Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Sur cette page

Motifs et décision

Introduction

[1] Le 24 juin 2015, la division générale (DG) du Tribunal de la sécurité sociale du Canada (le « Tribunal ») a tenu une audience par téléconférence à l’issue de laquelle elle a déterminé que la prestataire avait volontairement quitté son emploi sans y être fondée (sans justification) au sens de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi ») et rejeté l’appel de cette dernière concernant une inadmissibilité imposée en application des articles 29 et 30 de la Loi. La décision de la DG était datée du 30 juin 2015 et a été publiée le 2 juillet 2015.

[2] La demanderesse a déposé une demande de permission d’en appeler (la « Demande ») à la division d’appel (DA) du Tribunal le 4 août 2015.

Question en litige

[3] La DA du Tribunal doit déterminer si l’appel a une chance raisonnable de succès.

Observations

[4] La demanderesse a plaidé, à l’appui de la Demande, qu’il y avait des erreurs dans la décision de la DG, dont celles liées :

  1. a) à la conclusion de la DG qu’elle [traduction] « a remis verbalement sa démission puis est rentrée chez elle »;
  2. b) au fait que le climat de conflit qui régnait dans l’environnement de travail n’a pas été pris en compte;
  3. c) à la décision CUB 62597 qui n’a pas été mentionnée dans la décision de la DG mais qui s’applique à son cas;
  4. d) à des renseignements pertinents qui n’ont pas été mentionnés à l’audience devant la DG;
  5. e) aux commentaires du membre de la DG au sujet d’une entente à laquelle en seraient arrivés l’employeur et la demanderesse, en ce que ces commentaires étaient trompeurs.

Droit applicable et analyse

[5] Le paragraphe 52(1) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (la « Loi sur le MEDS ») stipule que l’appel d’une décision rendue au titre de la Loi sur l’assurance-emploi est interjeté devant la division générale dans les trente jours suivant la date où le demandeur reçoit communication de la décision.

[6] Dans la Demande, il est indiqué que la demanderesse a reçu la décision de la DG le 30 juin 2015. Ce doit être une erreur, car la demanderesse ne pouvait pas avoir reçu cette décision avant qu’elle fût envoyée par le Tribunal.

[7] En application de l’alinéa 19(1)a) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, je répute la décision de la DG avoir été communiquée à la demanderesse 10 jours après la date du 2 juillet 2015 à laquelle cette décision lui a été envoyée par la poste. Par conséquent, puisque les 11 et 12 juillet 2015 tombent une fin de semaine, je conclus que la décision a été communiquée à la demanderesse le 13 juillet 2015.

[8] La Demande a été déposée le 4 août 2015, 28 jours après la date de communication de la décision à la demanderesse, soit dans le respect du délai de trente jours.

[9] Aux termes des paragraphes 56(1) et 58(3) de la Loi sur le MEDS), « [i]l ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission » et « [la division d’appel] accorde ou refuse cette permission. »

[10] Le paragraphe 58(2) de la Loi sur le MEDS stipule que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[11] En vertu du paragraphe 58(1) de la Loi sur le MEDS, les seuls moyens d’appel sont les suivants :

  1. a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;
  2. b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;
  3. c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[12] Avant de pouvoir accorder une permission d’en appeler, le Tribunal doit être convaincu que les motifs d’appel se rattachent à l’un ou l’autre des moyens d’appel admissibles et que l’un de ces motifs au moins confère à l’appel une chance raisonnable de succès.

[13] Sans renvoyer expressément à l’alinéa 58(1)c) de la Loi sur le MEDS, les observations de la demanderesse, reproduites plus haut au paragraphe [4], notamment les observations formulées en [4] a), b) et d), laissent entendre que la DG a fondé sa décision sur des conclusions de fait erronées qu’elle a tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. L’observation reproduite en [4] c) suggère une erreur de droit. On ne sait pas exactement quel genre d’erreur est allégué par l’observation reproduite en [4] e).

[14] Au sujet de la conclusion de la DG que la demanderesse [traduction] « a remis verbalement sa démission puis est rentrée chez elle », qui correspond à l’observation énoncée en [4] a), la décision de la DG dit ceci (c’est moi qui souligne) :

[Traduction]

[23] Le membre du Tribunal conclut que la prestataire a volontairement quitté son emploi lorsqu’elle a remis verbalement sa démission puis est rentrée chez elle.

[…]

[26] À la lumière de l’ensemble des circonstances de cette affaire, le membre du Tribunal conclut que, selon la prépondérance des probabilités, la prestataire avait une solution de rechange raisonnable au départ, lorsqu’elle a démissionné, car elle aurait simplement pu rester au travail jusqu’à ce qu’elle soit capable d’obtenir un autre emploi.

[15] J’ai souligné les passages ci‑dessus pour indiquer où le membre de la DG avait pu faire une mauvaise interprétation des faits. La demanderesse affirme qu’elle est restée à son lieu de travail et a continué de travailler pendant deux semaines. Dans le dossier de révision, il y a des renseignements indiquant que la demanderesse a donné verbalement un préavis de deux semaines le 11 novembre 2014, dans le feu d’une dispute avec son directeur, qu’elle a tenté de se rétracter le jour ouvrable suivant puis ultérieurement et qu’elle a travaillé jusqu’au 21 novembre 2014.

[16] Quant aux autres observations reproduites plus haut au paragraphe [4], je note ce qui suit :

  1. a) La Demande ne précise pas quels « renseignements pertinents » n’ont pas été mentionnés à l’audience devant la DG ni comment il est dit qu’il en a résulté une erreur pouvant faire l’objet d’un appel.
  2. b) La décision de la DG, aux paragraphes [14], [16], [17] et [22], mentionne bel et bien le conflit entre la demanderesse et son directeur.
  3. c) Une décision du juge-arbitre du Canada (décision CUB) ne lie ni la DG ni la DA.
  4. d) La décision ne fait pas mention d’une entente à laquelle en seraient arrivés l’employeur et la demanderesse, si ce n’est qu’elle résume la preuve de la demanderesse qui a été présentée à l’audience devant la DG au sujet d’une plainte devant la Commission des relations de travail que la demanderesse a déposée et des efforts qu’elle a déployés pour en arriver à une entente avec l’employeur; la Demande ne précise pas en quoi les commentaires de la DG étaient « trompeurs ».

En conséquence, je ne suis pas convaincue que les motifs énoncés aux sous-paragraphes [4] b), c), d) et e) présentent une chance raisonnable de succès.

[17] Bien qu’un demandeur ne soit pas tenu de prouver les moyens d’appel pour les fins d’une demande de permission, il devrait à tout le moins exposer quelques motifs qui correspondent aux moyens d’appel énumérés. Ici, la demanderesse allègue que des erreurs de fait ont été commises, celles discutées plus haut au sous-paragraphe [4] a) et aux paragraphes [11] et [12], et elle fournit une explication de la façon dont la DG aurait fondé sa décision sur ces conclusions de fait erronées, qu’elle a tirées de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

[18] À la lumière des arguments soulevés par la demanderesse et de mon examen de la décision de la DG et du dossier, je suis convaincue que l’appel a une chance raisonnable de succès sur ce seul moyen, à savoir celui qui est reproduit plus haut en [4] a).

Conclusion

[19] La Demande est accueillie.

[20] Cette décision accordant la permission d’en appeler ne présume pas du résultat de l’appel sur le fond du litige.

[21] J’invite les parties à présenter par écrit des observations sur l’opportunité de tenir une audience et, le cas échéant, sur le mode d’audience à privilégier, de même que sur le fond de l’appel.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.