Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparutions

L’appelant, C. N. T., a comparu à l’audience par téléconférence prévue.

Introduction

[1] L’appelant a établi une demande initiale de prestations d’assurance‑emploi le 4 août 2014. Il a travaillé pour le restaurant Tomo du 25 avril 2012 au 3 novembre 2013. Le 15 août 2014, il a présenté une demande d’antidatation afin que sa demande soit antidatée au 3 novembre 2013. La Commission d’assurance‑emploi du Canada (la « Commission ») a conclu que l’appelant n’a pas prouvé qu’entre le 3 novembre 2013 et le 2 août 2014, il avait un motif valable de demander des prestations tardivement (GD3‑18).

[2] L’appelant a demandé une révision de la décision de la Commission rendue le 30 août 2014. Le 26 septembre 2014, la Commission a informé le prestataire qu’elle n’avait pas modifié sa décision initiale concernant la demande d’antidatation (GD3-22 et GD3-23).

[3] L’appelant interjette appel de la décision révisée de la Commission devant le Tribunal de la sécurité sociale (GD2-1 à GD2-3).

[4] L’audience a été tenue par voie de téléconférence pour les motifs suivants :

  • la complexité de la question soulevée en appel;
  • le fait que seul l’appelant sera présent;
  • l’information au dossier, y compris la nature de l’information manquante et la nécessité d’obtenir des clarifications;
  • le caractère économique et opportun du choix de l’audience.

Question en litige

[5] L’appelant interjette appel de la décision de refuser la demande d’antidatation en vertu du paragraphe 10(4) de la Loi sur l’assurance‑emploi (« la Loi »).

Droit applicable

[6] Le paragraphe 10(1) de la Loi prescrit ce qui suit :

(1) La période de prestations débute, selon le cas :

  1. (a) le dimanche de la semaine au cours de laquelle survient l’arrêt de rémunération;
  2. (b) le dimanche de la semaine au cours de laquelle est formulée la demande initiale de prestations, si cette semaine est postérieure à celle de l’arrêt de rémunération.

[7] Le paragraphe 10(4) de la Loi prescrit ce qui suit :

(4) Lorsque le prestataire présente une demande initiale de prestations après le premier jour où il remplissait les conditions requises pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si le prestataire démontre qu’à cette date antérieure il remplissait les conditions requises pour recevoir des prestations et qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.

Preuve

[8] Une demande initiale de prestations d’assurance‑emploi établie le 4 août 2014 (GD3‑12).

[9] Le relevé d’emploi pour le restaurant Tomo pour la période du 25 avril 2012 au 2 novembre 2013, faisant état de 2 064 heures d’emploi assurable (GD3-14).

[10] Le 15 août 2014, l’appelant a présenté une demande d’antidatation et demandé que la demande de prestations soit antidatée au 3 novembre 2013 (GD3‑17).

[11] La Commission a conclu que l’appelant n’a pas prouvé qu’entre le 3 novembre 2013 et le 2 août 2014, il avait un motif valable de retarder la présentation de sa demande de prestations (GD3‑18).

[12] L’appelant a demandé la révision de la décision de la Commission rendue le 30 août 2014. Le 26 septembre 2014, la Commission a informé le prestataire qu’elle n’avait pas modifié sa décision initiale concernant la demande d’antidatation (GD3‑22 et GD3‑23).

[13] L’appelant interjette appel de la décision révisée de la Commission devant le Tribunal de la sécurité sociale. Il estime qu’elle est injuste et demande au Tribunal de faire une exception. Il a des obligations financières et il a besoin des prestations pour acquitter ses frais de subsistance (GD2-1 à GD2-3).

[14] La Commission a communiqué avec l’appelant le 26 septembre 2014. Il a déclaré qu’il croyait qu’il pourrait trouver un emploi rapidement; c’est pourquoi il n’a pas présenté une demande de prestations immédiatement. Il a emprunté de l’argent plutôt que de demander des prestations (GD3‑21).

Observations

[15] L’appelant a fait valoir qu’il a attendu deux ou trois mois après avoir été congédié, croyant qu’il trouverait un autre travail. Il cherchait activement. Un de ses amis lui a dit qu’il disposait d’un délai d’un an pour demander des prestations d’assurance‑emploi. Il ne voulait pas recourir à une demande de prestations d’assurance‑emploi si cela n’était pas nécessaire.

[16] Il avait déjà touché des prestations d’assurance‑emploi et il avait alors fait une demande dans les délais prescrits. Il ignorait cependant qu’il devait faire la demande dans un délai d’un mois. Il a appelé Service Canada en avril, en mai ou en juin, mais il n’a pu parler avec personne. Il soutient avoir consulté le site Web pour obtenir des renseignements. Il estime avoir une bonne connaissance pratique de l’anglais.

[17] L’intimée soutient que les prestataires qui souhaitent demander des prestations d’assurance‑emploi pour une période antérieure doivent dans un premier temps être admissibles à la date antérieure en question et doivent ensuite démontrer qu’ils avaient un motif valable pendant toute la période du retard à présenter leur demande.

[18] Dans la présente affaire, la Commission soutient que le prestataire n’a pas agi comme une « personne raisonnable » l’aurait fait dans sa situation pour s’enquérir de ses droits et de ses obligations sous le régime de la Loi. Plus particulièrement, le prestataire n’a pas présenté de demande après son dernier jour de travail au restaurant Tomo au mois de novembre 2013. Il a présenté une demande le 4 août 2014, soit neuf mois après son dernier jour de travail. Il était censé obtenir un emploi quelques mois plus tard et il n’a pas présenté de demande de prestations lorsqu’il s’est retrouvé au chômage et qu’il s’est cherché du travail, ni lorsque cette possibilité d’emploi s’est soldée par un échec. Le fait de choisir de chercher du travail plutôt que de présenter une demande de prestations immédiatement est louable, mais il ne constitue pas en soi un motif valable de retarder la présentation d’une demande de prestations.

[19] Le prestataire a mentionné qu’un ami lui avait dit qu’il disposait d’un délai d’un an pour présenter une demande. Malheureusement, le prestataire ne s’est pas informé auprès de la Commission à cet égard et pour savoir quoi demander et à quel moment en faire la demande. Le prestataire est resté sans revenu pendant des mois et il a emprunté de l’argent. Rien ne l’empêchait de présenter une demande ou de s’informer à cet égard. En outre, le prestataire avait précédemment fait des demandes et avait alors touché des prestations. Il savait ce qu’il devait faire pour obtenir des prestations; présenter une demande.

[20] Dans son appel, le prestataire a déclaré qu’il avait bien présenté une demande, mais que suivant la loi, il avait présenté sa demande tardivement, et ses motifs pour expliquer sa demande tardive (neuf mois) ne sont pas suffisants pour que la Commission commence sa demande comme il le souhaite au mois de novembre 2013.

Analyse

[21] Pour que sa demande initiale de prestations soit antidatée au mois de novembre 2013, l’appelant doit prouver qu’il était admissible à des prestations à cette date et qu’il avait un motif valable, tout au long de la période, de retarder la présentation de la demande initiale de prestations.

[22] D’après les renseignements fournis par les parties, le Tribunal conclut que l’appelant aurait été admissible à des prestations au mois de novembre 2013. En conséquence, le Tribunal doit déterminer si l’appelant avait un motif valable de retarder la présentation de sa demande tout au long du retard.

[23] L’existence d’un motif valable soulève une question mixte de fait et de droit. Il incombe à l’appelant de prouver l’existence d’un motif valable.

[24] La Cour d’appel fédérale (CAF) a conclu que, pour établir l’existence d’un « motif valable », le prestataire doit démontrer qu’il a fait ce qu’une personne raisonnable et prudente aurait fait dans les mêmes circonstances, soit pour clarifier la situation concernant son emploi, soit pour confirmer ses droits et ses obligations sous le régime de la Loi. Chaque cas doit être évalué sur le fondement des faits qui lui sont propres et, dans cette mesure, il n’existe aucun principe clair et facilement applicable (Canada (A.G.)c. Albrecht, [1985] 1 C.F. 710 (C.A.F.) A‑172‑85, et Canada (A.G.) c. Caron, [1986] A.C.F.no 85 (C.A.F.) A-395-85).

[25] La CAF a conclu en outre qu’à moins qu’il n’existe des circonstances exceptionnelles, l’on s’attend d’une personne raisonnable qu’elle prenne des mesures raisonnablement rapides pour comprendre son droit à des prestations et ses obligations sous le régime de la Loi (Procureur général du Canada c. Kaler,2011 CAF 266).

[26] L’appelant a retardé la présentation de sa demande parce qu’il a cru qu’il trouverait un autre emploi dans les mois suivant sa mise à pied. Il a décidé d’emprunter de l’argent pour éviter de devoir demander des prestations d’assurance‑emploi. En outre, un ami lui a dit qu’il disposait d’un délai d’un an pour présenter une demande de prestations.

[27] Bien que la décision de l’appelant d’utiliser ses propres fonds plutôt que de demander des prestations d’assurance‑emploi soit louable, cela ne constitue pas un motif valable au sens de la Loi. Étant donné l’expérience passée de l’appelant au chapitre de l’assurance‑emploi, le Tribunal conclut qu’une personne raisonnable aurait fait d’autres efforts pour s’enquérir de ses droits et de ses obligations et qu’elle aurait notamment consulté le site Web ou se serait rendue au bureau de Service Canada. Lorsque sa possibilité d’emploi initiale n’a pas porté fruit dans les deux ou trois mois qui ont suivi sa mise à pied, l’appelant aurait pu raisonnablement communiquer avec Service Canada pour s’informer des diverses options qui s’offraient à lui.

[28] La Cour d’appel fédérale a clairement déclaré que l’ignorance de la loi, ou la compréhension erronée des droits et des obligations en cause, ne constituent pas un « motif valable » au sens de la Loi (Canada (A.G.) c. Larouche,(1994), 176 N.R. 69).

[29] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas démontré qu’il a agi comme une personne raisonnable l’aurait fait dans sa situation pour confirmer ses droits et ses obligations sous le régime de la Loi. L’appelant n’a pas démontré qu’il avait, tout au long de la période allant du 3 novembre 2013 au 2 août 2014, un motif valable justifiant le retard dans la présentation de sa demande de prestations d’assurance‑emploi.

Conclusion

[30] L’appel est rejeté.

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