Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparution

L’appelant, W. W., a participé à l’audience qui s’est tenue par téléconférence.

Introduction

[1] L’appelant a présenté une demande de prestations régulières et était incapable de se connecter au système. Il a présenté une demande de renouvellement et à ce stade l’intimée lui a refusé les prestations. L’appelant a déposé une demande de révision et les prestations lui ont été refusées au stade de la révision. L’appelant a interjeté appel au Tribunal et une audience a été prévue.

[2] Tel qu’il appert de l’avis d’audience du 23 avril 2015, l’audience s’est tenue par téléconférence pour éviter aux parties de perdre temps et argent, et pour clarifier la preuve de l’appelant.

Question en litige

[3] L’appelant interjette appel du refus de l’intimée de lui accorder des prestations d’assurance-emploi au motif qu’il n’a pas transmis ses déclarations dans le délai alloué conformément aux articles 10 et 50 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) et à l’article 26 du Règlement sur l’assurance-emploi (Règlement).

Droit applicable

[4] Paragraphe 10(5) de la Loi :

Lorsque l’appelant présente une demande de prestations, autre qu’une demande initiale, après le délai prévu par règlement pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si celui-ci démontre qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.

[5] Paragraphe 50(1) de la Loi :

Tout appelant qui ne remplit pas une condition ou ne satisfait pas à une exigence prévue par le présent article n’est pas admissible au bénéfice des prestations tant qu’il n’a pas rempli cette condition ou satisfait à cette exigence.

[6] Paragraphe 50(4) de la Loi :

Toute demande de prestations pour une semaine de chômage comprise dans une période de prestations est présentée dans le délai prévu par règlement.

[7] Paragraphe 50(10) de la Loi :

L’intimée peut suspendre ou modifier les conditions ou exigences du présent article ou des règlements chaque fois que, à son avis, les circonstances le justifient pour le bien de l’appelant ou un groupe d’appelants ou une catégorie d’appelant.

[8] Article 112 de la Loi :

(1) Quiconque fait l’objet d’une décision de l’intimée, de même que tout employeur d’un appelant faisant l’objet d’une telle décision, peut, dans les trente jours suivant la date où il en reçoit communication, ou dans le délai supplémentaire que l’intimée peut accorder, et selon les modalités prévues par règlement, demander à l’intimée de réviser sa décision.

(2) L’intimée est tenue d’examiner de nouveau sa décision si une telle demande lui est présentée conformément au paragraphe (1).

(3) Le gouverneur en conseil peut, par règlement, préciser les cas où l’intimée peut accorder un délai plus long pour présenter la demande visée au paragraphe (1).

[9] Article 26 du Règlement :

(1) Sous réserve du paragraphe (2), l’appelant qui demande des prestations pour une semaine de chômage comprise dans une période de prestations présente sa demande dans les trois semaines qui suivent cette semaine.

(2) L’appelant qui n’a pas demandé de prestations durant quatre semaines consécutives ou plus et qui en fait la demande par la suite pour une semaine de chômage présente sa demande dans la semaine qui suit cette dernière.

Preuve

[10] L’appelant a présenté une demande de prestations le 7 mai 2014. Le 3 juillet 2014, il a tenté de traiter sa déclaration de la semaine du 20 avril 2014 à l’aide du service de déclaration par Internet. La tentative de l’appelant a échoué puisque la déclaration devait être traitée au plus tard le 17 mai 2014 conformément au paragraphe 26(1) du Règlement (GD3-15).

[11] Le 3 juillet 2014, l’appelant a déposé une demande de renouvellement des prestations en demandant que sa demande soit datée du 18 avril 2014. Il a déclaré qu’il n’avait pas rempli ses déclarations parce qu’il attendait une réponse en ligne après qu’il eut été avisé de son droit aux prestations. Au moment où il vérifiait, en ligne, le statut de sa demande, il a réalisé qu’il avait omis de remplir ses déclarations et à ce moment il a déposé une demande de renouvellement (GD3-25).

[12] Le 1er décembre 2014, l’intimée a notifié à l’appelant son refus de verser les prestations d’assurance-emploi du 21 avril 2014 au 20 juin 2014 parce que l’appelant n’avait pas rempli ses déclarations dans le délai prescrit et n’avait pas démontré de motif valable justifiant son retard.

[13] Le 19 décembre 2014, l’appelant a demandé une révision de la décision. Lorsqu’il a réalisé en juillet qu’aucune prestation ne lui avait été versée, et au moment de vérifier l’état de sa demande, il a réalisé qu’il avait omis de remplir ses déclarations. Il a alors rempli une nouvelle demande et s’est rendu à un bureau de l’assurance-emploi pour obtenir des consignes supplémentaires. En outre, à ce jour il a rempli ses déclarations avec diligence.

[14] Le 20 janvier 2015, l’appelant a signalé à l’intimée qu’il n’arrivait pas à trouver sur Internet l’information nécessaire pour remplir ses déclarations. Il a tenté d’obtenir des renseignements auprès du service d’assistance téléphonique de Service Canada, mais n’y est jamais parvenu. Il s’est finalement rendu au bureau de Service Canada, à la fin mai ou au début juin, où on l’a informé que son dossier était toujours en traitement et où on lui a demandé de déposer une demande portant une date antérieure, ce à quoi il s’est conformé. Il prétend que le site web devrait indiquer, au moyen d’un lettrage en caractère gras, que les déclarations sont essentielles au versement des prestations. Il a déclaré qu’il s’était conformé à toutes les demandes qu’il avait reçues et qu’il continuerait d’agir ainsi. Il a déclaré ses vérifications et ses appels répétés il n’avait pu parler à un agent jusqu’à ce qu’il se rende aux bureaux de Service Canada.

[15] Le 21 janvier 2015, l’intimée a informé l’appelant qu’après avoir examiné la demande de révision elle avait décidé de maintenir la décision du 1er décembre 2014.

[16] Le 12 février 2015, l’appelant a interjeté appel devant le Tribunal.

[17] L’appelant a informé le Tribunal qu’il avait reçu le rôle, en avait lu le contenu et comprenait bien les questions soumises au Tribunal. L’appelant a réitéré ses allégations à l’intimée et au Tribunal. Il a déclaré que le système n’était pas très convivial et qu’il souhaitait que des consignes obligatoires soient présentées dans un lettrage en caractères gras. L’appelant a fourni une copie de la lettre de l’intimée, en date du 7 mai 2014, dans laquelle se trouvaient des instructions pouvant prêter à confusion (GD5-2).

Observations

[18] L’appelant a fait valoir que :

  1. Il ignorait l’existence d’un délai dans lequel il devait remplir sa déclaration puisqu’il s’agissait pour lui d’une première demande et qu’il n’avait aucune expérience à cet égard.
  2. Il croyait qu’on lui demanderait de remplir ses déclarations une fois qu’il aurait reçu paiement. L’appelant a cru qu’il aurait été en mesure de remonter dans le temps et de remplir ses déclarations antérieures, mais à la suite de plusieurs tentatives infructueuses, il a réalisé qu’il était impossible de favoriser le dépôt d’une demande de renouvellement pour recevoir des prestations.
  3. Le langage dans la lettre qu’il a reçue était différent du langage utilisé dans l’avis qu’on lui a envoyé le 7 mai 2014. Dans l’avis du 7 mai 2014, on l’informait de son taux de prestations, des semaines d’admissibilité et on l’incitait à remplir ses déclarations.
  4. Ce n’est pas son irresponsabilité qui l’a empêché de remplir ses déclarations en temps opportun.

[19] L’intimée a fait valoir que :

  1. Selon le paragraphe 50(4) de la Loi, toute demande de prestations pour une semaine de chômage comprise dans une période de prestations doit être présentée dans le délai prévu au paragraphe 26(1) de la Loi. Selon le paragraphe 10(5) de la Loi, si l’appelant présente une déclaration après le délai prévu par règlement pour la présenter, elle doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si l’appelant démontre qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard. Le paragraphe 50(1) de la Loi prévoit que les appelants qui ne remplissent pas une condition ou ne satisfont pas à une exigence prévue par l’article 50 de la Loi sont inadmissibles au bénéfice des prestations tant qu’ils n’ont pas rempli cette condition ou satisfait à cette exigence.
  2. L’appelant savait qu’il devait remplir ses déclarations. Il a admis qu’il avait reçu, le 7 mai 2014, un avis de l’intimée dans lequel elle lui demandait de remplir ses déclarations (GD2-2). On n’a jamais imposé à l’appelant d’attendre de recevoir ses prestations avant de commencer à remplir ses déclarations. L’appelant a attendu jusqu’au 3 juillet 2014 pour remplir sa déclaration relative à la période débutant le 20 avril 2014 et ce, sans en discuter avec l’intimée. Il a pris sa décision sans consulter qui que ce soit. Dans la présente affaire, l’appelant n’a pas démontré qu’il avait, pendant la période qui s’est écoulée avant qu’il remplisse ses prestations, de motif valable justifiant son retard. L’appelant n’a pas tenté de se convaincre de ses droits et de ses obligations aux termes de la Loi en contactant l’intimée.
  3. Le fait est que l’appelant a bien reçu l’encart du service de déclaration électronique (GD3-11) lorsqu’il a présenté sa demande initiale de prestations. Le document est envoyé automatiquement au moment du dépôt d’une demande de prestations. L’encart du service de déclaration électronique indique clairement à l’appelant qu’il doit soumettre sa première déclaration à la date inscrite sur le relevé des prestations qu’il a reçu, ou dans les jours suivant cette date. La responsabilité d’avoir lu tous les renseignements qu’il a reçus avec son dossier de demande de prestations et de lire toute la correspondance envoyée subséquemment par l’intimée incombe à l’appelant. À défaut de cela, il revient certainement à l’appelant de se renseigner au sujet de sa demande beaucoup plus rapidement qu’il ne l’a fait. L’appelant a pris la décision d’attendre pendant huit semaines après avoir fait sa demande de prestations pour soumettre ses déclarations. Bien que le système de l’assurance-emploi ne lui soit pas familier, le manque d’expérience ne modifie en rien ses droits et obligations aux termes de la Loi et son obligation d’agir en personne raisonnable, soit en communiquant avec l’intimée, soit en remplissant ses déclarations dans le délai alloué.
  4. Le maintien de la décision de l’intimée, selon laquelle elle refuse les prestations d’assurance-emploi relatives à la période du 21 avril 2014 au 20 juin 2014, est fondé aux termes du paragraphe 50(1) de la Loi.

Analyse

[20] La question dont est saisi le Tribunal porte sur l’appel du refus de l’intimée d’accorder des prestations d’assurance-emploi à l’appelant parce qu’il n’a pas rempli ses déclarations pendant la période permise conformément aux articles 10 et 50 de la Loi et à l’article 26 du Règlement.

[21] Le paragraphe 10(5) de la Loi :

Lorsque l’appelant présente une demande de prestations, autre qu’une demande initiale, après le délai prévu par règlement pour la présenter, la demande doit être considérée comme ayant été présentée à une date antérieure si celui-ci démontre qu’il avait, durant toute la période écoulée entre cette date antérieure et la date à laquelle il présente sa demande, un motif valable justifiant son retard.

[22] Le paragraphe 50(1) de la Loi prévoit:

Tout appelant qui ne remplit pas une condition ou ne satisfait pas à une exigence prévue par le présent article n’est pas admissible au bénéfice des prestations tant qu’il n’a pas rempli cette condition ou satisfait à cette exigence.

[23] Paragraphe 50(10) de la Loi :

L’intimée peut suspendre ou modifier les conditions ou exigences du présent article ou des règlements chaque fois que, à son avis, les circonstances le justifient pour le bien de l’appelant ou un groupe d’appelants ou une catégorie d’appelant.

[24] L’article 26 du Règlement prévoit :

(1) Sous réserve du paragraphe (2), l’appelant qui demande des prestations pour une semaine de chômage comprise dans une période de prestations présente sa demande dans les trois semaines qui suivent cette semaine.

[25] Dans l’affaire Larouche (A-644-93), le juge Décary a fait savoir par écrit que :

« La jurisprudence de cette Cour est claire : la bonne foi et l'ignorance de la loi n'excusent pas à elles seules le défaut de se conformer à une prescription législative; encore faut-il, en effet, que la prestataire retardataire démontre qu'elle a agi comme l'aurait fait une personne raisonnable dans la même situation pour s'assurer des droits et des obligations que lui impose la Loi. »

[26] Le but de ces exigences a été clairement exprimé par le juge McNair dans CUB 12818 :

[Traduction] « Les dispositions législatives qui énoncent les conditions nécessaires pour présenter une demande initiale de prestations ont été adoptées par le Parlement à des fins déterminées, c’est-à-dire pour assurer une gestion efficace et efficiente du régime d’assurance-emploi. Les dispositions ne sont ni dépourvues de sens ni superflues. Elles représentent le droit et le prestataire doit s’y conformer à moins d’avoir un motif valable d’y déroger. »

[27] Dans la présente affaire, le Tribunal constate que l’appelant a attendu jusqu’au 3 juillet 2014 pour déposer sa déclaration relative à la période débutant le 20 avril 2014, et ce, sans en discuter avec la Commission. Il n’a pas démontré qu’il avait, pendant la période qui s’est écoulée avant qu’il remplisse ses prestations, de motif valable justifiant son retard. L’appelant a mentionné au Tribunal que ses tentatives de connexion à Internet avaient échoué. Cet échec était, en fait, attribuable au retard dans le dépôt de ses déclarations.

[28] L’appelant n’a pas tenté de se convaincre de ses droits et de ses obligations aux termes de la Loi en contactant l’intimée. Tout au long de la période de retard, il n’a fait aucun effort pour connaître ses droits et ses responsabilités aux termes de la Loi. On ne peut affirmer que l’appelant a agi comme une personne prudente et raisonnable. L’appelant a déclaré que le processus ne lui était pas familier et que le système n’était pas convivial. L’appelant a fourni au Tribunal une copie de son relevé des prestations du 7 mai 2014 (GD5-2) sur lequel figurent des instructions imprécises selon l’appelant. Le Tribunal est d’avis que le relevé des prestations est clair et sans ambiguïté. Le relevé mentionne, en lettres majuscules : « important- veuillez remplir vos déclarations sur internet à l’adresse suivante : www.servicecanada.gc.cadeclarationae. Si vous n’avez pas accès à internet, veuillez utiliser le service de déclaration téléphonique : 1 800 531-7555 ». Le relevés de prestations donne d’autres consignes dont la note en lettres majuscules voulant que l’appelant doit remplir ses déclarations le samedI 03-05-2014 ou quelques jours après, et si l’appelant n’a pas d’accès à Internet, il doit communiquer avec le service de renseignement de l’assurance-emploi au 1 800 206-7218 ou en se rendant à un bureau de Service Canada.

[29] Le Tribunal refuse d’accepter qu’une personne raisonnable, placée dans les mêmes circonstances, aurait repoussé pendant environ deux mois l’exercice de remplir ses déclarations nécessaires au versement des prestations. La tentative de l’appelant de se connecter au système de déclaration par Internet le 3 juillet 2014 a échoué puisque la déclaration devait être traitée au plus tard le 17 mai 2014 conformément au paragraphe 26(1) du Règlement. Le Tribunal est d’avis qu’une personne raisonnable, placée dans des circonstances similaires, aurait fait des vérifications auprès de Service Canada avant le 3 juillet 2014 pour se convaincre précisément de ses droits et de ses obligations en la matière, ce que l’appelant n’a pas fait.

[30] La jurisprudence prévoit qu’un appelant a l’obligation de « vérifier assez rapidement » si il ou elle a droit à des prestations d’assurance-emploi et de s’assurer de ses droits et obligations aux termes de la Loi : Canada (P.G.) c. Carry, 2005 CAF 367, 344 N.R.) 142 au paragr. 5 (Carry; (Canada (P.G.) c. Larouche (1994), 176 N.R. 69 au paragr. 6 (C.A.F.); (Canada (P. G.) c. Brace, 2008 CAF 118; 377 N.R. 228) au paragr. 12. Cette obligation impose un devoir de prudence sévère et strict : Albrecht au paragr. 13. « L’ignorance de la loi et la bonne foi ne constituent pas des motifs valables. » : Carry au paragr. 5; Procureur général du Canada c. Trinh, 2010 CAF 335 aux paragr. 7, 8.

[31] Il appert du dossier que l’appelant n’a déployé aucun effort pour être au fait de son admissibilité aux prestations et pour connaître ses droits et ses obligations aux termes de la Loi.

[32] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas rempli ses déclarations en temps opportun conformément à la Loi et doit rejeter l’appel.

Conclusion

[33] L’appel est rejeté.

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