Assurance-emploi (AE)

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Comparutions

L'appelante a comparu à l'audience du 10 février 2014. Personne d'autre ne s'y est présenté. L'audience a été ajournée au 2 avril 2014 car l'appelante a fait savoir le 10 février 2014 qu'elle n'avait pas reçu certains des documents du dossier GD3 et il a été décidé qu'elle aurait lieu par téléconférence.

Décision

[1] Le membre du Tribunal de la sécurité sociale, division générale, section de l'assurance emploi (le « Tribunal ») conclut que la Commission a établi, selon la prépondérance des probabilités, que l'appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite. En conséquence, l'appel est rejeté.

Introduction

[2] L'appelante a présenté une demande initiale de prestations le 22 mai 2013 (pièce GD3 16). Une période de prestations débutant le 19 mai 2013 a été établie à son profit (GD4 1).

[3] Le 18 juin 2013, la Commission de l'assurance emploi du Canada (la « Commission ») a déterminé qu'elle ne pouvait verser de prestations à l'appelante puisque celle ci avait perdu son emploi en raison de son inconduite (GD3 22).

[4] L'appelante a déposé une demande de révision. Le 26 juillet 2013, la Commission a réexaminé sa décision originale et a décidé de confirmer cette décision (GD3 41).

[5] L'appelante a interjeté appel de cette décision auprès du Tribunal le 16 août 2013 (GD 2).

Mode d'audience

[6] L'audience a d'abord été instruite par comparution en personne puis par téléphone, pour les raisons indiquées dans les avis d'audience datés du 30 janvier 2014 et du 11 février 2014.

Question en litige

[7] La question à trancher est de savoir si l'appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite aux termes du paragraphe 30(1) de la Loi sur l'assurance emploi, L.C. 1996, ch. 23 (la « Loi »).

Droit applicable

[8] En vertu du paragraphe 30(1) de la Loi, un prestataire est exclu du bénéfice des prestations s'il perd un emploi en raison de son inconduite. Le paragraphe est ainsi libellé :

30. (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s'il perd un emploi en raison de son inconduite ou s'il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :

  1. a) que, depuis qu'il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d'heures requis, au titre de l'article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. b) qu'il ne soit inadmissible, à l'égard de cet emploi, pour l'une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

Preuve

[9] Dans sa demande de prestations datée du 22 mai 2013, l'appelante a indiqué ce qui suit : l'université est son niveau d'études le plus élevé; elle a travaillé à titre de téléphoniste préposée au service à la clientèle pour CDL (l'« employeur ») du 18 avril 2002 au 17 mai 2013, soit jusqu'à son congédiement ou sa suspension. Son employeur a indiqué qu'elle était jugée inapte à occuper ce poste en raison d'un rendement insatisfaisant, de l'incapacité à accomplir certaines tâches, et d'un manque de compétences, de connaissances et/ou d'expérience (GD3 2 à 17).

[10] Selon le relevé d'emploi daté du 22 mai 2013, l'appelante a travaillé aux Services à la clientèle de CDL du 18 avril 2012 au 17 mai 2013. L'appelante a reçu une indemnité de départ de 1 120,00 $ et le relevé indique comme motif de cessation d'emploi le code M (GD3 18).

Preuve de l'employeur

[11] Selon les notes au dossier, l'employeur a fourni les renseignements suivants les 12 et 17 juin 2013 :

[12] L'appelante a été congédiée à la suite d'avertissements et de suspensions ; l'appelante avait fait l'objet d'une suspension pour avoir dérogé aux pratiques de l'entreprise; malgré qu'elle était censée envoyer des copies de documents aux médecins des clients, elle ne l'avait pas fait et en dépit du fait qu'un rappel de la politique lui a été envoyé, elle ne s'est pas conformée à la politique (GD3 19 et 20).

[13] L'événement déclencheur a été la découverte du fait que l'appelante avait transféré des appels à la boîte vocale d'une collègue absente pour deux mois; comme il n'y avait pas de message d'absence, une trentaine d'appels provenant de clients qui s'attendaient à recevoir une réponse se sont accumulés dans la boîte. Lorsque, le 16 mai 2013, l'employeur a transféré les appels de cette boîte vers d'autres postes téléphoniques, la superviseure a reçu un transfert d'appel et la directrice, deux. Le 17 mai 2013, deux autres appels leur ont été transférés. Lorsque l'appelante a été confrontée à ce sujet, elle n'a pas fourni d'explication (GD3 19 et 20) ni n'a nié les faits. Le superviseur de l'après-midi, PB, a vu l'appelante alors qu'elle transférait des appels; il était possible de savoir que les appels transférés provenaient d'elle, puisque l'écran affichait « N./D./ » suivi de sa ligne téléphonique (GD3 38).

[14] Il y avait aussi un écart entre l'heure indiquée sur les fiches de temps de l'appelante et l'heure d'ouverture et de fermeture des systèmes téléphoniques de l'employeur (GD3 20).

[15] Les documents suivants ont été versés au dossier:

  1. Un courriel de M. à l'appelante daté du 16 octobre 2012, lequel indique ce qui suit : l'appelante, ayant fait savoir que le seul moment de la journée où elle avait des problèmes avec le système de suivi des heures quotidiennes Time Tracker était le matin (par comparaison à la pause repas du midi ou la fin de la journée), M. a examiné le problème. La carte magnétique de l'appelante indiquant qu'elle n'est arrivée qu'à 8 h 23, M. ne fera aucun rajustement sauf si l'appelante peut démontrer qu'à 8 h 00 pile, elle était arrivée au travail. L'employeur a aussi mentionné que l'appelante s'était plainte d'avoir eu un problème avec Time Tracker et que l'ajustement n'avait été fait qu'une demi heure plus tard. L'appelante a été informée qu'elle devra dorénavant envoyer un courriel à M. si d'autres problèmes surviennent lors de l'ouverture de session de Time Tracker (GD3 28).
  2. Un courriel de M. à l'appelante daté du 30 novembre 2012, lequel indique ce qui suit : l'appelante a présenté une demande de correction relative au Time Tracker pour faire corriger de 8 h 14 à 8 h 00 son heure d'arrivée; toutefois, le système montre clairement qu'elle est entrée dans les locaux des Services à la clientèle à 8 h 12. L'appelante a aussi pointé de 12 h 00 à 12 h 39 comme absence pour la pause repas du midi. Ensuite, à 12 h 55, elle a pris son manteau et a quitté les locaux des Services à la clientèle pour n'y revenir qu'à 13 h 53. M. lui dit que si elle ne fournit pas de raison valable pour ne pas avoir pointé ce temps d'absence, une heure sera soustraite de son temps de travail (GD3 27).
  3. Un courriel de M. à l'appelante daté du 14 décembre 2012, lequel indique ce qui suit : le lundi 10 décembre 2012, alors qu'elle était la seule personne à travailler, l'appelante a transféré directement à un téléphone du laboratoire un appel entrant aux Services à la clientèle, sans avoir préalablement répondu au client ou vérifié quelle information le client souhaitait obtenir. Il s'agit de la deuxième fois que l'employeur constate que l'appelante transfère des appels sans y avoir d'abord répondu. Lorsque l'appelante est à son poste, elle ne répond pas aux appels que lui font ses superviseurs. L'appelante ayant répondu que cela était dû au fait que sa sonnerie était réglée à un niveau sonore [Traduction] « faible », elle doit monter le volume de sa sonnerie sans délai et informer ses supérieurs si elle a besoin de formation supplémentaire sur l'utilisation du système téléphonique (GD3 29).
  4. Un courriel de M. à l'appelante daté du 18 décembre 2012, lequel indique ce qui suit : M. ne tolérera pas que l'appelante lui réponde, comme elle l'a fait ce matin là, sur un ton impoli et de façon défensive. De plus, l'appelante est arrivée à 8 h 07, a utilisé l'Internet à des fins personnelles et a lancé un juron, malgré le fait qu'elle ait été avertie, à plusieurs reprises, de ne pas dire de jurons. Il s'agit de son deuxième avertissement en deux semaines. Le manuel à l'intention des employés indique que l'insubordination n'est pas tolérée. M. aimerait recevoir des excuses (GD3 30).
  5. Une lettre datée du 1er février 2013 adressée à l'appelante et signée par celle-ci le 4 février 2013, laquelle l'informe qu'elle sera suspendue sans solde le vendredi 1er février 2013 pour les motifs suivants : elle a transféré des appels concernant le coût de tests médicaux, sans d'abord avoir répondu aux appels; elle a même transféré de nouveau l'appel d'un client qui se plaignait du fait que son appel avait été transféré; son travail consiste à fournir des renseignements sur le coût de tests médicaux; elle a utilisé l'Internet durant ses heures de travail à des fins non liées au travail; des écarts sont constatés en ce qui concerne la durée de pauses repas du midi et la durée qu'elle a inscrite dans le système Time Tracker ; elle ne peut, sans autorisation préalable, combiner sa pause dîner et sa pause de 15 minutes (GD3 31).
  6. Un courriel daté du 28 mars 2013 de J. à l'appelante, lequel indique que l'appelante fournit des renseignements erronés et dit aux clients qu'ils sont astreints à un jeûne de 8 heures alors qu'il est de 12 heures. Ces erreurs sont graves parce que des patients repartent sans avoir pu subir les tests, que des tests doivent être refaits ou que cela pourrait entraîner des erreurs de diagnostic. J. lui reproche son ton nonchalant et lui dit que ces erreurs pourraient leur faire perdre des clients ou des médecins (GD3 32).
  7. Un courriel daté du 19 avril 2013 de J. à l'appelante, lequel indique ce qui suit : elle a quitté son poste de travail avant 12 h 45, mais n'a pointé son départ qu'après son retour à 13 h 05. Il s'agit là d'une situation inacceptable et elle ne doit plus agir de la sorte (GD3 33).
  8. Une lettre datée du 23 avril 2013 adressée à l'appelante et signée par celle-ci, laquelle indique qu'elle sera suspendue sans solde pendant deux jours, les 24 et 25 avril 2013, pour les motifs suivants : elle ne s'est pas conformée à la politique de l'entreprise, qui était expliquée dans un courriel de rappel daté du 11 avril 2013 (GD3 35, courriel de J. adressé aux associés) et qui indiquait qu'il fallait apposer ses initiales sur certains rapports et en envoyer copie aux médecins. De plus, elle ne s'était pas conformée aux procédures de l'entreprise concernant la communication de renseignements sur le coût de tests médicaux et la façon de pointer l'heure de départ du travail dans le système (GD3 34).
  9. Une lettre de congédiement datée du 17 mai 2013 adressée à l'appelante et signée par celle-ci, laquelle indique qu'elle est congédiée avec effet immédiat pour les raisons suivantes : elle a reçu plusieurs avertissements verbaux et écrits et a été suspendue à deux reprises en raison de problèmes de rendement. Des écarts ont été constatés au sujet du pointage de ses heures d'arrivée et de départ, elle a transféré des appels sans y répondre, elle a induit des clients en erreur au sujet des procédures à suivre pour les tests, elle n'a pas envoyé des rapports qui devaient l'être, et J. et PB sont témoins du fait qu'elle a transféré des appels à une collègue en congé pendant deux mois. Ils reçoivent plusieurs plaintes au sujet de sa conduite, qu'ils considèrent non professionnelle et inacceptable (GD3 37).

Preuve de l'appelante figurant au dossier

[16] Le 17 juin 2013, un agent de la Commission a noté que l'appelante nie avoir transféré des appels à la boîte vocale d'une collègue qui était en congé. Concernant sa suspension, l'appelante dit que l'employeur a changé, de façon arbitraire, sa politique au sujet de la possibilité de combiner la pause repas du midi de 30 minutes et la pause quotidienne de 15 minutes. Elle reconnaît avoir reçu un avertissement au sujet de la façon correcte de répondre aux appels téléphoniques et qu'une suspension lui avait été imposée deux mois plus tôt pour n'avoir pas répondu à des appels correctement. Elle dit n'avoir pas reçu le courriel du 11 avril 2013 qui expliquait la procédure relative aux rapports urgents (rapports « stat ») et aux rapports ordinaires, et qui indiquait qu'il lui fallait apposer ses initiales au bas des rapports. Sa directrice a souri lorsqu'elle lui a annoncé qu'elle était congédiée pour avoir transféré des appels. L'appelante soupçonne que son renvoi s'inscrit, en réalité, dans une démarche de [Traduction] « réduction de l'effectif » (GD3 21).

[17] Dans la Demande de révision qu'elle a présentée, l'appelante a fourni les renseignements suivants : l'appelante était une employée vaillante, honnête et dévouée et toujours ponctuelle; elle a été congédiée pour une raison non valide; elle a été traitée de façon inéquitable; de 2004 à 2012, elle a travaillé pour un magasin Winners à temps partiel pendant qu'elle était aux études; elle a quitté cet emploi lorsqu'elle a obtenu un emploi à temps plein chez CDL; elle avait l'intention d'occuper ce poste pendant des années, aimait beaucoup son travail et est attristée de ce qui lui est arrivé (GD3 26).

[18] Le 25 juillet 2013, la Commission a noté ce qui suit : l'appelante dit qu'elle n'a pas transféré d'appels et qu'il arrivait que d'autres personnes utilisent sa ligne téléphonique; lorsqu'elle a été informée que PB l'avait vue transférer des appels et que J. et PB voyaient à leur écran que les appels provenaient de sa ligne téléphonique, elle n'a rien dit; elle a fait valoir que transférer des appels ne constitue pas une inconduite.

Témoignage à l'audience du 10 février 2014 :

(sauf lorsqu'il est précisé qu'il s'agit du témoignage présenté à l'audience du 2 avril 2014)

[19] L'appelante a dit qu'elle a commencé à travailler pour l'employeur en avril 2012 et que PB ainsi que D. et A. l'ont formée à ses tâches.

[20] Ses priorités étaient de répondre aux appels téléphoniques, en premier lieu, et de gérer les demandes transmises par télécopieur.

[21] Elle faisait aussi les arrangements requis pour l'envoi ou la réception de colis par messagerie et l'entrée de données des tests d'échographie.

[22] Elle était toujours la première à arriver. Elle arrivait à 7 h 30 même si son travail ne débutait qu'à 8 h 00. Elle recevait des appels de cliniques qui voulaient connaître les résultats de tests. Elle répondait immédiatement à ces appels.

[23] Elle restait travailler et faisait des heures supplémentaires, même si elle n'était pas rémunérée pour cela.

Initiales à apposer et rapports urgents

[24] Au sujet du problème relatif aux initiales à apposer au bas des rapports urgents (rapports « stat ») (GD34 et 35), l'appelante dit qu'elle n'a jamais reçu le courriel de rappel au sujet des rapports stat. Elle ignorait qu'il lui fallait apposer ses initiales au bas des documents avant de les placer dans les dossiers.

[25] L'appelante dit que PB, D. et A. ne lui ont pas parlé de cette procédure. A. l'a formée pour faire la saisie de données sur les tests de Pap et les échographies. L'appelante ne se souvient pas qu'A. lui ait dit qu'il fallait apposer ses initiales sur ces documents. C'est cette omission qui lui a valu sa suspension d'une journée. Ils ne l'en avaient pas informée auparavant.

[26] Elle n'a pas reçu le courriel de rappel mentionné aux pièces GD3 34 et 35, parce qu'ils avaient toujours des problèmes technologiques. Des pannes survenaient et le personnel de la TI à l'interne ne réglait pas les problèmes à temps.

[27] Le technicien commençait sa journée à 10 heures; il avait donc beaucoup de tâches de dépannage à faire.

[28] L'appelante avait constamment des problèmes avec son courrier électronique. Il arrivait parfois qu'un avis de « non livraison » s'affiche en lien avec ses courriels. Le système de courrier électronique utilisé au bureau était l'Outlook Express. Les envois par télécopieur étaient faits au moyen du système « limbs » ou manuellement. Elle devait tout le temps redémarrer son ordinateur, ce qui était très ennuyant. Les ordinateurs étaient désuets et n'étaient pas à jour.

[29] À l'audience du 2 avril 2014, lorsque le Tribunal lui a demandé si d'autres employés avaient ce genre de problèmes ou disaient n'avoir pas reçu le courriel figurant à la pièce GD3 35, l'appelante a déclaré qu'elle a demandé à d'autres employés s'ils avaient reçu ce courriel et que N. a dit qu'elle non plus ne l'avait pas reçu. Personne d'autre n'a fait l'objet de mesures disciplinaires pour ce genre d'erreur.

[30] Lorsque les télécopies arrivaient, il fallait les cocher sur une liste et apposer ses initiales sur les feuilles. Elles étaient six femmes à travailler dans ce local et n'importe qui parmi elles pouvait s'en charger.

[31] Pour certains médecins, aucun numéro de télécopieur n'était inscrit; il lui fallait donc les appeler pour obtenir leur numéro de télécopieur.

[32] Un des médecins s'occupait d'interpréter les résultats des tests de Pap, un autre des résultats des échographies et un troisième, des radiographies. C'était un milieu de travail stressant parce qu'il arrivait souvent que les renseignements transmis par le logiciel « limbs », auquel les autres cliniques avaient aussi accès, ne se mettent pas à jour correctement. Alors que l'information s'affichait de son côté, de l'autre côté la clinique ne voyait pas que les données avaient été entrées dans le système.

Allégation relative aux appels téléphoniques transférés

[33] L'appelante a déclaré que son adjointe, A. L., utilisait aussi son téléphone et répondait à des appels.

[34] L'appelante répondait aux appels entrant sur sa ligne, mais les autres lignes téléphoniques sonnaient aussi constamment. Il y avait cinq autres personnes, y compris PB, son superviseur, qui auraient pu répondre aux appels. Elle n'aurait pas pu accomplir son travail si elle avait répondu à tous ces appels téléphoniques en tout temps.

[35] N. était la téléphoniste principale. L'appelante la remplaçait souvent pendant qu'elle prenait sa pause repas du midi.

[36] L'appelante s'est fait avertir de ne pas parler à ses collègues des suspensions et du congédiement dont elle faisait l'objet. Elle ne leur en a parlé que deux mois après avoir été congédiée. Lorsque, durant son témoignage, elle a déclaré que ses collègues s'étaient dit très surpris qu'elle ait été congédiée pour avoir transféré [Traduction] « un appel », le Tribunal lui a fait remarquer que le dossier semble indiquer que de nombreux appels ont été transférés. Elle a nié ce fait, déclarant qu'il s'agissait d'un appel destiné à D. Elle se souvient précisément de quelle clinique l'appel provenait. C'était un appel de la clinique OVO qui voulait laisser un message pour D., même si l'appelante leur a dit que D. était en congé de maladie. Cet appel s'est produit le jour précédant son congédiement (16 mai 2013); elle n'a jamais transféré aucun autre appel.

[37] L'appelante a dit que PB ne peut pas l'avoir vue transférer cet appel puisqu'il travaille en après midi. Il n'était pas présent lors de l'appel, mais il acquiesce à tout ce qui est dit. PB a dit : [Traduction] « Oui, je t'ai vue me transférer cet appel. Et j'en suis très désolé. » Il ne faisait que fixer J.

[38] En ce qui a trait à l'allégation mentionnée à la pièce GD3 31, selon laquelle elle aurait transféré des appels portant sur le coût des tests alors que répondre à ce genre de questions fait partie de son travail, l'appelante a déclaré lors de son témoignage du 2 avril 2014 qu'elle transférait effectivement des appels lorsque l'interlocuteur demandait des renseignements d'ordre technique que seul un technicien de laboratoire pouvait fournir. Il arrivait parfois que des clients raccrochent après qu'elle leur ait dit : [Traduction] « Veuillez rester en ligne ».

[39] L'appelante se demandait si la formation qui lui avait été donnée était suffisante. Lorsque le Tribunal lui a posé d'autres questions à ce sujet le 2 avril 2014, l'appelante a dit que le coût des tests était affiché sur son ordinateur et que la liste précisait également si le client devait être à jeun ou pas.

[40] À l'audience du 2 avril 2014, l'appelante a dit qu'elle a vu A. L. se servir de son téléphone pour répondre à un appel le 16 mai 2013. C'était un appel pour D. L'appelante affirme qu'alors qu'elle se trouvait aux côtés d'A. L., elle a vu celle ci prendre le combiné du téléphone et transférer l'appel.

[41] À l'audience du 2 avril 2014, en réponse à une question du Tribunal au sujet de sa déclaration de février dernier selon laquelle elle n'a jamais transféré d'appels, sauf un, et qu'il s'agissait de l'appel pour D., l'appelante a dit que cet appel de la clinique OVO pour D. a eu lieu à une autre date et qu'il n'avait rien à voir avec l'appel du 16 mai 2013.

[42] En ce qui a trait à la pièce GD3 38, l'appelante affirme avoir déclaré à la Commission et à l'employeur que ce n'est pas elle, mais A. L., qui a transféré l'appel, et c'est ce qui s'est produit malgré ce qui est écrit à la pièce GD3 38. L'appelante ne sait pas non plus pourquoi les notes provenant de la Commission n'indiquent pas que PB n'était pas là.

[43] À l'audience du 2 avril 2014, en ce qui a trait à la pièce GD3 29 et à l'allégation selon laquelle le 18 décembre 2012, alors qu'elle était seule à travailler, l'appelante aurait transféré des appels et aurait omis de répondre à des appels car la sonnerie de son téléphone était réglée à faible volume, l'appelante a dit que ce jour là A. L. répondait à son téléphone lorsqu'elle était dans le laboratoire. L'appelante l'a dit à M., qui lui a répondu qu'elle croyait qu'A. L. était l'appelante.

[44] Le Tribunal a souligné à l'appelante que le courriel de M. à J. dans lequel elle signalait le problème des appels transférés est daté du 24 janvier 2013. L'appelante répond que J. lui a déjà dit, lors d'un entretien qu'elles avaient dans une salle de réunion, que des collègues s'étaient plaints par courriel qu'elle transférait des appels, mais l'appelante dit n'avoir jamais vu le courriel en question.

[45] A. L. avait besoin d'avoir son propre téléphone, mais personne n'a fait de démarches pour lui en procurer un.

[46] À l'audience du 2 avril 2014, interrogée quant à savoir si elle avait déjà dit à A. L. de ne pas transférer ses appels, l'appelante a répondu qu'elle se souvenait d'avoir questionné A. L. à ce sujet.

Rapports avec J. et M.

[47] J. et M. étaient toutes deux en congé de maternité lorsque l'appelante est entrée en poste. Celle-ci ignorait même qu'elles étaient ses superviseures. Elle ne l'a réalisé qu'après leur retour de congé. M. est revenue la première, a dit qu'elle occuperait le poste de J. pendant l'absence de cette dernière et a dit à l'appelante de s'adresser à elle pour toute question.

[48] M. est revenue de congé en juillet 2012 (deux mois après l'entrée en fonction de l'appelante).

[49] J. a repris le travail en janvier 2013.

[50] L'appelante sentait que M. et J. ne l'aimaient pas.

[51] Ses collègues lui avaient dit de faire attention lorsque M. reviendrait de congé. L'appelante ne comprenait pas pourquoi. Ils lui ont dit que M. était très pointilleuse. À titre d'exemple, l'appelante a expliqué que M. n'aimait pas que le son de la radio soit fort. M. téléphonait alors à l'appelante pour lui dire de fermer la radio. Elle ne téléphonait pas aux autres collègues à ce sujet, uniquement à l'appelante. Celle ci fermait donc la radio et, à un moment donné, quelqu'un d'autre rallumait la radio. Cela fâchait M., qui réprimandait alors l'appelante.

[52] À l'audience du 2 avril 2014, en réponse aux questions du Tribunal, qui lui demandait si elle expliquait à M. qu'elle n'avait pas fermé la radio ou ce qu'elle répondait à M. quand celle ci lui demandait de fermer la radio, l'appelante a dit qu'elle disait à M. que le son de la radio n'était pas fort.

[53] Le Tribunal a demandé à l'appelante si d'autres de ses collègues disaient aussi à M. que le son de la radio n'était pas fort. L'appelante a répondu qu'elle était la seule à le faire parce que tous les autres craignaient de le dire à M. Quand ses collègues se sont fâchés, l'appelante leur a dit qu'ils devraient s'affirmer par rapport à M.

[54] À un moment donné, A. L. était en congé de maternité et a repris le travail à la fin de juillet ou en août. Le Tribunal a demandé à l'appelante si M. et J. avaient des problèmes avec quelqu'un d'autre, l'appelante a répondu qu'elle pensait qu'elles avaient aussi des problèmes avec A. L.

[55] L'appelante a expliqué que le problème avec A. L. concernait sa disponibilité : M. et J. lui confiaient sans cesse d'autres tâches alors qu'A. L. était l'assistante de l'appelante et était censée l'aider. Lorsque M. et J. confiaient d'autres tâches à A. L., l'appelante leur demandait : [Traduction] « comment suis je supposée faire tout mon travail? » et « qui va m'aider? ». A. L. acceptait de faire tout ce que J. et M. lui confiaient comme tâche. C'était une [Traduction] « béni oui oui ».

[56] PB, A. et D. ont remplacé M. et J. pendant leur congé. Le milieu de travail est devenu tendu lors du retour de M. au travail. M. travaillait dans le laboratoire, et elle a remplacé J. comme chef des Services à la clientèle pendant un certain temps.

[57] M. se plaignait aussi que l'appelante avait une voix forte et lui demandait souvent de parler moins fort. L'appelante dit qu'elle a une voix forte, qu'elle est une personne nerveuse et qu'elle a tendance à parler plus fort lorsque ressent de la nervosité.

[58] L'appelante ne s'est jamais plainte à PB de M. et de J. ni des problèmes qu'elle semblait avoir avec celles ci, car PB faisait preuve d'une grande déférence à leur égard et était leur [Traduction] « béni oui oui ». PB entretenait un rapport étroit avec J. et ils s'échangeaient des services comme aller chercher le café à tour de rôle aux pauses. L'appelante en a d'ailleurs parlé à D. PB n'avait pas d'échine et ne se défendait pas quand il se faisait [Traduction] « engueuler ».

[59] Depuis le départ de l'appelante, cinq autres personnes ont quitté leur emploi. C'est un milieu de travail désorganisé et c'est à cause de M. que plusieurs d'entre eux sont partis.

[60] À l'audience du 2 avril 2014, le Tribunal a demandé à l'appelante ce qu'elle pensait de la situation qu'elle avait vécue dans cet emploi. L'appelante a répondu qu'après avoir reçu une suspension, elle pensait que tout rentrerait dans l'ordre. J. et M. ont fait tout ce qu'elles pouvaient pour se débarrasser d'elle.

[61] À l'audience du 2 avril 2014, l'appelante a dit avoir appris d'une collègue que celle ci avait entendu M. et J. parler d'elle avant qu'elles ne la congédient.

Autres expériences de travail de l'appelante

[62] L'appelante a toujours eu de bons rapports avec les autres au travail. Elle a travaillé dans un magasin Winners pendant huit ans. Elle était une employée dévouée qui travaillait avec sérieux et qui aimait beaucoup son emploi. Elle a été embauchée sur le champ lorsqu'elle s'est présentée chez l'employeur. Pendant deux semaines, elle a reçu une formation en saisie de données dans le laboratoire. L'employeur savait qu'elle n'avait aucune expérience, mais elle a su apprendre très vite.

[63] Après son congédiement, plusieurs personnes lui ont téléphoné pour s'enquérir d'elle. Un médecin l'a appelée chez elle et lui a dit qu'ils ne trouveraient personne comme elle. Elle faisait des heures supplémentaires et travaillait les jours fériés.

[64] Le Tribunal a demandé à l'appelante si elle a communiqué avec le bureau provincial des normes du travail. Elle affirme avoir communiqué avec les Normes du travail pour demander si quelque chose pouvait être fait parce qu'elle avait été [Traduction] « injustement congédiée ». On lui a dit que personne n'était en mesure de l'aider en raison d'un manque d'effectif et qu'elle devrait communiquer avec « Revenu Canada ».

[65] L'agent de Services Canada lui a dit qu'elle avait été congédiée pour inconduite en raison d'un « rendement insatisfaisant ». L'appelante ne croit pas qu'un rendement insatisfaisant constitue une inconduite. Se référant à l'information publiée par la Commission sur son site Web concernant la définition d'inconduite, elle fait valoir qu'un « rendement insatisfaisant » ne fait pas partie de la liste des [Traduction] « actions, omissions ou fautes considérées comme une inconduite » et que, selon ce qu'indique le site Web, le rendement insatisfaisant ne peut constituer une inconduite que si les [Traduction] « actions, omissions ou fautes sont délibérées ou découlent d'une mauvaise volonté ».

[66] C'est sa première demande de prestations d'assurance-emploi. Elle a un emploi fantastique, un poste qu'elle occupe depuis novembre 2013. Dans son emploi actuel, des clients téléphonent constamment au siège social de la société de services financiers où elle travaille pour dire comment elle est fantastique. Elle reçoit de nombreux compliments, et son patron lui a même demandé pourquoi il reçoit tous ces appels élogieux à son égard.

Combiner les pauses

[67] En ce qui a trait à l'allégation présentée à la pièce GD3 31, selon laquelle l'appelante combinait la durée de ses pauses malgré que cela n'était pas permis, l'appelante a expliqué que D. lui a donné une formation sur l'utilisation de Time Tracker et lui a dit qu'elle aurait une pause de 15 minutes le matin et une autre pause de 15 minutes l'après midi.

[68] PB a informé l'appelante qu'elle pouvait combiner ses pauses.

[69] Lorsque M. et J. ont vu qu'elle combinait ses pauses, elles lui ont infligé une suspension pour cette raison. Juste avant qu'elle ne soit suspendue, l'appelante a dit à M. que PB lui avait donné la permission de combiner ses pauses. M. est allée parler à PB et celui ci est allée voir l'appelante. Celle ci a alors demandé à PB pourquoi il lui avait dit qu'elle pouvait combiner ses pauses alors que cela n'était pas permis. PB est entré dans le bureau puis, lorsqu'il en est sorti, il a dit à l'appelante : [Traduction] « Je suis désolé. J'ai déclaré à M. que je t'avais dit que tu ne pouvais pas combiner tes pauses. » Quand l'appelante lui a ensuite demandé pourquoi il lui avait dit qu'elle pouvait combiner ses pauses alors que ce n'était pas vrai, PB n'a rien répondu.

À l'audience du 2 avril 2014, l'appelante a indiqué que c'est le 1er février 2013, lorsqu'elle a été suspendue et a reçu la lettre à cet effet, qu'elle a su pour la première fois qu'elle ne pouvait pas combiner ses pauses. D'autres personnes combinaient leurs pauses mais n'étaient pas suspendues pour cette pratique.

Témoignages entendus à l'audience tenue par téléphone le 2 avril 2014 :

(sauf s'il est précisé qu'il s'agit du témoignage entendu à l'audience du 10 février 2014)

Allégations relatives aux retards et à la modification du registre des heures travaillées

[70] À l'audience du 2 avril 2014, en réponse à une question du Tribunal lui demandant si ses cartes de pointage montraient aussi qu'elle arrivait à 7 h 30 même si elle ne commençait à travailler qu'à 8 h 00, l'appelante a dit qu'elle n'arrivait pas toujours à 7 h 30 et qu'elle ne pointait pas avant 8 h 00 parce que c'était à partir de ce moment là qu'elle commençait à être payée. Elle a expliqué que ce n'était pas la peine pour elle de pointer plus tôt, puisque l'employeur ne payait pas les heures supplémentaires.

[71] Lorsque le Tribunal lui a demandé si elle était déjà arrivée en retard au travail, l'appelante a répondu que cela ne s'est produit qu'une fois, lors d'une panne de métro. Elle a appelé au bureau pour aviser le ou les superviseurs qu'elle arriverait en retard. Elle est arrivée avec au moins trente minutes de retard à cette occasion.

[72] En ce qui a trait au courriel présenté à la pièce GD3 28, selon lequel l'appelante serait arrivée à 8 h 23, mais aurait rajusté l'heure indiquée dans le Time Tracker pour qu'il indique qu'elle était arrivée à l'heure (8 h 00), l'appelante a expliqué qu'elle n'a pas fait ce rajustement elle même et que c'était PB qui avait fait cette modification. Elle reconnaît avoir reçu et lu ce courriel. L'appelante a expliqué qu'elle ne savait pas comment rajuster l'heure dans le Time Tracker et que seul PB avait l'accès ou l'autorisation nécessaire pour faire un rajustement. Lorsque cela s'est produit, l'appelante a dit à M. que PB avait autorisé cette modification. M. est allée en discuter avec PB, mais l'appelante ignore ce qui s'est passé ensuite.

[73] L'appelante a expliqué que, parfois, lorsqu'elle lançait l'application Time Tracker et ouvrait une session avec son nom et son identificateur personnel, il ne se produisait rien.

[74] Lorsque le Tribunal lui a demandé pourquoi, selon ce qui est allégué à la pièce GD3 27, l'appelante aurait modifié dans le Time Tracker son heure d'arrivée pour que le système indique 8 h 00 même si elle était arrivée à 8 h 14, alors qu'elle avait reçu, par le passé, une sanction disciplinaire pour ce genre de conduite, l'appelante a dit que cela n'a pas été fait avec son autorisation et qu'elle n'avait aucune idée pourquoi PB l'aurait fait.

[75] En ce qui a trait à l'allégation présentée à la pièce GD3 27, selon laquelle le jour précédent, le 29 novembre 2012, l'appelante aurait pris deux pauses pour le repas du midi, celle ci nie avoir pris la première pause alléguée, celle de 12 h 00 à 12 h 39, mais confirme avoir pris la deuxième. Elle dit que la pause débutant à 12 h 00 qui est indiquée dans le Time Tracker résulte probablement d'un [Traduction] « bogue informatique ». Elle ne prenait pas sa pause repas du midi à une heure fixe et elle s'arrangeait avec les autres employés pour déterminer à quel moment la prendre. Lorsque l'appelante a reçu le courriel à ce sujet, elle a expliqué à M. qu'elle n'était partie qu'à 13 h 00 pour sa pause repas du midi. L'appelante a aussi dit que PB n'a pas modifié son temps dans le Time Tracker puisque, ce jour-là, il n'était arrivé au travail qu'après 14 h 00, à cause du décès de sa mère. Soit qu'une modification a été apportée par des techniciens, si PB n'était pas là, soit qu'il y a eu un [Traduction] « bogue informatique ». Les techniciens avaient, eux aussi, accès au Time Tracker. Il est impossible qu'elle ait pointé son départ à 12 h 00, puisqu'elle n'a pris sa pause qu'à 13 h 00. Elle ne se souvient pas de ce qu'elle a fait pendant sa pause repas du midi ce jour-là.

[76] En ce qui a trait à l'allégation présentée à la pièce GD3 33, selon laquelle l'appelante serait partie avant 12 h 45, le 19 avril 2013, mais n'aurait pointé son départ qu'après son retour, l'appelante dit n'avoir jamais reçu de la part de J. ce courriel. Interrogée quant à savoir si elle se rappelait avoir été accusée de n'avoir pointé son départ qu'après son retour, l'appelante dit ne pas s'en souvenir. Elle ne se souvient pas, non plus, d'avoir reçu un courriel au sujet d'une pause repas prolongée qu'elle aurait prise le midi.

[77] En ce qui a trait au courriel du 18 décembre 2012 présenté à la pièce GD3 30, l'appelante admet qu'elle est arrivée à 8 h 07 et qu'elle arrivait parfois au travail avec quelques minutes de retard, mais elle dit que ce n'était pas tout le temps le cas. Elle a aussi admis avoir été impolie envers M., conformément à ce qui est allégué. Elle explique qu'elle était de mauvaise humeur à ce moment là et qu'elle a présenté ses excuses à M. pour lui avoir parlé de cette façon. Elle nie avoir utilisé Internet à des fins personnelles, sauf durant sa pause repas du midi, et affirme que durant ses heures de travail, elle n'a utilisé Internet que pour chercher sur Google des cliniques et leurs coordonnées. Interrogée quant à savoir si elle avait lancé un juron, l'appelante a dit que le mot [Traduction] « merde » n'est pas un juron.

[78] En réponse aux questions que lui posait le Tribunal, l'appelante a aussi dit que le propriétaire de la clinique, qui y venait rarement, jurait à l'occasion mais qu'elle n'a jamais entendu de juron de la part ni de M. ni de J.

Allégation relative aux renseignements erronés au sujet de tests

[79] En ce qui a trait au courriel de J. présenté à la pièce GD3 32, dans lequel il est allégué que l'appelante aurait fourni des renseignements erronés concernant des tests, l'appelante ne se souvient pas d'avoir reçu ce courriel et nie l'avoir reçu. Elle reconnaît toutefois avoir fourni des renseignements erronés. Lorsque J. l'a entendue dire à un client de faire un jeûne de 8 heures au lieu de 12 heures, l'appelante a dit à J. qu'elle avait [Traduction] « commis une erreur ». L'appelante a dit qu'elle a pris l'initiative de rappeler le client pour rectifier les conseils qu'elle lui avait donnés.

Observations

[80] L'appelante soutient qu'elle n'a pas perdu son emploi en raison de son inconduite et fait valoir les arguments suivants :

  1. Elle n'a pas transféré d'appels de façon inappropriée (GD3 21, Demande de révision. GD3 35 et 40, Avis d'appel, GD3 2);
  2. La politique interdisant de combiner la pause repas du midi de 30 minutes avec la pause de 15 minutes a été établie de façon arbitraire (GD3 21) ;
  3. Un rendement de travail insatisfaisant et le transfert d'appels téléphoniques ne figurent pas dans la liste publiée par la Commission sur son site Web sous la rubrique [Traduction] « Actions, omissions ou fautes considérées comme une inconduite », et le site Web précise qu'un rendement insatisfaisant ne constitue une inconduite que si les [Traduction] « actions, omissions ou fautes sont délibérées ou découlent d'une mauvaise volonté » (GD-40 et témoignage) ;
  4. Elle a été traitée de façon injuste par deux personnes qui voulaient se débarrasser d'elle alors qu'elle est une employée vaillante et dévouée (témoignages du 10 février et du 2 avril 2014).

[81] L'intimée soutient que l'appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite et fait valoir les arguments suivants :

  1. Le paragraphe 30(2) de la Loi prévoit une exclusion du bénéfice des prestations pour une période indéterminée si la prestataire perd son emploi en raison de son inconduite. Pour que la conduite en question puisse constituer de l'inconduite au sens de l'article 30 de la Loi, elle doit être volontaire ou délibérée, ou résulter d'une insouciance telle qu'elle frôle le caractère délibéré. Il doit également y avoir une relation de cause à effet entre l'inconduite et le congédiement (GD4 4) ;
  2. La version de l'employeur était davantage crédible et était étayée par des éléments de preuve documentaire, tandis que l'appelante est demeurée silencieuse après avoir examiné les renseignements divulgués par son employeur et elle a changé sa position pour faire valoir que cela ne constituait pas de l'inconduite ;
  3. Le transfert d'appels ordinaires vers la boîte vocale d'un autre employé constitue un acte ayant un caractère volontaire ou délibéré ou résultant d'une insouciance telle qu'il frôle le caractère délibéré, parce que l'appelante avait reçu un avertissement final à ce sujet et qu'il y a eu une relation de cause à effet entre l'inconduite et le congédiement (GD4 5) ;
  4. Il y a inconduite lorsque la conduite de l'appelante est délibérée, c'est-à-dire que les actes qui ont mené au congédiement sont conscients, voulus ou intentionnels (Mishibinijima 2007 CAF 36) (GD4 5) ;
  5. Il y a inconduite lorsque l'appelante savait ou aurait dû savoir que sa conduite allait mener à son congédiement. Pour déterminer si l'inconduite pourrait mener à un congédiement, il doit exister un lien de causalité entre l'inconduite reprochée au prestataire et son emploi. L'inconduite doit donc constituer un manquement à une obligation résultant expressément ou implicitement du contrat de travail (Lemire 2010 CAF 314) (GD4 5) ;
  6. Ce n'est pas à l'employé de décider comment un employeur doit diriger son entreprise. L'employeur a le droit d'adopter une procédure de vente et de s'attendre à ce que ses employés la suivent (CUB 78553) (GD4 6).

Analyse

Bien que la Loi ne définisse pas la notion d'inconduite, le critère à appliquer dans les cas d'inconduite consiste à déterminer si l'acte reproché était volontaire ou procédait à tout le moins d'une insouciance ou d'une négligence telle que l'on pourrait dire que l'employé a volontairement fait abstraction des conséquences que ses actes auraient sur son rendement au travail (Tucker A-381-85) ou qu'il ne répond pas à une norme que l'employeur a le droit d'exiger de ses employés (Brissette A 1342 92). Pour qu'une conduite soit considérée comme une « inconduite » aux termes de la Loi, elle doit être délibérée ou si insouciante qu'elle frôle le caractère délibéré (Mackay Eden A 402 96; Tucker A 381 85).

[82] L'inconduite peut se manifester par une violation de la loi, d'un règlement ou d'une règle de déontologie, et il doit être démontré que la conduite reprochée constitue un manquement à une obligation résultant expressément ou implicitement du contrat de travail et que ce manquement est d'une portée telle que son auteur pouvait normalement prévoir qu'il serait susceptible de provoquer son congédiement (Nolet A 517 91; Langlois A 94 95).

[83] Il doit également être établi que l'inconduite a été la cause du congédiement de l'appelante (Cartier A 168 00; Namaro A 834 82). En fait, il faut que l'inconduite soit une cause opérante de la perte d'emploi et non un simple prétexte pour justifier le renvoi (Bartone A 369 88; Davlut A 241 82, [1983] C.S.C.R. 398; McNamara A 239 06, 2007 CAF 107; CUB 38905; 1997).

[84] À cet égard, il incombe à la Commission de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que l'appelante a perdu son emploi en raison de son inconduite (Larivee A-743-06; Falardeau A-396-85).

[85] En ce qui a trait à la question de savoir si le congédiement de l'appelante était une sanction appropriée, la Commission, le Tribunal et la cour ne sont pas en mesure d'évaluer ou d'examiner la sévérité de la sanction imposée par l'employeur. La seule question sur laquelle le Tribunal doit statuer est de savoir si la conduite reprochée constituait une « inconduite » au sens de l'article 30 de la Loi (Secours A 352 94, [2002] ACF 711 (Cour d'appel fédérale); Marion 2002 CAF 185, A 135 01; Jolin A 200 09; Roberge A 176 09; Lemire A 51 10).

[86] À ce titre, le Tribunal doit se demander s'il a clairement été établi, selon la prépondérance des probabilités, que l'appelante a contrevenu à une règle ou à une norme établie par l'employeur ou a, en quelque sorte, enfreint une condition d'emploi explicite ou implicite (Tucker A 381 85).

[87] L'appelante a été accusée d'être arrivée en retard, d'avoir été impolie, d'avoir lancé un juron ou utilisé un terme grossier, d'avoir modifié le Time Tracker, ou registre de ses heures travaillées, de n'avoir pas suivi une procédure de l'entreprise, d'avoir transféré des appels, de n'avoir pas accompli ses tâches, et ce, malgré plusieurs avertissements et sanctions disciplinaires, dont des suspensions.

[88] Le Tribunal est d'avis que les actes reprochés, s'ils ont eu lieu, constitueraient un manquement aux obligations explicites ou implicites de respect général, de ponctualité et de conformité aux modalités établies par l'employeur concernant les heures de travail, lesquelles font partie du contrat de travail. Le Tribunal est d'avis que le manquement était d'une portée telle que l'appelante pouvait normalement prévoir qu'il serait susceptible de provoquer son congédiement (Nolet A 517 91; Langlois A 94 95).

[89] La conduite reprochée a-t-elle eu lieu?

[90] Le Tribunal ne tient pas pour avéré que la Commission a prouvé selon la prépondérance des probabilités que l'appelante a commis tous les gestes reprochés. Le Tribunal tient toutefois pour avéré que la Commission a prouvé que l'appelante a commis certains des gestes reprochés, et le Tribunal considère que cela est suffisant pour tirer une conclusion d'inconduite. Le Tribunal souligne également que cette conclusion d'inconduite se fonde en partie sur le témoignage de l'appelante et sur certaines de ses admissions et en partie sur les nombreux courriels, lettres d'avertissement et avis de suspension versés au dossier. Le Tribunal a conclu à une inconduite malgré le fait que certains des éléments de preuve relevaient du ouï dire. Le Tribunal souligne qu'il est permis de se fonder sur une preuve par ouï dire et que la majeure partie de la preuve documentaire par ouï dire peut être considérée comme plus fiable, car elle a été produite dans le contexte de l'emploi de l'appelante et des activités commerciales de l'employeur et semble contemporaine aux événements dont il est question (Morris A 291 98, autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée [1999] C.S.C.R. no 304; Mills A 1873 83).

[91] En ce qui a trait aux allégations relatives à la combinaison de la durée des pauses, le Tribunal accepte la preuve fournie par l'appelante, qui a dit que lorsqu'elle a commis ce geste, elle ignorait que les pauses ne pouvaient pas être combinées et s'était fiée au fait que, par le passé, PB lui avait donné l'autorisation implicite de combiner ses pauses ou avait toléré qu'elle le fasse. À cet égard, on ne peut dire que l'appelante avait le degré requis de connaissance au sujet des conséquences de ses actions pour que celles ci puissent être qualifiées d'inconduite (Locke 2003 CAF 262; Lemire, 2010 CAF 314; Nolet A 517 91; Langlois A 94 95).

[92] En ce qui concerne les allégations relatives à la modification de ses données dans le Time Tracker ou son registre des heures travaillées, le Tribunal considère insatisfaisantes les explications fournies par l'appelante à ce sujet. Bien que le Tribunal puisse accepter que la modification de telles données nécessitait l'intervention d'un tiers, que PB l'avait fait pour elle la première fois (GD3 28) et que cela constitue une explication suffisante et crédible pour ce premier incident, le Tribunal juge non crédible l'explication fournie par l'appelante relativement à l'incident (GD3 27) survenu environ un mois après que celle ci ait fait l'objet d'une mesure disciplinaire et d'un avertissement précisément au sujet de cette conduite. Le Tribunal a aussi remarqué que, dans son témoignage, l'appelante affirmait que les techniciens auraient fait cette modification sans son autorisation ou que cela serait dû à un [Traduction] « bogue informatique ». L'appelante n'a pas nié avoir reçu le courriel ou que cela ait eu lieu.

[93] En ce qui concerne les allégations de retards, le Tribunal est d'avis que l'appelante est arrivée en retard au travail à au moins quelques reprises et que le retard constitue une inconduite. Le Tribunal constate que lors de son précédent témoignage, à l'audience du 10 février 2014, l'appelante a dit qu'elle était toujours ponctuelle et qu'elle arrivait même plus tôt (7 h 30) que l'heure prévue, mais qu'elle ne pointait son arrivée qu'à 8 h 00. À une question du Tribunal qui lui demandait pourquoi elle ne pointait qu'à 8 h00 si elle arrivait plus tôt, l'appelante a expliqué qu'elle n'était pas payée pour des heures supplémentaires et qu'il n'y avait donc aucune raison pour elle de pointer plus tôt que l'heure prévue. C'est l'explication qu'elle a donnée malgré le fait qu'elle était accusée d'arriver régulièrement en retard au bureau et qu'il aurait été raisonnable de penser qu'après avoir reçu un premier courriel d'avertissement, le 16 octobre 2012, elle aurait eu intérêt à documenter ses arrivées précoces. Ensuite, à l'audience du 2 avril 2014, à une question du Tribunal qui lui demandait si elle était déjà arrivée en retard au travail, l'appelante a déclaré qu'une fois, elle est entrée avec 30 minutes de retard en raison d'une panne de métro et qu'elle a prévenu son employeur qu'elle serait en retard avant d'arriver au bureau. Le Tribunal ne trouve pas que ce témoignage est crédible, compte tenu du fait que l'appelante a aussi admis durant son témoignage qu'elle est arrivée au travail à 8 h 07 le 18 décembre 2012 (GD3 30) et compte tenu des autres allégations au dossier. Interrogée au sujet du retard survenu le 18 décembre 2012, l'appelante a répondu qu'elle arrivait parfois au travail avec quelques minutes de retard, mais que ce n'était pas tout le temps le cas. Le Tribunal estime que ses arrivées au travail quelques minutes après l'heure prévue sont des retards, surtout dans le type de milieu où elle travaillait. Le Tribunal est d'avis que même si l'appelante était arrivée au travail avant 8 h 00 à quelques occasions, cela ne compensait pas ses retards à d'autres occasions. Le Tribunal est d'avis que l'employeur était en droit de s'attendre à ce que l'horaire qu'il avait établi soit respecté, et cela était d'autant plus important que l'appelante travaillait le matin, dès la première heure (Secours A 352 94; Locke A 799 95; Parsons 2005 CAF 248; Fleming 2006 CAF 16; CUB 38781, 1997, CUB 60693, 2004 CUB 78228, 2011).

[94] Le Tribunal n'accepte pas, non plus, les explications fournies par l'appelante relativement aux pauses repas du midi qu'elle aurait, selon le cas, pointées de façon incorrecte, prises en double ou pointées après son retour de la pause. Le Tribunal estime que ce dont l'appelante se souvient au sujet de ces incidents revêt un caractère sélectif et n'est pas très crédible. À titre d'exemple, concernant l'allégation présentée à la pièce GD3 27 au sujet de l'incident du 29 novembre 2012, l'appelante se souvient que PB n'était arrivé au travail qu'en après midi parce que sa mère était décédée et elle était catégorique dans son affirmation qu'elle n'avait pris sa pause repas qu'à partir de 13 h 00 ce jour-là et non durant la période indiquée plus tôt. Du même coup, elle ne pouvait pas se rappeler de ce qu'elle avait fait durant sa pause repas à cette date. En toute déférence, le Tribunal ne peut conclure que ce témoignage est crédible. Comment l'appelante peut elle se souvenir de ces détails mais non des autres? Où étaient les témoins avec lesquels elle avait pris sa pause repas? Cela concernait un incident pour lequel une suspension lui avait été imposée. Si elle avait une explication raisonnable pour justifier la duplication des pauses repas, on aurait pu s'attendre à ce qu'elle l'ait offerte à l'employeur lors de sa suspension ou qu'elle l'ait présentée au Tribunal lors des audiences (Murray A 245 96; CUB 79899, 2012; CUB 77337, 2011; CUB 75794, 2010, CUB 66381A, 2008).

[95] En ce qui concerne les allégations selon lesquelles l'appelante aurait ignoré ou transféré des appels et aurait été vue par PB pendant qu'elle transférait des appels le 16 mai 2013, le Tribunal est d'avis que l'appelante a bel et bien transféré des appels, et ce, malgré qu'elle avait reçu précédemment des avertissements et des sanctions disciplinaires pour ce genre de conduite précisément. L'appelante a tenté de convaincre la Commission et le Tribunal que [Traduction] « transférer des appels » n'entraîne pas une conclusion d'inconduite. Le Tribunal croit que cette observation, bien que recevable dans un contexte général, ne peut l'être dans celui de l'emploi que l'appelante occupait et que la liste du site Web de la Commission à laquelle l'appelante faisait référence n'est pas une liste exhaustive ni ne représente l'état du droit complet dans ce domaine.

[96] L'appelante a admis que sa tâche prioritaire était de répondre au téléphone et elle a indiqué, dans sa demande de prestations, que cela faisait partie de sa description de travail et de son titre de poste (GD3 2 à 17). Le Tribunal est aussi d'avis (comme cela est expliqué de façon plus détaillée un peu plus loin) que le fait de ne pas répondre à des appels téléphoniques et de ne pas se conformer aux directives raisonnables de son employeur à cet égard représente une forme d'« insubordination », un « refus d'exécuter un ordre » et un manque de « volonté » à corriger son « rendement insatisfaisant », autant d'éléments qui figurent dans la liste d'exemples d'inconduite à laquelle l'appelante a fait référence.

[97] Le Tribunal remarque, en outre, que si l'appelante n'était pas en mesure d'accomplir correctement ses tâches, elle avait eu amplement l'occasion d'expliquer cela à son employeur. L'incompétence ne constitue pas une inconduite. Il n'est pas ici question d'allégations selon lesquelles elle aurait commis des erreurs ou aurait transféré des appels parce qu'elle n'était pas en mesure de fournir des renseignements requis par ses interlocuteurs (même si cela fait partie de l'explication que l'appelante a fournie pour tenter de justifier la conduite reprochée). Il est plutôt question d'allégations selon lesquelles elle n'aurait pas répondu à des téléphones en train de sonner, aurait laissé à un niveau sonore faible le volume de la sonnerie de son téléphone et aurait transféré des appels dans la boîte vocale d'une personne en congé. Dans son témoignage du 10 février 2014, l'appelante a déclaré qu'elle n'a transféré qu'un seul appel dans la boîte vocale de D., qu'il s'agissait d'un appel de la clinique OVO transféré le 16 mai 2013 en matinée, que PB ne l'a pas vue transférer l'appel puisqu'il est arrivé au travail en après midi et qu'elle a transféré cet appel à la demande de la clinique, qui voulait laisser un message à D. malgré que l'appelante a indiqué que D. ne serait pas au bureau pour récupérer le message téléphonique. L'appelante affirme qu'il s'agit du seul appel qu'elle ait jamais transféré. L'appelante a aussi mentionné qu'A. L. (son adjointe ou sa collègue) répondait aussi au téléphone de l'appelante. Ensuite, dans son témoignage du 2 avril 2014, l'appelante a déclaré que le 16 mai 2013, elle a vu A. L. utiliser son téléphone et transférer des appels et que ce transfert d'appel survenu le 16 mai 2013 était la raison pour laquelle elle a finalement été congédiée. En réponse à des questions du Tribunal, l'appelante a déclaré que l'appel de la clinique OVO a eu lieu à une date autre que le 16 mai 2013. Elle a ensuite indiqué qu'elle transférait souvent des appels aux techniciens de laboratoire lorsqu'elle n'avait pas les renseignements qu'il lui fallait pour répondre aux appels relatifs aux tests médicaux. Après avoir aussi dit qu'elle n'avait pas accès à toute l'information, l'appelante a admis que les renseignements concernant les tests, leur coût et les indications relatives au jeûne étaient facilement accessibles à partir de son ordinateur. Le Tribunal juge que l'appelante, qui a d'abord essayé de rejeter les allégations de transfert d'appels sur l'appel de la clinique OVO, puis a cherché à blâmer A. L. pour ces transferts d'appel, a fourni, à cet égard, un témoignage non cohérent, contradictoire et non crédible.

[98] L'appelante n'a pas, non plus, fourni d'explication suffisante et n'a même fourni aucune explication dans certains cas, concernant des allégations et des éléments non concordants, dont les suivants : dans le courriel présenté à la pièce GD3 29, M. allègue que l'appelante a ignoré ou transféré des appels le 14 décembre 2012 alors qu'elle était seule au travail, des gestes dont l'appelante rejette le blâme sur A. L.; de plus, comment l'appelante peut-elle avouer à M. qu'elle n'avait pas répondu à son téléphone parce que le volume était réglé à un niveau sonore faible tout en disant que c'était A. L. qui utilisait son téléphone ce jour-là? Pourquoi n'y-a t il rien au dossier pour indiquer que l'appelante aurait informé M. que ce n'est pas elle même mais plutôt A. L. qui avait transféré les appels? Pourquoi l'appelante n'a t elle aucun souvenir précis d'avoir averti A. L. de cesser et de s'abstenir de transférer des appels qui entraient sur sa ligne téléphonique si elle avait vu A. L. le faire par le passé, alors que ce genre de conduite lui avait valu d'être suspendue et qu'elle se trouvait aux côtés d'A. L. (selon le témoignage de l'appelante elle même) la dernière fois qu'un appel a été transféré le 16 mai 2013?

[99] En ce qui concerne les observations de l'appelante selon lesquelles il était difficile de travailler avec J. et M. et que celles ci menaient une campagne pour se débarrasser d'elle, même pour des erreurs mineures, le Tribunal estime qu'il existait, en l'espèce, des relations conflictuelles avec un supérieur, pour reprendre les termes figurant au sous alinéa 29c)(x) de la Loi. Toutefois, le Tribunal estime aussi qu'on ne peut dire que la cause des relations conflictuelles n'est pas essentiellement imputable à l'appelante (Easson A 1598 92).

[100] Le Tribunal accepte la preuve testimoniale de l'appelante selon laquelle celle ci était très heureuse et populaire au bureau pendant les deux ou trois mois qui ont précédé le retour au travail de M. puis de J. Selon le Tribunal, il semble bien qu'il était plus facile pour l'appelante de travailler avec PB, A. et D. et que ces derniers avaient moins de règles et d'exigences et qu'ils appliquaient de façon moins rigoureuse les politiques de l'entreprise. Le Tribunal constate qu'après le retour au travail de M., un conflit de personnalités a commencé à surgir entre elle et l'appelante. Le Tribunal estime, cependant, que l'appelante n'a pas traité le conflit comme on se serait attendu d'une employée dans sa situation. À titre d'exemple, l'appelante a admis avoir été impolie envers M. le 18 décembre 2012 (GD3 30), lorsqu'elle est arrivée au travail avec sept minutes de retard. Malgré que l'appelante a aussi affirmé s'être excusée à M. pour son impolitesse et qu'elle était de mauvaise humeur, ce qui explique son écart de conduite, le Tribunal est d'avis que ce genre de comportement envers un employeur ne saurait être toléré et constitue une inconduite. En ce qui a trait à l'allégation selon laquelle l'appelante aurait, ce jour-là, lancé un juron, celle ci a fait valoir que [Traduction] « merde » n'est pas un juron. En toute déférence, le Tribunal n'est pas de cet avis. Le Tribunal constate que l'appelante travaillait dans un milieu professionnel, où elle occupait un poste de réceptionniste et était appelée à servir des clients et des patients et était souvent le premier point de contact entre son employeur et le public. Utiliser pareil langage dans un milieu comme celui là n'est pas acceptable, car cela témoigne d'un manque de professionnalisme et renvoie une piètre image d'elle même et de son employeur, et ce, d'autant plus que l'appelante a avoué qu'elle parlait souvent d'une voix forte lorsqu'elle était nerveuse (CUB 39993, 1997) (son propre témoignage).

[101] Le Tribunal estime également que des déclarations faites par l'appelante lors de son témoignage au sujet de la nature générale de ses rapports avec M. indiquent que l'appelante était responsable, dans une certaine mesure, des relations conflictuelles et qu'elle a fait preuve d'insubordination. À titre d'exemple, lorsque l'appelante expliquait dans son témoignage que M. se plaignait souvent à elle que le volume de la radio était trop fort, elle a déclaré que bien qu'elle fermait la radio, elle ne s'excusait pas et répliquait plutôt que le son n'était pas fort. Le Tribunal estime que la question de savoir si l'appelante ou ses collègues trouvaient que le son de la radio était fort n'est pas pertinente, dans ce contexte. Ce n'est pas simplement parce que PB, D. ou A. pouvaient avoir toléré que le volume de la radio dans le lieu de travail soit élevé que M. ou J. devaient tolérer cela à leur retour de congé. L'appelante ne comprenait pas pourquoi c'était toujours elle que M. appelait pour faire éteindre le poste de radio. Cela était le cas malgré le fait que l'appelante, selon son propre témoignage, était la seule à répliquer à M. et encourageait ses collègues à s'affirmer face à M. Le Tribunal est d'avis que M. avait probablement senti cela et que, à cet égard, l'appelante n'était pas ciblée injustement, M. ayant un motif de présumer que l'appelante était la personne qui faisait jouer la radio à un niveau sonore élevé. L'hypothèse que l'appelante ne réagissait pas bien ou de façon stratégique, ou qu'elle ne manifestait pas envers ses superviseurs le respect ou la déférence attendus d'elle, est confirmée par l'évaluation qu'elle a faite de ses collègues qui suivaient les directives de leurs superviseurs et ne leur répliquaient pas ni ne leur tenaient tête : l'appelante a décrit ces collègues (A. L. et PB) comme des [Traduction] « béni oui oui ». Ce que l'appelante ne réalisait ou n'admettait pas est que le défaut de suivre les directives raisonnables d'un employeur, le fait de répliquer ou d'être impoli représentent une forme d'insubordination (Bedell A 1716 83; Morrow A 170 98).

[102] Le Tribunal ne met pas en doute le bien fondé ou l'exactitude des déclarations de l'appelante voulant qu'elle soit très appréciée dans son lieu de travail actuel et qu'elle ait été bien accueillie dans son emploi antérieur, qu'elle était populaire auprès de ses autres collègues chez l'employeur ou que les employés des services de messagerie et les médecins, avec qui elle faisait affaire, l'aimaient bien. Le Tribunal est cependant d'avis que l'appelante a effectivement fait preuve d'un comportement et d'une attitude d'insubordination envers ses superviseurs et que cette conduite a causé ou a contribué à l'émergence de conflits de personnalités et de relations conflictuelles entre elle et ses superviseurs. Le Tribunal estime également que, malgré les avertissements répétés et les suspensions dont elle a fait l'objet, l'appelante n'en a pas assez fait pour régler le conflit ou pour modifier sa conduite ou son attitude.

[103] Le Tribunal est d'avis que l'appelante est arrivée en retard à quelques reprises, qu'elle a été impolie, a lancé des jurons et ne s'est pas pliée aux directives raisonnables de son employeur concernant la réponse aux appels téléphoniques ou leur transfert et qu'elle a fait preuve d'insubordination de par son attitude et ses actions. Le Tribunal considère que les actions susmentionnées constituent une inconduite, puisque l'appelante a ainsi manqué à une obligation résultant expressément ou implicitement de son contrat de travail (Tucker A-381-85; Brissette A 1342 92). Il s'agissait d'une conduite qui aurait pu être prévenue, puisque l'appelante savait ou aurait dû savoir ce qui était attendu d'elle dans le cadre de son emploi, d'autant plus qu'elle avait fait l'objet d'avertissements et de suspensions répétés (Lemire, 2010 CAF 314; Nolet A 517 91; Langlois A 94 95). En ce qui a trait à l'élément de causalité, le Tribunal estime que la conduite de l'appelante a causé les relations conflictuelles entre elle et ses superviseurs – ou y a contribué – et que cet antagonisme a, au bout du compte, mené à son congédiement ou à la perte de son emploi (Nolet A 517 91; Langlois A 94 95; Morrow A 170 98).

Conclusion

[104] Pour les motifs susmentionnés, l'appel est rejeté.

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