Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L'appel est accueilli, la décision du conseil arbitral en date du 22 février 2012 est annulée et l'appel de l'Intimée devant le conseil arbitral est rejeté.

Introduction

[2] En date du 22 février 2012, un conseil arbitral a conclu que :

  • - L'Intimée avait accumulé un nombre suffisant d'heures d'emploi assurable afin de répondre aux exigences de l'article 7 de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi »).

[3] L'Appelante a déposé un appel de la décision du conseil arbitral devant le juge- arbitre en date du 12 mars 2012.

Mode d'audience

[4] Le Tribunal a tenu une audience en personne pour les motifs mentionnés à l'avis d'audience du 12 mars 2014. L'Appelante était absente lors de l'audience. L'Intimée a assisté à l'audience.

La loi

[5] La division d'appel du Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal ») est saisie des appels interjetés auprès du bureau du juge-arbitre et non encore entendus avant le 1er avril 2013, conformément aux articles 266 et 267 de la Loi sur l'Emploi, croissance et prospérité durable de 2012. Le 1er avril 2013, le juge-arbitre n'avait pas encore entendu l'appel de l'Appelant ni rendu de décision sur celui-ci. L'appel a été transféré du bureau du juge-arbitre à la Division d'appel du Tribunal. La permission d'en appeler est réputée avoir été accordée par le Tribunal le 1er avril 2013 conformément à l'article 268 de la Loi sur l'Emploi, croissance et prospérité durable de 2012.

[6] Par souci d'équité, la présente demande sera examinée sur la base des attentes légitimes de l'Appelante au moment du dépôt de son appel devant le juge-arbitre. Pour cette raison, le présent appel sera décidé en fonction des dispositions applicables de la Loi en vigueur immédiatement avant le 1er avril 2013.

[7] Conformément au paragraphe 115(2) de la Loi, alors en vigueur au moment de l'appel, les seuls moyens d'appel sont les suivants :

  1. a) le conseil arbitral n'a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d'exercer sa compétence;
  2. b) le conseil arbitral a rendu une décision ou une ordonnance entachée d'une erreur de droit, que l'erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) le conseil arbitral a fondé sa décision ou son ordonnance sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[8] Le Tribunal doit décider si le conseil arbitral a erré en fait ou en droit en concluant que l'Intimée avait accumulé le nombre suffisant d'heures d'emploi assurable pour établir une demande de prestations d'assurance-emploi en vertu de l'article 7 de la Loi.

Arguments

[9] L'Appelante soumet les motifs suivants au soutien de son appel:

  • - Le conseil arbitral a erré en fait et en droit lorsqu'il a décidé de prolonger la période de référence de l'Intimée;
  • - Aux termes de l'article 8(2) de la Loi, l'Intimée ne répondait à aucun des critères permettant de prolonger la période de référence;
  • - Le fait que l'Intimée a reçu des prestations en vertu du RQAP dans sa période de référence n'est pas une situation, selon la Loi, qui permet la prolongation de sa période de référence;
  • - Le conseil arbitral ne pouvait modifier les conditions requises prévues à l'article 7 de la Loi pour rendre la prestataire admissible aux prestations.

[10] L'Intimée a soumis les motifs suivants à l'encontre de l'appel de l'Appelante:

  • - Il faut avoir touché un revenu de travail pour avoir droit au RQAP puisqu'il s'agit d'un remplacement du revenu d'emploi;
  • - Sa situation correspond au paragraphe 8(2)c) de la Loi parce qu'elle recevait de l'aide dans le cadre d'une prestation d'emploi;
  • - Le conseil arbitral n'a commis aucune erreur en fait et en droit.

Normes de contrôle

[11] L'Appelante soumet que la norme de contrôle applicable aux questions mixtes de fait et de droit est celle du caractère raisonnable - Canada (PG) c. Hallée, 2008 CAF 159.

[12] L'Intimée n'a fait aucune représentation quant à la norme de contrôle applicable.

[13] Le Tribunal retient que la Cour d'appel fédérale a statué que la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision d'un conseil arbitral et d'un juge-arbitre relativement à des questions de droit est la norme de la décision correcte - Martens c. Canada (PG), 2008 CAF 240. La norme de contrôle applicable aux questions mixte de fait et de droit est celle du caractère raisonnable - Canada (PG) c. Hallée, 2008 CAF 159.

Analyse

[14] Lorsqu'il a accueilli l'appel de l'Intimée, le conseil arbitral a déclaré ce qui suit :

« Pour le Conseil arbitral, la citoyenne a démontré qu'elle recevait des prestations de travailleur pour recevoir du RQAP et qu'elle était admissible à la prolongation de ses semaines de référence soit du 28 novembre 2009 au 25 novembre 2011 soit 104 semaines. Cette décision est basée sur le fait qu'elle recevait de l'aide dans le cadre d'une prestation d'emploi.

En conséquence, elle est admissible à ses prestations d'assurance-emploi parce qu'avec sa prolongation de sa période de référence, elle a le nombre suffisant d'heures d'emploi assurables soit entre le 28 novembre 2009 au 25 novembre 2011.

Le conseil arbitral appuie sa décision sur le fait que madame I. M. a reçu des indemnités du RQAP qui permettent selon le paragraphe 8(2)c) de la Loi, une prolongation de sa période de référence. »

[15] La question en litige devant le Tribunal a déjà été soumise à plusieurs reprises devant les juges-arbitres.

[16] Dans le CUB 73329, le juge-arbitre conclut ce qui suit:

La Commission est d'avis qu'aux termes de l'article 8 de la Loi, qu'il s'agisse du paragraphe 8(2) ou du paragraphe 8(5), une prolongation de la période de référence peut être accordée pour les semaines pour lesquelles la prolongation est demandée seulement si la personne est visée par l'une des exceptions énoncées au paragraphe 8(5). Malheureusement, le congé parental n'en fait pas partie; par conséquent, la prestataire ne peut bénéficier d'une prolongation de sa période de prestations si elle n'a pas le nombre d'heures d'emploi assurable requis.

Aux termes du paragraphe 8(5) de la Loi et de l'article 76.13 du Règlement, la période de référence de la prestataire ne peut être prolongée. Par ailleurs, il n'aurait servi à rien à la prestataire de demander de faire antidater sa demande.

Je me sens obligé de souligner que l'objectif premier de l'entente entre le gouvernement fédéral et plusieurs provinces n'a pas été nécessairement soutenu par les amendements à la Loi qui auraient dû aller dans le même sens. Si le gouvernement avait souhaité que les périodes de référence soit consécutives et que les heures d'emploi assurables soient protégées, il aurait fait en sorte que les dispositions de l'article 8 de la Loi reflètent cette intention.

Le gouvernement ne l'a pas fait, et je ne peux réécrire la loi pour le législateur. Si les dispositions de la Loi ne reflètent pas l'intention du Parlement de façon réaliste, l'amendement nécessaire ne peut être apporté que par des mesures législatives. Le pouvoir judicaire ne peut élargir des privilèges qui n'existent pas dans la loi et ainsi la réécrire.

Pour ce motif, c'est avec regret que je dois, par les présentes, confirmer la décision rendue par le conseil, rejeter l'appel et confirmer la décision de la Commission. »

[17] Dans le CUB 75822, le juge-arbitre conclut ce qui suit :

« Cette question des prestations en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi et du Régime québécois d'assurance parentale a été débattue dans CUB 73329.

Dans ce dossier, la décision du Conseil arbitral a été confirmée par le juge-arbitre. Le Conseil arbitral s'exprimait comme suit :

« (...) La Loi est très claire à ce sujet : « La période de référence est la période de 52 semaines précédant immédiatement le début de la période de prestations; elle peut être prolongée dans certaines circonstances prévues au paragraphe 8(2) de la Loi. Dans la présente affaire, la période de référence va du 5 août 2007 au 2 août 2008. La période de référence ne peut être prolongée.

Dans le contexte de la mise en œuvre du Régime québécois d'assurance parentale le 1er janvier 2006, un nouveau principe a été établi pour garantir l'équité du traitement des demandes de prestations d'assurance-emploi présentées dans l'ensemble du pays. Ce principe d'équivalence qui confère aux prestations versées sous un régime provincial une reconnaissance similaire aux prestations de maternité ou aux prestations parentales versées sous le régime d'assurance- emploi, s'applique à toute demande éventuelle de prestations d'assurance-emploi.

En vertu d'un nouveau règlement, toute semaine pour laquelle une personne a reçu des prestations du RQAP pour une naissance ou une adoption ne pourra entrer en ligne de compte pour prolonger la période de référence de l'assurance-emploi, tout comme il en est de toute semaine pour laquelle une personne a reçu des prestations d'assurance-emploi. »

Une prolongation de la période de référence peut être accordée pour les semaines pour lesquelles la prolongation est demandée, seulement si la personne est visée par l'une des exceptions énoncées au paragraphe 8(5) de la Loi sur l'assurance- emploi. Le congé parental n'en fait pas partie. »

[18] Dans le CUB 79758, le juge-arbitre conclut ce qui suit :

« La Commission dispose enfin du litige sur les deux points par les paragraphes qui suivent et qui me convainquent :

« (...) La question en litige sur laquelle le Conseil arbitral devait se prononcer, était de déterminer si la prestataire avait accumulé un nombre suffisant d'heures d'emploi assurable dans sa période de référence afin de pouvoir faire établir une période de prestations en maladie en date du 1er avril 2012.

Selon la preuve non contestée au dossier, la prestataire n'a accumulé que 101 heures d'emploi assurable dans sa période de référence, soit entre le 3 avril 2011 et le 31 mars 2012, alors qu'un minimum de 600 heures était requis afin de recevoir des prestations de maladie.

La Commission soumet également que contrairement à ce que le Conseil arbitral a invoqué, la période de référence de la prestataire ne pouvait être prolongée puisque la situation de cette dernière ne rencontre aucun des critères de l'article 8(2) de la Loi. »

[19] Compte tenu de ce qui précède, Le Tribunal constate qu'une prolongation de la période de référence peut être accordée pour les semaines pour lesquelles la prolongation est demandée, si la personne est visée par l'une des exceptions énoncées au paragraphe 8(2) de la Loi. Malheureusement, le congé parental n'en fait pas partie. Par conséquent, l'Intimée ne peut bénéficier des prestations puisqu'elle n'a pas le nombre d'heures d'emploi assurable requis.

[20] Pour ces motifs, c'est avec regret que le Tribunal doit accueillir l'appel, annulée la décision du conseil arbitral en date du 22 février 2012 et rejeter l'appel de l'Intimée devant le conseil arbitral.

Conclusion

[21] L'appel est accueilli, la décision du conseil arbitral en date du 22 février 2012 est annulée et l'appel de l'Intimée devant le conseil arbitral est rejeté.

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