Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision



Comparutions

[1] Me Jean Mailloux et Cassandra Riendeau, stagiaire, Laroche Martin, contentieux de la Confédération des syndicats nationaux (« CSN ») représentant les appelants membres du syndicat des employés de l'usine Fruits de Mer de l'Est du Québec (« FMEQ »), affiliés à la CSN ; et représentant également les trois contremaîtres non-syndiqués, soit Messieurs J. B., S. B. et Madame C. F. ;

[2] Me Renée Baillargeon, de la Fédération des travailleurs du Québec (« FTQ »), représentant les appelants membres du syndicat des employés de l'usine FMEQ affiliés au Syndicat des Travailleurs et Travailleuses Unis de l'alimentation et du commerce section locale 503 (« TUAC »), accompagnée de Monsieur Alain Langlois, secrétaire- trésorier TUAC ;

[3] Les témoins suivants ont été présents lors de l'audience : C. O., Richard Labrie, André Cloutier, G. D., J. H., M. T. et J. B. Était également présente C. H. M.

Introduction

[4] Les appelants ont contesté auprès de la Commission de l'assurance-emploi du Canada (« la Commission »), des avis d'imposition de périodes d'inadmissibilité pour certaines périodes durant les années 2010, 2011 et 2012 et l'émission d'avis de trop-payés conséquentes à ces décisions. Les montants de trop payés vont de 281$ à 11 725 $, selon les dossiers.

[5] La Commission a émis des lettres de révision entre le 27 juin et le 21 août 2013, concernant les appelants faisant partie du présent appel de groupe et maintenant les inadmissibilités qui avaient été imposées. La liste des autres appelants composant ledit appel de groupe se retrouve à l'annexe 1 de la présente. Entre le 30 juillet et le 7 novembre 2013, les appelants ont déposé leurs appels devant la section de l'assurance-emploi de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal »).

[6] Le Tribunal a rendu un certain nombre de décisions interlocutoires avant la présente audience. Une première décision fut de joindre les appels en vertu des pouvoirs octroyés au Tribunal au paragraphe 13 (1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (« Règlement sur le Tribunal ») et de constituer un appel de groupe, ce qui a permis de tenir une seule audience, de rassembler la preuve et de ne rendre qu'une seule décision s'appliquant à l'ensemble des dossiers. Une seconde décision interlocutoire fut de mettre en cause l'employeur FMEQ dans cet appel de groupe en vertu des pouvoirs octroyés au Tribunal conformément au paragraphe 10 (1) du Règlement sur le Tribunal. Finalement dans une troisième décision, le Tribunal a rejeté la demande de la Commission de participer par téléconférence à l'audience, initialement prévue en personne pour 4 jours.

[7] Suite à la décision du Tribunal lui refusant de participer par téléconférence, l'intimée a décidé de ne pas se présenter à l'audience. Quant à la partie mise-en-cause FMEQ, elle ne s'est également pas présentée à l'audience, et ce même si l'audience s'est tenue dans la municipalité où se trouve l'usine de FMEQ. Le Tribunal n'a aucun pouvoir de contraindre soit une partie, soit un témoin, à se présenter devant lui. Par conséquent, le Tribunal n'a pu poser aucune question, ni demander quelque précision que ce soit, lors de l'audience, aux parties absentes. Par conséquent, et en vertu des pouvoirs octroyés au Tribunal par le paragraphe 12 (1) du Règlement sur le Tribunal, le Tribunal a procédé à la tenue de l'audience en l'absence de l'intimée et de la partie mis-en-cause.

[8] À l'audience, Me Mailloux a demandé que le dossier de Mme G. D. (GE-13-656) soit désigné comme dossier-type pour l'audience et que la preuve présentée pour ce dossier vaille également comme preuve pour tous les dossiers faisant l'objet de l'appel. Le Tribunal a fait droit à cette requête.

Décision

[9] Le Tribunal fait droit à l'appel pour les motifs ci-après énoncés. Le Tribunal conclut que les employés étaient en état de chômage durant les périodes faisant l'objet des décisions de la Commission, et ce en raison du manque de preuve au dossier. Le Tribunal conclut de plus que selon l'état actuel du droit, il n'a pas la compétence juridictionnelle pour procéder à la révision d'une demande de défalcation.

Mode d'audience

[10] L'audience s'est tenue en personne à Matane, province de Québec pour les motifs énoncés dans l'avis d'audience daté du 5 mars 2014.

Question en litige

[11] Les appelants étaient-il en état de chômage au sens des articles 9, 11(1) et 11(4) de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi ») et de l'article 31 du Règlement sur l'assurance-emploi (le « Règlement ») ?

[12] Le Tribunal a-t-il le pouvoir de se prononcer sur son pouvoir de défalcation de la Commission prévu à l'article 56 du Règlement ?

[13] La Commission a-t-elle exercé le pouvoir discrétionnaire de défalcation prévu à l'article 56 du Règlement de manière judiciaire?

Droit applicable

[14] L'article 9 de la Loi prévoit que lorsqu'un assuré qui remplit les conditions requises aux termes de l'article 7 ou 7.1 formule une demande initiale de prestations, on doit établir à son profit une période de prestations et des prestations lui sont dès lors payables, en conformité avec la présente partie, pour chaque semaine de chômage comprise dans la période de prestations.

[15] Selon le paragraphe 11(1) de la Loi, une semaine de chômage, pour un prestataire, est une semaine pendant laquelle il n'effectue pas une semaine entière de travail.

[16] Le paragraphe 11(4) de la Loi prévoit l'assuré qui travaille habituellement plus d'heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaillent habituellement au cours d'une semaine des personnes employées à plein temps et qui a droit, aux termes de son contrat de travail, à une période de congé est censé avoir travaillé une semaine entière de travail au cours de chaque semaine qui est comprise complètement ou partiellement dans cette dernière période.

[17] Le paragraphe 47(1) de la Loi prévoit que les sommes payables au titre des articles 38, 39, 43, 45, 46 ou 46.1 constituent des créances de Sa Majesté, dont le recouvrement peut être poursuivi à ce titre soit devant la Cour fédérale ou tout autre tribunal compétent, soit selon toute autre modalité prévue par la présente loi.

[18] Le paragraphe 52(1) de la Loi prévoit que, malgré l'article 111 mais sous réserve du paragraphe (5), la Commission peut, dans les trente-six mois qui suivent le moment où des prestations ont été payées ou sont devenues payables, examiner de nouveau toute demande au sujet de ces prestations.

[19] L'article 31 du Règlement prévoit que :

« (1)  La semaine entière de travail du prestataire, sauf celui visé aux articles 29 ou 30, correspond au nombre d'heures, de jours ou de quarts de travail qu'accomplissent normalement dans une semaine civile les personnes du même rang ou de la même classe ou faisant partie de la même équipe à l'usine, à l'atelier ou en tout autre local où il exerce ou exerçait un emploi.

(2) Lorsque le nombre d'heures, de jours ou de quarts de travail visé au paragraphe (1) est celui qu'accomplissent normalement les employés à temps partiel et est inférieur au nombre d'heures, de jours ou de quarts de travail qu'accomplissent normalement dans une semaine civile les personnes exerçant à temps plein l'emploi qui se rapproche le plus de celui du prestataire, celui-ci est considéré comme ayant travaillé une semaine entière de travail s'il a travaillé le nombre d'heures, de jours ou de quarts normalement travaillés par la personne exerçant un emploi à temps plein.

(3) La semaine entière de travail du prestataire, sauf celui visé aux articles 29 ou 30, qui est rétribué à la pièce, au parcours ou à tout autre taux unitaire correspond au nombre de jours de travail qu'accomplissent normalement dans une semaine civile les personnes du même rang ou de la même classe ou faisant partie de la même équipe à l'usine, à l'atelier ou en tout autre local où il exerce ou exerçait un emploi. »

[20] Le paragraphe 56(1) du Règlement prévoit que :

« (1)  La Commission peut défalquer une pénalité à payer en application des articles 38, 39 ou 65.1 de la Loi ou une somme due aux termes des articles 43, 45, 46, 46.1 ou 65 de la Loi ou les intérêts courus sur cette pénalité ou cette somme si, selon le cas :

  1. a) le total des pénalités et des sommes, y compris les intérêts courus, que le débiteur doit à Sa Majesté en vertu de tout programme administré par le ministère de l'Emploi et du Développement social ne dépasse pas cent dollars, aucune période de prestations n'est en cours pour le débiteur et ce dernier ne verse pas de paiements réguliers en vertu d'un plan de remboursement ;
  2. b) le débiteur est décédé ;
  3. c) le débiteur est un failli libéré ;
  4. d) le débiteur est un failli non libéré à l'égard duquel le dernier dividende a été payé et le syndic a été libéré ;
  5. e) le versement excédentaire ne résulte pas d'une erreur du débiteur ni d'une déclaration fausse ou trompeuse de celui-ci, qu'il ait ou non su que la déclaration était fausse ou trompeuse, mais découle :
    1. (i) soit d'une décision rétrospective rendue en vertu de la partie IV de la Loi,
    2. (ii) soit d'une décision rétrospective rendue en vertu des parties I ou IV de la Loi à l'égard des prestations versées selon l'article 25 de la Loi ;
  6. f) elle estime, compte tenu des circonstances, que :
    1. (i) soit la pénalité ou la somme, y compris les intérêts courus, est irrécouvrable,
    2. (ii) soit le remboursement de la pénalité ou de la somme, y compris les intérêts courus, imposerait au débiteur un préjudice abusif,
    3. (iii) soit les frais administratifs de recouvrement de la pénalité ou de la somme, ou les intérêts, seraient vraisemblablement égaux ou supérieurs à la pénalité, à la somme ou aux intérêts à recouvrer. »

[21] Le paragraphe 56(2) du Règlement prévoit :

« (2) La Commission peut défalquer la partie de toute somme due aux termes des articles 47 ou 65 de la Loi qui se rapporte à des prestations reçues plus de douze mois avant qu'elle avise le débiteur du versement excédentaire, y compris les intérêts courus, si les conditions suivantes sont réunies :

  1. a) le versement excédentaire ne résulte pas d'une erreur du débiteur ni d'une déclaration fausse ou trompeuse de celui-ci, qu'il ait ou non su que la déclaration était fausse ou trompeuse;
  2. b) le versement excédentaire est attribuable à l'un des facteurs suivants :
    1. (i) un retard ou une erreur de la part de la Commission dans le traitement d'une demande de prestations,
    2. (ii) des mesures de contrôle rétrospectives ou un examen rétrospectif entrepris par la Commission,
    3. (iii) une erreur dans le relevé d'emploi établi par l'employeur,
    4. (iv) une erreur dans le calcul, par l'employeur, de la rémunération assurable ou du nombre d'heures d'emploi assurable du débiteur,
    5. (v) le fait d'avoir assuré par erreur l'emploi ou une autre activité du débiteur. »

[22] L'article 3 du Règlement sur le Tribunal prévoit ce qui suit :

« (1) Le Tribunal :

  1. a) veille à ce que l'instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l'équité et la justice naturelle permettent ;
  2. b) peut, s'il existe des circonstances spéciales, modifier une disposition du présent règlement ou exempter une partie de son application.

(2) Il résout par analogie avec le présent règlement toute question de nature procédurale, qui n'y étant pas réglée, est soulevée dans le cadre de l'instance. »

[23] Le paragraphe 24(1) du Règlement sur le Tribunal se lit comme suit :

« (1) L'appel est présenté selon la forme prévue par le Tribunal sur son site Web et contient :

  1. a) Une copie de la décision rendue en application des paragraphes 81(2) ou (3) du Régime de pensions du Canada, du paragraphe 27.1(2) de la Loi sur la sécurité de la vieillesse ou de l'article 112 de la Loi sur l'assurance-emploi ;
  2. b) La date à laquelle la décision a été communiquée à l'appelant ;
  3. c) Si une personne est autorisée à le représenter, le nom, l'adresse et le numéro de téléphone de cette personne et tout numéro de télécopieur et adresse électronique qu'elle possède ;
  4. d) Les moyens d'appel ;
  5. e) Tous les documents ou observations que l'appelant entend invoquer à l'appui de l'appel ;
  6. f) Le numéro identificateur du type précisé par le Tribunal sur son site Web en vue de l'appel ;
  7. g) Le nom complet de l'appelant, ses adresse et numéro de téléphone et tout numéro de télécopieur et adresse électronique qu'il possède ;
  8. h) Une déclaration selon laquelle les renseignements fournis sont, à la connaissance de l'appelant, véridiques. »

Preuve

Preuve documentaire

[24] Les éléments de preuve contenus au dossier GE-13-656 nous indiquent que :

  1. On retrouve aux pages GD3-13 et GD3-14 du dossier GE-13-656 les relevés d'emploi de l'appelante pour les années concernées.
  2. On retrouve aux pages GD3-15 à GD3-21 des extraits des sites web d'Industrie Canada et du Registre des entreprises du Québec concernant la partie mise-en-cause FMEQ.
  3. À la page GD3-22, on retrouve un rapport d'enquête signé par Martial Lévesque, enquêteur de la Commission quant à des conversations qu'il aurait eu avec madame Colette Inglis employée au département de la paye de la Compagnie Les crevettiers Marinard (« Marinard »), les 15 novembre 2012 et le 24 mai 2013 à l'effet que les horaires des employés seraient de 5 jours de travail, suivis de 2 jours de congés, soit de 40 à 45 heures par semaine pour les employés de l'usine de traitement, et de 55 heures par semaine pour les travailleurs au déchargement.
  4. Aux pages GD3-23 à GD3-30, on retrouve une déclaration solennelle de madame F. B. datée du 22 novembre 2012, faite à l'enquêteur Martial Lévesque et un autre enquêteur dont le nom n'est pas lisible. Cette déclaration est en fait un compte-rendu de questions formulées par l'enquêteur et répondues par le témoin. Le témoin affirme être la directrice des ressources humaines de FMEQ; que la compagnie est spécialisée dans la transformation des fruits de mer ; qu'ils ont environ 140 employés répartis dans diverses sections ; que la compagnie est surtout saisonnière, soit d'avril à octobre de chaque année; que la production a été continue en 2011 et 2012 ; que les conventions collectives contiennent des horaires spécifiques de travail, soit du dimanche au samedi, avec une équipe le jour et une équipe la nuit, et ce en alternance entre les semaines, et ce pour les employés affiliés aux deux syndicats, soit la CSN et les TUAC ; que les employés auraient pu travailler à temps plein d'avril à la mi-septembre, soit 5 jours par semaines la plupart du temps, comme chez Marinard; que les employés ne veulent pas céder sur les horaires de travail et que lorsqu'ils sont rappelés, ils ne veulent pas faire une seule journée afin de ne pas se faire couper leur chômage ; qu'en 2008, le président J. C. a essayé de changer les horaires de travail, mais sans succès parce que monétairement, c'était plus avantageux pour les employés; que la compagnie n'a pas proposé de changements d'horaires car c'était perdu d'avance, mais ils ont réduit le salaires des employés qui étaient rappelés de temps simple et demi à temps simple ; que les jours non travaillés sont en fait des jours de congés et qu'ils font partie intégrante de l'horaire de travail ; que les employés peuvent volontairement travailler en se plaçant volontairement sur une liste de rappel, et ils sont rappelés sur la base de leur ancienneté; que les employés travaillent normalement 60 heures par semaine, mais parfois jusqu'à 75 heures par semaine ; les contremaîtres font du 7/7 ou du 14/7 ; que la compagnie n'a jamais avisé les employés qu'il n'avaient pas droit aux prestations de l'assurance-emploi ; que la fin du contrat est à la fin de la saison de production.
  5. À la page GD3-31, on retrouve un rapport d'enquête de monsieur Martial Lévesque enquêteur, qui est le résumé d'une rencontre avec Me J. C. tenue le 22 novembre 2012. Il est le président de FMEQ ; qu'en 2008 ils auraient essayé de faire changer les horaires de travail, et ce sans succès ; qu'ils auraient proposé en 2008 des horaires 5/2, car sans ça ils ne pouvaient pas avoir des horaires de travail stables, mais sans succès puisque les employés préféraient recevoir plus en chômage ; que madame C. O. n'était pas sur l'équipe de négociation en 2008, même si elle a siégé sur les comités exécutifs depuis 1979 ; que les horaires 7/7 existaient depuis longtemps, soit de 25 à 30 ans, afin de faire travailler le plus de gens possible ; que les 7 jours de congés sont pris en chômage, alors que l'employeur a du travail à leur donner; que les congés lors des horaires 7/7 sont prévus à la convention collective ; les employés peuvent travailler durant leur semaine de congé, et ce sur une base volontaire.
  6. Aux pages GD3-32 à GD3-35, on trouve une déclaration solennelle datée du 23 novembre 2012 de madame C. O. faite à monsieur Martial Lévesque et un autre enquêteur. Elle explique que les horaires 7/7 ont été établis en 1996 à la demande de l'employeur ; le rappel s'effectue d'abord par ancienneté au département, et ensuite par ancienneté générale ; que les horaires de travail sont de 7 jours suivis de 7 jours de congé, mais les employés sont disponibles à travailler durant les 7 jours de congé ; au début de la saison, les employés choisissent leur équipe de travail, et ce basé sur l'ancienneté ; en 2009, lors de la négociation de la convention collective, l'employeur offrait un horaire de travail 4/3, mais que personne était contre un horaire de travail 5/2 ; l'horaire 7/7 a été maintenu cette année-là ; les horaires 7/7 ont commencé en 1996 afin de conserver le plus de monde possible et que cette main-d'œuvre spécialisée était nécessaire ; physiquement, il était difficile de travailler 7 jours sur 7 en continu ; que lorsque la mécanisation est survenue, l'employeur pouvait ainsi s'assurer une main d'œuvre qualifiée ; les employés sont toujours disponibles à travailler autrement, même si notre nom n'est pas inscrit sur la liste de rappel, et l'employeur les appelle si c'est nécessaire, et ils sont obligés de rentrer.
  7. On retrouve aux pages GD3-133 à 165 du dossier GE-13-1184 le texte de la Convention collective des TUAC pour les années 2011 à 2014. Les horaires de travail pour les années 2011 et 2012 se retrouvent aux pages GD3-150 à 152 et se lisent comme suit :

    Article X – Planification de la main-d'oeuvre et horaire de travail

    10.1 Planification de la main-d'œuvre

    1. i. L'horaire de travail est établi par l'Employeur selon les besoins des opérations.
    2. ii. L'horaire quotidien de travail doit prévoir des heures consécutives en tout temps à l'exception des périodes de repas. La présente disposition ne s'applique pas à la pesée.
    3. iii. Les horaires de travail sont établis en tenant compte de ce qui suit sans toutefois que cela constitue une garantie d'heures de travail par jour, de jour de travail par semaine ou de semaine de travail par année.
    4. iv. Les salariés auront une (1) semaine de travail déterminée selon les équipes de travail suivantes réparties sur deux (2) semaines.
    5. La semaine de travail étant des semaines de calendrier qui continuent à courir tout au long de l'année pour l'horaire 7/7.
    6. Équipe A : De cinq heures et quarante-cinq minutes (05h45) à seize heures quinze minutes (16h15) du dimanche au samedi inclusivement pour la première (1re) semaine.
    7. Équipe B : De quinze heures et quarante-cinq minutes (15h45) à une heure et trente minutes (01h30) du dimanche au samedi inclusivement pour la première (1re) semaine.
    8. Équipe C : De cinq heures et quarante-cinq minutes (05h45) à seize heures quinze minutes (16h15) du dimanche au samedi inclusivement pour la deuxième (2e) semaine.
    9. Équipe D : De quinze heures et quarante-cinq minutes (15h45) à une heure et trente minutes (01h30) du dimanche au samedi inclusivement pour la deuxième (2e) semaine.
    10. a) Les parties peuvent s'entendent sur un horaire différent en tout temps, mais s'il n'y a pas d'entente possible, l'horaire ci-haut reste en vigueur. Les salariés doivent faire leur choix de quart de travail en ordre d'ancienneté, les salariés ayant plus d'ancienneté ayant priorité. Ces choix doivent être effectués par ancienneté au début de chaque année ou lorsqu'il survient une diminution d'équipe ou de quart de travail. Le salarié absent doit quand même faire connaitre son choix d'équipe.
    11. b) Lors de la formation des équipes, lorsque l'Employeur considère qu'il n'y a pas suffisamment de personnel expérimenté faisant partie d'une équipe, il peut assigner temporairement une ou plusieurs personnes de son choix sans suivre les dispositions relatives à l'ancienneté, en autant que les salariés concernés y consentent et par la suite, si le nombre est insuffisant, l'Employeur assigne ceux ayant le moins d'ancienneté.
    12. c) L'Employeur ne peut obliger un salarié à terminer son quart de travail plus de quinze (15) minutes après l'heure de terminaison prévue à 10.01 d), à moins que le salarié soit consentant.
    13. d) À partir de la semaine incluant le 1er août, le jeudi qui précède avant midi (12h00) pour la semaine suivante, le salarié désireux de travailler communique avec le directeur du contrôle de la qualité et s'engage à être disponible pour toute la semaine, il déplace le salarié possédant le moins d'ancienneté dans sa classification. Le salarié est rémunéré à taux simple pour toutes les heures régulières effectuées au cours de cette semaine.

    10.2 Affichage de l'horaire de travail

    1. a) L'horaire de travail de tous les salariés pour la semaine suivante est affiché le jeudi de chaque semaine et par la suite ses corrections.
    2. b) Une copie conforme à l'original et facilement lisible est remise au moment de l'affichage au délégué du Syndicat.
    3. c) Chaque salarié est responsable de l'exactitude des entrées sur sa carte de présence et ne doit en aucun cas pointer la carte d'un autre salarié.

    10.3 Compensation d'heures suite à un congé

    Le salarié qui demande et obtient un congé durant sa semaine de travail ne pourra pas compenser ses heures perdues en allant chercher des heures à un autre salarié qui est déjà programmé.

    10.4 Échange de quart de travail

    Deux (2) salariés de la même semaine mais sur deux (2) équipes différentes peuvent après entente avec l'Employeur échanger un quart de travail ou plus pour la semaine. Pour ce faire, les salariés utilisent le formulaire prévu à cet effet et l'Employeur indique sur l'horaire de travail les échanges de quart de travail. Cette disposition ne peut avoir pour effet d'occasionner du temps supplémentaire.

  8. Les horaires de travail pour les années 2011 et 2012 quant au Syndicat CSN sont aux pages GD3-160 à GD3-163, et se lisent comme suit :

    Article 7 Heures de travail

    7.1 Malgré l'article 7, les parties peuvent par entente, mettre en place les horaires de travail différents en autant qu'ils maintiennent ou permettent le meilleur rendement au niveau quantité et qualité.

    7.2 Les salariés dont les fonctions sont rattachées aux besoins de production continue (hebdomadaire) dans les départements ayant eu ou qui auront des changements technologiques (étant accepté que les départements « crevettes » et « remballage » ont subi de tels changements) auront une semaine de travail déterminée selon les équipes de travail suivantes réparties sur 2 semaines :

    La semaine de travail étant des semaines de calendrier qui continuent à courir tout au long de l'année pour l'horaire 7/7.

    Équipe A : De 07h00 à 16h00 du dimanche au samedi inclusivement pour la 1ère semaine ;

    Équipe B : De 16h00 à 01h00 du dimanche au samedi inclusivement pour la 1ère semaine ;

    Équipe C : De 07h00 à 16h00 du dimanche au samedi inclusivement pour la 2ième semaine ;

    Équipe D : De 16h00 à 01h00 du dimanche au samedi inclusivement pour la 2ième semaine ;

    Pour les autres départements, l'horaire de 7 jours est applicable mais sa rotation est établie pour chaque département, selon l'option des salariés du département entendu qu'un salarié ne peut ainsi être programmé pour travailler plus de 3 périodes consécutives. Toutefois, à compter du 1ier Août, un salarié peut travailler plus de trois (3) périodes consécutives.

    Les parties peuvent convenir d'horaires de travail de 7 jours fonctionnant sur une rotation différente que celle énumérée ci-haut dans le présent article.

    Les salariés doivent faire leur choix d'horaire de travail en ordre d'ancienneté, les salariés ayant plus d'ancienneté ayant priorité. Ces choix doivent être effectués au début de chaque année ou lorsqu'il survient une diminution d'équipe ou de quart de travail.

    Lors de la formation des équipes, lorsque l'employeur considère qu'il n'y a pas suffisamment de personnel expérimenté faisant partie d'une équipe, il peut assigner temporairement une ou plusieurs personnes de son choix sans suivre les dispositions relatives à l'ancienneté, en autant que le(s) salarié(s) concerné(s) y consente(nt) et par la suite, si le nombre est insuffisant, l'employeur assignera ceux ayant le moins d'ancienneté. Dans tous les cas, l'employeur ne pourra exiger plus de 20 % de personnel expérimenté lors de la formation d'une équipe et ce, pour une durée ne devant pas excéder 10 jours ouvrables.

    b) L'employeur peut décider de poursuivre la transformation de la matière première en modifiant l'horaire hebdomadaire existant pour 2 jours de 12 heures et 2 jours de 8 heures de travail, seulement dans les cas de force majeure. À titre d'exemple un bris mécanique de plus de 4 heures, une panne d'électricité, une tempête de neige.

    Un avis est donné aux salariés avant la fin de leur quart de travail, la journée précédant le changement d'horaire. Le nouvel horaire est obligatoire pour les salariés, Il est entendu que le temps supplémentaire s'applique conformément à la convention collective et une pause de quinze (15) minutes (en rotation) est allouée à la fin du quart régulier de travail. De plus, il est entendu que lors de l'application de cet horaire, les contremaîtres peuvent remplacer au saumureur et à la table d'inspection durant la période de 30 minutes pour le repas.

    7.3 Il est convenu que la septième journée de cet horaire est une période de repos que les salariés acceptent de travailler.

    7.4 L'ancienneté des salariés affectés à la deuxième semaine de cet horaire (les équipes C et D) sera réputée ayant commencé à se computer au même moment où les salariés appelés à travailler dans la première semaine (les équipes A et B) débuteront leur travail sur cet horaire.

    7.5 Il sera loisible, nonobstant les dispositions ci hautes prévues, de faire commencer les salariés préposés au nettoyage et équipe sanitaire dès que l'équipe de jour de production a terminé le travail de cette journée-là et les heures régulières de ces salariés seront avancées d'autant. Il en est de même des salariés préposés au démarrage et à la clôture de chaque quart de travail. Ce travail doit être considéré comme compris dans l'horaire de travail. Compte tenu que dans certains départements des salariés effectuent actuellement du travail après l'heure de fin de travail de d'autres salariés pour lequel ils ne sont pas payés, il est convenu qu'un horaire spécial leur sera attribué pour ajuster cette situation. S'il est impossible de le faire, l'employeur convient de payer le temps effectué en surplus de l'horaire de travail.

    7.6 Les salariés du département du déchargement et de la réception seront appelés à travailler selon les arrivages de matière première.

    7.7 Chaque salarié se doit de poinçonner personnellement sa carte de présence et ne doit en aucun cas pointer la carte d'un autre salarié.

    7.8 Le salarié qui demande et obtient un congé durant sa semaine de travail ne peut pas compenser ses heures perdues en allant chercher des heures à un autre salarié déjà programmé.

  9. Un questionnaire a été envoyé aux employés, et on le retrouve aux pages GD3-164 à GD3-169.
  10. On retrouve un rapport d'entrevue à la page GD3-170 en date du 14 février 2013 où l'employée déclare qu'elle était disponible à l'emploi même si son nom ne se trouvait pas sur une liste de disponibilité.
  11. La décision initiale de la Commission se retrouve aux pages GD3-171 et GD3-172.
  12. La lettre de révision se trouve aux pages GD3-180 et GD3-181.
  13. La demande de défalcation quant aux employés membres de la CSN se retrouve aux pages GD3-178 et GD3-179.
  14. La demande de défalcation quant aux employés membres des TUAC se retrouve au document GD25 déposé lors de l'audience.
  15. La demande de défalcation quant aux trois contremaîtres non-syndiqués se retrouve au document GD29, déposé après l'audience.

[25] La preuve documentaire soumise à l'audience est constituée des documents suivants sous les cotes ci-après indiquées :

  1. GD5 : Documents datant de 1995, soit une requête du bureau de Matane de la Commission et réponse du bureau régional de la Commission à Montréal concernant les horaires de travail chez FMEQ.
  2. GD6 : Échanges de courriels entre Michel Harrisson de la Commission et F. B. de FMEQ datant de juin 2011.
  3. GD7 : Convention collective FMEQ-CSN couvrant les années 1989 à 1992.
  4. GD8 : Convention collective FMEQ-CSN couvrant les années 1992 à 1995.
  5. GD9 : Convention collective FMEQ-CSN couvrant les années 1995 à 1998.
  6. GD10 : Convention collective FMEQ-CSN couvrant les années 1998 à 2003.
  7. GD11 : Convention collective FMEQ-CSN couvrant les années 2003 à 2006.
  8. GD12 : Convention collective FMEQ_CSN couvrant les années 2006 à 2008.
  9. GD13 : Convention collective FMEQ-CSN couvrant les années 2008 à 2011.
  10. GD14 : Convention collective FMEQ-CSN couvrant les années 2011 à 2014.
  11. GD15 : Lettre d'entente FMEQ-CSN amendant la convention collective 2011 à 2014.
  12. GD16 : Décision du conseil arbitral en date du 23 septembre 2013 dans le dossier 1300816116 concernant C. O.
  13. GD17 : Décision du Conseil arbitral en date du 23 septembre 2013 dans le dossier 1300815607 concernant C. O.
  14. GD18 : Demandes patronales lors de la négociation FMEQ-CSN de la convention collective de 2011 à 2014.
  15. GD19 : Horaire de travail 14/7 proposé par FMEQ à la CSN en 2013.
  16. GD20 : Avis de convocation de la CSN pour le 4 juillet 2013.
  17. GD21 : Convention collective FMEQ-TUAC couvrant les années 1999 à 2001.
  18. GD22 : Convention collective FMEQ-TUAC couvrant les années 2002 à 2005.
  19. GD 23 : Convention collective FMEQ-TUAC couvrant les années 2005 à 2008.
  20. GD24 : Lettre d'entente datant du 3 juin 2013 modifiant la convention collective quant aux horaires de travail.
  21. GD25 : Demande de défalcation envoyée à la Commission par Me Renée Baillargeon, conseillère juridique des TUAC en date du 23 octobre 2013.
  22. GD26 : Récapitulatif des différents dossiers des employés affiliés à la CSN quant à l'état de leurs demandes de révision administrative, tel que préparé par leurs représentants.
  23. GD27 : Récapitulatif des différents dossiers des employés affiliés au TUAC quant à l'état de leurs demandes de révisions administrative, tel que préparé par leurs représentants.
  24. GD29 : Demande de défalcation pour les contremaîtres non-syndiqués, déposée après l'audience.
  25. GD31 : Cahier d'autorités déposé par les représentants des appelants.

Preuve testimoniale

Témoignage de Mme C. O.

[26] Avant le témoignage de madame C. O., les témoins Richard Labrie et André Cloutier ont été exclus de la salle à la demande du procureur des appelants, Me Jean Mailloux.

[27] Elle est une employée de la compagnie FMEQ depuis 1977. Lorsqu'elle a commencé à travailler à l'usine elle était trancheuse aux poissons de fonds. Suite au déclin de la pêche et des prises de poissons de fonds, l'usine s'est spécialisée dans le traitement de la grande crevette du Nord (Pandalus boréalis). Elle est présentement préposée au classeur de crevettes.

[28] Elle est présentement présidente du syndicat local affilié à la CSN. Elle a commencé à y occuper des fonctions en 1981, année où le syndicat fut formé. Avant cette date, les employés étaient non syndiqués. De 1981 à 1992, elle occupait le poste de secrétaire du syndicat puis en 1992, elle est devenue la présidente. Elle a occupé ce poste à plusieurs reprises de 1992 à 2005. De 2005 à 2009, elle n'a occupé aucun poste sur l'exécutif du syndicat, puis elle est revenue en 2009 comme présidente jusqu'à ce jour. Les mandats de la présidence sont de deux ans, et renouvelables.

[29] En 1995, elle était sur l'équipe de négociation pour le renouvellement de la convention collective. Elle était également présidente en 1992 lors de la négociation de la convention collective précédente. Elle a participé à divers degrés à la négociation des toutes les conventions collectives de 1988 à 2013 et les a parfois signées à titre de présidente, à l'exception de la convention collective de 2006 à 2008 (GD12) à laquelle elle n'a aucunement participé et celle de 2008-2011 (GD13) à laquelle elle n'a participé que partiellement.

[30] Lors de l'audience, elle a déposé les conventions collectives en place depuis 1988, et l'entente de modification de la convention collective de 2011 à 2014 (GD15) qui fut signée le 23 avril 2013, qui était un amendement aux heures de travail.

[31] Dans la convention collective 1989-1992, l'horaire de travail officiel était de 42,5 heures par semaine, mais dans les faits, les employés travaillaient souvent de 70 à 80 heures par semaine. La première heure de temps supplémentaire était payée en temps double, alors que les autres heures étaient payées en temps et demi. Le travail est saisonnier, soit d'avril à octobre, parfois jusqu'en novembre.

[32] En 1996, à la demande de la compagnie, les horaires ont changé. Lors du début des négociations en 1995, la compagnie a annoncée qu'elle procéderait à d'importants changements qui impliquaient la mécanisation des opérations, ce qui réduisait de façon importante le nombre d'employés. Voulant conserver cette main d'œuvre spécialisée, la compagnie exigeait un horaire dit « 7/7 », c'est-à-dire que les employés devaient travailler sept jours consécutifs du lundi au dimanche, puis étaient sans travail durant les sept jours suivants. On retrouve ces dispositions à l'article 7 de GD9. Lors de ces négociations, le représentant patronal était monsieur J. O.

[33] Ce genre d'horaire ne faisait pas du tout l'affaire de madame C. O., puisque ses journées de travail sur deux semaines étaient réduites à 7 alors qu'avant elle en travaillait 10, ses revenus s'en trouvant diminués. Elle ne recevait plus de temps supplémentaire alors qu'auparavant elle en recevait. L'employeur, par son directeur général d'alors J. Y. O. et son gérant de production A. O., insistaient pour que les employés acceptent cet horaire, leur disant s'être informés auprès de la Commission et que durant les semaines sans travail, les employés étaient éligibles aux prestations d'assurance emploi, et ils soutenaient que cette façon d'agir était légale. Au final, Mme C. O. et les plus anciens employés avaient moins de revenus mais plus de gens pouvaient travailler avec cet horaire.

[34] Ne croyant pas les affirmations de leur employeur, le Comité de négociation de la convention collective s'est référé au comité de soutien du syndicat constitué de M. Gaétan Paradis, conseiller syndical à la mobilisation du conseil central du Bas St-Laurent et M. André St-Pierre, officier du syndicat local. Ceux-ci en ont parlé à monsieur Paradis du bureau local de l'intimée, qui en a parlé avec madame Shirley Nesrallah du bureau de Montréal de l'intimée. Les employés voulaient savoir s'ils avaient le droit ou non de procéder ainsi. La réponse fut claire : oui, vous avez le droit de collecter des prestations d'assurance emploi la semaine où vous êtes sans travail, mais à la condition que vous demeuriez disponible à travailler. Une fois cette réponse obtenue, les employés ont été rassurés, et ils ont poursuivi le processus de négociation et signé la convention collective GD-9. Selon madame C. O., l'employeur avait procédé à ses propres vérifications et la responsabilité de faire ces démarches auprès de la Commission lui incombait puisqu'il avait initié cette façon de faire. Le syndicat n'a fait que vérifier les informations.

[35] Une fois ce système instauré en avril 1996, les employés étant toujours dans la même période de chômage qui a commencée en novembre 1995, ils continuaient de recevoir leurs cartes, déclaraient ne pas travailler une semaine sur deux et ils ont ainsi reçu leurs prestations sans qu'aucune question ne leur soit posée par un agent de chômage. Il arrivait très souvent que les employés étaient rappelés au travail durant la semaine « chômée », surtout durant la haute saison. Dans ce cas, ils ne recevaient pas de prestations s'ils travaillaient un certains nombres d'heures ou de journées, selon l'année. Les rappels effectués se faisaient selon les listes d'ancienneté. Les employés ne recevaient pas de nouveaux relevés d'emplois chaque semaine chômée, mais plutôt une seule fois par année à la fin de la saison. En aucun temps, entre 1996 et 2013, les employés se sont vus refuser leurs prestations aux deux semaines selon l'horaire « alternatif » mis en place à la demande de l'employeur.

[36] Par la suite, à deux reprises, parce que le syndicat se faisait poser des questions par ses membres qui entendaient des rumeurs et parce qu'on leur demandait de vérifier, l'exécutif syndical a demandé à l'employeur des rencontres conjointes à l'usine avec quelqu'un de l'assurance-emploi pour vérifier si le système mis en place par l'employeur, soit l'horaire dit « 7/7 », était conforme à la loi. Elle a elle-même communiqué avec la Commission par l'entremise du bureau local à Matane. Il y a alors eu des rencontres conjointes entre la Commission, le syndicat et l'employeur dans la salle de conférence de l'employeur FMEQ. La Commission a alors envoyé un de ses agents du bureau de Matane à ces rencontres. Ces rencontres ont eu lieu de façon proactive puisqu'aucun problème n'avait été soulevé par la Commission. Le syndicat voulait une confirmation écrite de la part de la Commission, mais la réponse verbale du bureau de Matane de la Commission fut que « à FMEQ, vous êtes sur un horaire 7/7, on le sait ». Il en était de même lorsque des employés de FMEQ se présentaient pour leurs demandes de prestations à d'autres agents locaux de la Commission.

[37] La première rencontre a eu lieu en 1999. Étaient présents Monsieur Richard Labrie, représentant la Commission, Monsieur A. O., gérant de production pour l'employeur, et pour le syndicat, Monsieur G. U. D., Mesdames M. D. et C. O. La rencontre a duré environ une heure. Suite à cette rencontre, le syndicat a convoqué les employés en assemblée générale afin de les informer, et les employés ont été rassurés de cette clarification. On a traité de cette question environ 15 minutes sur les deux heures qu'a duré l'assemblée. Environ 60 à 70 membres du syndicat sur les 90 ont assisté à cette assemblée, ce qui représente un fort pourcentage, puisque l'assemblée a été tenue durant un quart de travail où plusieurs employés travaillaient.

[38] La seconde rencontre a eu lieu en 2001, à l'initiative encore du syndicat, dans la salle de conférence de FMEQ et à laquelle étaient présents madame M. D., monsieur G. U. D. et madame C. O. pour le syndicat, monsieur A. O. pour l'employeur et monsieur Maurice Bellavance pour la Commission. Il y a été posé des questions similaires à celles posées en 1999. La réponse de monsieur Bellavance fut encore que si les employés étaient disponibles et prêts à travailler, alors leur horaire « 7/7 » était correct. Encore une fois, un rapport de cette rencontre fut relaté lors d'une assemblée générale des membres du syndicat. Il y avait encore plus de 50 membres sur 90, étant donné qu'une des équipes était au travail.

[39] Ainsi, les conventions collectives se sont succédées, soit celles produites sous GD11, GD12 et GD13. Lors de la négociation de GD13, soit la convention collective de 2008 à 2011, on a instauré une liste de disponibilité pour le rappel des membres lors des semaines chômées si l'intensité du travail augmentait ou pour des remplacements de maladies. Les employés devaient s'inscrire chaque semaine. Mais même si ce système existait formellement, les employés qui ne se trouvaient pas sur la liste de disponibilité de l'entreprise étaient rappelés de toute façon. En réponse à une question du Tribunal à l'effet que si à sa connaissance il y avait des employés qui refusaient de se présenter au travail suite à un rappel ou si des griefs avaient été déposés ou des mesures disciplinaires imposées, madame C. O. et a répondu que non, il n'y en avait pas eu à sa connaissance, soit aucun grief ou mesures disciplinaires envers les employés. Il a pu arriver qu'à certaines reprises des employés étaient difficiles à rejoindre. À cette époque les ressources humaines étaient dirigées par madame M. P., puis ce fut madame F. B. à partir de 2010. Il a d'ailleurs été rappelé aux membres à chaque assemblée générale ou spéciale du syndicat, soit une ou deux fois par année, qu'ils devaient être disponibles au travail lors des semaines chômées.

[40] À partir de début des années 2000, l'assurance-emploi a changé son système pour passer des semaines travaillées aux heures travaillées afin de déterminer les seuils de qualification. Pour des employés comme ceux de FMEQ, l'incitatif de la liste de rappel ou de disponibilité pour travailler le plus d'heures possibles est important puisqu'ils peuvent se qualifier plus facilement.

[41] En 2008, monsieur J. C., alors directeur général de l'employeur, aurait demandé au syndicat de modifier l'horaire de travail. Il voulait d'abord un horaire « 4/7 », ensuite « 14/7 », soit 14 jours de travail continus, et ensuite une semaine de congé, mais sans prestations. Le syndicat n'était pas d'accord car en bout de ligne, les employés faisaient moins d'argent. On retrouve cette allégation aux pages GD3-31 et GD-3-32 du dossier GE-13-656. Mme C. O. ne se souvient pas que l'employeur ait voulu changer l'horaire 7/7 à cette époque. Quant à l'allégation de monsieur J. C. à l'effet que le syndicat aurait refusé un horaire « 5/2 », soit une semaine de travail civique conventionnelle, madame C. O. est catégorique : ça n'a jamais été offert ou demandé par l'employeur. Lors des négociations ayant menés à la signature de la convention collective en 2009, il n'y a eu aucune exigence à cet effet. Si un horaire 5/2 avait été offert, comme présidente du syndicat, Mme C. O. aurait recommandé aux membres d'accepter parce que ce n'est pas vrai que l'horaire 7/7 donnait un meilleur taux de prestations d'assurance-emploi. Et les employés auraient accepté. Quant à l'allégation que les horaires de travail auraient été fait par les syndicats, ceci est faux. L'employeur a toujours composé les horaires de travail. Monsieur J. C. aurait dit aux enquêteurs (Page GD3-31) que le Syndicat aurait exigé un tel horaire de travail en 1979. Le témoin dit qu' faux de prétendre que le syndicat aurait exigé ça en 1979, puisque le syndicat n'existe que depuis 1981. Lors du début du système « 7/7 » en avril 1996, monsieur J. C. n'était pas chez FMEQ. Il y est arrivé en 1998 comme procureur des Pêcheurs avec Clearwater. Il n'y a jamais eu une demande du syndicat pour avoir cet horaire « 7/7 », c'est lors de la négociation de la convention collective GD9 qu'il est apparu et suite à la demande de l'employeur en 1995 en raison de la mécanisation.

[42] C'est suite à la modification de la convention collective de 2011 à 2014 (pièce GD14) le 23 avril 2013 par le document GD-15, qu'il est mis fin à l'horaire 7/7. Mme C. O. répète qu'avant cette modification, l'employeur n'avait pas de demande sur les horaires de travail. Le nombre d'employés est passé de 118 à 64, soit 54 employés de moins. Le nouvel horaire était de 7 jours en continu, avec la possibilité de demander des jours de vacances, et ce, une semaine à l'avance. La compagnie demandait initialement un horaire « 14/7 ». Cette proposition fut rejetée lors de l'assemblée générale dans une proportion d'environ 98.6%. Ce système est assez difficile à gérer, car tous les employés veulent prendre congé lors des fins de semaines. Parfois les employés travaillent 15 jours en continu. Ces jours de congé sont d'abord pris en semaines de vacances, puis sans solde. Par contre avec le nouveau système, les employés restants font plus d'argent.

[43] À titre de présidente du syndicat, madame C. O. siège au Comité de relations de travail (« CRT »), qui est un comité conjoint du syndicat et de l'employeur. Les rencontres de ce comité se tiennent à chaque mois ou à chaque deux mois, parfois même aux deux semaines, et parfois également durant la saison morte. C'est entre autre à ce comité que la modification GD15 à la convention collective GD14 a été discutée. Lors de la négociation de la convention collective de 2011 à 2014 (GD14), Mme C. O. faisait partie du comité de négociation avec G. U. D. et M. D., de même que Jonathan Racine, conseiller syndical. Lors des négociations qui ont conduit à l'amendement (GD15) à la convention collective GD14, le comité de négociation comprenait G. U. D., S. J. et elle-même, de même que monsieur André Cloutier de la CSN.

[44] En raison de l'enquête initiée par la Commission à l'automne 2012, les employés se sont fait demander de répondre à un questionnaire. En janvier 2013, Mme C. O. a reçu un appel de monsieur Martial Lévesque, enquêteur de la Commission, l'informant que l'utilisation par les employés de FMEQ de l'horaire de travail 7/7 avec leurs demandes de prestations, était interdit et que l'employeur en était averti. Puis les décisions de la Commission ont été rendues et les avis de trop payés ont été envoyés aux employés.

[45] Suite aux avis de trop payé envoyés aux employés, il y a eu trois assemblées générales. Une première a eu lieu suite à la réception des avis fin novembre 2012. Une seconde a eu lieu, à l'hiver/printemps 2013, suite aux questionnaires envoyés par la Commission, et une troisième, fin mars 2013, qui a porté sur les mesures à prendre. Plus de 100 des 130 employés se sont présentés à ces rencontres, puisque l'on était en saison morte. La colère régnait lors des assemblées, les membres soulignant leur incapacité de payer, l'état dépressif provoqué et le sentiment de ne pas être responsables de cette situation, puisque les employés s'étaient toujours fait dire par la Commission et leur employeur que tout était en règle.

[46] Les trop-payés consistaient en des sommes importantes. Dans son cas à elle, on parle de 10 000$ à 12 000$. Dans quelques cas les sommes étaient beaucoup moins élevées. Parmi les employés, il y a au moins trois couples qui travaillent à l'usine FMEQ, ce qui peut représenter pour chaque couple visé une somme de plus de 25 000$. Ils ont eu l'aide de la CSN, sinon il aurait été très difficile de se payer des avocats.

[47] Le témoin s'est fait montrer par son procureur les pièces GD16 et GD17 qui représentent les décisions du conseil arbitral qui a entendu en septembre 2009 un autre groupe d'employés de FMEQ. Elle a alors affirmé que les faits décrits dans les décisions étaient similaires.

[48] En réponse à une question du Tribunal quant aux allégations de la Commission contenue dans leur argumentaire (GD4) à l'effet que l'enquête de la Commission aurait été conduite suite à une « plainte » de l'employeur, le témoin a répondu que la demande de madame F. B., alors directrice des ressources humaines de FMEQ, produit sous la cote GD6 parlait d'elle-même. Ce n'est que lors de ces audiences du conseil arbitral en septembre 2009 qu'elle a été mise au courant de l'existence de ce document.

[49] Le témoin a déclaré que sa rencontre avec monsieur Martial Lévesque, enquêteur de la Commission, a eu lieu le 23 novembre 2012. Le Tribunal a alors demandé au témoin si, suite aux envois d'avis de trop payés, l'employeur avait modifié les relevés d'emplois. La réponse fut non. Le Tribunal a également demandé au témoin si, à titre de présidente du syndicat, elle avait eu connaissance que l'employeur aurait rempli des relevés d'emplois avec la mention « refus de travailler ». La réponse fut non.

[50] En réponse à une question du Tribunal, Mme C. O. a indiqué qu'avec le nouvel horaire plus exigeant physiquement, il y a eu une augmentation des accidents de travail. Le Tribunal voulait également savoir pourquoi certains employés se faisaient exiger des trop-payés parfois pour l'année 2010, parfois l'année 2011 et parfois l'année 2012. Le témoin a répondu que dans certains cas on demandait pour une année, parfois deux années ou parfois trois années, mais elle ne savait pas pourquoi.

Témoignage de Monsieur Richard Labrie

[51] Le témoin est maintenant retraité. De 1971 à 2004, il a travaillé pour la Commission. Il a occupé divers postes durant sa carrière. À partir de l'année 1988-1989, il a travaillé à Matane à titre de conseiller au service des prestations, d'agent de liaison avec le public (un poste de relations publiques) et à titre de préposé aux relevés. Lorsqu'il était agent de liaison, il se rendait parfois visiter des entreprises pour parler aux employeurs ou aux employés, ou leur syndicat, le cas échéant. Il occupait cette fonction en 1995.

[52] En 1995, il a reçu une demande du syndicat des employés chez FMEQ d'aller les rencontrer afin de déterminer si l'horaire « 7/7 » que l'employeur proposait était correct. Ils voulaient faire valider cette information. Il a rencontré le syndicat avec l'employeur lors d'une visite à FMEQ. Lors de cette rencontre, madame C. O. y était, en plus de une ou deux autres personnes pour le syndicat et une ou deux personnes pour l'employeur. Il a répondu qu'en autant que les contraintes de la Loi étaient respectées, à savoir que les employés étaient disponibles et en état de chômage, l'horaire de travail en place était correct. Il a toutefois pris soin de mentionner « qu'ils ne géraient pas la convention collective ». Si un employé refusait de travailler, alors l'employé serait considéré comme non-disponible. Ils ont fait valider ça par le bureau régional à Montréal. Madame Shirley Nesrallah était en charge du dossier.

[53] En réponse à une question du Tribunal si un tel arrangement n'était pas un cas de partage de travail. La réponse fut non, ce n'était nullement le cas. En réponse à une question du procureur des appelants à savoir si cette façon de procéder était légale, la réponse du témoin fut que oui, en autant que les employés étaient en état de chômage et disponibles. Le témoin s'est ensuite fait montrer la pièce GD5, soit la correspondance de 1995 entre monsieur André Bellavance du bureau de la Commission de Matane et le bureau de la Commission de Montréal, et il a répondu qu'il était au courant de cette correspondance et en avait discuté avec M. Bellavance. La réponse de madame Ricci à la demande de monsieur Bellavance était à l'effet que selon le paragraphe 14(a) de la Loi (maintenant l'alinéa 18(1)a)), l'horaire de travail chez FMEQ respectait l'esprit de la Loi en autant que les employés étaient disponibles ou en état de travail. La question était axée sur la disponibilité et non sur une semaine de chômage.

[54] Le témoin a déclaré que oui, le bureau de la Commission à Matane était au courant de l'horaire « 7/7 » qui existait chez FMEQ. Le bureau de Matane était ouvert en 1995 et M. Labrie y est resté jusqu'en 1998, date de son transfert à Rimouski. En 1995 il était inspecteur et enquêteur. Le témoin a également spécifié que l'échange de correspondance produit sous la cote GD5 concernait bien FMEQ. Pour lui la question était réglée, il n'était pas nécessaire d'y revenir il ne s'est plus occupé du dossier FMEQ par la suite.

Témoignage de Monsieur André Cloutier

[55] Le témoin est conseiller syndical à la négociation pour la CSN. Il a débuté à la CSN en 1992 et il a occupé diverses fonctions. Il est attitré au syndicat de FMEQ depuis 2004. Il a négocié pour le syndicat des employés de FMEQ la convention collective de 2006. Quant à celle de 2008, il a travaillé à la préparation des négociations, puis il a été affecté à un autre emploi à Montréal pour revenir ensuite. C'est lui qui était négociateur au dossier lors de l'entente de modification de la convention collective 2011 à 2014, soit le document GD15 signé en 2013.

[56] Lors des négociations de 1996, les horaires « 7/7 » ont été inscrits à la demande de l'employeur. En 2006 donc, ils existaient déjà et l'employeur a demandé de modifier ces horaires. Des discussions ont eu lieu, mais on est resté au statu quo. Cette année-là, la compagnie FMEQ a demandé aux employés de changer l'horaire de travail pour un horaire « 4/3 » avec trois équipes. Quant à celle de 2008, selon sa connaissance du dossier, il n'y aurait pas eu de discussions quant aux horaires de travail, mais il n'a pas agi à titre de négociateur.

[57] Cependant, lors des négociations, on a gardé le « 7/7 », car sinon les employés risquait de perdre trop d'argent. Les deux questions primordiales dont le syndicat devait s'assurer lors des négociations étaient : 1- Que les employés aient assez de revenus pour vivre lorsqu'ils étaient en emploi et, 2- Qu'ils puissent avoir accumulé suffisamment d'heures de travail pour se qualifier à l'assurance-emploi à la fin de la saison.

[58] En 1992, il a négocié la convention collective de la compagnie Marinard à Rivière-aux-Renards. Cette compagnie avait à l'époque un horaire différent, soit un horaire « 4/3 », soit 4 jours de travail effectués par une équipe de jour et une équipe de soirée suivis de trois jours de congés effectués par une troisième équipe d'appoint. Cependant, à l'époque le propriétaire de Marinard possédait plusieurs autres commerces dans la région et il pouvait ainsi permettre à ses employés de compléter le nombre de semaines manquantes leur permettant de se qualifier à l'assurance-emploi. Ceci lui permettait de garder sa main d'œuvre qualifiée et ainsi éviter la perte de leur expertise. Selon le témoin, il existe deux autres usines de transformation de la crevette dans la région, soit une à Sainte-Anne-des-Monts et une autre à Chloridorme.

[59] Il a entendu dire que ce serait la même situation présentement Marinard, mais à part la négociation de 1992 et une courte période en 2004 où il a travaillé sur le dossier de cette compagnie sans négocier de convention collective, il n'a pas une connaissance directe de la situation chez Marinard. Selon lui, la situation des deux entreprises n'est pas comparable. Même si les procédés sont similaires, le contexte et les équipements sont différents. Marinard a une fréquence d'approvisionnement plus stable que FMEQ.

[60] En 2012, il est revenu dans le dossier FMEQ alors que la convention collective GD14 avaient été signée 10 jours auparavant. La pièce GD18 est produite et indique la position patronale lors du début des négociations de cette convention. Il porte à l'attention du Tribunal la mention de l'horaire de travail que l'on retrouve à la page 8. La demande de la compagnie était un statu quo sur l'horaire « 7/7 » et ils ne sont pas revenus avec une demande d'un horaire « 4/3 » ou d'un autre quelconque type d'horaire de travail. Il mentionne que la convention collective 2011-2014 (GD14) a été signée en 2012.

[61] Après la fin de la saison de production en 2012, les employés ont reçu un appel d'un monsieur Lévesque qui aurait signifié que l'horaire « 7/7 » n'était pas conforme à la Loi. En 2013, la Commission a émis des avis de trop-payés. Il a alors dit à Monsieur Lévesque qu'il « n'y avait pas eu de cachettes et que les 120 employés ont rempli leurs cartes de cette façon durant 17 années ». Dans ses avis de trop payés, la Commission est retournée en arrière deux ans, parfois trois. Il ne sait pas pourquoi ils sont retournés deux ans dans certains cas et trois ans dans d'autres cas. Monsieur Cloutier a alors contacté l'inspecteur Lévesque en janvier ou février 2013 dans le but de savoir à qui s'adresser afin de leur donner la bonne perspective de la situation et de leur donner les bonnes informations et de faire cesser le processus engendré par la Commission.

[62] En 2013, suite aux décisions de la Commission, l'employeur a été interpelé pour modifier le régime 7/7. Il y a eu des négociations quant à la modification des horaires de travail. Le syndicat a proposé un horaire « 5/2 », soit 5 jours de travail pour deux équipes et 2 jours de congé. Une troisième équipe aurait assuré les opérations pendant les deux jours de congé des deux premières équipes. L'employeur a refusé. L'employeur voulait éviter de revenir à la situation d'avant 1995 concernant le temps supplémentaire à payer, étant motivé par la réduction des coûts d'opération. La compagnie voulait un horaire « 14/7 », voire même « 21/7 », mais pour les employés ce n'était pas possible. Par conséquent, le nouvel horaire en est un de 7 jours en continu, et les employés demandent des jours de congés, payés au début, puis non-payés par la suite, le tout selon les demandes faites par les employés et leur ancienneté. La proposition d'un horaire « 14/7 » a été rejetée par plus de 90% des employés. Avec le nouvel horaire, environ 75% des employés ont conservé leur travail.

[63] Le témoin a lu le rapport d'enquête que l'on retrouve au dossier de l'entrevue avec monsieur J. C. de FMEQ. Il est en désaccord avec l'affirmation que l'horaire « 7/7 » était une exigence des employés. Si ces horaires ont existés, ce fut à la demande de l'employeur. Maintenant que les employés ont leur nouvel horaire, pendant environ 6 à 7 semaines de production les employés travaillent 7 jours sur 7. Le reste du temps, les employés travaillent maintenant de 4 à 5 jours et demi de travail par semaine chacun. La pression sur les employés est forte. La semaine moyenne de travail est de plus de 70 heures par semaine. Depuis l'instauration du nouveau système, les accidents de travail ont augmentés et le taux de productivité est à la baisse. Toutefois, l'abolition du régime 7/7 a amélioré le sort financier de ceux qui ont conservé leur emploi. La capacité de production de l'usine est passée de 30 000 livres/jour en 2004 à 90 000 livres/jours présentement.

[64] M. Cloutier a assisté aux assemblées générales des employés suite aux avis de trop-payés envoyés par la Commission. Une insécurité majeure et généralisée était ressentie. Selon lui, ces avis constituent un préjudice important pour les employés, soit près de 50 % de leur salaire dans certains cas. Jamais le syndicat ni les employés n'auraient accepté un horaire « 7/7 » en 1995 si celui-ci n'avait pas été « légal » et c'est pourquoi des validations d'informations auraient eu lieu auprès de, employée de la Commission. Selon les notes qu'il a vues au dossier, en 1995, les conseillers syndicaux au dossier étaient M. Claude Beaupré (maintenant décédé) et M. Gaétan Paradis.

Témoignage de Monsieur J. B.

[65] Le témoin est contremaître à la « sanitation » chez FMEQ. Il exerce cette fonction depuis 2011. Il a été embauché chez FMEQ en 2008 après avoir passé 20 ans dans les Forces armées canadiennes. Lorsqu'il a commencé en 2008, cet emploi alors syndiqué constituait son premier emploi civil. L'horaire de travail était « 7/7 ». Ne connaissant rien au monde du travail civil, il s'est alors rendu à son bureau de Service Canada local dans les jours qui ont suivi son embauche afin de s'assurer que l'horaire de travail était bien conforme à la loi. Une préposée l'accueillit. On lui a répondu « oui, chez FMEQ, vous avez un horaire « 7/7 », on est au courant, c'est ok ».

[66] Le montant mentionné dans l'avis de trop-payé qu'il a reçu est de 10 998$. Comme son revenu est de 35 000$, le fait de devoir rembourser cette somme lui serait préjudiciable. Parce qu'il n'est pas dans le même département, sa saison de travail est légèrement plus longue que celles des employés réguliers, soit environ deux semaines plus tôt avant la saison de production et s'étend environ deux semaines après la fin de la saison de production.

Témoignage de Madame M. T.

[67] Le témoin est contremaître à la « slush » chez FMEQ. Elle occupe cette fonction depuis l'année 2011. Auparavant, elle a occupé divers postes chez FMEQ où elle travaille depuis 2007. Elle avait un horaire « 7/7 » chez FMEQ à condition d'être disponible durant les sept jours de congé comme il lui avait été dit par madame M. P. de FMEQ. Les semaines où elle ne travaillait pas ou durant les périodes des sept jours de congé, elle a souvent travaillé suite à des rappels et elle a toujours accepté de se présenter au travail.

[68] Elle a assisté à l'audience devant le Conseil arbitral en septembre 2009 pour un de ses dossiers. Elle a reçu un avis de trop-payé au montant de 4 200$ pour l'année 2012 seulement. Elle a peu travaillé en 2010 et en 2011 en raison d'un congé de maternité. Son salaire est d'environ 28 000$ à 30 000$ par année. Payer une somme de 4 200$ serait difficile, surtout avec de jeunes enfants. Elle n'a pas reçu de pénalité.

Témoignage de Madame G. D.

[69] Le témoin travaille chez FMEQ depuis 1975. Depuis 2010, elle est classeure. Elle n'a jamais fait partie de l'exécutif syndical. En 1996, il y a eu une modification aux horaires de travail et un horaire « 7/7 » a été instauré. Elle fut mise au courant de ce nouvel horaire lors d'une assemblée syndicale tenue en 1995. Jamais l'exécutif du syndicat a mentionné que ce nouvel horaire faisait partie des revendications syndicales lors de la négociation des conventions collectives. Ce serait plutôt une demande venue du côté patronal.

[70] Il lui est arrivé de s'être rendue au bureau de la Commission à Matane afin d'y déposer ses demande de prestation d'assurance-emploi. Lors de ces visites, les employés de la Commission étaient au courant de l'horaire « 7/7 » qui existait chez FMEQ.

[71] Suite à la fin de la saison de production en 2012, elle a reçu un questionnaire de la Commission, et par la suite en 2013, elle a reçu un avis de trop-payé de 10 495$. Son salaire annuel est de 26 103$, avec le nouvel horaire. Elle ne considère pas avoir à payer cette somme, et elle n'est pas capable de payer cette somme. Avant 2013, avec les horaires « 7/7 », son revenu d'emploi était environ de 14 100$. Donc les horaires « 7/7 » n'étaient pas avantageux pour elle.

Témoignage de Madame J. H.

[72] Le témoin travaille chez FMEQ depuis 1990, et a toujours occupé le poste de contrôleure de la qualité. Elle est syndiquée avec les TUAC et est, depuis 2002, la déléguée syndicale du syndicat local des TUAC. Ils sont 8 employés de FMEQ membres de ce syndicat. En raison du petit nombre de syndiqués, ils n'ont pas d'exécutif syndical. Les horaires de travail sont selon le système « 7/7 », sauf ceux affectés au débarquement qui ont un horaire « 5/2 ». L'horaire « 7/7 » a commencé pour eux en 2005 suite à une demande de l'employeur. Elle a également déposé les pièces GD21 (convention collective 1999-2001 ; GD22 (convention collective 2002-2005) ; GD23 (convention collective 2005-2008) ; et GD24 (lettre d'entente modifiant la convention collective). La convention collective 2011-2014 se trouve déjà au dossier sous sa forme intégrale.

[73] Le témoin a également déposé le document GD25 qui représente la demande formelle de défalcation à la Commission en date du 23 octobre 2013. Aucune réponse n'a été reçue à ce jour. Aucun des dossiers des employés affiliés au TUAC n'a été entendu par le conseil arbitral du mois de septembre 2009.

[74] Lors des négociations, les employés se sont fait offrir des horaires « 14/7 » et même du « 21/7 ». Parfois il y a des horaires « 6/2 », mais ils sont difficiles à gérer. Lors du début en 2005 des horaires « 7/7 », les semaines étaient souvent de 70 à 80 heures de travail, mais parfois c'était aussi « peu » que 50 heures par semaine. Les employés étaient souvent rappelés au travail les journées de non-travail. Ils ont toujours été disponibles à travailler. L'employeur leur a dit à de nombreuses reprises qu'ils avaient droit à l'assurance-emploi les semaines où ils ne travaillaient pas en application des horaires « 7/7 ». En 2005, la directrice des ressources humaines était madame M. P. Puis ce fut madame F. B., et maintenant c'est de nouveau M. P. Présentement, suite à l'entente GD25, la semaine de travail fonctionne selon un horaire « 14/7 » et c'est « l'enfer », puisqu'ils perdent une semaine de salaire sur trois, même s'ils sont parfois rappelés durant les jours de congés. La compagnie continue d'exiger qu'ils soient disponibles les jours de congés, car ils sont souvent en déficit de personnel. Leur type d'emploi est très dépendant des arrivages.

[75] Suite à la fin de la saison de production en 2012, elle a reçu un questionnaire de la part de la Commission. En 2013, elle a reçu un avis de trop-payé. Il s'élève à environ 12 000$. Actuellement, son salaire annuel est d'environ 25 000$. C'est énorme, elle n'a pas les moyens de rembourser le trop-payé. Les employés avaient fait des démarches auprès de la Commission, et la réponse était toujours « oui, vous à FMEQ, vous êtes sur un horaire 7/7 ». Les employés TUAC sont en contact journalier avec les employés CSN. Ils étaient au courant des négociations menées par ceux-ci avec l'employeur, et qu'ils se sont fait dire que l'horaire « 7/7 » était légal. Elle en a elle-même parlé avec monsieur A. S. qui était employé et officier syndical CSN en 1996.

Arguments des parties

[76] Les appelants ont fait valoir que :

  1. Sur la question de l'état de chômage et de l'article 11 de la Loi, la preuve présentée par l'intimée est faible, mal documentée et incomplète. La règle de la meilleure preuve doit s'appliquer dans le cas présent. Les documents soumis par la Commission sont contredits par la preuve présentée par les appelants.
  2. La question des horaires de travail « 7/7 » doit son existence à une exigence de l'employeur en 1995 et n'a été inscrite dans la convention collective de 1995 (GD9) et les suivantes que suite à des démarches qui ont été prises auprès de l'intimée afin de valider cet horaire de travail particulier. Ces démarches ont eu lieu en 1995, 1999, 2001 et 2008. L'horaire « 7/7 » qui est venu remplacer un horaire « 5/2 » en 1995 ne faisait pas l'affaire des employés, qui perdaient au change et leurs revenus totaux diminuaient.
  3. M. Richard Labrie, ancien employé de l'intimée, est venu témoigner que cette validation a été transmise aux employés et à l'employeur en 1995. Par conséquent, l'intimée a effectivement acquiescé à cet horaire « 7/7 », puisqu'il a été indiqué comme tel par le témoin Cloutier lors de sa visite en 1995 : l'horaire « 7/7 » était correct, en autant que les employés étaient en état de chômage et qu'ils devaient être disponibles. La lettre de monsieur Bellavance (GD5) et la réponse de madame Ricci (GD5-8) en constituent un acquiescement.
  4. À l'exception des témoins Labrie et Cloutier, tous les témoins entendus ont été affectés par les décisions qui sont contestées devant le Tribunal, ou contestées auparavant en septembre 2013 lors des audiences devant le conseil arbitral. Dans chacun des cas, ils trouvent les montants déraisonnables et les appelants subissent un préjudice économique important parce qu'ils sont tributaires d'un revenu modeste, et que par conséquent le remboursement de ces sommes leur créerait de sérieux préjudices.
  5. Lors des négociations de 2011-2014 qui ont eu lieu en 2012, bien qu'il avait reçu une information de l'intimée en juin 2006 à l'effet que les horaires « 7/7 » ne respectaient pas la Loi, l'employeur n'a non seulement pas demandé de modifier les horaires de travail (GD18), mais a signé tel quel sur ce point la convention collective 2011-2014 (GD14) en 2012. En 2008, la question de l'horaire de travail avait été soulevée, le témoin Cloutier est venu affirmer que deux questions étaient importantes : 1) Est-ce que les employés peuvent assurer leur subsistance avec un tel horaire de travail, et 2), s'ils sont capables de se qualifier pour l'assurance-emploi une fois la saison de production terminée. Comme l'analyse fut négative dans les deux cas, l'horaire de travail ne fut pas modifié en 2008. N'eût été de la validation et de l'approbation de l'horaire par la Commission, aucun employé n'aurait accepté cet horaire.
  6. Dans ses représentations, l'intimée signifie que les employés n'étaient pas disponibles. Ceci est faux, car il n'existe aucune preuve crédible au dossier à cet effet. La seule qui existe serait une preuve par ouï-dire. Aucune liste de rappel n'a été déposée par quelque partie que ce soit. L'employeur a décidé de ne pas se présenter aux audiences, tout comme l'intimée, et la preuve déposée par les appelants à cet effet est non contredite.
  7. La déclaration de madame F. B. (GD3-23 à GD3-30) et le rapport d'entrevue de monsieur J. C. (GD3-31), tous deux représentants des employeurs, sont à rejeter. Dans le cas de monsieur J. C., il ne s'agit que d'un rapport d'entrevue. Les faits qui y sont mentionnés sont soit faux (tel que le date du début du syndicat et de l'horaire « 7/7 »), soit mensongers, alors que l'on essaie de dépeindre les employés comme des fraudeurs qui cherchent à tout prix à exploiter le système. En fait, ils ont induit la Commission en erreur. On affirme que les employés ont refusé les modifications aux horaires de travail en 2008, mais il n'existe aucune preuve à cet effet.
  8. L'argumentaire de l'intimée (GD4) contient une série d'éléments factuels qui ne se retrouvent nulle part dans la preuve. Le Tribunal doit donc faire preuve de discernement. L'intimée connaissait la situation lorsqu'elle s'est fait poser des questions par l'employeur en 2011, mais n'a rien fait avant la fin de 2012 et n'a avisé les employés qu'en 2013. Pourtant, l'argumentaire ne mentionne rien là-dessus. L'enquête débute après la connaissance qu'a eue l'intimée de la situation, 18 mois plus tard, et hormis le questionnaire envoyé aux employés à l'automne 2012, ce n'est que le 9 janvier 2013 que l'on informe le témoin C. O. par téléphone de « l'illégalité » de l'horaire « 7/7 ». On a laissé « tourner le compteur » de façon indue. L'intimée, après avoir acquiescée à l'horaire « 7/7 » en 1995, a laissé la situation perdurer au vue et au sus de tous durant 17 ans. Selon les divers témoins, le bureau local de l'intimée rassurait les employés que l'horaire « 7/7 » était légal.
  9. Les appelants demandent au Tribunal de se prononcer en faveur d'une défalcation en vertu de l'article 56 du Règlement. En particulier sur sous-alinéa 56(1)f)(ii) alors qu'il est question d'un préjudice abusif envers les débiteurs. Et ce, parce que la Commission de même que l'employeur connaissaient l'illégalité de la situation et que les employés ont été tenus dans l'ignorance.
  10. Le fondement juridique qui octroie au Tribunal ce pouvoir se retrouve dans les commentaires du juge Stratas dans l'arrêt Steel c. le Procureur général du Canada, 2011 CAF 153. La Commission s'est prononcée par la négative quant à la demande de défalcation formulée par les représentants des employés membres du syndicat affiliés à la CSN. Elle n'a toujours pas répondu à la demande de défalcation formulée par les représentants des employés membres du syndicat affiliés au TUAC qui fut envoyée en octobre. Quant à la demande formulée pour les employés non syndiqués, elle a été déposée après l'audience de la présente cause, et elle demeure également sans réponse.
  11. Dans l'arrêt Steel, supra, le juge Stratas, aux paragraphes 74 à 78, est d'avis que lorsque la Loi fut modifiée en 1996, ce pouvoir a été conféré aux conseils arbitraux, et par extension au Tribunal. Dans l'arrêt Zora Gill, 2010 CAF 112, la Cour a décidé qu'il importe d'éviter les interprétations qui entraînent des conséquences sévères ou inéquitables, sauf lorsque cela est clairement requis par le libellé, la structure et l'objet de la Loi. Dans le présent cas, en raison du préjudice abusif établi et faisant partie des critères de l'article 56 du Règlement, la Commission devait défalquer les dettes. En droit administratif, lorsqu'il y a exercice d'un pouvoir discrétionnaire, le verbe « peut » devient « doit » si les critères pour son exercice sont par ailleurs remplis. Dans l'affaire Campbell, 2002 CFPI 811, la Cour fédérale a déterminé qu'un Conseil arbitral (par extension le Tribunal) est mieux placé que la Commission pour tirer des conclusions de faits pour l'application par l'intimée de son pouvoir discrétionnaire.
  12. On retrouve également un autre fondement juridique au pouvoir du Tribunal sur la défalcation dans l'arrêt de la Cour suprême Abrahams c. Procureur général du Canada, [1983] 1 RCS 2, où le juge Wilson déclare qu'en raison du but général de la Loi qui est de procurer des prestations aux chômeurs, une interprétation libérale doit exister en faveur des employés lorsque le texte est ambigu.
  13. Il existe également un fondement juridique au pouvoir du Tribunal dans l'article 3 du Règlement sur le Tribunal, et plus précisément dans le libellé du sous l'alinéa 3(1) a) qui confère au Tribunal le pouvoir de conduire l'instance dans la manière la plus expéditive que ce soit, ce qui implique qu'un prestataire pourrait faire appel au Tribunal pour demander une révision d'une demande de défalcation, afin d'éviter au prestataire de devoir se rendre devant la Cour d'appel fédérale, qui est un processus plus long et plus coûteux. L'article 3 du Règlement sur le Tribunal confirme les intentions du législateur quant à la compétence du Tribunal sur le pouvoir de défalcation et reflète les conclusions de l'arrêt Steel.
  14. En raison des faits, de la preuve qui en est faite au Tribunal, des règles de droit applicables et de leur interprétation jurisprudentielle, les appelants demandent au Tribunal d'accueillir l'appel. C'est suite à une erreur de droit de la Commission que des montants de trop-payé ont été établis. La Commission ne pouvait pas établir ces trop-payés de façon rétroactive mais seulement pour le futur.

[77] La Commission intimée a soutenu que :

  1. les appelants n'étaient pas en chômage lors des périodes mentionnées dans chacun des dossiers constituant le présent appel de groupe parce qu'ils travaillaient plus d'heures qu'un employé à temps plein dans une période de 7 jours suivie d'une période de congé de 7 jours aux termes de leur contrat de travail.
  2. Pour cette raison, elle a imposé une inadmissibilité aux termes des articles 9 et 11(4) de la Loi.
  3. Le représentant des appelants fait des allégations « sans apporter de faits ».
  4. Elle a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire lorsqu'elle a pris la décision de refuser la défalcation du trop-payé.
  5. La décision de ne pas défalquer ne peut pas être portée en appel devant le Tribunal parce que celui-ci n'a pas le pouvoir pour trancher cette question. Seule la Cour d'appel fédérale possède cette autorité selon le paragraphe 47(1) de la Loi. Le Tribunal ne doit trancher que la question de la semaine de chômage et ne doit pas trancher sur la défalcation.
  6. En vertu du paragraphe 52(1) de la Loi, la Commission peut réexaminer toute demande de prestations dans les 36 mois qui suivent le moment où des prestations ont été payées et la Commission a respecté ce délai.
  7. Ce n'est qu'à l'automne 2012, lorsque contactée par l'employeur, que la Commission a été mise au courant que la convention collective prévoyait un horaire de travail 7/7.
  8. Elle n'a pu, ne peut et ne pourra jamais autoriser le versement de prestations qui va à l'encontre de la Loi. La Commission affirme, après avoir vérifié ses archives qu'il n'y a eu aucune entente et qu'il n'y a aucune preuve à cet effet. Si un agent de la Commission avait mal informé l'une ou l'autre des parties, tel mauvais renseignement ne permet pas à un prestataire d'outrepasser la Loi selon la jurisprudence.
  9. En vertu de l'article 43 de la Loi, un prestataire est tenu de rembourser les prestations auxquelles il n'avait pas droit.
  10. En regard du paragraphe 31(1) du Règlement, la Commission a établi qu'une semaine entière de travail, pour une personne qui travaille une semaine normale à temps plein dans une usine de transformation de crevettes, est de 42.5 heures en se basant sur l'entreprise Pêcheries Marinard située à quelques kilomètres (GD4-10).
  11. Il y a deux questions à se poser pour vérifier si un prestataire, ayant un horaire de travail 7/7 chez FMEQ, doit être considéré en chômage :
    1. Est-ce que le prestataire travaille habituellement plus d'heures au cours d'une semaine que des personnes employées à temps plein dans une semaine normale ?
    2. Est-ce que le contrat de travail prévoit que le prestataire doive suivre un horaire de travail qui lui donne droit à un congé après sa période de travail ?
  12. En réponse à la première question, le Tribunal doit répondre « oui », puisque selon la preuve au dossier, la semaine normale de travail est de 42,5 heures par semaine. Les employés de Pêcheries Marinard, située à quelques kilomètres de FMEQ et qui travaillent eux aussi dans la transformation de la crevette, ont une semaine régulière de travail de 42,5 heures. Donc selon le paragraphe 31(1) du Règlement, la Commission a établi qu'une semaine entière de travail pour une usine de transformation de crevettes est de 42,5 heures par semaine. Les employés de FMEQ travaillent donc en moyenne 60 à 75 heures, ce qui représente une semaine de travail supérieure à celle de Marinard qui est de 42,5 heures par semaine.
  13. En réponse à la deuxième question, la réponse est également oui. Les conventions collectives de 2008 à 2011 et de 2011 à 2014 dictent l'horaire de travail des employés chez FMEQ et prévoient des périodes de travail de 7 jours suivies de périodes de congé de 7 jours congés. Ceci est corroboré par le président de l'entreprise, la directrice des ressources humaines et la présidente du syndicat. De plus, chez FMEQ, sur une période de 14 jours, les employés reçoivent davantage de revenus que chez Marinard.
  14. La Cour d'appel fédérale a confirmé le principe selon lequel les prestataires qui ont un horaire prévoyant des périodes de travail et de congé sont réputés être en emploi pendant les périodes de congé qui s'inscrivent dans cet horaire reconnu.
  15. Les employés de FMEQ ne doivent pas être considérés comme licenciés ou en chômage alors que la saison de transformation bat son plein.

Analyse

[78] Les questions en litiges sont claires, mais les faits le sont moins. Il est important de souligner qu'en l'absence des certaines des parties, le Tribunal ne peut se fier qu'à la preuve documentaire produite aux dossiers par ces parties quant à leurs prétentions, et le Tribunal examinera la force probante de cette preuve documentaire soumise.

[79] Il existe deux volets importants à étudier ici. Le premier est l'assise légale de la décision de la Commission concernant l'état de chômage ou non des appelants conformément aux dispositions législatives mentionnées ci-dessus. Advenant que le Tribunal conclut que les appelants ne sont pas en état de chômage pour les périodes en question pour les appelants respectifs, il y aura lieu pour le Tribunal de se pencher sur le second volet, à savoir si le Tribunal a le pouvoir de se prononcer sur une défalcation, et si oui, s'il doit défalquer les montants trop payés aux appelants.

Crédibilité des témoins

[80] Avant d'examiner les questions en litige, il est important de noter que le Tribunal a entendu plusieurs témoins. Tous les témoins employés sont jugés crédibles aux yeux du Tribunal. Ils étaient calmes et posés, ont répondu sans détours aux questions, tant celles de leur procureur que celles du Tribunal. Il n'y avait pas d'hésitations ou de contradictions malgré l'exclusion avant témoignage demandée. Certains témoins ont eu des témoignages plus brefs. Celui du témoin C. O. fut particulièrement long, en raison du fait qu'à titre de présidente du syndicat durant de nombreuses années, elle a dû présenter une genèse des événements. Elle était de plus présente durant les rencontres avec les représentants de l'intimée, a participé et a signé plusieurs des conventions collectives et a discuté avec les enquêteurs de l'intimée. Sans diminuer la crédibilité des autres témoins, le Tribunal tient à souligner à quel point son témoignage fut empreint de sincérité, exactitude et précision. Quant au témoin Cloutier, à titre de représentant syndical pour sa centrale (CSN), il était plus détaché des événements, surtout qu'il a été absent du dossier durant de nombreuses années. Mais encore une fois dans son cas, ses réponses furent directes et sans ambigüité. Dans le cas du témoin Labrie, le Tribunal a relevé une contradiction par rapport au témoin C. O., et ceci concernait qui du syndicat ou de l'entreprise avait effectué les démarches auprès de l'intimée. Il se pourrait, près de 17 ans plus tard que ce soit le témoin C. O. qui se soit trompée, mais de toute façon ce point a peu d'importance : une démarche a été effectuée et l'intimée a envoyé un représentant fournir une réponse aux appelants et à leur employeur.

Semaine de chômage

[81] Les appelants ont choisi de ne présenter que peu d'arguments sur cette question, préférant se concentrer sur le deuxième volet soit la défalcation des prestations trop-payées et le pouvoir du Tribunal sur ce point. Leur seul argument concernant l'état de chômage fut à l'effet que la preuve présentée par la Commission à l'appui de ses prétentions est faible et insuffisante.

[82] Selon l'argumentation de la Commission, tout repose sur la comparaison faite entre les deux entreprises étudiées, soit FMEQ et Pêcheries Marinard, et sur l'ensemble de leur preuve documentaire.

[83] Le Tribunal a toutefois les pouvoirs d'apporter proprio motu ses propres arguments pour appuyer ses propres conclusions.

[84] L'article 9 de la Loi nous indique que des prestations sont payables pour ceux et celles qui se qualifient quant à chaque semaine de chômage se trouvant durant la période de prestations.

[85] Le paragraphe 11 (1) de la Loi nous indique qu'une semaine de chômage est une semaine pendant laquelle le prestataire n'effectue pas une semaine entière de travail.

[86] Le paragraphe 31 (1) du Règlement définit qu'une semaine entière de travail (à l'exception des articles 29 et 30 de la Loi) correspond au nombre d'heures, de jours ou de quarts de travail qu'accomplissent normalement dans une semaine civile les personnes de même rang ou de la même classe ou faisant partie de la même équipe à l'usine, à l'atelier ou en tout autre local où il exerce ou exerçait un emploi.

[87] Le paragraphe 11 (4) de la Loi nous indique que l'assuré est présumé avoir travaillé une semaine entière de travail durant chaque semaine qui est comprise complètement ou partiellement dans cette période de congé si cette personne travaille une nombre d'heures plus important en terme d'heures, de jours ou de quarts de travail par des personnes qui travaillent habituellement et que l'employé a droit à une telle période de congé prévue à son contrat de travail afin de compenser pour ce travail.

L'application du paragraphe 11(4) de la Loi

[88] Afin que la personne assurée puisse se prévaloir de la présomption d'avoir travaillé une semaine entière de travail en vertu du paragraphe 11 (4) de la Loi, deux conditions doivent être rencontrées. Premièrement, elle doit travailler un plus grand nombre d'heures, de jours ou de quarts de travail que ne travaillent habituellement au cours d'une semaine que des personnes employées à plein temps. Deuxièmement, elle a droit, aux termes de son contrat de travail, à une période de congé en compensation. Afin que le paragraphe 11 (4) de la Loi puisse s'appliquer, il faut rencontrer les deux conditions.

[89] Il existe très peu de jurisprudence portant sur le paragraphe 11(4) de la Loi qui représente la pierre angulaire dans le cas présenté devant nous. Le Tribunal n'a relevé que quelques décisions : Procureur général du Canada c. Merrigan, 2004 CAF 253 ; Procureur général du Canada c. Duguay, A-75-95 ; et Kieley c. CAIC, A-708-92, citées par la Commission, de même que Procureur général du Canada c. Buchanan, 2003 CAF 51.

[90] Dans Merrigan, supra, l'horaire de travail établi d'une employée d'un bar ne faisait pas l'objet de litige, mais uniquement son interprétation. La Cour d'appel fédérale rappelle néanmoins que dans les cas où un décideur doit se pencher sur l'applicabilité (ou non) des dispositions du paragraphe 11(4) de la Loi, il est important d'étudier chaque situation comme un cas d'espèces. Selon le Juge Desjardins :

« Pour que le paragraphe 11(4) de la Loi soit applicable, il doit exister une preuve montrant que le prestataire a travaillé davantage que le nombre d'heures qui sont habituellement travaillées au cours d'une semaine par des personnes employées à temps plein. Il s'agit là essentiellement d'une question de fait (les soulignés sont de nous), et le juge-arbitre ne devait pas intervenir à moins que le conseil eût commis une erreur sujette à révision, c'est-à-dire à moins qu'il eût « fondé sa décision ou son ordonnance sur une conclusion erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance » (alinéa 115(2)c) de la Loi). »

[91] Dans Buchanan, supra, qui date d'avant Merrigan, supra, la Cour a refusé de renverser la décision du juge arbitre qui refusait l'application du paragraphe 11(4) de la Loi en raison d'une absence de preuve de la part de la Commission quant à ce en quoi constitue un horaire normal de travail. L'horaire de travail n'était pas contesté, mais le facteur comparatif n'a pas été mis en preuve, quoiqu'allégé. Il s'agissait d'une entreprise de transformation dans le domaine de l'agro-alimentaire, comme c'est le cas chez FMEQ. Il s'agissait en l'espèce de demandes de prestations suite à un arrêt de production, mais le point à retenir de cet arrêt n'est pas la nature ou même l'industrie en question, mais bien le fait que, sans le dire explicitement, la Cour semble indiquer que la Commission intimée a le fardeau de la preuve quant à ce que constituerait un horaire normal de travail. Selon le juge Sharlow :

« [10] Le paragraphe 11(4) ne s'applique que si les défendeurs travaillent habituellement plus d'heures, de jours ou de périodes de travail que ne travaillent habituellement au cours d'une semaine des personnes employées à plein temps.

[11] Le conseil arbitral a accepté les observations de l'avocat des défendeurs selon lesquelles dans la province de l'Île-du-Prince-Édouard, la semaine normale de travail est de 48 heures, en application du paragraphe 15(1) de l'Employment Standards Act, R.S. P.E.I. 1988, Cap. E-6.2. Bien que le procureur général ait fait valoir devant le conseil arbitral que la semaine normale de travail était de 40 heures, aucune preuve n'a été avancée pour étayer cette affirmation. Le conseil a conclu que les défendeurs ne travaillaient habituellement pas plus d'heures, de jours et de périodes de travail habituelles dans la semaine et il a conclu que le paragraphe 11(4) ne pouvait s'appliquer (les soulignés sont de nous).

[12] Le juge-arbitre a statué que le conseil disposait d'éléments de preuve convaincants pour étayer sa conclusion de fait quant au nombre d'heures dans une semaine normale de travail. Pour ce motif, il n'a pas pu conclure que le conseil avait commis une erreur de droit en concluant que le paragraphe 11(4) ne s'appliquait pas.

[13] Nous sommes d'accord avec le juge-arbitre. Nous constatons également que le conseil n'aurait pas pu conclure que les défendeurs travaillaient plus d'heures par semaine que des personnes employées à plein temps parce qu'il n'y avait aucune preuve que le nombre d'heures normales de travail d'une personne à plein temps est de 40 heures. » (les soulignés sont de nous).

[92] Par rapport à la première question sous le paragraphe 11(4) de la Loi et le nombre d'heures qui sont habituellement travaillées au cours d'une semaine par des personnes employées à temps plein, les affirmations de l'intimée à l'appui de ses prétentions sont fort problématiques.

[93] Elle « déclare » qu'une semaine normale de travail pour une entreprise comme FMEQ est de 42,5 heures. Elle arrive à cette conclusion en comparant FMEQ avec Marinard, qui n'est qu'à quelques kilomètres de FMEQ (les soulignés sont de nous) ou sur le fait que plus de 25 ans avant les périodes visées FMEQ avait un horaire de 42,5 heures par semaine. L'argumentation de l'intimée manque de clarté à cet effet, mais en toute connaissance de cause elle a décidé de ne pas se présenter à l'audience où elle aurait pu donner des éclaircissements. Or il est de connaissance judiciaire que Marinard, sise à Rivière-aux-Renards, est située à plus de 250 kilomètres de FMEQ qui est à Matane. Également, la preuve recueillie chez Marinard ne fait aucunement état que le travail accompli dans cette usine est similaire. La seule preuve au dossier est que les deux entreprises transforment de la crevette. Colette Inglis, dont le nom se retrouve sur le rapport d'enquête précité, est une « employée au département de la paye », mais sans préciser ses fonctions ou son rang hiérarchique. De plus, le témoin Cloutier, permanent syndical qui travaille dans la région dans le domaine de la transformation des produits de la mer, a affirmé devant le Tribunal qu'il existait au moins deux autres usines de transformation de crevettes, soit une à Ste-Anne-des-Monts, située à environ 85 kilomètres de FMEQ, et une seconde située à Chloridorme, située à environ 220 kilomètres de FMEQ. Pourquoi la Commission n'a pas décidé d'effectuer de comparaison avec ces usines ? Le Tribunal n'a pas pu obtenir de réponse à cette question. La preuve soumise par l'intimée à ce sujet n'est qu'un rapport d'enquête (page GD3-22) et ne comporte aucune déclaration signée. Même si devant un tribunal administratif la preuve est plus souple, le Tribunal ne peut donner qu'une faible force probante à cette preuve, qui par surcroit ne comprend que très peu d'éléments de preuve.

[94] Concernant l'année 2010, il n'existe aucune preuve au dossier à part certains horaires de travail ou les conventions collectives. La seule preuve dans les dossiers quant aux trois années visées et qui est un peu plus solide se retrouverait dans les déclarations assermentées de madame F. B., mais elle ne répond que concernant les années 2011 et 2012. Ce n'est que par assimilations à des faits présumées semblables et à des analogies que l'on étend cette interprétation à l'année 2010.

[95] Les déclarations de F. B., même si elles sont signées et déclarées solennellement, sont également peu fiables quant à l'horaire de travail chez Marinard, puisqu'elle n'y travaille pas. De plus, madame F. B., tout comme monsieur J. C. et les autres cadres de FMEQ, ne se sont pas présentés à l'audience et comme ni le Tribunal, ni les demandeurs ne peuvent émettre de subpoena, ils ne peuvent contraindre qui que ce soit à venir témoigner. Parmi les règles de justice naturelle, il est important de pouvoir entendre, mais également de pouvoir contre-interroger les témoins. Ici, ni les représentants des appelants, ni le Tribunal n'a été en mesure de le faire.

[96] Quant au reste de la preuve déposée par l'intimée, le Tribunal doit évaluer cette preuve à sa face même, sans pouvoir contre-interroger les personnes qui ont signé des déclarations ou parlé avec les enquêteurs de l'intimée. Dans le cas de monsieur J. C., ce qui semble être ses dires est en contradiction sur des points évidents comme le début des conventions collectives, quant à qui a demandé que ces horaires de travail « 7/7 » soient instaurés, les motifs du syndicat pour les conserver, de même que les raisons qui ont fait que ces horaires aient été maintenus de 1996 à 2013. Il en est de même avec madame F. B., même si elle a signé ses déclarations et les a affirmées solennellement. Il est donc impossible, dans ces conditions, pour le Tribunal de considérer leurs déclarations comme déterminantes et il doit se fier davantage à la preuve documentaire se trouvant au dossier. Contrairement à ce qu'affirme l'intimée dans son argumentation, les éléments au dossier provenant de monsieur J. C. et de madame F. B. ne viennent pas « corroborer » les prétentions de l'intimée quant à l'absence d'une situation d'état de chômage de la part des appelants. Quant à ce que l'on retrouve dans le dossier concernant le témoin C. O. lorsqu'elle a répondu strictement à des questions précises choisies par les enquêteurs de l'intimée, ce témoin est venu nuancer ses propos à l'audience, tel que relaté ci-dessus.

[97] Les règles de preuve doivent être les mêmes pour chaque partie. Selon les règles de justice naturelle, le Tribunal doit appliquer les mêmes contraintes et obligations à toutes les parties. De plus, la pratique adoptée par le Tribunal est d'assermenter chaque témoin entendu devant lui. Par conséquent, si des documents et déclarations présentés par l'intimée ne sont pas assortis d'une telle déclaration, et que l'intimée choisisse délibérément et en toute connaissance de cause de ne pas se présenter devant le Tribunal, alors le Tribunal doit prendre la preuve qui lui est présentée avec une force probante relative selon ces principes. des commentaires émis par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Buchanan, supra. Mais par contre, donner la même force probante à des témoignages rendus sous serment devant le Tribunal avec les possibilités de contre-interrogatoires disponibles à toutes les parties, à une preuve qui consiste par exemple en de simples rapports d'enquêteurs non signés par les témoins est problématique aux yeux du Tribunal. Il est également important de souligner que si dans certains cas l'intimée fait signer et déclarer solennellement certains témoins qu'elle rencontre et pas d'autres, il est alors clair que pour l'intimée elle-même elle accorde une force probante différente dans la preuve qu'elle présente.

[98] La première question à laquelle doit répondre le Tribunal est la suivante : est-ce que les employés ont travaillé une plus grand nombre d'heures, de jours ou de quarts de travail que ne travaillent habituellement au cours d'une semaine que des personnes employées à plein temps? Pour les raisons qui précèdent, le Tribunal n'est pas d'accord avec l'argument de l'intimée qui prétend que la réponse est « oui ». Le Tribunal, est d'avis que la réponse est « non ». Le Tribunal rappelle que selon son analyse de l'arrêt Buchanan, supra, il semble y avoir un renversement du fardeau de la preuve quant à la question de la détermination d'une semaine normale de travail. Par conséquent, l'intimée n'a pas réussi à prouver, selon le principe de la prépondérance de preuve, selon l'argumentation de l'intimée, que l'horaire normal de travail d'une personne employée à plein temps est de 42.5 heures par semaine et que l'horaire de travail chez FMEQ contrevient au paragraphe 11(4) de la Loi. Il est vrai que dans Buchanan le conseil arbitral avait déterminé ce en quoi consistait une semaine normale de travail, mais d'une part les faits tels que présentés ici par l'ensemble des parties ne permettent pas au Tribunal de le faire, et d'autre part, il n'incombe pas au Tribunal de rechercher ladite preuve, et encore moins de jouer le rôle d'un enquêteur.

[99] Examinons maintenant la seconde question au paragraphe 11(4) de la Loi : Les employés ont-il droit, aux termes de leur contrat de travail, à une période de congé en compensation. Puisque selon les critères établis ci-dessus il est nécessaire de répondre « oui » aux deux questions qui constituent le test que l'on retrouve au paragraphe 11(4) de la Loi et que le Tribunal a répondu « non » à la première question, il n'est pas nécessaire de statuer quant à la deuxième question.

[100] Cependant, afin que le paragraphe 11 (4) de la Loi puisse s'appliquer, il faut rencontrer les deux conditions énoncées dans le texte. Puisque la réponse est « non » quant au premier critère, le paragraphe 11(4) de la Loi n'est pas applicable dans la présente situation.

L'application du paragraphe 31(1) du Règlement

[101] Une fois que la question du paragraphe 11 (4) de la Loi est réglée, il faut se pencher sur le paragraphe 11(1) de la Loi et le paragraphe 31 (1) du Règlement, tel que soulevé par l'intimée.

[102] Le paragraphe 11(1) de la Loi prévoit qu'une semaine de chômage est une semaine pendant laquelle un prestataire n'effectue pas une semaine entière de travail. En vertu du paragraphe 31(1) du Règlement :

« la semaine entière de travail du prestataire, sauf celui visé aux articles 29 ou 30, correspond au nombre d'heures, de jours ou de quarts de travail qu'accomplissent normalement dans une semaine civile les personnes du même rang ou de la même classe ou faisant partie de la même équipe à l'usine, à l'atelier ou en tout autre local où il exerce ou exerçait un emploi ».

[103] Or ici, l'intimée n'apporte aucune preuve quant aux autres employés co-travailleurs de la même entreprise. Par conséquent, le paragraphe 31 (1) du Règlement ne trouve pas son application dans la présente cause en fonction des faits mis en preuve. Les conventions collectives prévoient que les employés travaillent environ 70 heures par semaine, alors que la semaine suivante, leur nombre d'heures est de 0. Par conséquent, ils n'ont pas travaillé une semaine entière de travail.

Conclusion quant à la semaine de chômage

[104] Par conséquent, le Tribunal en vient à la conclusion que les appelants étaient en état de chômage étant donné que l'intimée n'a pas réussi à prouver que le paragraphe 11(4) de la Loi s'applique ou que les appelants ont effectué une semaine entière de travail selon les paragraphes 11(1) de la Loi et 31(1) du Règlement.

La défalcation

[105] Puisque le Tribunal a déterminé que les employés étaient en état de chômage pour les périodes mentionnées dans les divers dossiers pour lesquels l'intimée a procédé à une révision, il ne devrait pas être nécessaire de se prononcer sur la question de la défalcation. Néanmoins, d'une part les appelants et en particulier leurs procureurs ont dépensé beaucoup d'énergie à présenter leur position, et d'autre part l'intimée en fait mention dans son argumentaire. Finalement la question est assez d'actualité en raison de certaines positions jurisprudentielles qui se développent sur la question de la défalcation, ce qui pousse le Tribunal à donner son opinion, même si celle-ci ne peut avoir qu'un statut d'obiter dictum dans la présente décision.

[106] Les appelants demandent que le Tribunal accueille leurs deux moyens d'appels quant à la question de défalcation. Le premier serait que le Tribunal en vienne à la conclusion qu'il a la compétence juridictionnelle et le pouvoir de réviser une décision de la Commission quant à la défalcation. Le second fait suite au premier moyen, à savoir qu'une fois que le Tribunal en vient à la conclusion qu'il a le pouvoir de réviser une décision de la Commission quant à la défalcation, d'effectivement réviser cette décision et de procéder à la défalcation.

[107] Il est demandé au Tribunal de s'approprier cette juridiction, et une fois qu'il aurait cette juridiction, de statuer sur la question de défalcation en concluant que la Commission n'aurait pas exercée sa discrétion d'une manière judicieuse, et donc d'ordonner la défalcation du trop-payé.

[108] L'argument des appelants quant à l'étendu de l'article 3 du Règlement sur le Tribunal se base sur une compréhension erronée de cet article. Lorsqu'il est fait mention du fait qu'une instance se déroule d'une manière « informelle et expéditive », il n'est nullement question de raccourcis procéduraux visant à éliminer des paliers d'appels, mais plutôt de veiller à ce que le déroulement des instances se tienne de façon efficace et rapide et de pouvoir traiter les dossiers dans les meilleurs délais possibles. Cet article ne comporte aucune disposition qui confèrerait de quelconques pouvoirs au Tribunal.

[109] Les appelants basent l'essentiel de leur argumentation à ce sujet sur la position concourante formulée par monsieur le Juge Stratas dans l'arrêt Steel, supra. Le juge Stratas traite de la question de la façon suivante :

« E. Le bien-fondé de la question de la compétence

[74] Je suis d'avis que la décision du législateur d'ajouter les mots « quiconque » (en anglais other person) au paragraphe 114(1) et à l'article 115 de la Loi actuelle avait pour but de permettre à des personnes comme M. Steel d'interjeter appel de décisions relatives à des demandes de défalcation devant le conseil arbitral et le juge-arbitre, et ensuite de saisir la Cour. Si non, il serait très difficile de déterminer ce que le législateur avait à l'esprit lorsqu'il a ajouté ces mots.

[75] À mon avis, il serait possible de vérifier la validité de cette interprétation en examinant l'intention générale du législateur qui sous-tend le régime administratif, comme le démontrent les dispositions législatives particulières qu'il a adoptées : Bell ExpressVu Limited Partnership c. Rex, 2002 CSC 42, [2002] 2 R.C.S. 559; Chrysler Canada Ltd. c. Canada (Tribunal de la concurrence), [1992] 2 R.C.S. 394. Ce régime administratif vise à détourner les questions relatives à l'assurance-emploi du système judiciaire pour les diriger vers les mécanismes d'arbitrage plus informels, plus spécialisés et plus efficaces mis en place par le législateur. L'interprétation que je donne du terme « quiconque » est compatible avec cet objectif et favorise sa réalisation.

[76] Une interprétation contraire signifierait que la défalcation d'une obligation de rembourser un versement excédentaire de prestations, question liée à l'admissibilité à des prestations d'assurance-emploi, serait détournée de ce régime informel, spécialisé et efficace et dirigée vers un système judiciaire plus lent, plus formel et plus exigeant sur le plan des ressources. Cette interprétation n'a aucun sens. Seul le plus clair des textes de loi, non présent en l'espèce, pourrait nous conduire à un tel résultat.

[77] Les énoncés des arrêts Buffone, Mosher et Villeneuve qui proposent une réponse différente à la question de la compétence en l'espèce sont au mieux considérés comme ne reflétant pas l'opinion réfléchie des tribunaux qui ont tranché ces affaires. En outre, dans la mesure où les arrêts Cornish-Hardy et Filiatrault empêchent des personnes comme M. Steel d'interjeter appel au conseil arbitral et au juge-arbitre en vertu du paragraphe 114(1) et de l'article 115 de la Loi, ils ne devraient plus être appliqués. Ces décisions reposent sur l'ancienne Loi qui, contrairement à la Loi actuelle, ne permet pas à une « autre personne » d'interjeter appel.

[78] Par conséquent, j'estime que M. Steel était une « autre personne » en vertu du paragraphe 114(1) et de l'article 115 et pouvait interjeter appel devant le conseil arbitral et le juge-arbitre et, qu'en vertu de l'article 118, il pouvait déposer une demande de contrôle judiciaire à la Cour. La Cour a donc compétence. »

[110] Les appelants mentionnent également des arguments supplémentaires quant à la juridiction, et présentent également des arguments visant à expliquer pourquoi le Tribunal, une fois qu'il aurait accueilli la demande quant à la juridiction, devrait se prononcer en faveur de la défalcation, et ce en vertu de l'article 56 du Règlement.

[111] Sur la question de la juridiction, l'intimée se base sur le paragraphe 47(1) de la Loi et la jurisprudence.

[112] Le Tribunal est d'accord avec la position du juge Stratas dans l'arrêt Steel, supra, à l'effet qu'il serait souhaitable que le Tribunal « compétent et spécialisé » puisse traiter de cette question, tout comme il a le pouvoir de maintenir ou d'annuler, de modifier, une pénalité imposée par l'intimée. De plus, le libellé du paragraphe 47 (1) de la Loi, n'est pas applicable à la présente situation car ledit texte fait référence au recouvrement d'une dette et à la juridiction compétente. Cette disposition ne traite aucunement de la question de la défalcation.

[113] Un tribunal administratif fédéral n'est pas une cour de droit commun. Les pouvoirs et compétences qu'il exerce sont, soit issus des lois promulguées par le Parlement du Canada, soit en fonction d'une compétence qu'une cour supérieure a pu lui reconnaître ou assigner. Dans le cas de la défalcation, la disposition existe depuis un certain temps (1996), et à l'exception de l'arrêt Steel, supra, et dans une certaine mesure dans l'arrêt Bernatchez c. Procureur général du Canada, 2013 CF 111, la jurisprudence est constante à cet effet. La position du juge Stratas, si intéressante soit-elle, ne constitue pas la ratio decidendi de l'arrêt Steel mais bien une position qui est propre et spécifique à sa décision concourante qui ne n'est pas partagée par ses collègues dans ledit jugement.

[114] Dans Berntachez, supra, le juge de Montigny résume bien la situation :

« [23] Avant d'examiner le bien-fondé de la demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur, il convient de se pencher sur le forum approprié pour entendre le présent litige. Lors de l'audition, j'ai soulevé d'office cette question et j'ai invité les parties à faire des représentations à ce sujet, à la lumière des motifs concourants rédigés par le juge Stratas, de la Cour d'appel fédérale, dans l'arrêt Steel c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 153, 418 NR 327. Dans cette affaire, le juge Stratas s'est dit d'avis que depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'assurance-emploi, LC 1996, c. 23 [LAE], « quiconque », et non plus simplement un « prestataire », comme c'était le cas auparavant, peut interjeter appel d'une décision de la Commission devant le conseil arbitral puis devant le juge-arbitre (voir le paragraphe 114(1) et l'article 115 de la LAE). Il s'ensuivrait que, même dans les cas de défalcation, une décision de la Commission peut être portée en appel devant le conseil arbitral, le juge-arbitre et puis la Cour d'appel fédérale, conformément à l'article 118 de la LAE.

[24] Le demandeur n'a pas fait de représentations additionnelles à ce sujet. En revanche, le Procureur général a soutenu que la Cour fédérale est toujours le forum approprié pour entendre une demande de contrôle judiciaire relative à une décision de défalcation de la Commission, dans la mesure où les motifs du juge Stratas ne liaient pas cette Cour.

[25] Il est vrai que les motifs du juge Stratas ne représentent qu'un obiter dictum auquel la majorité n'a pas souscrit. Il est également exact de soutenir que la défalcation ne fait pas partie de l'expertise du conseil arbitral puisque c'est en qualité de débiteur et non de prestataire qu'une personne fait une telle demande. Cela étant dit, le raisonnement du juge Stratas me paraît inattaquable. La jurisprudence antérieure reposait sur le fait que l'article 79 de la Loi sur l'assurance-chômage, LRC 1985, c. U-1, ne conférait un droit d'appel qu'au prestataire, ce qui excluait la personne qui demandait une remise de dette, puisqu'elle agissait alors non pas en tant que prestataire mais plutôt en tant que débitrice. Or, le Parlement a modifié cette disposition en 1996 en introduisant le paragraphe 114(1) de la LAE, lequel prévoit que « quiconque fait l'objet d'une décision de la Commission » peut interjeter appel de cette décision devant le conseil arbitral et le juge-arbitre. Je serais donc porté à me ranger à cet argument et à rejeter la demande de contrôle judiciaire du demandeur pour ce seul motif. Deux raisons m'incitent cependant à examiner sa demande au fond.

[26] Tout d'abord, le défendeur a raison de soutenir que les propos du juge Stratas dans l'arrêt Steel ne lient pas formellement cette Cour tant et aussi longtemps que la Cour d'appel n'aura pas fait sienne l'opinion exprimée par le juge Stratas et n'aura pas explicitement écarté les nombreuses décisions qu'elle a rendues (avant et après la modification législative adoptée en 1996) à l'effet qu'une décision de la Commission refusant la défalcation d'une somme ne peut faire l'objet d'un appel au conseil arbitral (les soulignés sont de nous) : voir notamment Cornish-Hardy c. Canada (Conseil arbitral) (1979), [1979] 2 CF 437 (disponible sur QL) (CA), conf par [1980] 1 RCS 1218 ; Canada (Procureur général) c. Idemudia, 236 NR 359 au para 1, 86 ACWS (3d) 253 ; Buffone c. Canada (ministre du Développement des Ressources humaines), [2001] ACF no 38 au para 3 (QL) ; Canada (Procureur général) c. Mosher, 2002 CAF 355 au para 2, 117 ACWS (3d) 650 ; Canada (Procureur général) c. Villeneuve, 2005 CAF 440 au para 16, 352 NR 60. »questions primordiales dont le syndicat devait s'assurer lors des négociations étaient

[115] Le juge de Montigny, tout comme le Tribunal, est d'avis qu'il serait souhaitable qu'une décision de refus de défalcation puisse être entendue et décidée par le Tribunal, mais jusqu'à ce que ce pouvoir soit clairement dévolu au Tribunal par la Cour d'appel fédérale ou le Parlement du Canada, le Tribunal n'a pas ce pouvoir.

[116] Par conséquent, le Tribunal est d'opinion que tant et aussi longtemps que ce pouvoir ne lui sera pas accordé par le Parlement du Canada ou par une cour qui lui est supérieure, il n'a pas la juridiction pour réviser une décision de la Commission quant à la défalcation. De plus, même si le Tribunal avait le pouvoir de réviser les décisions de la Commission, faut-il que l'on ait présenté au Tribunal des décisions à réviser en matière de défalcation. Des demandes de défalcations ont été présentées, mais pas de décisions de la Commission. Dans le cas des employés membres du Syndicat de la CSN, tant les demandeurs que l'intimée font allusion à la décision négative de l'intimée à cet effet. Mais dans le cas des employés membres des TUAC, de même que dans le cas des contremaîtres non-syndiqués, le Tribunal n'a pas de décisions devant lui. Puisque le Tribunal a conclu ne pas avoir le pouvoir de statuer sur cette question, ce point est largement académique, et c'est pourquoi il procède à une recommandation à cet effet.

Recommandation quant à la défalcation

[117] Le Tribunal recommande que soit réalisée une défalcation, et pour ce faire, il doit analyser la question en vertu de l'article 56 du Règlement et il le fait tel qu'il suit.

[118] Le libellé de l'article 56 du Règlement est très explicite et détaillé. Il peut y avoir défalcation si le versement excédentaire découle, selon l'alinéa 56(1)f)(ii) du Règlement, si, compte tenu des circonstances, « le remboursement … de cette somme … imposerait au débiteur un préjudice abusif ». Également, en vertu du paragraphe 56 (2) du Règlement, quant au fait que le versement excédentaire ne résulte pas d'une erreur du débiteur ou d'une déclaration fausse ou trompeuse, et si une erreur a été commise par la Commission.

[119] Tous les employés qui sont venus témoigner ont affirmé que le remboursement d'une telle somme leur constituerait un préjudice. Sans faire de savants calculs, il est clair que pour un individu, le fait de rembourser une somme d'environ 10 000$ avec un salaire annuel de 25 000$ à 30 000$ constitue un préjudice abusif. Ce ne sont pas la totalité des demandeurs qui doivent des sommes aussi importantes, puisque dans un cas, la somme ne représente que 281$, mais c'est l'exception. Dans la très grande majorité des cas, la somme est importante.

[120] Or ici, l'intimée ne reconnait nullement son erreur. Au contraire, elle affirme qu'il n'existe rien dans ses archives à cet effet. Le Tribunal a soulevé précédemment que ceci était faux comme en fait foi la pièce GD5, qui parle par elle-même. Les témoignages sont nombreux et non contredits, dont un provient d'un employé à la retraite de l'intimée. Il ne s'agirait pas d'une erreur d'un employé, mais d'une série d'erreurs de plusieurs employés. En d'autres termes, l'intimée avait donné son accord.

Autres commentaires

[121] Avant de terminer, le Tribunal veut adresser les derniers points soulevés par les parties, soit la question de l'inadmissibilité, les avis de révision modifiés, la notion d'erreur de la part des employés de la Commission et de la connaissance préalable de la situation particulière des employés de la Commission et de l'attitude de la Commission dans le présent dossier.

[122] Premièrement, l'intimée a indiqué que les appelants ne se sont pas tous déclarés admissibles sur les listes de rappel de l'employeur, et que ceci constitue un autre élément qui milite en faveur de l'inadmissibilité imposée aux appelants. Le Tribunal n'est pas d'accord avec cette affirmation de l'intimée. Nulle part dans la preuve de l'ensemble des dossiers, ces « listes de disponibilité » ont été produites. De plus, selon le témoin C. O., il n'y a eu aucun cas de mesures disciplinaires quant à des employés qui auraient refusé d'être en disponibilité sur ces listes. La question de l'admissibilité, qui relève e l'article 18, n'est pas devant le Tribunal.

[123] Deuxièmement, pour les dossiers présentement sous étude, la Commission émet dans certains cas des avis de révision modifiés par lesquels elle dit réduire le nombre de jours et des montants donnant lieux à des avis de trop-payés, mais ne change pas le montant de trop-payé sur les lettres de révision. Pourtant, à titre subsidiaire, si le Tribunal avait rejeté les arguments des appelants quant à l'état de chômage et quant à la défalcation, la décision subsidiaire aurait dû porter sur les montants de trop-payés, mais en l'absence d'informations à cet effet, le Tribunal n'aurait pas pu le faire.

[124] Troisièmement, l'intimée a plaidé que dans le cas d'une erreur de la part d'un de ses employés, la jurisprudence est à l'effet qu'ils ne sont pas en mesure de changer la Loi. L'intimée ne mentionne aucune cause de jurisprudence, mais le Tribunal a consulté l'arrêt Granger c. CEIC (A-684-85). Le Tribunal est d'accord que la situation pourrait s'appliquer ici, encore qu'en raison de l'échec de l'intimée sur la question de l'état de chômage la question est peu importante. Quoiqu'il en soit, dans l'affaire Granger, supra, l'intimée a reconnu son erreur et sa décision fut de changer son interprétation uniquement quant aux futures prestations. Elle n'est pas alors venue appliquer rétroactivement son changement d'interprétation.

[125] Finalement, l'intimée mentionne dans son argumentation que ce ne fut qu'en septembre 2012 qu'elle a été mise au courant de la situation de l'horaire de travail « 7/7 » chez FMEQ. Cette prétention est contredite et il est clair que l'intimée était au courant de la situation chez FMEQ, et ce depuis fort longtemps. Le témoin Labrie, ancien employé de l'intimée, est venu confirmer qu'en 1995, il avait rencontré le syndicat et l'entreprise, et ce afin de faire valider l'horaire de travail. La preuve documentaire GD5, pages 6 à 8 vient prouver que monsieur André Bellavance a envoyé une demande spécifique au bureau de Montréal de l'intimée. Même si madame Ricci a envoyé une réponse mi-figue mi-raisin, les questions qui lui avaient été posées étaient sans équivoque et soutiennent que l'intimée était au courant dès ce moment. Selon le témoin C. O., cette même preuve fut déposée devant le conseil arbitral qui a entendu les appels des autres employés de FMEQ. Selon les témoins C. O. et G. D., les employés ont effectué les mêmes vérifications en 1999 et 2001. Le témoin J.B. est venu affirmer que lui-même avait fait des démarches en 2008. De plus, le document GD6, déposé par les appelants lors de l'audience, vient prouver que ce ne fut pas en 2012 mais bien en 2011 qu'il fut rappelé par FMEQ à l'intimée l'existence de l'horaire « 7/7 » des employés de FMEQ. Monsieur Michel Harrisson, employé de Service Canada, répond le 22 juin 2011 à la demande envoyée le 14 juin 2011 par madame F. B. de FMEQ à l'intimée. Cette question a peu d'importance en soit, si ce n'est que pour démontrer l'attitude de l'intimée dans le présent dossier.

[126] L'attitude de l'intimée dans le présent dossier est fortement problématique. Il a été démontré que les employés n'ont jamais voulu cet horaire de travail, il fut imposé par l'employeur, et si en 1995, l'intimée disait ne pas vouloir s'immiscer dans les conventions collectives entre les employés, les syndicats et les employeurs, elle semble avoir changé d'avis en 2011 alors que l'employeur veut faire changer une convention collective qui ne fait plus son affaire et utilise l'intimée pour faire indirectement ce qu'il semblait avoir de la difficulté à faire directement. De plus, dans certains cas, et même si le Tribunal est saisi de cette affaire, l'intimée refuse sciemment de se prononcer sur certaines demandes de défalcation, comme celle envoyée par le TUAC en octobre 2013 qui demeure sans réponse au moment de rédaction de la présente décision, soit près de 8 mois plus tard.

[127] En raison de son attitude, de son manque de promptitude et de rectitude, et de ses importantes erreurs durant toutes ces années et du fait qu'elle a continué de confirmer à plusieurs reprises aux employés et à l'employeur que l'horaire de travail « 7/7 » était conforme à la Loi alors qu'elle aurait dû simplement informer les employés en 2011 ou en 2012 que la situation particulière chez FMEQ ne correspond plus à son interprétation de la Loi, procéder à des changements pour l'avenir comme elle l'a fait dans l'arrêt Granger, supra. Il est maintenant de son devoir de procéder à une défalcation des montants réclamés à tous et chacun des appelants.

Conclusion

[128] L'appel est donc accueilli pour les motifs énoncés ci-dessus, les avis d'inadmissibilité émis par l'intimée sont annulés, et les appelants ne doivent donc pas rembourser les trop-payés.

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