Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision



Comparutions

[1] L'appelant, monsieur L. L., était absent lors de l'audience téléphonique (téléconférence) tenue le 12 juin 2014.

[2] Le Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») précise qu'une lettre, en date du 20 mai 2014, a été envoyée à l'appelant l'avisant de la tenue de l'audience le 12 juin 2014 (pièces GD1-1 à GD1-3). Cette lettre a été retournée au Tribunal le 8 juin 2014 avec la mention suivante : « Return to Sender - Renvoi à l'expéditeur ». À la suite de ce retour, deux appels téléphoniques été effectués par le Tribunal au numéro de téléphone de l'appelant, tel qu'il apparaît à son dossier et un message a été laissé dans sa boîte vocale.

[3] L'article 6 du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale (le « Règlement ») impose l'obligation suivante en cas de « changement d'adresse » d'une des parties :

« S'il advient un changement dans les coordonnées d'une partie, celle- ci en informe sans délai le Tribunal en déposant un avis […] ».

[4] Dans le cas présent, rien dans la preuve au dossier n'indique que l'appelant a informé le Tribunal d'un changement de ses coordonnées (ex. : changement d'adresse ou de numéro de téléphone) en vertu de l'article 6 du Règlement. Le Tribunal considère que des mesures appropriées ont ainsi été prises afin de communiquer avec l'appelant dans le but de lui remettre son avis d'audience ou de lui indiquer la date de cette audience.

[5] L'alinéa 3(1)a) du Règlement prévoit aussi les dispositions suivantes pour le « déroulement de l'instance » :

« Le Tribunal : a) veille à ce que l'instance se déroule de la manière la plus informelle et expéditive que les circonstances, l'équité et la justice naturelle permettent […] ».

[6] Considérant que des mesures appropriées ont été prises afin d'aviser l'appelant de la tenue de l'audience le 12 juin 2014, le Tribunal a procédé en son absence. Le Tribunal considère également qu'une décision doit être rendue sur le fond par souci d'équité et de justice naturelle, tel que le prévoit l'alinéa 3(1)a) du Règlement. Le Tribunal note aussi avoir attendu plus de 30 minutes après le début de l'audience afin de s'assurer de la présence de l'appelant à celle-ci. Toutefois, malgré cette période d'attente, l'appelant n'a pas signifié sa présence.

Décision

[7] Le Tribunal conclut que l'appel de la décision de la Commission de l'assurance- emploi du Canada (la « Commission ») à l'effet d'imposer à l'appelant, une exclusion du bénéfice des prestations d'assurance-emploi, parce que celui-ci a perdu son emploi en raison de son inconduite, n'est pas fondé en vertu des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi »).

Introduction

[8] Le 1er octobre 2013, l'appelant a présenté une demande initiale de prestations ayant pris effet le 29 septembre 2013. L'appelant a déclaré avoir travaillé pour l'employeur Bank of Montreal (BMO), du 25 février 2013 au 15 août 2013 inclusivement et avoir cessé de travailler pour cet employeur en raison d'un congédiement ou d'une suspension (pièces GD3-2 à GD3-14).

[9] Le 13 novembre 2013, la Commission a avisé l'appelant qu'il n'avait pas droit aux prestations régulières d'assurance-emploi, à partir du 29 septembre 2013, car il a cessé de travailler pour l'employeur Bank of Montreal le 16 août 2013, en raison de son inconduite (pièces GD3-19 et GD3-20).

[10] Le 3 décembre 2013, l'appelant a présenté une Demande de révision d'une décision d'assurance-emploi (pièce GD3-21 à GD3-23).

[11] Le 9 janvier 2014, la Commission a avisé l'appelant qu'elle maintenait la décision rendue à son endroit en date du 13 novembre 2013 (pièce GD3-31).

[12] Le 24 janvier 2014 (date de la réception du document par le Tribunal selon le timbre dateur), l'appelant a présenté un Avis d'appel auprès de la Section de l'assurance- emploi de la Division générale du Tribunal dans le but de contester la décision en révision prise à son endroit par la Commission le 9 janvier 2014 (pièces GD2-1 à GD2-8 et GD3-31).

[13] Le 27 janvier 2014, le Tribunal a informé l'employeur Bank of Montreal que s'il souhaitait devenir une « personne mise en cause » dans le présent dossier, il devait déposer une demande à cet effet au plus tard le 12 février 2014. L'employeur n'a pas donné suite à cette demande.

Mode d'audience

[14] L'audience a été tenue par téléconférence pour les motifs énoncés dans l'avis d'audience du 20 mai 2014 (pièces GD1-1 à GD1-3).

Question en litige

[15] Le Tribunal doit déterminer si l'appel de la décision de la Commission relativement à l'imposition à l'appelant, d'une exclusion des prestations d'assurance- emploi, parce qu'il a perdu son emploi en raison de son inconduite, est justifié en vertu des articles 29 et 30 de la Loi.

Droit applicable

[16] Concernant une « exclusion » en raison d'une « inconduite » ou d'un « départ sans justification », le paragraphe 30(1) de la Loi prévoit que :

« […] Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s'il perd un emploi en raison de son inconduite ou s'il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas : a) que, depuis qu'il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d'heures requis, au titre de l'article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage; b) qu'il ne soit inadmissible, à l'égard de cet emploi, pour l'une des raisons prévues aux articles 31 à 33. »

[17] Relativement à une « exclusion non touchée par une perte d'emploi subséquente », le paragraphe 30(2) de la Loi prévoit que :

« […] L'exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n'est pas affectée par la perte subséquente d'un emploi au cours de la période de prestations. ».

[18] Au sujet d'une « exclusion » du bénéfice des prestations d'assurance-emploi ou d'une « inadmissibilité » à celles-ci, les paragraphes 29a) et 29b) de la Loi précisent que :

« […] Pour l'application des articles 30 à 33 : a) « emploi » s'entend de tout emploi exercé par le prestataire au cours de sa période de référence ou de sa période de prestations; b) la suspension est assimilée à la perte d'emploi, mais n'est pas assimilée à la perte d'emploi la suspension ou la perte d'emploi résultant de l'affiliation à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs ou de l'exercice d'une activité licite s'y rattachant […] ».

Preuve

[19] Les éléments de preuve contenus dans le dossier sont les suivants :

  1. Un relevé d'emploi, en date du 14 août 2013, indique que l'appelant a travaillé à titre de « CAN Customer Service Rep » pour l'employeur Bank of Montreal, du 25 février 2013 au 16 août 2013 inclusivement et qu'il a cessé de travailler pour cet employeur en raison en raison d'un congédiement (code M - Congédiement), (pièce GD3-15) ;
  2. Un relevé d'emploi modifié ou remplacé (numéro de série W29295436), en date du 14 août 2013, indique que l'appelant a travaillé à titre de « CAN Customer Service Rep » pour l'employeur Bank of Montreal, du 25 février 2013 au 16 août 2013 inclusivement et qu'il a cessé de travailler pour cet employeur en raison en raison d'un congédiement (code M - Congédiement), (pièce GD3-16) ;
  3. Le 5 novembre 2013, l'employeur (monsieur R. C. de la firme Aon- Hewitt pour l'unité de relation de travail de la BMO) a déclaré que l'appelant a été congédié parce qu'il a effectué des transactions irrégulières dans son compte pour s'approprier de sommes non disponibles. Il a expliqué que l'appelant s'est fait un chèque antidaté (à une date ultérieure), [postdaté], l'a déposé dans un guichet automatique et a retiré la somme, ce qui correspond à une forme de « quitting ». L'employeur a expliqué que l'appelant a déposé le chèque daté du vendredi et la journée du dépôt, ce dernier n'avait pas les fonds disponibles. Il a précisé que le chèque ne pouvait pas être honoré puisqu'il était daté à une journée « dans le futur », ce qui a eu pour effet de mettre le compte à découvert. L'employeur a expliqué qu'il s'agit d'un « truc illégal pour obtenir de l'argent ». L'employeur a indiqué que l'appelant était représentant à la clientèle et en période de probation. L'employeur a expliqué qu'il existe un code de conduite dans lequel il est spécifié qu'on ne peut pas utiliser les délais de compensation pour s'approprier de sommes d'argent (pièce GD3-17) ;
  4. Le 6 novembre 2013, l'appelant a expliqué qu'il était en désaccord à l'effet qu'il avait été congédié pour manquement à l'éthique (pièce GD3-18) ;
  5. Le 3 janvier 2014, l'employeur (monsieur R. C., ressources humaines) a déclaré que l'appelant a été congédié pour avoir déposé des chèques postdatés au guichet automatique dans un compte bancaire. Il a expliqué que l'appelant a, de cette manière, utilisé le délai de compensation, une pratique inacceptable et non conforme au code de conduite de la banque, un document de 40 pages. Il a toutefois précisé qu'il ne pouvait transmettre ce document à la Commission. Il a indiqué que l'appelant a été rencontré par la directrice régionale et lui a avoué avoir fait des chèques sans provision et les avoir déposés dans un compte bancaire pour obtenir de l'argent. Il a ajouté que l'appelant a fait de telles transactions à quatre ou cinq reprises en juillet et août 2013 (pièce GD3-24) ;
  6. Une copie de la lettre de congédiement de l'appelant, en date du 15 août 2013, est jointe au dossier (pièce GD3-25) ;
  7. Le 8 janvier 2014, l'appelant a déclaré avoir été congédié pour avoir fait des chèques sans provision qu'il a ensuite déposés dans son compte bancaire pour retirer de l'argent (pièce GD3-26) ;
  8. Un extrait du document intitulé « Principes fondamentaux - Notre code de conduite et d'éthique » est joint au dossier (pages 7 et 8), (pièces GD3-27 à GD3- 30).

[20] Les éléments de preuve présentés à l'audience sont les suivants :

  1. Les deux parties au dossier étaient absentes lors de l'audience et aucun élément de preuve n'a donc été présenté au cours de celle-ci.

Arguments des parties

[21] L'appelant a présenté les observations et les arguments suivants :

  1. Il a expliqué avoir été congédié pour avoir fait des chèques sans provision qu'il a ensuite déposés dans son compte bancaire pour retirer de l'argent. Il a précisé qu'il possède deux comptes bancaires, soit un compte chèque et un compte épargne. Il a affirmé avoir fait un chèque à partir de son compte chèque pour le déposer dans son compte épargne, pour ensuite retirer l'argent de ce compte, avant même d'avoir les fonds suffisants pour effectuer cette transaction (pièces GD3-18 et GD3-26). Il a déclaré avoir fait deux transactions de ce genre, soit une en mai 2013 puis l'autre en juillet ou août 2013. Il a ajouté qu'il s'agissait d'une erreur et ne croyait pas que c'était illégal (pièces GD3-18 et GD3-26) ;
  2. Il a fait valoir qu'il y avait plusieurs personnes qui font ce qu'il a fait et que ce n'était pas du « quitting » mais qu'il s'agissait d'une forme de « quitting » (pièce GD3-18) ;
  3. Il a déclaré avoir lu le code de conduite de l'employeur et que ce document n'indiquait pas qu'il n'était pas permis de faire ce genre de transaction. Il a expliqué qu'il connaissait l'existence du service de protection à découvert mais qu'il n'y avait pas droit étant donné qu'il n'avait pas un bon dossier de crédit (pièce GD3-26) ;
  4. Il a expliqué qu'il était en désaccord à l'effet qu'il a été congédié pour manquement à l'éthique (pièce GD3-18) ;
  5. Il a affirmé avoir contacté le « Centre contact clientèle », le service à la clientèle de la banque (BMO), afin de savoir si l'institution financière allait couvrir les chèques dans les 24 heures et avoir eu une réponse positive à cet effet. Il a mentionné ne pas avoir été en mesure de prouver à son employeur qu'il avait reçu cette indication de la part de la banque (pièce GD3-26) ;
  6. Il a précisé qu'il n'avait pas encore terminé sa formation au moment des faits reprochés. Il a indiqué avoir avoué à son employeur les gestes reprochés. Il a mentionné qu'il se « pensait correct » et ne croyait pas être congédié (pièce GD3-26) ;
  7. Il a soutenu que l'employeur n'avait pas raison de le congédier car il a couvert les fonds dès le lendemain (pièce GD3-18) ;
  8. Il a dit trouver le congédiement « très sévère » et a affirmé qu'il aurait été d'accord avec une mesure disciplinaire telle une suspension (pièce GD3-26). Il a fait valoir que l'employeur aurait plutôt dû appliquer une mesure administrative à son endroit car il était encore en formation (pièce GD3-18). Il a soutenu que ses droits de travailleurs ont été bafoués et qu'il a été congédié sans avoir eu de préavis, ni de mesures ou de sanctions disciplinaires antérieures à son congédiement (pièces GD3-26 et GD2-1 à GD2-8) ;
  9. Il a fait valoir qu'il était un « employé modèle », qu'il était « exemplaire » et qu'il n'avait eu « aucun manquement » dans le cadre de son travail. Il a mentionné avoir effectué du remplacement dans deux autres succursales et que le directeur pouvait confirmer de la qualité de son travail (pièces GD3-18 et GD3-21 à GD3- 23). Il a fait valoir qu'en plus d'avoir travaillé six jours sur sept, en effectuant du remplacement, il a remporté un prix d'excellence à titre de représentant, mais que celui-ci ne lui a jamais été remis (pièces GD2-1 à GD2-8) ;
  10. Il a soutenu que son renvoi n'était pas justifié, que les heures qu'il a travaillées étaient des heures assurables et qu'il avait le droit de recevoir des prestations (pièce GD3-21 à GD3-23).

[22] La Commission a présenté les observations et arguments suivants :

  1. Elle a fait valoir que le paragraphe 30(2) [paragraphe 30(1)] de la Loi prévoit l'imposition d'une exclusion d'une durée indéterminée s'il est établi que le prestataire a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. La Commission a précisé que pour que le geste reproché constitue de l'inconduite au sens de l'article 30 de la Loi, il faut qu'il ait un caractère volontaire ou délibéré ou qu'il résulte d'une insouciance ou d'une négligence telles qu'il frôle le caractère délibéré. Elle a précisé qu'il doit également y avoir une relation de cause à effet entre l'inconduite et le congédiement (pièce GD4-3) ;
  2. Elle a indiqué que de multiples actions ou omissions peuvent se voir attribuer le qualificatif d'inconduite dans le sens où ces agissements s'avèrent incompatibles avec les visées d'un contrat de travail, entrent en conflit d'intérêt avec les activités de l'employeur ou portent atteinte à la relation de confiance des parties (pièce GD4-3) ;
  3. Elle a soutenu que l'appelant a été congédié parce qu'il a effectué des transactions bancaires afin de s'approprier de sommes d'argent qui n'étaient pas disponibles dans son compte bancaire (pièce GD4-3) ;
  4. Elle a soumis que par ses agissements, l'appelant a brisé le lien de confiance qui existait entre les parties. Elle a souligné que l'appelant connaissait très bien le fonctionnement de la banque car il avait lu les principes fondamentaux et ces principes étaient révisés et expliqués en formation (pièce GD4-4) ;
  5. Elle a fait valoir que, selon l'employeur, le fait d'utiliser un délai de compensation pour s'approprier de fonds non disponibles n'est pas conforme au code de conduite de la banque et que ce n'était pas acceptable (pièce GD4-4) ;
  6. Elle a évalué que l'appelant devait raisonnablement savoir que de s'approprier de sommes d'argent qu'il n'avait pas était un acte illégal qui allait à l'encontre des principes établis par l'employeur (pièce GD4-4) ;
  7. Elle a évalué que l'appelant avait besoin de fonds et qu'il a soutiré de l'argent en faisant un chèque sans provision à partir d'un compte de banque, qu'il a ensuite déposé dans un autre compte bancaire. La Commission a souligné qu'en raison de la fonction de représentant à la clientèle occupée par l'appelant, celui-ci a manqué d'intégrité et brisé le lien de confiance qui existait pour maintenir son statut d'employé, car il a fait preuve d'un manquement implicite (pièces GD4-5 et GD4-7) ;
  8. Elle a déterminé que rien n'excusait le fait pour l'appelant d'avoir fait des transactions illégales à partir du guichet automatique et de ses comptes bancaires (pièce GD4-5) ;
  9. Elle a exprimé l'avis que l'appelant était conscient que le geste qu'il a commis allait à l'encontre de la politique de l'employeur. Elle a souligné que les gestes reprochés à l'appelant n'étaient pas compatibles avec l'emploi de représentant qu'il occupait et l'exercice fidèle et convenable des fonctions pour lesquelles il avait été embauché (pièce GD4-5 et GD4-7) ;
  10. Elle a soumis que même si l'appelant a allégué que plusieurs autres personnes font la même chose que lui, cela ne justifiait pas ses actes (pièce GD4-5) ;
  11. Elle a souligné qu'en prétendant que l'employeur avait appliqué une mesure disciplinaire trop sévère à son endroit en le congédiant et que ledit employeur aurait plutôt dû appliquer une mesure administrative à son endroit, par exemple une suspension, l'appelant était conscient que son geste n'était pas acceptable et qu'un mesure disciplinaire était appropriée dans les circonstances. La Commission a expliqué qu'elle n'avait pas à décider si la gravité de la sanction appliquée par l'employeur était justifiée, mais plutôt à se demander si le geste posé par l'appelant constituait de l'inconduite au sens du paragraphe 30(1) de la Loi (pièces GD4-5 et GD4-6) ;
  12. Elle a fait valoir que selon les principes fondamentaux énoncés dans le document « Principes fondamentaux - Notre code de conduite et d'éthique » de l'employeur, l'appelant devait raisonnablement savoir que ses gestes constituaient un manquement à ses obligations et qu'ils pouvaient entraîner des mesures disciplinaires allant jusqu'au congédiement (pièce GD4-6) ;
  13. Elle a souligné que bien que l'appelant ait mentionné qu'il était en période de formation, cela n'excusait pas la gravité du geste (pièce GD4-6) ;
  14. Elle a indiqué que lors du dépôt de sa demande de révision, l'appelant a inclus un relevé d'emploi provenant de l'employeur Signotech Inc., où il a travaillé du 20 août 2013 au 15 novembre 2013. Elle a expliqué que puisque sa période de prestations débutait le 29 septembre 2013, il avait travaillé pendant seulement cinq semaines du 20 août 2013 au 28 septembre 2013. La Commission a spécifié que selon l'avis envoyé à l'appelant le 13 novembre 2013, celui-ci a alors été informé que pour recevoir des prestations régulières à l'avenir, il devait présenter une nouvelle demande (pièce GD3-19), mais qu'il n'avait pas fait une telle demande (pièce GD4-6). Elle a précisé que selon la lettre de congédiement transmise à l'appelant, celui-ci a été congédié le 15 août 2013 et que selon le relevé d'emploi, son dernier jour payé était le 16 août 2013. Elle a expliqué que ces deux journées se situaient dans la même semaine et que cette situation ne contredisait pas le fait qu'il n'a pas droit aux prestations à partir du 29 septembre 2013 (pièce GD4-7) ;
  15. Elle a conclu que le fait de faire un chèque sans fonds dans un compte bancaire et de retirer l'argent provenant de ce chèque dans un autre compte bancaire alors que l'appelant savait qu'il n'avait pas de fonds, constitue des gestes d'inconduite au sens de la Loi (pièce GD4-7) ;
  16. Elle a soutenu que les gestes qui ont mené au congédiement de l'appelant étaient conscients, délibérés ou intentionnels et que ceux-ci étaient préjudiciables aux relations employeur-employé. Elle a souligné que l'appelant savait ou aurait dû savoir qu'il pouvait être congédié (pièce GD4-7) ;
  17. Elle a soutenu avoir démontré que le comportement de l'appelant allait à l'encontre de l'éthique et des principes instaurés par l'employeur et qu'il a été congédié en raison des gestes qu'il a commis (pièce GD4-7).

Analyse

[23] Bien que la Loi ne définisse pas le terme d'inconduite, la jurisprudence mentionne, dans l'arrêt Tucker (A-381-85), que :

« […] pour constituer de l'inconduite, l'acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d'une telle insouciance ou négligence que l'on pourrait dire que l'employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement au travail. ».

[24] Dans cette décision (Tucker, A-381-85), le juge Mark R. Macguigan de la Cour d'appel fédérale (la « Cour ») a également rappelé les propos du juge Reed de la Cour à l'effet que :

« […] L'inconduite, qui rend l'employé congédié inadmissible au bénéfice des prestations de chômage, existe lorsque la conduite de l'employé montre qu'il néglige volontairement ou gratuitement les intérêts de l'employeur, par exemple, en commettant des infractions délibérées, ou ne tient aucun compte des normes de comportement que l'employeur a le droit d'exiger de ses employés, ou est insouciant ou négligent à un point tel et avec une fréquence telle qu'il fait preuve d'une intention délictuelle […] ».

[25] Dans l'affaire Mishibinijima (2007 CAF 36), le juge Nadon de la Cour a fait le rappel suivant :

« Il y a donc inconduite lorsque la conduite du prestataire est délibérée, c'est-à- dire que les actes qui ont mené au congédiement sont conscients, voulus ou intentionnels. Autrement dit, il y a inconduite lorsque le prestataire savait ou aurait dû savoir que sa conduite était de nature à entraver l'exécution de ses obligations envers son employeur et que, de ce fait, il était réellement possible qu'il soit congédié. ».

[26] La Cour a défini la notion juridique d'inconduite au sens du paragraphe 30(1) de la Loi comme une inconduite délibérée dont le prestataire savait ou aurait dû savoir qu'elle était de nature à entrainer son congédiement. Pour déterminer si l'inconduite pourrait mener à un congédiement, il doit exister un lien de causalité entre l'inconduite reprochée au prestataire et son emploi; l'inconduite doit donc constituer un manquement à une obligation résultant expressément ou implicitement du contrat de travail (Canada (PG) c. Lemire, 2010 CAF 314).

[27] Dans l'arrêt McKay-Eden (A-402-96), le juge McDonald de la Cour a apporté la précision suivante :

« À notre avis, pour qu'une conduite soit considérée comme une «inconduite» sous le régime de la Loi sur l'assurance chômage, elle doit être délibérée ou si insouciante qu'elle frôle le caractère délibéré. ».

[28] Les décisions rendues dans les affaires Cartier (A-168-00) et MacDonald (A- 152-96) confirment le principe établi dans la cause Namaro (A-834-82) selon lequel il doit également être établi que l'inconduite a constitué la cause du congédiement du prestataire.

[29] Dans l'arrêt Marion (2002 CAF 185 - A-135-01), le juge Gilles Létourneau de la Cour a fait le rappel suivant :

« […] Le rôle du conseil arbitral n'était pas de se demander si la sévérité de la sanction imposée par l'employeur était justifiée ou non ou si le geste de l'employé constituait un motif valable de congédiement, mais plutôt de se demander si ce geste posé par l'employé constituait une inconduite au sens de la Loi. ».

[30] Pour que le geste reproché constitue de l'inconduite au sens de l'article 30 de la Loi, il faut qu'il ait un caractère volontaire ou délibéré ou qu'il résulte d'une insouciance ou d'une négligence telle qu'il frôle le caractère délibéré. Il doit également y avoir une relation de cause à effet entre l'inconduite et le congédiement.

[31] Par ailleurs, un contrat de travail peut se définir globalement comme une convention entre un employeur et une personne employée concernant l'attribution d'une rémunération et d'autres avantages, en échange de services et implique, du fait de cette association d'intérêts, le respect de règles de conduite entendues entre les parties et consacrées par l'éthique professionnelle, le bon sens, l'usage ou les mœurs.

[32] De multiples actions ou omissions peuvent se voir attribuer le qualificatif d'inconduite dans le sens où ces agissements s'avèrent incompatibles avec les visées d'un contrat de travail, entrent en conflit d'intérêt avec les activités de l'employeur ou portent atteinte à la relation de confiance entre les parties.

[33] La dérogation aux normes établies, aux directives, à un règlement formel ou tacite ou encore, à la convention collective, constitue de l'inconduite, dans la mesure où l'existence de ladite norme, directive ou règle est établie et la dérogation ou le manquement est bel et bien précisé.

[34] Dans le présent dossier, l'appelant a reconnu les faits qui lui sont reprochés par son employeur et qui ont mené à son congédiement, soit d'avoir effectué des transactions bancaires afin d'avoir accès à des sommes d'argent qui n'étaient pas disponibles dans son compte bancaire.

[35] Les gestes reprochés à l'appelant constituent clairement de l'inconduite au sens de la Loi.

[36] Les gestes qui lui sont reprochés sont incompatibles avec la fonction de représentant à la clientèle qu'il occupait à l'institution bancaire pour laquelle il travaillait.

[37] L'employeur a déclaré que les gestes posés par l'appelant constituaient un « truc illégal pour obtenir de l'argent » (pièce GD3-17). L'employeur a aussi expliqué que l'appelant avait utilisé un « délai de compensation » pour s'approprier de sommes d'argent, une pratique inacceptable et non conforme au code de conduite de la banque (pièces GD3-17 et GD3-24). L'employeur a aussi rappelé que l'appelant avait été rencontré par la directrice régionale et que celui-ci lui avait alors avoué avoir fait des chèques sans provision et les avoir déposés dans un compte bancaire pour obtenir de l'argent (pièce GD3-24).

[38] Même si l'appelant a déclaré que le code d'éthique de l'institution bancaire pour laquelle il a travaillé n'indiquait pas qu'il n'était pas permis de faire le genre de transaction qu'il a faite, il connaissait le fonctionnement et les exigences de cette institution. Il a d'ailleurs déclaré avoir lu ce document (pièce GD3-26).

[39] La preuve au dossier indique notamment que le document « Principes fondamentaux - Notre code de conduite et d'éthique » émet les exigences suivantes à l'endroit de ses employés :

« 1. Respectez toutes les exigences juridiques et gouvernementales ainsi que toutes les normes sectorielles partout où nous exerçons nos activités. Respectez toutes vos obligations contractuelles et juridiques. 2. Assurez-vous que vous comprenez bien toutes les politiques de BMO. […] 8. Évitez la fraude et l'appropriation illicite, ce qui comprend le détournement de fonds, le tirage à découvert, la création de fonds de couverture et les conversions irrégulières de fonds, de biens ou d'autres actifs. […] » (pièces GD3-29 et GD3-30).

[40] En dépit du fait que l'appelant ait expliqué avoir contacté le « Centre contact clientèle », le service à la clientèle de la banque pour laquelle il travaillait, afin de savoir si l'institution financière allait couvrir les chèques dans les 24 heures et avoir eu une réponse positive à cet effet, il n'a pas démontré qu'il avait reçu un telle cette indication de la part de la banque (pièce GD3-26).

[41] Le Tribunal est d'avis que l'appelant ne pouvait ignorer la portée des gestes qu'il a posés, et que dans ce contexte, il ne retient pas son argumentation voulant qu'il n'avait pas encore terminé sa formation au moment des faits reprochés et qu'il avait avoué à son employeur les gestes reprochés (pièce GD3-26).

[42] En agissant de la sorte, l'appelant a brisé le lien de confiance qui l'unissait à son employeur. Dans la lettre de congédiement de l'appelant, l'employeur lui a indiqué que ses « agissements dans les situations investiguées ont irrémédiablement brisé le lien de confiance nécessaire pour maintenir votre [son] statut d'employé […] » (pièce GD3-25).

[43] Le Tribunal est d'avis que les actes reprochés à l'appelant étaient d'une portée telle que celui-ci pouvait normalement prévoir qu'ils seraient susceptibles de provoquer son congédiement. Il savait que sa conduite était de nature à entraver les obligations envers son employeur et qu'il était possible qu'il soit congédié (Tucker, A-381-85, Mishibinijima, 2007 CAF 36).

[44] Le Tribunal considère que la preuve présentée démontre que l'appelant a été congédié en raison de gestes qu'il a posés de manière volontaire et délibérée (Tucker, A- 381-85, Mishibinijima, 2007 CAF 36).

[45] C'est pourquoi, le Tribunal estime que ces gestes constituent de l'inconduite au sens de la Loi et que l'appelant a perdu son emploi par sa propre faute. Le congédiement de l'appelant est la conséquence directe des gestes qui lui sont reprochés (Namaro, A- 834-82, MacDonald, A-152-96, Cartier, A-168-00).

[46] Même si l'appelant a dit trouver le congédiement « très sévère », qu'aucune sanction disciplinaire ne lui avait été imposée avant qu'il ne soit congédié et qu'il aurait été d'accord avec une mesure disciplinaire telle une suspension (pièces GD3-18, GD3-26 et GD2-1 à GD2-8), le Tribunal rappelle que la jurisprudence a établi que son rôle n'est pas d'évaluer si le congédiement est justifié ou si la sanction prise à l'endroit dudit appelant était appropriée, mais de déterminer si les gestes posés par celui-ci constituent une inconduite au sens de la Loi (Marion, 2002 CAF 185).

[47] S'appuyant sur la jurisprudence mentionnée plus haut et sur la preuve présentée, le Tribunal considère que l'appelant a perdu son emploi en raison de son inconduite et qu'en conséquence, la décision de la Commission de l'exclure du bénéfice des prestations d'assurance-emploi est justifiée dans les circonstances.

[48] Le Tribunal conclut que l'appel n'est pas fondé à l'égard du litige en cause.

Conclusion

[49] L'appel est rejeté.

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