Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est accueilli. La décision du conseil arbitral est annulée et la décision de la Commission de l’assurance-emploi du Canada est rétablie.

Introduction

[2] Le 28 février 2013, un conseil arbitral a déterminé que l’appel interjeté par l’intimé à l’encontre d’une décision précédente de la Commission devrait être accueilli. La Commission a porté la décision du conseil arbitral en appel devant le Bureau du juge arbitre.

[3] Le 1er avril 2013, la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale a été saisie de tout appel interjeté devant le Bureau du juge-arbitre mais non instruit par ce dernier avant cette date.

[4] Le 20 février 2014, une audience par téléconférence a été tenue. Bien que l’avis d’audience ait dûment été transmis aux parties, seule la Commission s’est présentée à l’audience. Comme j’étais convaincu que l’intimé avait reçu l’avis d’audience, j’ai instruit l’affaire en son absence.

Droit applicable

[5] Afin de garantir l’équité, le présent appel sera examiné en fonction des attentes légitimes de l’appelante au moment du dépôt de son appel devant le Bureau du juge-arbitre. Pour cette raison, la décision relative à l’appel sera rendue en application de la Loi dans sa version antérieure au 1er avril 2013.

[6] En application du paragraphe 115(2) de la Loi dans sa version antérieure au 1er avril 2013, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) le conseil arbitral n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) le conseil arbitral a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) le conseil arbitral a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[7] La norme de contrôle qui s’applique aux questions de droit et d’exercice de la compétence est celle de la décision correcte.

[8] La norme de contrôle qui s’applique aux questions de fait et aux questions mixtes de fait et de droit est celle de la décision raisonnable.

Analyse

[9] L’appelante soutient que le conseil arbitral a commis une erreur en concluant que les gestes que l’intimé a posés ne constituaient pas une inconduite au sens de la Loi, et ce, en raison de son alcoolisme. L’appelante s’objecte en particulier au fait que, contrairement à ce que la Loi prescrit et qu’il est établi dans la jurisprudence, aucun élément de preuve médicale n’a été présenté pour prouver que l’intimé souffrait d’alcoolisme ou que sa conduite n’était pas délibérée.

[10] Dans la décision qu’il a rendue, le conseil arbitral a conclu le congédiement de l’intimé avait été causé par sa [TRADUCTION]. « conduite de la voiture avec les facultés affaiblies par l’alcool » Le conseil arbitral a aussi conclu qu’il ne s’agissait pas d’un geste délibéré parce que l’intimé [TRADUCTION] « a une longue existence [sic] d’alcoolisme et que cela lui a coûté son emploi. Le conseil arbitral conclut que c’est en raison de son alcoolisme qu’il a perdu son emploi. »

[11] Malheureusement, le conseil arbitral semble n’avoir pas tenu compte de la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale et, plus particulièrement, de l’arrêt Canada (Procureur général) c. Bigler (2009 CAF 91) qui porte sur une situation très similaire à la présente affaire.

[12] Dans l’arrêt en question, la Cour a notamment déclaré ce qui suit :

« Il n’existe aucune preuve médicale relative à l’alcoolisme du défendeur ou à la question de savoir si les circonstances dans lesquelles M. Bigler a commencé à consommer de l’alcool après la mort de sa mère ont effectivement rendu sa consommation d’alcool à l’époque involontaire [...] Je suis d’accord avec le demandeur qu’en l’espèce il n’existe aucune preuve à l’appui de la conclusion du Conseil selon laquelle les actes du prestataire n’étaient pas volontaires. »

[13] En donnant le bénéfice du doute au conseil arbitral (et à l’intimé) concernant l’alcoolisme, il se peut que sur la foi du témoignage de l’intimé, le conseil arbitral ait conclu que l’intimé souffrait d’alcoolisme. Même si cela était le cas, je ne trouve dans le dossier aucun élément de preuve étayant la conclusion du conseil arbitral que la conduite de l’intimé revêtait un caractère involontaire et que, par conséquent, il ne s’agissait pas d’un comportement délibéré.

[14] Au final, l’intimé a perdu son emploi parce qu’il n’avait plus de permis de conduire valide. Il n’avait plus de permis de conduire valide parce qu’il avait été reconnu coupable de conduite avec facultés affaiblies. Il avait été reconnu coupable de conduite avec facultés affaiblies parce que, de son propre aveu, il avait pris le volant de sa voiture après avoir bu.

[15] Bien que l’alcoolisme puisse avoir contribué à cette suite d’événements, l’arrêt Bigler appuie le principe selon lequel il faut conclure à l’inconduite à moins que l’existence de l’alcoolisme et le caractère involontaire de la conduite en question sont tous deux établis. Étant donné qu’aucune preuve en ce sens n’a été présentée en l’espèce, je me dois d’accueillir l’appel de la Commission.

Conclusion

[16] Pour les motifs susmentionnés, l’appel est accueilli. La décision du conseil arbitral est annulée et la décision de la Commission est rétablie.

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