Assurance-emploi (AE)

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Comparutions

[1] L'appelante, madame N. G., était présente lors de l'audience téléphonique (téléconférence) tenue le 11 juin 2014.

Décision

[2] Le Tribunal de la sécurité sociale du Canada, ci-après nommé, le Tribunal, conclut que l'appel de la décision de la Commission de l'assurance-emploi du Canada, ci-après désignée, la Commission, à l'effet d'imposer à l'appelante, une exclusion du bénéfice des prestations d'assurance-emploi, parce que celle-ci a perdu son emploi en raison de son inconduite, est fondé en vertu des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi »).

Introduction

[3] Le 2 mai 2013, l'appelante a présenté une demande initiale de prestations ayant pris effet le 5 mai 2013. L'appelante a déclaré avoir travaillé pour l'employeur Pub du Pti Boulevard (Donarco Ltée), du 25 décembre 2012 au 28 avril 2013 inclusivement et avoir cessé de travailler pour cet employeur en raison d'un congédiement ou d'une suspension (pièces GD3-2 à GD3-13).

[4] Le 28 mai 2013, la Commission a informé l'appelante que sa demande de prestations d'assurance-emploi allait commencer le 5 mai 2013. La Commission a expliqué qu'un montant de 385.00 $ reçu par l'appelante à titre de paie de vacances allait être déduit de ses prestations pour la période du 28 avril 2013 au 11 mai 2013 (pièce GD2A-2).

[5] Le 6 juin 2013, la Commission a avisé l'appelante qu'elle n'avait pas droit aux prestations régulières d'assurance-emploi, à partir du 5 mai 2013, car elle a cessé de travailler pour l'employeur Donarco Ltée, le 28 avril 2013, en raison de son inconduite (pièces GD3-18 et GD3-19).

[6] Le 31 mai 2013, l'appelante a présenté une Demande de révision d'une décision d'assurance-emploi. L'appelante a indiqué avoir été avisée verbalement de la décision de la Commission le 21 mai 2013 à l'effet que sa demande de prestations allait être refusée (pièces GD3-20 à GD3-26).

[7] Le 14 juin 2013, la Commission a avisé l'appelante qu'elle maintenait la décision rendue à son endroit en date du 17 mai 2013 (sic) [6 juin 2013] (pièce GD3-30).

[8] Le 5 juillet 2013, Service Canada a informé l'appelante qu'elle devait s'adresser au Tribunal de la sécurité sociale si elle voulait interjeter appel de la décision rendue par la Commission (pièce GD2-2).

[9] Le 18 juillet 2013 (date de la réception du document par le Tribunal selon le timbre dateur), l'appelante a signifié au Tribunal son intention de présenter un appel de la décision en révision qui a été rendue à son endroit en transmettant une lettre dont l'en-tête est identifié par l'expression « Nouvel examen de la décision » et dans laquelle ladite appelante a fourni de nouvelles observations concernant son employeur. Le 23 octobre 2013, l'appelante a transmis une copie de la décision en révision rendue par la Commission le 14 juin 2013 (pièces GD3-31, GD2-1, GD2-2 et GD2A-1 à GD2A-4). Le Tribunal précise que même si l'appelante n'a pas utilisé le formulaire intitulé « Avis d'appel – Division générale – Section de l'assurance-emploi » pour présenter son appel, cette demande a été traitée comme un appel régulier auprès dudit Tribunal.

[10] Le 6 décembre 2013, le Tribunal a informé l'employeur que s'il souhaitait devenir une « personne mise en cause » dans le présent dossier, il devait déposer une demande à cet effet au plus tard le 21 décembre 2013. L'employeur n'a pas donné suite à cette demande.

Mode d'audience

[11] L'audience a été tenue par téléconférence pour les motifs énoncés dans l'avis d'audience du 21 mai 2014 (pièces GD1-1 et GD1-2).

Question en litige

[12] Le Tribunal doit déterminer si l'appel de la décision de la Commission relativement à l'imposition à l'appelante, d'une exclusion du bénéfice des prestations d'assurance-emploi, parce qu'elle a perdu son emploi en raison de son inconduite, est justifié en vertu des articles 29 et 30 de la Loi.

Droit applicable

[13] Concernant une « exclusion » en raison d'une « inconduite » ou d'un « départ sans justification », le paragraphe 30(1) de la Loi prévoit que :

« […] Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s'il perd un emploi en raison de son inconduite ou s'il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas : a) que, depuis qu'il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d'heures requis, au titre de l'article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage; b) qu'il ne soit inadmissible, à l'égard de cet emploi, pour l'une des raisons prévues aux articles 31 à 33. ».

[14] Relativement à une « exclusion non touchée par une perte d'emploi subséquente », le paragraphe 30(2) de la Loi prévoit que :

« […] L'exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n'est pas affectée par la perte subséquente d'un emploi au cours de la période de prestations. ».

[15] En ce qui concerne une « exclusion » du bénéfice des prestations d'assurance-emploi ou d'une « inadmissibilité » à celles-ci, les paragraphes 29a) et 29b) de la Loi précisent que :

« […] Pour l'application des articles 30 à 33 : a) « emploi » s'entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations; b) la suspension est assimilée à la perte d'emploi, mais n'est pas assimilée à la perte d'emploi la suspension ou la perte d'emploi résultant de l'affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l'exercice d'une activité licite s'y rattachant […] ».

Preuve

[16] Les éléments de preuve contenus dans le dossier sont les suivants :

  1. Un relevé d'emploi, en date du 13 mai 2013, indique que l'appelante a travaillé à titre de « serveur(se) » pour l'employeur Donarco Ltée, du 25 décembre 2012 au 28 avril 2013 inclusivement et qu'elle a cessé de travailler pour cet employeur en raison d'un congédiement (code M – Congédiement), (pièce GD3-15);
  2. Le 16 mai 2013, l'employeur (monsieur R. S.) a expliqué que l'appelante travaillait à raison de quatre jours par semaine et qu'en raison d'un conflit avec une autre serveuse (« barmaid »), ladite appelante voulait travailler deux journées par semaine et ne pas être en présence de l'autre serveuse. L'employeur a indiqué avoir informé l'appelante que s'il trouvait quelqu'un qui voulait effectuer le travail à raison de quatre jours par semaine, il l'embaucherait. Il a précisé que l'autre serveuse avec qui l'appelante ne voulait pas travailler effectuait son travail, de soir, un vendredi sur trois. Il a précisé que cette situation faisait en sorte que ces deux employées ne se rencontraient que lors de leur changement de quarts de travail, soit environ 10-15 minutes, une fois aux trois semaines (pièce GD3-16);
  3. Le 14 juin 2013, l'employeur (monsieur R. S.) a déclaré que l'appelante a été embauchée à titre de serveuse au bar et pour effectuer le service de « repas simples ». L'employeur a expliqué que l'appelante lui a demandé de ne travailler que le samedi et le dimanche parce qu'elle était en conflit avec une autre employée qu'elle croisait un vendredi sur trois et qu'il s'agissait de la seule raison que ladite appelante lui a donnée. L'employeur a expliqué avoir congédié l'appelante parce qu'il a trouvé une autre employée qui a accepté de travailler à temps plein, à raison de quatre jours par semaine. L'employeur a indiqué que l'appelante n'a pas discuté du fait qu'elle se sentait épuisée, qu'elle trouvait trop difficile de faire les diners ou qu'elle n'avait pas d'aide pour les repas du midi (pièce GD3-27);
  4. Le 23 octobre 2013, l'appelante a transmis au Tribunal une copie des documents suivants :
    1. Lettre de la Commission en date du 28 mai 2013 indiquant que la période de prestations de l'appelante commencera le 5 mai 2013 (pièce GD2A-2);
    2. Lettre de la Commission en date du 6 juin 2013 informant l'appelante qu'elle n'avait pas droit aux prestations régulières d'assurance-emploi, à partir du 5 mai 2013 (pièce GD2A-3);
    3. Lettre de la Commission en date du 14 juin 2013 informant l'appelante que la décision prise à son endroit le 17 mai 2013 (sic) [6 juin 2013] était maintenue (pièce GD2A-4), (pièces GD2A-1 à GD2A-4);
  5. Le 7 janvier 2014, l'appelante a transmis au Tribunal une copie d'un certificat médical complété par le docteur André Beauchesne du Centre médical St-Jacques, en date du 1er novembre 2013 (2013-11-01), indiquant un arrêt de travail de ladite appelante à compter du 20 avril 2013 jusqu'à une date indéterminée (pièces GD5-1 et GD5-2);
  6. Le 29 mai 2014, l'appelante a expliqué qu'à la suite de l'envoi à la Commission d'un relevé d'emploi modifié ou remplacé par son employeur, le montant de ses prestations est passé de 216.00 $ à 291.00 $ par semaine (pièces GD6-1 à GD6-4);
  7. Le 29 mai 2014, l'appelante a transmis au Tribunal une copie d'un relevé d'emploi modifié ou remplacé (numéro de série du relevé modifié ou remplacé : K01916473), en date du 5 mars 2014, indiquant qu'elle a travaillé à titre de « serveur(se) » pour l'employeur Donarco Ltée, du 25 décembre 2012 au 28 avril 2013 inclusivement et qu'elle a cessé de travailler pour cet employeur en raison d'un congédiement (code M – Congédiement), (pièce GD7-1).

[17] Les éléments de preuve présentés lors de l'audience sont les suivants :

  1. L'appelante a rappelé les circonstances ayant mené à son congédiement;
  2. Elle a expliqué avoir consulté un médecin le 1er novembre 2013, son médecin de famille depuis peu de temps. Elle a précisé qu'il fallait attendre parfois deux ou trois mois avant d'avoir un rendez-vous médical. Elle a indiqué que le médecin qu'elle a rencontré lui a alors prescrit un arrêt de travail à compter du 20 avril 2013 compte tenu de son état de santé qui prévalait déjà à ce moment (pièce GD5-2);
  3. Elle a expliqué avoir commencé à recevoir des prestations d'assurance-emploi maladie vers la fin de novembre 2013 et que celles-ci se sont terminées en février 2014 (pièces GD6-1 à GD6-4);
  4. Elle a mentionné qu'elle aimait le travail qu'elle effectuait, qu'elle voulait continuer à travailler et que la perte de son emploi l'a beaucoup dérangée. Elle a indiqué être actuellement sans emploi mais qu'elle effectuait plusieurs recherches à cet effet. Elle a précisé être en état de travailler même si elle n'avait pas de certificat médical pour le démontrer puisque le dernier médecin de famille qu'elle avait est décédé.

Arguments des parties

[18] L'appelante a présenté les observations et les arguments suivants :

  1. Elle a déclaré qu'au moment de son embauche chez l'employeur Donarco Ltée, en décembre 2012, elle travaillait le mercredi, le jeudi, le samedi et le dimanche. Elle a rappelé qu'elle ne travaillait pas le vendredi (pièces GD3-5 et GD3-23). Elle a soutenu qu'elle n'a pas été embauchée à titre de serveuse dans un restaurant et que ces tâches n'avaient pas été convenues au départ (pièces GD3-28 et GD3-29);
  2. Elle a expliqué qu'après deux mois de travail environ, elle a accepté, à la demande de son employeur, de travailler du jeudi au dimanche inclusivement, à raison de 50 heures par semaine, le temps de remplacer un autre employé (ancien propriétaire) qui était parti en vacances pour une période prévue d'environ deux ou trois semaines. Elle a expliqué avoir continué de remplacer l'autre employé, après son retour de vacances, parce que celui-ci était malade et dans l'incapacité de reprendre le travail. Elle a précisé avoir continué de faire du remplacement jusqu'à ce que la situation se règle, mais que la personne qu'elle remplaçait est finalement décédée;
  3. Elle a expliqué qu'elle trouvait de plus en plus difficile d'effectuer son travail pendant quatre journées consécutives, représentant environ 50 heures de travail, une situation qui n'avait pas été prévue au départ et qu'elle commençait à être épuisée. Elle a aussi précisé qu'elle devait rencontrer un médecin en raison de la fatigue éprouvée en raison des heures de travail qu'elle accomplissait (pièces GD3-5, GD3-28 et GD3-29);
  4. Elle a aussi déclaré avoir réduit sa disponibilité parce qu'elle ne voulait plus travailler les jeudis et vendredis où elle devait servir seule les diners alors que c'était très achalandé ces journées et qu'en plus ce n'était pas payant (pièces GD3-17 et GD3-28). Elle a affirmé qu'elle effectuait aussi du remplacement le lundi, qu'elle n'a jamais manqué une journée de travail et qu'elle n'était jamais arrivée en retard. Elle a expliqué qu'après son travail, elle était fatiguée et qu'elle en avait assez de ses heures (pièces GD3-22 à GD3-26);
  5. Elle a expliqué avoir trouvé encore plus fatiguant le fait qu'elle devait croiser une nouvelle employée travaillant au bar de l'établissement où ladite appelante travaillait et avec qui elle ne s'entendait pas bien. Elle a expliqué qu'elle ne voulait pas rencontrer cette personne lors des changements de quarts de travail (« changements de shift ») qui survenaient un vendredi sur deux, une situation que l'appelante appréhendait, d'autant plus qu'il s'agissait d'une journée plus achalandée. Elle a relaté des situations qu'elle n'avait pas à « endurer » (ex. : encombrement de l'espace de travail de l'appelante par la nouvelle employée avec son matériel parce qu'elle arrivait trop à l'avance pour effectuer son travail, accusation de la nouvelle employée à l'endroit de l'appelante à l'effet d'avoir pris une bière dans le réfrigérateur sans la payer, attitude « bête » de la part de cette employée à son endroit devant les clients), (pièce GD3-28). Elle aussi indiqué qu'elle ne voulait plus travailler la semaine en présence de cette autre employée qui lui « parlait bête devant les clients » et qui recevait « bêtement » les clients qui allaient voir ladite appelante (pièce GD3-5);
  6. Elle a affirmé que l'employeur était au courant de cette situation mais qu'il n'a rien fait pour la corriger ou pour trouver une solution au problème qu'elle lui a exposé. Elle a affirmé que l'employeur lui disait presque que c'était de sa faute s'il n'y avait pas beaucoup de clients au bar (pièces GD3-5, GD3-17, GD3-28 et GD3-29);
  7. Elle a expliqué qu'elle se sentait alors très fatiguée et qu'elle a demandé à son employeur de travailler à raison de deux journées par semaine. Elle a précisé ne pas avoir demandé de reprendre les quatre journées de travail qu'elle effectuait au début de son emploi (mercredi, jeudi, samedi et dimanche) parce qu'elle était trop fatiguée, mais que cela aurait probablement été possible après quelques semaines de repos;
  8. Elle a affirmé que l'employeur lui avait dit qu'il accepterait qu'elle travaille à raison de deux journées par semaine et qu'il chercherait à la remplacer pour les deux autres journées. Elle a soutenu que même si son employeur a déclaré à la Commission que ce n'était pas le cas et qu'il n'avait pas accepté sa demande à l'effet de travailler deux journées par semaine, ladite Commission aurait dû faire la preuve que l'employeur ne disait pas la vérité. Elle a affirmé avoir présenté la preuve à l'effet que son employeur voulait embaucher une personne à raison de quatre jours par semaine mais que la Commission n'a pas accepté cette preuve. Elle a indiqué avoir mentionné à l'agente de l'assurance-emploi que son employeur lui a dit qu'il essaierait de trouver quelqu'un pour travailler deux journées par semaine, mais que s'il était obligé de le faire, il embaucherait quelqu'un à raison de quatre jours par semaine. Elle a ajouté que son employeur lui a menti, qu'il a aussi menti à l'assurance-emploi et a dit trouver injuste la décision prise à son endroit. Elle a indiqué que malgré cette situation, la décision prise par la Commission a été maintenue (pièces GD3-22 à GD3-26). Elle a soutenu détenir la preuve que l'employeur lui avait menti de même qu'à l'assurance-emploi en indiquant qu'il cherchait une remplaçante à raison de deux journées par semaine (pièce GD3-28). Elle a affirmé qu'après la fin de son emploi, l'employée qui lui a succédé lui a dit que l'employeur ne lui avait jamais offert de travailler deux journées par semaine, mais qu'il voulait absolument quelqu'un pour travailler quatre jours par semaine (du jeudi au dimanche inclusivement), (pièce GD3-31, pièces GD2-1 et GD2-2);
  9. Elle a soutenu que son employeur avait l'intention d'embaucher une personne à raison de quatre jours par semaine, même si une autre personne a dit à ladite appelante qu'elle aurait accepté de travailler deux jours par semaine. Elle a souligné que l'employeur a préféré embaucher une nouvelle personne qui a accepté de travailler à temps plein (pièces GD3-17 et GD3-28);
  10. Elle a affirmé que les renseignements qu'elle avait fournis à la Commission ne se trouvaient pas tous au dossier parce que ladite Commission ne les avait pas considérés pas comme étant suffisamment pertinents. Elle a aussi mentionné qu'elle était au courant de l'existence de « quotas » à l'assurance-emploi et que cette situation pouvait expliquer pourquoi elle n'a pas eu le droit de recevoir des prestations d'assurance-emploi. Elle a dit s'être sentie « harcelée » par le questionnement répétitif d'une agente de l'assurance-emploi à l'effet de savoir s'il était vrai que son employeur (monsieur R. S.) lui avait dit qu'il essaierait de trouver une autre personne pour lui permettre ainsi de travailler deux jours par semaine. L'appelante a exprimé son insatisfaction en regard du traitement reçu de la part de l'agente de l'assurance-emploi avec qui elle a discuté de son dossier (pièces GD3-22 à GD3-26);
  11. Elle a souligné avoir d'abord reçu une lettre de la Commission, en date du 28 mai 2013 l'informant que sa demande de prestations d'assurance-emploi allait débuter le 5 mai 2013 (pièce GD2A-2) puis avoir ensuite reçu une autre lettre de cette instance, en date du 6 juin 2013, lui indiquant alors qu'elle n'avait plus le droit de recevoir de prestations parce qu'elle avait cessé de travailler chez l'employeur Donarco Ltée en raison de son inconduite (pièce GD2A-3);
  12. Elle a soutenu que son employeur l'empêchait de travailler auprès d'autres employeurs en fournissant des mauvaises références la concernant (pièces GD6-1 à GD6-4).

[19] La Commission a présenté les observations et arguments suivants :

  1. La Commission a expliqué que le paragraphe 30(2) [paragraphe 30(1)] de la Loi prévoit l'imposition d'une exclusion d'une durée indéterminée s'il est établi que la prestataire a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. Elle a précisé que pour que le geste reproché constitue de l'inconduite au sens de l'article 30 de la Loi, il faut qu'il ait un caractère volontaire ou délibéré ou qu'il résulte d'une insouciance ou d'une négligence telles qu'il frôle le caractère délibéré. Elle a souligné qu'il doit également y avoir une relation de cause à effet entre l'inconduite et le congédiement (pièce GD4-5);
  2. Elle a expliqué qu'un employeur est en droit de s'attendre à ce qu'une personne employée se présente à l'ouvrage de façon assidue et y demeure en poste jusqu'à la fin de son horaire de travail. Elle a souligné que cette question d'assiduité au travail est à n'en pas douter un élément important dans la productivité d'une entreprise. Aussi, a précisé la Commission, est-il de rigueur que la personne qui désire ou prévoit s'absenter en informe l'employeur au préalable et lui demande la permission. Cependant, a souligné la Commission, que ce soit un congédiement pour inconduite ou départ volontaire non justifié, il n'en demeure pas moins que c'est aux termes des articles 29 et 30 de la Loi. Elle a expliqué qu'il importe peu qu'il s'agisse d'une perte d'emploi en raison d'une inconduite ou d'un départ sans justification, si l'exclusion du bénéfice des prestations se justifie pour l'un et l'autre motif; l'agent responsable peut invoquer en ce cas les deux motifs dans l'avis d'exclusion (pièce GD4-5);
  3. Elle a expliqué qu'il se peut qu'occasionnellement, ce soit le comportement même du prestataire qui mène à son congédiement. En de tels cas, a-t-elle précisé, l'on peut considérer que la cessation d'emploi constitue un départ volontaire. Elle a mentionné à titre d'exemple, le cas d'un employé qui suit un cours de formation et qui informe son employeur que sa disponibilité pour travailler sera plus limitée qu'elle ne l'était auparavant. Elle a souligné qu'il peut s'agir dans ce contexte, d'une invitation de l'employé à son employeur de mettre fin à son contrat d'emploi. Elle a ajouté que si l'employeur congédie le prestataire, l'on considérera qu'il s'agit en l'occurrence d'une cessation volontaire d'emploi puisque le congédiement s'inscrit dans la suite logique (pièce GD4-5);
  4. Elle a conclu que les gestes de l'appelante constituaient des gestes d'inconduite au sens de la Loi parce que celle-ci a initié la situation menant au congédiement. Elle a expliqué que l'horaire normal de travail de l'appelante était de quatre jours par semaine et que c'était l'appelante elle-même qui a voulu les vendredis lorsqu'ils sont devenus disponibles car c'était une journée payante. La Commission a soutenu que les faits au dossier démontrent que le propriétaire était présent de façon régulière les vendredis afin d'apporter son aide au besoin. Elle a fait valoir que lorsque l'appelante a été avisée qu'en diminuant sa disponibilité à travailler, elle risquait de perdre son emploi, elle n'a pas offert de travailler d'autres journées. La Commission a souligné que l'horaire de travail de l'appelante, depuis son embauche, était de quatre jours par semaine et que les tâches étaient connues. Elle a soutenu qu'en refusant des journées de travail ou bien en refusant de faire certaines tâches, l'appelante a pris le risque de se faire congédier. Elle a soumis que si le travail était à ce point intolérable, si l'appelante était à ce point fatiguée, elle aurait pu demander un congé, aller consulter un médecin, choses qu'elle n'a pas faite. La Commission a fait valoir que l'appelante s'est également contredite au niveau des tâches à faire. Elle a indiqué que l'appelante a initialement déclaré que le fait de servir les diners n'était pas convenu au départ pour déclarer ensuite qu'à l'embauche, elle savait qu'elle devait faire les tâches de servir des repas congelés mais que les vendredis étaient trop difficiles (pièce GD3-28). La Commission a souligné que les tâches n'ont pas été changées de façon considérable, qu'elles étaient connues au départ et que c'était la volonté de l'appelante de travailler cette journée-là, le vendredi. La Commission a soutenu que l'appelante devait raisonnablement s'attendre à ce que les vendredis soient plus achalandés (pièce GD4-6);
  5. Concernant la question relative à l'existence d'un réel conflit entre l'appelante et une autre employée, la Commission a fait valoir qu'il peut y avoir occasionnellement des frictions, une certaine animosité ou des relations conflictuelles qui ne soient pas de nature à améliorer un climat de travail, mais qu'une telle situation ne justifie pas en soi une personne à quitter son emploi. Elle a expliqué que dans la mesure où chacun y met du sien et fait des efforts raisonnables pour s'accommoder des différences et trouver un terrain d'entente, la situation ne devrait pas dégénérer en conflits interminables ou irrésolus. La Commission a dit ne pas juger du fait que l'appelante devait tolérer la situation de conflit. Elle a souligné que, par contre, si le conflit se produisait le vendredi une fois aux trois semaines, ou bien aux deux semaines comme l'a affirmé l'appelante et que la situation était inacceptable, cette dernière aurait pu demander de travailler une autre journée ou chercher un autre emploi au lieu de diminuer son horaire à deux jours semaine si les raisons étaient en effet que les vendredis étaient trop achalandés et qu'elle avait un conflit lors des échanges avec l'autre serveuse à ce moment (pièce GD4-6);
  6. Elle a fait valoir que l'appelante a été avisée qu'elle risquait de perdre son emploi en diminuant ses heures de travail. Elle a souligné que l'appelante peut ne pas être d'accord en disant que l'employeur aurait pu trouver une autre personne pour deux jours, par contre, elle n'a pas à dire à un employeur comment gérer son personnel. La Commission a expliqué que même si elle contactait l'employée qui l'a remplacée, et que celle-ci confirmait qu'elle aurait pu ne travailler que deux jours, ladite Commission a soutenu que c'était l'appelante qui a initié la situation en diminuant ses heures. La Commission a souligné qu'en aucun cas l'employeur ne lui a dit qu'il se cherchait une employée pour deux jours seulement. Elle a souligné que l'employeur avait avisé l'appelante qu'il serait difficile de trouver quelqu'un à raison de deux jours par semaine et que si une employée désirait travailler quatre jours, elle serait engagée. La Commission a précisé que les besoins de l'employeur n'avaient pas à être discutés (pièce GD4-6).

Analyse

[20] Bien que la Loi ne définisse pas le terme d'inconduite, la jurisprudence mentionne, dans l'arrêt Tucker (A-381-85), que :

« […] pour constituer de l'inconduite, l'acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d'une telle insouciance ou négligence que l'on pourrait dire que l'employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement au travail. ».

[21] Dans cette décision (Tucker, A-381-85), le juge Mark R. Macguigan de la Cour d'appel fédérale (la « Cour ») a également rappelé les propos du juge Reed de la Cour à l'effet que :

« […] L'inconduite, qui rend l'employé congédié inadmissible au bénéfice des prestations de chômage, existe lorsque la conduite de l'employé montre qu'il néglige volontairement ou gratuitement les intérêts de l'employeur, par exemple, en commettant des infractions délibérées, ou ne tient aucun compte des normes de comportement que l'employeur a le droit d'exiger de ses employés, ou est insouciant ou négligent à un point tel et avec une fréquence telle qu'il fait preuve d'une intention délictuelle […] ».

[22] Dans l'affaire Mishibinijima (2007 CAF 36), le juge Nadon de la Cour a fait le rappel suivant :

« Il y a donc inconduite lorsque la conduite du prestataire est délibérée, c'est-à- dire que les actes qui ont mené au congédiement sont conscients, voulus ou intentionnels. Autrement dit, il y a inconduite lorsque le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l'exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu'il soit congédié. ».

[23] La Cour a défini la notion juridique d'inconduite au sens du paragraphe 30(1) de la Loi comme une inconduite délibérée dont le prestataire savait ou aurait dû savoir qu'elle était de nature à entrainer son congédiement. Pour déterminer si l'inconduite pourrait mener à un congédiement, il doit exister un lien de causalité entre l'inconduite reprochée au prestataire et son emploi; l'inconduite doit donc constituer un manquement à une obligation résultant expressément ou implicitement du contrat de travail (Canada (PG) c. Lemire, 2010 CAF 314).

[24] Les décisions rendues dans les affaires Cartier (A-168-00) et MacDonald (A-152-96) confirment le principe établi dans la cause Namaro (A-834-82) selon lequel il doit également être établi que l'inconduite a constitué la cause du congédiement du prestataire.

[25] Dans l'arrêt McKay-Eden (A-402-96), le juge McDonald de la Cour a apporté la précision suivante :

« À notre avis, pour qu'une conduite soit considérée comme une « inconduite » sous le régime de la Loi sur l'assurance chômage, elle doit être délibérée ou si insouciante qu'elle frôle le caractère délibéré. ».

[26] Pour que le geste reproché constitue de l'inconduite au sens de l'article 30 de la Loi, il faut qu'il ait un caractère volontaire ou délibéré ou qu'il résulte d'une insouciance ou d'une négligence telle qu'il frôle le caractère délibéré. Il doit également y avoir une relation de cause à effet entre l'inconduite et le congédiement.

[27] Déterminer que la conduite d'un employé qui entraîne la perte de son emploi constitue une inconduite est une question de fait à régler à partir des circonstances de chaque cas.

[28] Dans le présent dossier, le geste reproché à l'appelante, soit d'avoir réduit sa disponibilité à travailler pour n'effectuer que deux jours de travail par semaine, ne constitue pas de l'inconduite au sens de la Loi.

[29] La preuve médicale au dossier indique que l'appelante était dans l'incapacité de travailler pour des raisons médicales à compter du 20 avril 2013, soit pendant la période au cours de laquelle elle était toujours à l'emploi de l'employeur Donarco Ltée et plusieurs jours avant son congédiement survenu le 28 avril 2013 (pièces GD5-1 et GD5-2).

[30] Le Tribunal note aussi que même si l'appelante a présenté une preuve médicale a posteriori, elle a déclaré à plusieurs reprises qu'elle se sentait fatiguée en raison de l'accomplissement de son travail pendant quatre journées consécutives, représentant environ 50 heures de travail et qu'elle prévoyait rencontrer un médecin (pièces GD3-5, GD3-28 et GD3-29).

[31] L'appelante a aussi précisé qu'il fallait attendre parfois deux ou trois mois avant d'avoir un rendez-vous médical. Elle a indiqué que le médecin qu'elle a rencontré lui a alors prescrit un arrêt de travail à compter du 20 avril 2013 compte tenu de son état de santé qui prévalait déjà à ce moment (pièce GD5-2).

[32] Dans un tel contexte le Tribunal ne retient pas l'argumentation de la Commission selon laquelle « Si le travail était à ce point intolérable, si elle était à ce point fatiguée, elle aurait pu demander un congé, aller consulter un médecin, choses qu'elle n'a pas faite » (pièce GD4-6).

[33] L'appelante a aussi rappelé, au cours de l'audience, qu'au moment de son embauche, en décembre 2012, elle travaillait le mercredi, le jeudi, le samedi et le dimanche. Elle pouvait donc bénéficier du vendredi pour récupérer (pièces GD3-5 et GD3-23).

[34] Le témoignage non contredit de l'appelante est aussi à l'effet que son horaire de travail a par la suite été modifié après deux mois de travail. Elle a déclaré avoir alors accepté, à la demande de son employeur, de travailler du jeudi au dimanche inclusivement, afin de remplacer un autre employé jusqu'à son retour de vacances. Toutefois, cette situation s'est prolongée puisque l'employé qu'elle remplaçait, sur une base temporaire, n'est pas revenu au travail. Même si l'appelante a mentionné avoir voulu travailler le vendredi, parce que c'était une journée plus payante, elle a aussi expliqué ne pas avoir obtenu le soutien nécessaire de la part de son employeur pour arriver à réaliser toutes les tâches qui lui étaient confiées (pièces GD3-23 et GD3-24).

[35] La situation décrite par l'appelante permet de mettre en perspective le contexte de travail dans lequel elle a évolué et qui a conduit à sa demande de ne travailler qu'à raison de deux journées par semaine, sans toutefois exclure un motif très important lié à la demande de l'appelante selon lequel celle-ci ne voulait plus travailler en présence d'une autre employée qu'elle rencontrait au moment de ses changements de quarts de travail.

[36] La Commission a expliqué dans son argumentation que l'horaire de travail de l'appelante, depuis son embauche, était de quatre jours par semaine et que les tâches étaient connues (pièce GD4-6). La Commission n'a toutefois pas pris en compte qu'au moment de son embauche, l'appelante n'effectuait pas quatre jours de travail consécutifs tel que l'appelante l'avait mentionné dans sa demande de prestations et tel qu'elle l'a rappelé lors de l'audience (pièces GD3-5 et GD3-23).

[37] Subsidiairement, en ce qui concerne la demande formulée par l'appelante à l'effet de pouvoir travailler deux journées par semaine et la réponse obtenue de la part de son employeur, le Tribunal est d'avis qu'il se trouve devant des déclarations contradictoires sur cet aspect de la part des parties au dossier.

[38] D'un côté, l'appelante a déclaré que son employeur avait accepté sa demande de travailler à raison de deux journées par semaine mais que finalement celui-ci a préféré embaucher une personne à raison de quatre jours par semaine, d'où le congédiement de l'appelante.

[39] De son côté, l'employeur a déclaré avoir informé l'appelante que s'il trouvait quelqu'un qui voulait effectuer le travail à raison de quatre jours par semaine, il l'embaucherait (pièces GD3-16 et GD3-27).

[40] Des divergences subsistent entre la version donnée par l'employeur et celle fournie par l'appelante concernant cet aspect fondamental ayant mené au congédiement de cette dernière. Toutefois, le Tribunal accorde plus de poids au témoignage crédible, donné par l'appelante au cours de l'audience. Celle-ci a présenté un témoignage constant, détaillé et exempt de contradictions. Elle a ainsi présenté un portrait global plus complet concernant son historique de travail, les motifs à l'origine de sa demande à l'effet de ne travailler que deux journées par semaine et les circonstances ayant mené à son congédiement.

[41] Par ailleurs, le Tribunal trouve contradictoire et ambigüe l'analyse effectuée par la Commission ayant mené à sa décision d'accepter d'abord la demande de prestations de l'appelante pour ensuite l'exclure du bénéfice des prestations en raison de son inconduite (pièces GD2A-2, GD2A-3, GD3-18 et GD3-19).

[42] Dans une déclaration faite le 16 mai 2013, l'employeur a informé la Commission des motifs pour lesquels l'appelante voulait travailler deux journées par semaine (pièce GD3-16). L'appelante a donné sa version des faits dans une déclaration présentée le même jour (pièce GD3-17). La Commission a ensuite indiqué avoir informé l'appelante, en date du 21 mai 2013, de la décision prise à son endroit et qu'elle pouvait « faire appel de la décision » (pièce GD3-17).

[43] Or, la preuve au dossier indique que dans une lettre de la Commission en date du 28 mai 2013, après avoir pris connaissance de la version des faits de l'employeur et de l'appelante, celle-ci a d'abord été informée que sa période de prestations allait commencer le 5 mai 2013 (pièce GD2A-2). Puis, le 6 juin 2013, sans avoir obtenu de renseignements additionnels ou différents de la part des parties au dossier, la Commission a transmis une nouvelle lettre (avis de décision) à l'appelante dans laquelle celle-ci a alors été informée qu'elle n'avait pas droit aux prestations régulières d'assurance-emploi, à partir du 5 mai 2013 (pièces GD2A-3, GD3-18 et GD3-19). Aucune explication à cet égard n'a été fournie par la Commission dans l'argumentation qu'elle a soumise le 31 octobre 2013, afin d'expliquer pourquoi elle avait modifié sa décision (pièces GD4-1 à GD4-9).

[44] Nonobstant cette situation, le Tribunal considère que la preuve présentée démontre que l'appelante n'a pas été congédiée en raison d'un acte qu'elle a posé de manière volontaire et délibérée (Tucker, A-381-85, McKay-Eden, A-402-96).

[45] Le Tribunal est d'avis que le geste reproché à l'appelante n'était pas d'une portée telle que celle-ci pouvait normalement prévoir qu'il serait susceptible de provoquer son congédiement (Mishibinijima, 2007 CAF 36).

[46] En somme, le Tribunal considère que l'appelante n'a pas été congédiée en raison de son inconduite et qu'en conséquence, la décision de la Commission de l'exclure des prestations d'assurance-emploi n'est pas justifiée dans les circonstances (Cartier, A-168-00, MacDonald, A-152-96, Namaro, A-834-82).

[47] Le Tribunal conclut que l'appel est fondé à l'égard du litige en cause.

Conclusion

[48] L'appel est accueilli.

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