question. Cela dit, il avait déjà déclaré cette information puisqu’il avait présenté une autre demande de prestations d’assurance-emploi le 2 août 2012. Le prestataire a dit qu’il remplissait ses déclarations toutes les deux semaines et qu’il déclarait sa rémunération. Il ignore ce qui a pu se passer dans le système comme celui-ci ne montre pas sa rémunération (pages GD3-73 et GD3-74).
  4. Le 31 octobre 2012, le prestataire a communiqué avec la Commission pour lui dire qu’il avait reçu la lettre indiquant la rémunération hebdomadaire fournie par son employeur. Il a affirmé qu’il avait déjà fait part de cet emploi et de sa rémunération à Service Canada. Il a dit que ce n’était pas de sa faute si Service Canada n’avait pas réglé la situation, et qu’il ne devrait pas être tenu responsable (page GD3-75).
  5. Le prestataire a confirmé qu’il avait touché des prestations d’assurance-emploi du 22 janvier au 7 juillet 2012, et qu’il avait travaillé du 13 février au 3 juin 2012. On l’a informé qu’il avait reçu la totalité des 22 semaines de prestations auxquelles il avait été admissible. Toutefois, rien ne montre qu’il avait signalé son emploi à la Commission ou déclaré sa rémunération avant qu’il ne demande des prestations le 2 août 2012. Il a dit qu’il avait parlé de son emploi à Service Canada et qu’un agent lui avait dit que tout était beau. Il a répété sans cesse qu’il avait informé la Commission, que ce n’était pas de sa faute si la situation n’avait pas été réglée et qu’il ne devrait pas être pénalisé pour cela (page GD3-75).
  6. Le 13 novembre 2012, le prestataire a rempli une Demande de clarification de renseignements sur l’emploi. Il y a expliqué qu’il n’avait pas reçu les paiements indiqués comme il avait juste travaillé à temps partiel pour cet employeur, même si l'idée d'un tel salaire le ravissait vraiment. Ensuite, il avait appelé Service Canada pour signaler qu’il travaillait à temps partiel. L’agente lui a dit qu’elle prenait note de l’information, et qu’il n’avait pas besoin de déclarer cette faible rémunération comme elle en avait pris note. Il n’avait jamais fait de déclaration fausse ou trompeuse quant à sa rémunération. Il a toujours été très honnête avec Service Canada. L’agente lui avait dit qu’il n’avait pas besoin de déclarer sa rémunération, comme elle en avait pris note et que l’information apparaîtrait ainsi dans sa demande. Service Canada l’avait mal avisé et il n’avait jamais rempli de déclarations auparavant. Toute erreur n’était pas intentionnelle (page GD3-78).
  7. Le 16 novembre 2012, le prestataire a fait savoir à la Commission qu’il récupérerait ses talons de chèque de paie et a confirmé qu’il les soumettrait d’ici le 21 novembre 2012. Il a réitéré qu’il avait déjà signalé à la Commission qu’il travaillait tout en touchant des prestations d’assurance-emploi et que, chaque fois qu’il téléphone au centre d’appel, il parle à des personnes qui n’ont pas le même niveau de formation (page GD3-81).
  8. Une révision interne n’a permis de trouver aucun document écrit attestant d’appels faits au centre d’appels. Une note témoigne par contre d’une conversation de 2011 sur sa Commission des accidents du travail (page GD3-85).
  9. Un avis de dette a été envoyé au prestataire le 25 mai 2013. Cette lettre expliquait qu’il avait présenté sa rémunération de manière inexacte et qu’il en avait résulté un trop-payé de 7 125 $ ainsi qu’une pénalité s’élevant à 3 563 $ (page GD3-92).
  10. Après la réception de sa demande de révision, le prestataire a été joint. Il a affirmé qu’il avait appelé la Commission quand il avait recommencé à travailler et qu’il avait parlé de son retour au travail à une agente. Il affirme lui avoir dit qu’il travaillait, et on l’aurait assuré que sa demande serait mise à jour pour refléter ces renseignements. Il avait dit à l’agente le nom de son employeur et qu’il travaillait à temps plein. Il a insisté sur le fait qu’on lui avait dit que l’information serait inscrite au dossier et qu’il pouvait continuer de remplir ses déclarations comme d’habitude (page GD3-152).
  11. On lui a demandé pourquoi il n’avait pas déclaré qu’il travaillait dans ses rapports. Il a répondu qu’il avait répondu aux questions comme d’habitude et qu’il est possible qu’il ne leur ait pas porté assez attention. On lui a demandé pourquoi il avait donné une mauvaise réponse à une question simple et directe. Il a répondu en disant qu’il n’avait pas fait de fausses déclarations et a réitéré qu’il avait dit à une agente qu’il était retourné au travail et qu’il avait simplement donné les mêmes réponses qu’auparavant (page GD3-152).
  12. Le prestataire a dit qu’il ne pensait pas qu’il était bizarre qu’il travaille à temps plein tout en touchant de pleines prestations d’assurance-emploi, comme il ne connaissait pas bien le système et n’était pas né au Canada. Comme il avait dit à une agente qu’il avait recommencé à travailler, il pensait qu’il devait être admissible aux prestations. Quand on lui a demandé pourquoi il avait déclaré qu’il travaillait à temps partiel plutôt qu’à temps plein, il a affirmé que sa réponse n’avait pas dû être claire, comme l’anglais n’était pas sa langue maternelle (page GD3-153).
  13. Pour appuyer son appel au Tribunal, le prestataire a soumis une note d’un médecin précisant qu’il avait été incapable de travailler du 19 septembre au 19 novembre 2013 (Page GD2-3).
  14. L’employeur a soumis tous les documents concernant la paie du prestataire (pages DG3- 96 to GD3-138).

Observations

[24] Le prestataire a présenté les observations suivantes :

  1. Il n’a rien présenté sous un faux jour. Il avait appelé le numéro du service à la clientèle et signalé qu’il travaillait. Il ne se souvient pas du nom exact de la personne à qui il avait parlé, mais l’appel avait eu lieu le 14 février 2012. L’agente lui a dit qu’elle inscrirait dans le système qu’il travaillait (page GD3-94).
  2. Pour sa période de prestations allant du 22 janvier 2012 au 19 janvier 2013, on peut voir que l’agente qui avait pris en charge son dossier lui avait d’abord donné moins de semaines de prestations, mais que le nombre de semaines avait été augmenté après une révision faite par Service Canada. En gros, l’agent à qui il avait parlé avait fait une erreur en omettant de répertorier l’information dans le système. Aussi, pour l’une de ses demandes, l’agence avait déposé par erreur près de 7 000 $ dans son compte bancaire. Il rembourse aujourd’hui cette dette, et doit encore environ 2 000 $ (page GD3-94).
  3. Il est injuste, irrespectueux et non justifié que la Commission lui inflige une amende de 3 563 $ en plus de l’obliger à travailler des heures additionnelles pour être admissible aux prestations. Il a une épouse et deux enfants de sept et deux ans. La situation est insoutenable et il implore l’annulation de la décision. Il n’a jamais fait sciemment de fausses déclarations et avait rempli les déclarations après avoir parlé à l’agente (page GD3-94).
  4. Il a fourni d’autres documents montrant qu’il avait touché des prestations d’assurance-emploi en 2009. On lui a demandé de donner plus de détails sur sa rémunération de l’époque. Il a dit avoir signalé que quelqu’un utilisait son numéro d’assurance sociale (NAS) et demandait des prestations d’assurance-emploi en utilisant son nom. Il était allé chez Service Canada et un nouveau NAS lui avait été donné. Il avait fermé son compte bancaire près de trois fois en raison de fraude liée à son identité. Vu ces circonstances, il avait aussi fait une demande de changement de nom, qui avait été acceptée. Il reçoit encore des factures d’hôtels où il n’est jamais allé. Il possède un rapport de police, un certificat de changement de nom légal et de rapports de crédit pour montrer qu’il n’a jamais fait de demandes d’assurance-emploi non fondées (page GD5-7).

[25] L’intimé a soutenu ce qui suit :

  1. Le prestataire a deux NAS. Il a d’abord reçu un NAS temporaire quand il était venu au Canada comme travailleur étranger temporaire. Il était depuis devenu résident permanent au Canada et avait reçu un nouveau NAS sous un nom différent. La Commission a passé en revue l’entièreté du dossier d’assurance-emploi du prestataire. Celui-ci n’a jamais dit à Service Canada ni à la Commission qu’il croyait que l’un ou l’autre de ses NAS soit utilisé de façon frauduleuse ou à des fins frauduleuses (page GD6-3).
  2. Dans sa demande de révision, le prestataire n’a jamais soulevé que son NAS faisait l’objet de fraude. Il n’a pas non plus soulevé cette question auprès de la Commission durant leur conversation du 16 septembre 2013. Le prestataire a plutôt reconnu qu’un employeur lui versait une rémunération alors qu’il touchait en même temps des prestations de l’assurance-emploi. Il n’a fourni aucun document ou preuve montrant qu’il aurait effectivement rempli un rapport de police pour un vol d’identité, ou qu’il avait fermé des comptes bancaires par crainte d’un vol d’identité. Il avait bel et bien changé son nom, mais on ne sait pas pourquoi. Rien ne montre qu’il l’aurait fait par crainte d’un vol d’identité (page GD6-3).

Rémunération et répartition de la rémunération

  1. Le prestataire a reçu de l’argent de la part de son employeur : salaire, indemnité de préavis, et indemnité de vacances accumulée. Il s’agissait donc d’une rémunération selon le Règlement sur l’AE. La Commission maintient que ces sommes ont valeur de rémunération au sens de l’article 35(2) du Règlement sur l’AE, comme elles lui ont été versées pour des heures travaillées, à titre d’indemnité de préavis à la cessation de son emploi, et comme indemnité de vacances accumulée (page GD4- 7).

Pénalité

  1. La Commission a fait valoir qu’elle s’est acquittée, en l’espèce, du fardeau de prouver que le prestataire avait fait neuf fausses déclarations. En effet, du 13 février 2012 au 3 juin 2012, il savait qu’il occupait un emploi, mais a déclaré n’avoir ni travaillé ni touché un revenu durant cette partie de sa période de prestations. Dans chacune de ses déclarations du prestataire – et notons qu’il a fait des études universitaires –, il lui était posé une question simple, directe et claire :

    [traduction]
    Avez-vous travaillé ou reçu une rémunération durant la période visée par cette déclaration? Sont ici compris le travail pour lequel vous serez rémunéré plus tard, le travail non rémunéré ainsi que le travail autonome.
  2. Dans neuf déclarations consécutives, le prestataire a répondu « NON » à cette question, même s’il avait travaillé et gagné entre 215 $ et 1 810 $ pour chacune des semaines visées par la question. La Commission a soutenu, en toute déférence, que le prestataire savait qu’il faisait des déclarations fausses ou trompeuses en répondant incorrectement à cette question, et qu’il l’a fait afin de recevoir des prestations auxquelles il se savait inadmissible (pages GD4-8 et GD4-9).
  3. La Commission a affirmé qu’elle a rendu sa décision de manière judiciaire dans cette affaire. Elle a tenu compte de toutes les circonstances pertinentes pour établir le montant de la pénalité. Aux fins du calcul de la pénalité, il a été considéré qu’il s’agissait de la première fausse déclaration du prestataire. Le montant original de la pénalité a été établi à 3 563 $%, soit 50 % du trop-payé s’élevant à 7 125 $. Après révision, le trop-payé a été revu à la hausse, pour atteindre 8 941 $. La pénalité maximale possible aurait correspondu à 50 % du trop-payé net, soit 4 471 $ (50 % x 8 941 $). Conformément à sa politique interne, la Commission aurait pu imposer une pénalité de 4 471 $ au prestataire. Elle a cependant jugé que la pénalité initiale de 3 563 $ était suffisamment élevée, et n’a donc pas majoré le montant de la pénalité (pages GD4-10 et GD4-11).

Violation

  1. La Commission aurait imposé l’avis de violation en exerçant son pouvoir discrétionnaire de façon guidée. L’impact global d’un tel avis sur le prestataire a été considéré, notamment les circonstances atténuantes, ses infractions passées et l’effet sur son admissibilité aux prestations dans le futur. Il a été conclu qu’une violation était applicable en l’espèce (page GD4-12).
  2. Le prestataire avait 1820 heures assurables quand sa demande a été approuvée. Seules 700 heures assurables étaient alors nécessaires à son admissibilité. L’imposition d’une violation pour une infraction dite très grave l’obligera à accumuler 1225 heures assurables pour être admissible aux prestations dans le futur (en présumant que le taux régional de chômage demeure inchangé). Comme il avait accumulé 1820 heures la dernière fois, l’imposition d’une violation n’est pas indûment sévère ou exagérée (page GD3-156).

Analyse

Rémunération et répartition de la rémunération

[26] Pour être considéré comme une rémunération, le revenu doit provenir d’un emploi. Le prestataire est tenu de déclarer toutes les sommes qui lui ont été payées ou qui lui sont payables. Il lui revient de prouver qu’un revenu n’est pas une rémunération et qu’il ne doit pas être réparti.

[27] Le prestataire a reçu des prestations d’assurance-emploi du 22 janvier au 7 juillet 2012. Une enquête a révélé que le prestataire avait travaillé et touché une rémunération durant sa période de prestations, et qu’il n’avait pas déclaré sa rémunération du 13 février au 3 juin 2012.

[28] Contacté à ce sujet, le prestataire a admis qu'il avait travaillé du 13 février au 3 juin 2012, alors qu’il recevait des prestations d’assurance-emploi.

[29] Le Tribunal s’est reporté à la décision CUB 67681, où le juge Goulard s’est exprimé comme suit :

En ce qui a trait à la question du trop-payé résultant de la répartition de la rémunération qu’a touchée le prestataire pendant qu’il recevait des prestations d’assurance-emploi, le paragraphe 36(4) du Règlement sur l’assurance-emploi prévoit que la rémunération payable en échange de services rendus doit être répartie sur la période pendant laquelle ces services ont été fournis et les heures donnant droit à la rémunération effectuées. Même si le prestataire a touché sa rémunération à une date ultérieure, celle-ci doit tout de même être répartie sur la période où les services donnant droit à cette rémunération ont été rendus, conformément aux dispositions législatives applicables.

[30] Le Tribunal constate que le prestataire travaillait alors qu’il recevait des prestations d’assurance-emploi. Il n’a pas déclaré cette rémunération et a donc touché des prestations auxquelles il n’était pas admissible.

[31] Même s’il a d’abord contesté le fait que la somme reçue correspondait à un salaire, le prestataire n’a fourni aucune preuve montrant que l’information donnée par l’employeur était inexacte. Aux termes de l’article 44 de la Loi sur l’AE, « [l]a personne qui a reçu ou obtenu, au titre des prestations, un versement auquel elle n’est pas admissible ou un versement supérieur à celui auquel elle est admissible, doit immédiatement renvoyer le mandat spécial ou en restituer le montant ou la partie excédentaire, selon le cas. »

[32] Ainsi, le Tribunal conclut que le prestataire a reçu une rémunération de la part d’un employeur et que cette rémunération a été répartie à juste titre conformément aux articles 35 et 36 du Règlement sur l’AE.

Pénalité

[33] Pour qu’une pénalité puisse être imposée par la Commission, la déclaration fausse ou trompeuse doit avoir été faite sciemment. La question de savoir si cette déclaration a été faite « sciemment » est jugée selon la prépondérance des probabilités, selon les circonstances ou la preuve propres à chaque cas. Si la Commission démontre qu’une fausse déclaration a été faite sciemment, le fardeau se déplace ensuite vers le prestataire : il lui revient alors d’expliquer pourquoi ces informations inexactes ont été données (Gates A-600- 94).

[34] Le prestataire touchait des prestations d’assurance-emploi tout en travaillant. Il a rempli ses déclarations aux deux semaines de façon ponctuelle. Dans chaque déclaration, il devait répondre à la question de savoir s’il avait travaillé ou touché une rémunération durant la période visée par la déclaration. La même question lui a été posée chaque fois. Chaque fois, il a dit « non ». Il a rempli neuf déclarations ainsi.

[35] Voici ce qu’a expliqué le juge Linden dans la décision Mootoo (2003 CAF 206) :

Pour qu’une pénalité s’applique en vertu de l’alinéa 38(1)a), il ne suffit pas qu’une déclaration soit fausse ou trompeuse, il faut que le demandeur l’ait faite en sachant sciemment qu’elle était fausse ou trompeuse. […]

Dans l’arrêt Gates, la Cour a également cité la jurisprudence des juges-arbitres en matière de fardeau de la preuve. D’après cette jurisprudence, c’est au départ à la Commission qu’il appartient de prouver qu’un prestataire a sciemment fait une déclaration fausse ou trompeuse. Mais, à partir du moment où la preuve démontre qu’un prestataire a donné une réponse inexacte à une question très simple ou à des questions figurant sur la carte de déclaration, il y a renversement du fardeau de la preuve et c’est alors au prestataire qu’il appartient d’expliquer l’existence de ses réponses inexactes.

[36] Le Tribunal s’est aussi reporté à la décision CUB 69912, où le juge Goulard s’est exprimé comme suit :

Dans cette affaire, durant une période s’étalant sur trois semaines entre la semaine du 31 octobre 2005 et celle du 14 novembre 2005, le prestataire avait travaillé et reçu des rémunérations. Il avait par contre pour chacune de ces semaines indiqué ne pas avoir travaillé et ne pas avoir reçu de rémunérations.

Il est de jurisprudence constante que lorsqu’il est établi qu’un prestataire a fourni des informations qui étaient fausses, il incombe au prestataire de démontrer qu’il avait une explication valable pour avoir fait de fausses déclarations. Autrement, il est présumé d’avoir sciemment fait des fausses déclarations (CUBs 23119, 40065 et 32017). Le fait que le prestataire n’avait aucune intention de frauder ne constitue pas une explication pour ne pas avoir déclaré du travail et des rémunérations (CUB 23119). Dans les CUBs 23119 et 40065, le juge-arbitre avait aussi déterminé qu’il est de la compétence du conseil arbitral de déterminer si l’explication d’un prestataire pour avoir fourni de fausses informations constitue une explication acceptable pour avoir agi ainsi et déterminé si un prestataire a sciemment fait une fausse déclaration. Le CUB 32017 avait été confirmé par la Cour d’appel fédérale dans Fecteau (A-182-96).

La Cour d’appel fédérale a également déterminé que, lorsqu’il est établi qu’un prestataire a sciemment fait de fausses déclarations, la Commission détient la compétence exclusive de décider si une pénalité doit être imposée conformément à l’article 38 de la Loi et que le conseil arbitral ou le juge-arbitre ne doit pas intervenir dans cette décision à moins qu’il ne soit démontré que la Commission n’a pas exercé sa discrétion de bonne foi et de façon judicieuse. (Martin (A-1001-92), Morin (A-453-95), Dunham (A-708-95), Gauley (A-353-01)).

[37] En l’espèce, le prestataire a mal répondu à des questions très simples. Il travaillait. Il devait savoir qu’il travaillait et qu’il lui revenait d’en informer de la Commission et de déclarer la rémunération qu’il avait touchée.

[38] Le Tribunal juge que le prestataire a sciemment fait des déclarations fausses ou trompeuses à la Commission quand il a omis de déclarer son travail et sa rémunération dans neuf déclarations bimensuelles consécutives.

[39] Le prestataire a été joint le 24 octobre 2012. Il a affirmé qu’il remplissait ses déclarations bimensuelles et qu’il déclarait sa rémunération et qu’il n’était pas certain de ce qui avait cloché dans le système. Le 31 octobre 2012, il a de nouveau confirmé qu’il avait déjà avisé Service Canada de son emploi et de sa rémunération, et qu’il n'était ni concerné ni imputable si la situation n’avait pas été réglée. Le prestataire a ensuite soumis sa Demande de clarification de renseignements sur l’emploi, expliquant qu’il avait signalé à une représentante de Service Canada qu’il travaillait à temps partiel. Elle lui aurait dit qu’il n’avait pas à déclarer cette rémunération. Celle-ci figurerait dans sa demande puisqu’elle en avait pris note.

[40] Le prestataire a été joint après la réception de sa Demande de clarification de renseignements sur l’emploi. Il a dit à l’agent de la Commission qu’il travaillait à temps plein et a insisté sur le fait qu’on lui avait dit que cette information serait inscrite dans son dossier, et qu’il pouvait continuer de remplir ses déclarations comme d’habitude. On lui a alors demandé pourquoi il avait mal répondu à des questions simples. Il a affirmé qu’il était possible qu’il n’ait pas prêté suffisamment attention aux questions. On lui a alors demandé pourquoi il avait d’abord déclaré travailler à temps partiel, et non à temps plein. Il a répondu en disant que l’anglais n’était pas sa langue maternelle et qu’il avait dû ne pas être assez clair.

[41] Le Tribunal juge que sa version des faits n’est pas crédible. Le prestataire a contredit à maintes reprises les déclarations qu’il avait lui-même faites à l’oral et à l’écrit. Il a d’abord affirmé qu’il travaillait à temps partiel et avait déclaré sa rémunération. Plus tard, il a affirmé qu’il travaillait à temps plein et qu’il n’avait pas déclaré sa rémunération comme on l’avait avisé de ne pas le faire.

[42] Le prestataire a ensuite soutenu qu’il n’avait jamais fait de réclamations non fondées auprès de l’assurance-emploi, qu’il était victime d’un vol d’identité et que quelqu’un d’autre présentait des demandes d’assurance-emploi à son nom. Le Tribunal estime que cette déclaration va complètement à l’encontre de ses déclarations précédentes, où il avait confirmé avoir reçu des prestations d’assurance-emploi tout en travaillant à temps plein.

[43] La Commission a conclu que le prestataire avait fait de fausses déclarations en donnant sciemment des informations fausses ou trompeuses, et elle a établi une pénalité s’élevant à 3 563 $, soit 50 % du trop-payé net. Même si le montant véritable du trop-payé a été porté à 8 941 $, la Commission a décidé de ne pas augmenter la pénalité pour qu’elle représente encore les 50 % du trop-payé.

[44] Le Tribunal estime que la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.

[45] Pour ces raisons, le Tribunal conclut que le prestataire a effectivement fait des observations ou des déclarations qu’il savait être fausses ou trompeuses. La Commission a raison de lui imposer une pénalité en vertu de l’article 38 de la Loi sur l’AE.

Violation

[46] Pour que la Commission puisse imposer lui un avis de violation, le prestataire doit avoir commis l’un des actes délictueux prévus à l’article 7.1(4) de la Loi sur l’AE et avoir reçu une pénalité ou un avertissement.

[47] En l’espèce, le prestataire a travaillé tout en recevant des prestations de l’AE. Il n’a pas déclaré cette rémunération, et il a été établi qu’il avait fait de nombreuses déclarations fausses ou trompeuses. Comme il a été conclu qu’une pénalité doit être imposée au prestataire en vertu de l’article 38 de la Loi sur l’AE, la Commission peut lui imposer un avis de violation.

[48] La Commission a tenu compte de l’incidence globale de cette sanction sur la situation du prestataire, considérant notamment ses circonstances atténuantes, ses infractions précédentes et sa capacité à être admissible à des prestations dans le futur. Le Tribunal conclut que la Commission a bel et bien exercé son pouvoir de manière judiciaire.

[49] En conséquence, le Tribunal conclut qu'un avis de violation pour une infraction dite très grave doit être imposé au prestataire.

Conclusion

[50] L’appel est rejeté.

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