Assurance-emploi (AE)

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Introduction

[1] Le 17 avril 2013, le conseil arbitral a accueilli l’appel de la prestataire concernant si elle avait ou non un motif valable de quitter volontairement son emploi aux termes des articles 29 et 30 de la Loi sur l'assurance-emploi (Loi A-E).

[2] La demanderesse (la Commission) a déposé une demande de permission d’en appeler (Demande) devant la division d’appel le 3 mai 2013, dans les délais prescrits.

[3] Le Tribunal, par lettre datée du 29 juin 2015, a demandé aux parties de fournir des observations écrites concernant la Demande.  La demanderesse a déposé des observations pour suppléer à la Demande.  Le 30 juillet 2015, l’intimée a déposé des observations.

Question en litige

[4] Le Tribunal doit décider si l’appel a une chance raisonnable de succès.

La loi et l’analyse

[5] Tel qu’il est stipulé aux paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, « il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et la division d’appel « accorde ou refuse cette permission ».

[6] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social stipule que « la division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[7] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. (a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. (b) la division générale a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. (c) la division générale a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[8] La demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience au fond de l'affaire. C'est un premier obstacle qu’un demandeur doit franchir, mais celui-ci est inférieur à celui auquel il devra faire face à l'appel sur le fond.  À l’étape de la demande de permission d’en appeler, le demandeur n’a pas à prouver ses arguments.

[9] La permission d’en appeler sera en effet accordée par le Tribunal si le demandeur démontre qu’il y a au moins un des moyens d’appel ci-dessus mentionnés et le Tribunal est satisfait qu’un des moyens ait une chance raisonnable de succès.

[10] Pour ce faire, le Tribunal doit être en mesure de déterminer, conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, s’il existe une question de droit ou de fait ou de compétence dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision attaquée.

[11] Dans sa Demande et ses observations écrites, la demanderesse souligne que:

  1. a) Le conseil arbitral a erré en fait et en droit en accueillant l’appel;
  2. b) Les erreurs de droit identifiés sont :
    1. Les motifs du conseil arbitral ne sont pas exposés comme l’exige le paragraphe 54(a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social;
    2. Le conseil n’a pas expliqué pourquoi il a rejeté la preuve présentée par la prestataire ainsi que sa déclaration; et
    3. L’interprétation du paragraphe 30(1) de la Loi A-E et l’application du critère juridique de « justification » pour volontairement quitter un emploi;
  3. c) Les erreurs de fait ou mixtes de droit et de faits sont :
    1. La preuve établie que la prestataire a volontairement quitté son emploi mais elle n’a pas démontré que les conditions de travail étaient si intolérables qu’elles ne lui laissaient d’autre choix que de quitter son emploi;
    2. La prestataire a quitté son emploi de façon précipitée et sans avoir exploré la possibilité que les conditions de travail soient modifiées pour palier à ses inquiétudes; et
    3. Le conseil arbitral a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée lorsqu’il a conclu que la prestataire n’avait pas d’autre choix que de démissionner.

[12] L’intimée soumet, par contre, que :

  1. a) La Commission était absente pour l’audience et, donc, le témoignage et la preuve documentaire offerts par la prestataire lors de l’audience;
  2. b) Le système de gestion du stationnement où la prestataire travaillait était inadéquat;
  3. c) Le superviseur (« régulateur ») était conscient des problèmes et la prestataire avait tenté de raisonner avec lui mais sans succès;
  4. d) Le superviseur n’était pas employé de l’employeur de la prestataire, et le syndicat de la prestataire ne pouvait pas être un secours le soir de sa démission;
  5. e) Jugeant qu’il y avait un danger pour sa sécurité et la sécurité des clients, la prestataire a pris la décision de quitter son travail;
  6. f) Le conseil arbitral a conclu que la décision de quitter prise ce soir-là n’avait d’autre motif que son souci pour la sécurité et que, dans les circonstances, la prestataire croyait n’avoir d’autre solution que de démissionner;
  7. g) La seule décision qui lui semblait possible ce soir-là était de démissionner et cette décision n'était d'aucune manière déraisonnable;
  8. h) Le conseil arbitral a appliqué le bon test, celui de la seule solution raisonnable dans les circonstances;
  9. i) La Commission, dans son argumentaire soumis au conseil arbitral a cité le mauvais test « réussi à prouver hors de tout doute » et n’a pas appliqué l’article 49.2(2) de la Loi A-E (bénéfice du doute au prestataire);
  10. j) La Commission ne fait aucune référence à la présence d’un conflit entre la prestataire et son superviseur;
  11. k) La Commission a erré dans l’étude de ce dossier;
  12. l) Le conseil arbitral n’a pas à énumérer les raisons pour lesquelles il ne retient pas les prétentions de la Commission, leur seul devoir étant de rendre une décision raisonnable;
  13. m) La norme de la décision raisonnable devrait être suivie en cas où devrait primer la déférence face à la spécialisation du tribunal administratif ou disciplinaire comme dans les circonstances présents; et
  14. n) La décision du conseil arbitral est bien fondée, juste et raisonnable et une instance d'appel conclurait dans le même sens et refuserait de substituer un autre jugement à celui du conseil dans le cas en espèce.

[13] Le Tribunal a considéré les observations des deux parties et note qu’elles ont aidé à mieux expliquer la situation et la position des parties.  Puisque la demande de permission d’en appeler est une étape préliminaire à une audience au fond de l'affaire (si une est nécessaire), les parties n’ont pas à prouver leurs arguments.  Si le Tribunal est satisfait qu’un des moyens d’appel ait une chance raisonnable de succès, la permission d’en appeler sera accordée.

[14] La décision du conseil arbitral, sous la rubrique « Conclusions et application de la Loi » a stipulé :

En matière de départ volontaire, le Conseil doit évaluer si, en tenant compte de toutes les circonstances, le fait de quitter son emploi à ce moment constituait  la seule solution raisonnable pour le prestataire.

Dans le présent dossier, le Conseil constate que la prestataire a quitté son emploi après que les autorités du Casino aient restructuré les modes de gestion de la circulation automobile, enlevant plusieurs préposés et superviseurs au stationnement.

Cette restructuration entrainait une insatisfaction d'une clientèle déjà surchauffée par l'activité entourant les jeux du casino.

Le jour de sa démission, le superviseur de la prestataire a pris certaines décisions qui précarisaient encore plus la sécurité des usagers et des travailleurs, d'où la décision de la prestataire de quitter les lieux.

Le Conseil considère que la prestataire n'avait d'autre choix que de démissionner comme elle l'a fait, pour préserver sa sécurité dans les circonstances.

[15] Le conseil arbitral ne semble pas avoir énoncé le critère juridique de « justification » pour volontairement quitter un emploi.  De plus, le conseil semble avoir conclu que le prestataire n’avait d’autre choix que de démissionner sans avoir expliqué quelles preuves qu’il rejetait ou qu’il acceptait ou si la prestataire avait exploré la possibilité que les conditions de travail soient modifiées.  Ces défauts potentiels sont possiblement le résultat des motifs peu détaillés.  La demanderesse soumet que les motifs ne sont pas exposés comme l’exige le paragraphe 54(a) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social.

[16] Après révision du dossier d’appel, de la décision du conseil arbitral et des arguments des parties, le Tribunal conclut que l’appel a une chance raisonnable de succès.  La demanderesse a soulevé plusieurs questions de fait et de droit concernant l’interprétation et l’application par le conseil arbitral des articles 29 et 30 de la Loi A-E dont la réponse pourrait mener à l’annulation de la décision attaquée.

Conclusion

[17] La permission d’en appeler est accordée.

[18] Cette décision sur la permission d’interjeter appel ne présume pas le résultat de l’appel sur le fond de l’affaire.

[19] J’invite les parties à présenter des observations sur les questions suivantes : si une audience est appropriée; si oui, le mode de l'audience; ainsi que des observations sur le fond de l’appel.

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