Assurance-emploi (AE)

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Introduction

[1] La demanderesse demande au Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») la permission d’en appeler de la décision que le conseil arbitral (le « Conseil ») a rendue le 11 avril 2013. Le Conseil a accueilli l’appel du prestataire alors que la Commission avait imposé une exclusion du bénéfice des prestations pour une période indéfinie en application des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi »). La Commission avait déterminé que le prestataire avait perdu son emploi en raison de sa propre inconduite.

[2] La demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler (la « Demande ») à la division d’appel du Tribunal le 22 avril 2013.

Question en litige

[3] Le Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Dispositions législatives

[4] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS »), « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et « [la division d’appel] accorde ou refuse cette permission. »

[5] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS stipule que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[6] Le paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS stipule que les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a)   la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b)   elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c)   elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[7] En l’espèce, la décision du Conseil est considérée comme une décision de la division générale.

Observations

[8] À l’appui de la Demande, la demanderesse a cité les alinéas b) et c) du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS. En particulier, il est soutenu, dans la Demande, que le Conseil a commis une erreur de droit ainsi qu’une erreur mixte de fait et de droit en accueillant l’appel.

[9] Les motifs d’appel énoncés sont les suivants :

  1. a) Le prestataire a occupé un emploi occasionnel du 13 avril 2011 au 31 août 2012.
  2. b) Il a fait l’objet d’une enquête criminelle et, le 5 septembre 2012, a été déclaré coupable relativement aux accusations portées contre lui, puis il a envoyé une lettre de démission à l’employeur le 11 septembre 2012.
  3. c) L’employeur avait une politique selon laquelle aucun membre du personnel ne pouvait travailler s’il était reconnu coupable d’une infraction criminelle, et le prestataire était au courant de cette politique.
  4. d) Le Conseil a accueilli l’appel en accordant le bénéfice du doute au prestataire quant à sa déclaration qu’il avait informé l’employeur des accusations qui pesaient contre lui au moment de son embauche.
  5. e) Le Conseil a commis une erreur de fait et de droit en ne tenant compte que de la question de savoir si le prestataire avait informé l’employeur des accusations portées contre lui et en faisant abstraction du critère juridique relatif à l’inconduite.
  6. f) Le prestataire a perdu son emploi en raison de sa propre inconduite. Le fait qu’il ait démissionné avant d’être congédié ne le soustrait pas de l’exclusion du bénéfice des prestations en vertu de la Loi.

Analyse

[10] La demanderesse doit me convaincre que les motifs invoqués à l’appui de son appel se rattachent à l’un ou l’autre des moyens d’appel énumérés. L’un de ces motifs au moins doit conférer à l’appel une chance raisonnable de succès avant que je puisse accorder une permission d’en appeler.

[11] La décision du Conseil, sous la rubrique [traduction] « Conclusions de fait et application du droit », cite l’arrêt Tucker (A-381-85) et le critère relatif à l’inconduite qu’a établi la Cour d’appel fédérale. Selon ce critère, pour qu’il y ait inconduite, « l’acte reproché doit avoir été volontaire ou du moins procéder d’une telle insouciance ou négligence que l’on pourrait dire que l’employé a volontairement décidé de ne pas tenir compte des répercussions que ses actes auraient sur son rendement. »

[12] Le Conseil a estimé que le prestataire avait bel et bien déclaré les accusations portées contre lui à son superviseur et que le superviseur n’avait pas communiqué ce renseignement à la personne responsable des embauches. Le Conseil a conclu ce qui suit : [traduction] « À la lumière de la preuve produite à l’audience, le Conseil conclut que l’inconduite n’a pas été prouvée. » De plus, le Conseil a cité le paragraphe 49(2) de la Loi pour la proposition qu’il faut accorder le bénéfice du doute à un prestataire lorsque les éléments de preuve présentés de part et d’autre à cet égard sont équivalents, ce qui, selon le Conseil, était le cas en l’espèce. Le Conseil a également cité une décision de la Cour d’appel fédérale disant que l’inconduite ne peut être prouvée qu’à la lumière d’une preuve claire à cet effet et que c’est à la Commission qu’il incombe de convaincre le Conseil de l’existence d’une telle preuve. Le Conseil a conclu que [traduction] « selon la prépondérance des probabilités, l’inconduite n’a pas été prouvée en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi et de la jurisprudence connexe. »

[13] Le prestataire et un représentant de l’employeur étaient présents à l’audience devant le Conseil. La Commission n’était pas présente, mais elle avait déposé des observations écrites. Dans sa décision, le Conseil indique qu’il a examiné la lettre de décision et les observations de la Commission.

[14] Bien qu’un demandeur ne soit pas tenu de prouver les moyens d’appel pour les fins d’une demande de permission, il devrait à tout le moins exposer quelques motifs relevant de l’un ou l’autre des moyens d’appel énumérés. En l’espèce, la demanderesse affirme qu’il y a eu erreur de droit et erreur mixte de fait et de droit, et elle fournit une explication de la façon dont le Conseil aurait omis d’appliquer le critère juridique relatif à l’inconduite. En particulier, la demanderesse fait valoir que l’employeur avait une politique selon laquelle aucun membre du personnel ne pouvait travailler là s’il était reconnu coupable d’une infraction criminelle, que le prestataire était au courant de cette politique, que sa condamnation a entraîné son non‑respect d’une condition d’emploi et que le fait qu’il ait démissionné avant qu’on le congédie ne le soustrait pas d’une exclusion du bénéfice des prestations.

[15] À la lumière des arguments soulevés par la demanderesse et de mon examen de la décision du Conseil et du dossier, je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès.

Conclusion

[16] La demande est accueillie.

[17] Cette décision accordant la permission d’en appeler ne présume pas du résultat de l’appel sur le fond du litige.

[18] J’invite les parties à présenter des observations écrites sur l’opportunité de tenir une audience et, le cas échéant, sur le mode d’audience à privilégier, de même que sur le bien‑fondé de l’appel.

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