Assurance-emploi (AE)

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Décision

[1] L’appel est rejeté.

Introduction

[2] En date du 26 mars 2013, un conseil arbitral a conclu que :

  • - L’Intimée n’avait pas volontairement quitté son emploi aux termes des articles 29 et 30 de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi »).

[3] L’Appelante a déposé une demande pour permission d’en appeler de la décision du conseil arbitral en date du 12 avril 2013.  La demande pour permission d’en appeler a été accordée le 28 janvier 2015.

Mode d’audience

[4] Le Tribunal a déterminé que cet appel procéderait en personne pour les raisons suivantes :

  • - la complexité de la ou des questions en litige.
  • - de l’Information au dossier, y compris la nature de l’information manquante et la nécessité d’obtenir des clarifications.
  • - du fait que les parties sont représentées.

[5] L’Appelante, représentée par Me Stéphane Arcelin, et l’Intimée, représentée par Me Marlène Jacob, ont assistés à l’audience.

La loi

[6] Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) la division générale a rendu une décision ou une ordonnance entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) la division générale a fondé sa décision ou son ordonnance sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Question en litige

[7] Le Tribunal doit décider si le conseil arbitral a erré en fait et en droit en concluant que l’Intimée n’avait pas volontairement quitté son emploi aux termes des articles 29 et 30 de la Loi.

Arguments

[8] L’Appelante soumet les motifs suivants au soutien de son appel:

  • - Le conseil arbitral a erré en faits et en droit dans sa décision du 26 mars 2013 en déterminant que le 11 janvier 2013 l’Intimée n'avait pas volontairement quitté son emploi aux termes des articles 29 et 30 de la Loi;
  • - La conclusion du conseil arbitral est entièrement fondée sur les représentations de l’Intimée à l'effet que l’Appelante aurait dû, dans la détermination, tenir compte qu'elle ne pouvait pas «faire valoir son ancienneté avant d'accepter sa mise à pied »sur l'assurance-emploi;
  • - La décision du conseil arbitral repose essentiellement sur un paragraphe de la lettre d'intention entre le syndicat et l'employeur tout en omettant de considérer un autre paragraphe de cette même pièce ainsi que d'autres preuves au dossier qui était devant le conseil arbitral;
  • - Plus précisément, cette décision du conseil arbitral repose essentiellement sur le paragraphe 4 de cette lettre d'intention entre le syndicat et l'employeur qui stipule que « Lors des changements d’équipe de travail les personnes salariées mises à pied ne peuvent exercer leur droit de supplantation prévue à la convention collective »;
  • - Cette détermination du conseil arbitral a été faite en faisant abstraction du paragraphe 7 de la lettre d’intention entre le syndicat et l’employeur, les règles d’ancienneté concernant le droit de supplantation prévues à l’article 9 de la convention collective et la lettre de Développement des ressources humaines du Canada en date du 19 novembre 2012;
  • - Le conseil arbitral a erré lorsqu'il a conclu que l’Intimée n'a pas quitté son emploi de façon volontaire alors que la preuve au dossier démontre clairement le contraire;
  • - En concluant de la sorte, le conseil arbitral a écarté de la preuve déterminante sans motifs, ce qui constitue en soi une erreur de droit;
  • - II a été reconnu dans l'arrêt Bellefleur de la Cour d'appel fédérale qu'un conseil arbitral doit justifier les conclusions auxquelles il arrive et que lorsque le conseil arbitral est confronté à des éléments de preuve contradictoires comme dans le présent dossier, il ne peut les ignorer. S'il décide de les écarter ou de leur accorder peu de poids, il doit s'expliquer au risque de voir sa décision entachée d'une erreur de droit;
  • - De plus, selon la jurisprudence en la matière, à la lumière de la preuve devant le conseil arbitral, le conseil arbitral n'avait alors d'autre choix que de trancher la question de savoir si l’Intimée était justifiée à quitter son emploi, ce qu'il n'a pas fait. Autrement dit, le conseil arbitral devait alors se demander si, compte tenu de toutes les circonstances, il s'agissait de la seule solution raisonnable;
  • - Il ne s’agit pas d’un cas de compression de personnel prévu à l’article 51 du Règlement sur l’assurance-emploi ou d’un cas de travail partagé prévu aux articles 42 à 49 dudit Règlement.

[9] L’Intimée soumet les motifs suivants à l’encontre de l’appel :

  • - La décision du conseil arbitral n’est pas fondée sur une erreur de droit ou de faits et il n’a pas excédé ou refusé d’exercer sa juridiction;
  • - La lettre d’intention a été signée le 12 janvier 2001 entre le syndicat et les travailleurs et travailleuses de la Régie intermunicipale du traitement des matières résiduelles de la Gaspésie (Régie);
  • - La lettre d’intention prévoit essentiellement que lors de changement d’équipe de travail les personnes salariées mises à pied ne peuvent exercer leur droit de supplantation prévu à la convention collective;
  • - Pour annuler les effets de la lettre d’intention, le DHRC région Gaspésie ne doit plus autoriser la pratique prévue à la lettre d’intention ou les parties doivent l’exclure de la convention collective;
  • - À défaut d’être dans l’une de ses situations, un grief ne peut prétendre à l’application des règles prévues à la convention collective concernant le droit de supplantation;
  • - Les règles en matière de négociation des conditions de travail sont du ressort unique du syndicat et de l’employeur;
  • - Bien que l’Appelante reconnaissent qu'elle ne peut se prononcer sur la légalité de l’entente négociée entre l’employeur et le syndicat, elle soutient que celle-ci n’est pas valide car elle n’a pas été déposée auprès du Ministre du travail;
  • - La lettre d’intention fait partie intégrante de la convention collective même si elle n’est pas déposée auprès du Ministre du travail;
  • - Manifestement, cette pratique appliquée depuis 1999 était nécessairement connue et acceptée par le DRHC région Gaspésie;
  • - Elle a été mise à pied le 11 janvier 2013;
  • - Le 14 janvier 2013, Mme Drapeau de la Régie est informée de la procédure à suivre concernant les relevés d’emplois et elle comprend que Service Canada n’autorise plus la pratique existante depuis 1999;  Elle informe Service Canada que les mises à pied ont été faites le 11 janvier et qu’elle ne peut donner suite à ses instructions;
  • - La Régie appliquera donc l’article 7 de la lettre d’intention à partir du 7 février 2013;  L’Intimée est retournée au travail el 14 février 2013;
  • - Aussitôt que l’Intimée est informé par un agent de Service Canada que l’employeur et le syndicat sont au courant que la lettre d’entente ne tient plus, elle prend les mesures nécessaires pour faire valoir son ancienneté;
  • - L’Intimée ne pouvait agir au moment au il fut mis à pied le 11 janvier 2013 puisque la lettre d’entente était toujours appliquée et ce, depuis de nombreuses années;
  • - La preuve ne laisse aucun doute quant au fait que la volonté de l’Intimée n’est pas en cause dans la décision de rester à l'emploi le 11 janvier 2013;
  • - Par conséquent, les arguments soumis par l’Appelante devant le présent tribunal sont mal fondés en fait et en droit;
  • - Parmi toutes les décisions soumises par l’Appelante, tant devant le conseil arbitral que devant le présent tribunal, seule la décision CUB 75519 peut s’appliquer à la présente affaire;
  • - Pour l’ensemble de ces considérations, la décision du conseil arbitral doit être maintenue considérant que c’est à tort que l’Appelante a décidé que l’Intimée avait volontairement arrêté de travailler le 11 janvier 2013, sans motif valable et que ce n’était pas la seule solution raisonnable;
  • - Elle n’a pas volontairement arrêté de travailler;
  • - La décision du conseil arbitral est raisonnable.

Normes de contrôle

[10] L’Appelante soumet que la Cour d’appel fédérale a statué que la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision d’un conseil arbitral et d’un juge-arbitre relativement à des questions mixte de fait et de droit est celle du caractère raisonnable - Canada (PG) c. Richard, 2009 CAF 122.

[11] L’Intimée soumet que la Cour d’appel fédérale a statué que la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision d’un conseil arbitral et d’un juge-arbitre relativement à des questions mixte de fait et de droit est celle du caractère raisonnable - Canada (PG) c. Burke, 2012 CAF 139.

[12] Le Tribunal est d’accord avec les parties que la Cour d’appel fédérale a statué que la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision d’un conseil arbitral et d’un juge-arbitre relativement à des questions mixte de fait et de droit est celle du caractère raisonnable - Canada (PG) c. Burke, 2012 CAF 139, Canada (PG) c. Richard, 2009 CAF 122, Canada (PG) c. Hallée, 2008 CAF 159.  [12].

[13] Le Tribunal retient également que la Cour d’appel fédérale a statué que la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision d’un conseil arbitral et d’un juge-arbitre relativement à des questions de droit est la norme de la décision correcte - Martens c. Canada (PG), 2008 CAF 240.

Analyse

[14] Lorsqu’il a accueilli l’appel de l’Intimée,  le conseil arbitral a conclu ce qui suit :

«Le prestataire n'a pas volontairement quitté son emploi parce que selon l’entente connue, les employés étaient liés par un contrat de travail ayant une date de début et une date de fin et qu'ils devaient demeurer toujours disponibles pour l'emploi. Pour qu'il y ait départ volontaire, il faut que ce soit un choix délibéré ou volontaire de l’employé de mettre fin à son emploi. Ce qui n'est pas le cas dans ce dossier.

Le conseil arbitral doit valider s'il y a eu départ volontaire. Le 14 janvier 2013, l'employeur est mis au courant de la façon de procéder lors des mises à pied. Or, l’employeur a déjà fourni les relevés d'emploi aux 3 prestataires en appel et ces relevés d'emploi signifient manque de travail/ fin de saison ou de contrat.

Les prestataires, étant sous enquête, le 6 février 2013, se voient dans l’obligation d'informer le syndicat et l'employeur qu'ils doivent exercer leur droit de supplantation selon leur ancienneté a cause de la lettre d'intention du 12 janvier 2001 qui autorise Ressources Humaines Canada a mettre fin à la pratique actuelle de changement d'équipe (pièce 4-5 (7)). Les employés doivent récupérer leur emploi le 11 février 2013, et ce, même avant la lettre de Ressources Humaines Canada datée du 12 février 2013 les informant qu'ils n'ont plus droit aux prestations régulières. Or, le conseil arbitral se retrouve devant une pratique connue de l'employeur, du syndicat et de Ressources Humaines Canada, et ce, depuis l'ouverture du centre de tri en 1999 et que les prestataires, selon la représentante, étaient otages dans la façon de faire et qu'ils demeuraient toujours disponibles a l'emploi selon leurs témoignages, tel qu'en font foi les relevés d'emploi qui démontrent un nombre d'heures supérieur dû au fait qu'ils travaillaient 5 jours par semaine à raison de 40 heures, et ce, pendant 6 mois.

En référence a la position de la Commission (pièce 11-3), nous pensons que le prestataire a fait la preuve que la lettre d'entente fixant la pratique du travail partage faisait partie du contrat d'embauche et de travail. Le prestataire ne pouvait donc pas« faire valoir son ancienneté avant d'accepter sa mise à pied». Nous ne retenons pas I' argument de la Commission que c'est le « prestataire lui-même qui a pris l'initiative de mettre fin à son emploi ».

[15] Le rôle du conseil arbitral (maintenant la division générale) est d'examiner les preuves que lui présentent les deux parties, pour déterminer les faits pertinents, soit les faits qui concernent le litige particulier qu'il doit trancher et d'expliquer, dans sa décision écrite, la décision qu'il rend concernant ces faits.

[16] Un conseil arbitral doit évidemment justifier les conclusions auxquelles il en arrive. Lorsqu’il est confronté à des éléments de preuve contradictoires, il ne peut les ignorer. Il doit les considérer. S’il décide qu’il y a lieu de les écarter ou de ne leur attribuer que peu de poids ou pas de poids du tout, il doit en expliquer les raisons, au risque, en cas de défaut de le faire, de voir sa décision entachée d’une erreur de droit ou taxée d’arbitraire - Bellefleur c. Canada (PG), 2008 FCA 13.

[17] Dans le présent dossier, le conseil arbitral a ignoré les éléments de preuve de l’Appelante, à savoir, les discussions depuis octobre 2012 entre l’employeur et Service Canada concernant la pratique de l’employeur (Pièces AD2-35, AD2-36), et la lettre du 19 novembre 2012 qui informait l’employeur que la pratique du partage d’emploi n’était pas admise en vertu du Régime de l’assurance-emploi (Pièces AD2-36, AD2-37).

[18] Compte tenu de l’erreur de droit ci-dessus mentionné du conseil arbitral, le Tribunal est justifié d’intervenir dans le présent dossier et de rendre la décision qui aurait dû être rendue.

[19] Il n’est pas contesté que l’employeur utilise deux équipes de travail pour exécuter les tâches nécessaires à son exploitation annuelle et ce depuis au moins 2001. Chaque équipe travaille en alternance pour une période de six (6) mois chacune. Peu avant l’expiration de la période de six (6) mois, l’employeur expédie à l’employé concerné une lettre l’avisant de la fin de son contrat de travail et un rappel qu’il doit demeurer disponible pour tout remplacement pendant cette période.  Il est également informé que son employeur souhaite son retour lors de la prochaine période de travail (Pièce AD2-64).

[20] Afin de permettre l’implantation de cette alternance, l’employeur et le syndicat ont signés une lettre d’intention datée du 12 janvier 2001 qui prévoit notamment ce qui suit :

« 4. lors de changements d'équipe de travail les personnes salariées mise à pied ne peuvent exercer leur droit de supplantation prévu à la convention collective.

(…)

7.  Advenant le cas où le développement des ressources humaines Canada (DHRC) région Gaspésie n’autorise plus la pratique actuelle de changement d’équipe de travail cette lettre d’entente cesse automatiquement de s’appliquer et les règles prévues à la convention collective s’appliquent. »

[21] Cette lettre d’intention vise évidemment à suspendre l’application de l’article 9.09 de la convention collective concernant l’utilisation de l’ancienneté, article qui prévoit ce qui suit :

« 9.09  Dans tous les cas de rappel au travail, l’Employeur procède, pour ses personnes salariées régulières, par ordre d'ancienneté et, dans les cas de mise pied, par ordre inverse d'ancienneté, d'abord parmi les personnes salariées à l'essai, puis temporaires ».

[22] Suite à une demande de renseignements de la part de l’employeur en date du 29 octobre 2012, l’Appelante informe l’employeur en date du 19 novembre 2012 de ce qui suit (Pièces AD2-36, AD2-37):

«Nous donnons suite à votre demande du 29 octobre dernier dans laquelle vous souhaitiez obtenir des éléments d’information concernant les modalités d’application du programme d’assurance-emploi.

D’entrée de jeu, il est important de préciser que la pratique du partage d’emploi n’est pas un concept reconnu en vertu du Régime d’assurance-emploi.

(…)

Nous tenons par ailleurs à vous préciser que toute clause relative à l’ancienneté – incluse dans une convention collective – est prise en considération lors de l’analyse de l’admissibilité d’une demande.

Ainsi, lorsqu’un employé syndiqué est mis-à-pied – et qu’il n’exerce pas son droit d’ancienneté alors qu’il y aurait eu du travail pour lui – la situation est associée à un départ volontaire au sens de la Loi sur l’assurance-emploi.  Dans une telle situation, l’employé s’expose à une exclusion du bénéfice des prestations ».

[23] Malgré la prétention de la procureure de l’Intimée à l’effet que cette lettre n’est pas un refus clair de la part de l’Appelante, il apparaît manifeste pour le Tribunal que cette lettre indique que Développement des ressources humaines Canada (DHRC) région Gaspésie n’autorise pas la pratique de changement d’équipe de travail de l’employeur.

[24] Le Tribunal ne peut également retenir la position de la procureure de l’Intimée à l’effet que la correspondance de l’Appelante en date du 14 janvier 2013 représente la lettre réelle de refus puisque ladite lettre est manifestement une lettre d’instructions sur la façon pour l’employeur de donner suite à la position de l’Appelante exprimée dans sa correspondance du 19 novembre 2012.

[25] Le Tribunal en vient donc à la conclusion que lors du changement d’équipe de janvier 2013, les personnes salariées mises à pied pouvaient exercer leur droit de supplantation prévue à la convention collective.

[26] Compte tenu de cette conclusion du Tribunal, il n’est pas nécessaire pour les fins du présent appel de décider si la lettre d’intention intervenue entre l’employeur et le syndicat en date du 12 janvier 2001 lie les tiers puisque non déposée auprès du Ministre du Travail selon les exigences de l’article 72 du Code du Travail.

[27] Le Tribunal constate qu’il est de jurisprudence constante qu'un employé qui, compte tenu de son ancienneté, a le droit de continuer de travailler mais choisit de refuser pour permettre à un autre employé de travailler a quitté volontairement son emploi et n'a pas établi une justification au sens de la Loi sur l'assurance-emploi.

[28] La procureure de l’Intimée soutient cependant devant le Tribunal que l’Intimée n’était pas au courant qu’elle pouvait exercer son droit de supplantation en janvier 2013. Elle n’a donc pas refusé de travailler pour permettre à un autre employé de travailler mais a plutôt respecté la lettre d’intention signée par le syndicat et l’employeur.

[29] Elle plaide qu’elle n’a donc pas quitté son emploi volontairement au sens des articles 29 et 30 de la Loi. D’ailleurs, dit-elle, l’Intimée une fois informée par l’Appelante, a immédiatement pris les mesures nécessaires pour faire valoir son ancienneté auprès de l’employeur.

[30] Il y a effectivement absence de preuve devant le conseil arbitral sur la connaissance par les employés des discussions entre l’Appelante et leur employeur au sujet de l’annulation de la lettre d’intention.  Le syndicat n’a pas donné suite à l’offre de l’Appelante de communiquer avec elle puisqu’il était d’avis que la lettre d’intention lui permettait d’agir de la sorte (Pièce AD2-34).  Il est donc fort probable dans les circonstances que les employés n’ont pas été informés par le syndicat ou l’employeur.

[31] Le procureur de l’Appelante soutient que même si l’Intimée n’a pas été informée par son employeur ou son syndicat, elle aurait dû s’informer ou insister sur son droit d’ancienneté qui lui assurait de continuer à travailler.

[32] Le Tribunal doit d’abord déterminer si l’Intimée a quitté volontairement son emploi.  Un départ volontaire survient lorsque l’employé et non l’employeur prend l’initiative de mettre fin à l’emploi.  Dans l’affirmative, le Tribunal doit déterminer, d'après la prépondérance des probabilités, si l’Intimée n'avait d'autre solution raisonnable que de quitter son poste compte tenu de toutes les circonstances.

[33] Dans le présent dossier, l’Intimée a recu une lettre de son employeur datée du 7 janvier 2013 l’avisant de la fin de son contrat de travail et un rappel qu’elle devait demeurer disponible pour tout remplacement pendant cette période. Elle a également été informée par son employeur que ce dernier souhaitait son retour lors de la prochaine période de travail (Pièce AD2-64).

[34] Il n’y a eu aucune preuve devant le conseil arbitral qui démontre que les employés avaient été préalablement informés par l’employeur, le syndicat ou l’Appelante de l’annulation de la lettre d’intention signée le 12 janvier 2001 par l’employeur et le syndicat.

[35] Il était donc raisonnable pour l’Intimée de croire au moment de la fin de son travail en janvier 2013 que la lettre d’intention s’appliquait toujours comme elle s’était toujours appliquée depuis 2001 et que son droit de supplantation était suspendu.

[36] L’Appelante soutient que l’Intimée aurait dû se renseigner ou insister sur son droit d’ancienneté.  Le Tribunal se demande bien pourquoi l’Intimée aurait procédé à se renseigner ou à insister sur son droit d’ancienneté alors que la lettre d’intention s’appliquait depuis 2001, qu’elle n’avait pas été avisée du contraire par son employeur et son syndicat et qu’elle avait recu une lettre de son employeur confirmant la fin de son travail.  Le Tribunal ne peut retenir cette position de l’Appelante qu’il considère insoutenable et irréaliste dans le présent contexte.

[37] Il apparaît manifeste pour le Tribunal que l’Intimée n’est pas celle qui a mis fin à son emploi.  La preuve ne laisse aucun doute quant au fait que la volonté de l’Intimée n’est pas en cause dans la décision de rester à l'emploi le 11 janvier 2013.  Il y a lieu ici de se distinguer de la jurisprudence constante en matière de droit de supplantation puisque dans le présent cas, l’Intimée n’a pas choisi de refuser du travail afin de permettre à un autre employé de travailler à sa place.

[38] D’ailleurs, dès que l’Intimée a été informée par l’Appelante de l’annulation de la lettre d’intention, elle a immédiatement pris les mesures nécessaires pour faire valoir son ancienneté auprès de son employeur (Pièce AD2-46).

[39] Le Tribunal, pour les motifs ci-dessus mentionnés et en considérant les circonstances particulières du présent dossier, en vient à la conclusion que l’Intimée n’a pas volontairement quitté son emploi.

Conclusion

[40] L’appel est rejeté.

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