Assurance-emploi (AE)

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Comparution

L’appelante, N. S., a participé par téléphone.

Décision

[1] Le Tribunal conclut que la demande renouvelée de prestations de l’appelante, présentée le 13 janvier 2014, ne doit pas être antidatée en 2004 parce qu’elle n’a pas démontré l’existence d’un motif valable pour la présentation tardive de la demande renouvelée de prestations.

Introduction

[2] L’appelante a déposé une demande renouvelée de prestations le 13 janvier 2014.

[3] L’appelante a demandé que sa demande du 13 janvier 2014 soit antidatée en 2004, année où ses prestations spéciales de 15 semaines ayant commencé le 15 février 2004 ont pris fin. L’intimée a rejeté la demande de l’appelante parce que cette dernière n’a pas démontré l’existence d’un motif valable justifiant le retard de la présentation de sa demande pendant toute la période écoulée.

[4] Le 22 janvier 2014, l’appelante a présenté une demande de révision de la décision prise par la Commission. L’intimée a maintenu sa décision originale, et l’appelante a interjeté appel devant la division générale du Tribunal de la sécurité sociale le 13 mars 2014.

Mode d'audience

[5] Le Tribunal a décidé de tenir l’audience par téléconférence pour les raisons énoncées dans l’avis d’audience daté du 7 avril 2014.

Question en litige

[6] La demande initiale de prestations de l’appelante peut-elle être considérée comme ayant été faite à une date antérieure en application de l’article10(4) de la Loi sur l’assurance-emploi?

Droit applicable

[7] L’article 10(4) de la Loi énonce les conditions auxquelles la demande initiale de prestations d’une partie prestataire peut être considérée comme ayant été faite à une date antérieure.

[8] Pour qu’une demande initiale de prestations soit antidatée pour prendre effet à une date antérieure, la partie prestataire doit démontrer :

  1. qu’à cette date antérieure elle remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations;
  2. qu’elle avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle elle a présenté sa demande, un motif valable justifiant son retard.

[9] La question de savoir s’il existe un motif valable justifiant l’antidatation d’une demande de prestations est une question mixte de fait et de droit (Procureur général du Canada c Burke, 2012 CAF 139; Procureur général du Canada c Innes, 2010 CAF 341; Procureur général du Canada c Albrecht, A-172-85).

Preuve

[10] L’appelante a déposé une demande renouvelée de prestations le 13 janvier 2014.

[11] L’appelante a demandé que sa demande du 13 janvier 2014 soit antidatée en 2004, année où sa demande de prestations spéciales ayant commencé le 15 février 2004 a pris fin.

[12] L’appelante a déclaré qu’elle a tardé à déposer sa demande parce qu’elle était très malade et qu’elle était atteinte d’une tumeur osseuse, et que cela s’était produit à la suite de son renvoi après 18 ans de service. Le grand nombre d’interventions chirurgicales qu’elle devait subir ont causé du stress et de la confusion, et elle a mal compris l’explication donnée par Service Canada.

[13] Lorsque l’intimée a communiqué avec l’appelante, cette dernière a déclaré qu’elle avait présenté une demande de prestations de maladie, mais qu’elle n’avait pas songé à présenter une demande de prestations régulières. Elle a affirmé avoir été traitée de façon inéquitable et avoir reçu des renseignements inexacts de la part du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, du Régime de pensions du Canada (RPC) et de l’Assurance‑emploi.

[14] Les pièces GD3-23 à GD3-32 sont une lettre rédigée par S. F., directrice générale de la Direction des politiques, des appels et de la qualité. Cette lettre informe l’appelante qu’elle avait touché des prestations de maladie à partir du 16 février 2004 pendant les 15 semaines maximales permises et que rien dans son dossier ne fait état qu’elle a demandé la conversion de sa demande de prestations de maladie en demande de prestations régulières. Cette lettre mentionnait également que l’appelante a présenté une demande de prestations régulières le 30 mai 2011 pour laquelle elle n’avait pas accumulé suffisamment d’heures afin d’être admissible aux prestations.

[15] L’intimée a conclu que l’appelante n’a pas réussi à démontrer l’existence d’un motif valable, durant toute la période écoulée, pour justifier la présentation tardive de sa demande de prestations d’assurance-emploi.

[16] À l’audience, l’appelante a répété la plupart des renseignements fournis dans le dossier d’appel. Elle a également déclaré que, en 2004 ou vers ce moment-là, elle s’est présentée au centre de Service Canada à deux reprises afin d’obtenir des renseignements sur les prestations et qu’elle a reçu des documents administratifs pour demander des prestations d’invalidité du RPC. Lorsque le Tribunal lui a demandé d’expliquer la raison pour laquelle elle n’avait pas cherché à obtenir de renseignements sur sa demande en 2011, l’appelante a répondu qu’elle n’y avait pas pensé.

[17] Finalement, l’appelante a déclaré qu’elle ne connaît pas les règles de l’assurance‑emploi et que les agentes et agents de la Commission sont des professionnelles et professionnels qui auraient dû être en mesure de constater les prestations auxquelles elle était admissible.

Observations

[18] L’appelante a fait valoir ce qui suit :

  1. Elle a tardé à déposer sa demande parce qu’elle était très malade et qu’elle était atteinte d’une tumeur osseuse, et que cela s’était produit à la suite de son renvoi après 18 années de service. Le grand nombre d’interventions chirurgicales qu’elle devait subir ont causé du stress et de la confusion, et elle a mal compris l’explication donnée par Service Canada.
  2. Elle a reçu des renseignements inexacts de la part du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées, du RPC et de l’Assurance-emploi.

[19] L’intimée a fait valoir ce qui suit :

  1. l’appelante n’a pas agi comme l’aurait fait une personne raisonnable dans la même situation pour se renseigner au sujet de ses droits et obligations en vertu de la Loi;
  2. même si l’appelante a été frappée d’incapacité pendant une partie de la période du retard, la loi prévoit clairement que le motif valable doit exister pendant toute cette période.

Analyse

[20] Pour que sa demande initiale de prestations soit antidatée en 2004, l’appelante doit démontrer :

  1. qu’elle est admissible aux prestations depuis 2004;
  2. qu’elle avait un motif valable, durant toute la période écoulée, pour tarder à présenter sa demande initiale de prestations.

[21] D’après la Cour d’appel fédérale (CAF), pour établir l’existence d’un motif valable de retarder la présentation d’une demande initiale de prestations, la partie prestataire doit démontrer qu’elle a agi comme une personne raisonnable et prudente l’aurait fait dans la même situation pour connaître ses droits et ses obligations en vertu de la Loi (Mauchel c Procureur général du Canada, 2012 CAF 202; Bradford c Commission de l’assurance-emploi du Canada, 2012 CAF 120; Procureur général du Canada c Albrecht, A-172-85).

[22] La CAF a conclu en outre qu’à moins qu’il n’existe des circonstances exceptionnelles, l’on s’attend d’une personne raisonnable qu’elle prenne des mesures raisonnablement rapides pour comprendre son droit à des prestations et ses obligations en vertu de la Loi (Procureur général du Canada c Kaler, 2011 CAF 266, Procureur général du Canada c Innes, 2010 CAF 341; Procureur général du Canada c Somwaru, 2010 CAF 336).

[23] L’appelante n’a pas communiqué avec Service Canada afin de se renseigner sur l’antidatation de sa demande avant le 13 janvier 2014. Les motifs de l’appelante concernant son retard étaient qu’elle ne savait pas qu’elle pouvait présenter une demande à cette époque. Elle a subi une chirurgie et elle a eu besoin de plusieurs semaines pour récupérer. Elle a également fait valoir qu’elle a reçu des renseignements inexacts de la part de Service Canada lorsqu’on lui a dit de présenter une demande de prestations d’invalidité du RPC.

[24] L’intimé a soutenu que même si l’appelante a été frappée d’incapacité pendant une partie de la période du retard, la loi prévoit clairement que le motif valable doit exister pendant toute cette période.

[25] Le Tribunal reconnaît que l’appelante a vécu une période très difficile en 2004. Il est raisonnable de croire que sa situation a été difficile pendant la majeure partie de 2004.

[26] Une partie du critère relatif au motif valable pour l’antidatation est que la partie prestataire doit avoir un motif valable pendant toute la période du retard. Le Tribunal est d’avis que l’appelante n’a pas été en mesure de prouver qu’elle avait un motif valable pendant toute la période du retard. Lorsque le Tribunal lui a demandé d’expliquer la raison pour laquelle elle ne s’était pas renseignée auprès de la Commission au sujet de son admissibilité en 2011, l’appelante a répondu qu’elle n’y avait pas pensé.

[27] L’appelante a également soutenu qu’elle a fait des démarches à deux reprises auprès de Service Canada et qu’on lui a donné des renseignements sur les prestations d’invalidité du RPC. Elle a déclaré qu’on aurait dû être en mesure de constater qu’elle était admissible aux prestations.

[28] Le Tribunal n’est pas d’accord avec la déclaration ci-dessus. L’appelante n’a pas fourni beaucoup de détails relativement à ces visites à Service Canada. Rien ne permet de savoir les questions que l’appelante a posées à l’agente ou à l’agent. Il est possible, étant donné le fait que l’appelante venait de subir une chirurgie, que l’agente ou l’agente avait compris qu’elle demandait des renseignements sur les prestations d’invalidité.

[29] Dans l’arrêt Canada c Carry (2005 CAF 367), le juge Linden a clairement précisé qu’une partie prestataire a une obligation formelle de vérifier ses obligations en vertu de la Loi.

[30] Le Tribunal estime qu’une personne raisonnable et prudente n’aurait pas attendu aussi longtemps que l’a fait l’appelante avant de se renseigner sur ses droits et obligations en vertu de la Loi. En outre, le Tribunal estime que les circonstances de l’appelante, à savoir qu’elle a retardé de plus de 10 ans la présentation de sa demande parce qu’elle ignorait qu’elle aurait pu présenter une demande en 2004, ne sont pas des circonstances exceptionnelles.

[31] Le critère pour déterminer si la demande initiale peut être antidatée à une date antérieure en vertu de l’article 10(4) de la Loi comporte deux volets. La preuve doit établir si la partie appelante satisfait aux deux volets du critère, satisfait à seulement un des volets ou ne satisfait à aucun des deux volets du critère. En l’espèce, le Tribunal a déterminé que l’appelante n’a pas prouvé qu’elle avait un « motif valable » pendant toute la période du retard (deuxième volet du critère). Par conséquent, le Tribunal n’a pas tiré de conclusion au sujet du premier volet du critère.

[32] Enfin, le Tribunal estime que l’intimée a tenu compte de l’ensemble de la preuve qui lui avait été présenté avant de déterminer si l’appelante était admissible aux prestations.

Conclusion

[33] L’appel est rejeté.

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