Assurance-emploi (AE)

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparutions

La tenue de l’audience était fixée pour le 2 février 2016 par conférence téléphonique.

Le Tribunal a laissé la ligne téléphonique ouverte pendant environ 45 minutes.

Personne ne s’est présenté à l’audience.

Le membre de la division générale (section de l’assurance-emploi) du Tribunal de la sécurité sociale (le « Tribunal ») a vérifié les confirmations de la Société canadienne des postes versées au dossier et a constaté que l’appelant et l’employeur avaient reçu l’avis d’audience.

Sur cette base, le Tribunal était convaincu que les parties avaient reçu l’avis d’audience et a procédé en l’absence des parties et aux termes du paragraphe 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, DORS/2013‑60 (le « Règlement sur le TSS »).

Décision

[1] Le Tribunal conclu que l’appelant n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi. L’appel est donc rejeté.

Introduction

[2] L’appelant a présenté une demande initiale de prestations le 28 janvier 2015 (pièce GD3‑10). Cette demande a pris effet le 18 janvier 2015 (pièce GD4‑1).

[3] La Commission de l’assurance-emploi du Canada (la « Commission ») a décidé, le 9 mars 2015, qu’elle n’était pas en mesure de payer à l’appelant des prestations d’assurance-emploi au motif que ce dernier avait volontairement quitté son emploi sans y être fondé (pièce GD3‑38).

[4] L’appelant a déposé une demande de révision auprès de la Commission. La Commission a décidé, le 29 avril 2015, de maintenir sa décision concernant la question du départ volontaire (pièce GD3‑46).

[5] L’appelant a interjeté appel de cette dernière décision auprès du Tribunal le 28 mai 2015 (pièce GD‑2). L’appelant a envoyé une copie de la lettre de décision en révision peu après avoir reçu un avis de rappel du Tribunal de la sécurité sociale (pièce GD2A).

[6] Le Tribunal a ajouté l’employeur comme mis en cause le 13 octobre 2015. L’employeur n’a pas présenté d’observations, bien qu’il ait eu l’occasion de le faire (pièce GD6).

[7] Personne ne s’est présenté à l’audience, qui était fixée pour le 8 décembre 2015. Sur les instructions du Tribunal, l’agent de gestion des cas (AGC) du Tribunal a téléphoné à l’appelant quelques jours avant l’audience parce qu’il semblait, d’après les confirmations de la Société canadienne des postes, que l’appelant n’était pas allé chercher l’avis d’audience au bureau de poste. L’AGC a alors fourni à l’appelant tous les renseignements nécessaires pour qu’il participe à l’audience. L’appelant a également confirmé à l’AGC qu’il disposait d’une copie du dossier, qu’on lui avait envoyée antérieurement avec le document de la pièce GD6. Par surcroît de précaution, le Tribunal a décidé de remettre l’audience au 2 février 2016, même s’il était convaincu que l’appelant avait effectivement reçu l’avis de l’audience. Un nouvel avis d’audience, avec copie versée au dossier (pièce GD7), a été envoyé à l’appelant et à l’employeur.

Mode d’audience

[8] L’audience devait se dérouler par conférence téléphonique pour les raisons indiquées dans les avis d’audience datés des 5 novembre et 8 décembre 2015.

Question en litige

Départ volontaire

[9] Il s’agit de déterminer si l’appelant était fondé à quitter volontairement son emploi aux termes de l’alinéa 29c) de la Loi sur l’assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23 (la « Loi »).

Droit applicable

Concernant le départ volontaire

[10] Le paragraphe 30(1) de la Loi prévoit une exclusion du bénéfice des prestations pour une période indéfinie lorsque le prestataire a volontairement quitté son emploi sans y être fondé. Cette disposition est ainsi libellée :

30. (1) Le prestataire est exclu du bénéfice des prestations s’il perd un emploi en raison de son inconduite ou s’il quitte volontairement un emploi sans justification, à moins, selon le cas :

  1. a) que, depuis qu’il a perdu ou quitté cet emploi, il ait exercé un emploi assurable pendant le nombre d’heures requis, au titre de l’article 7 ou 7.1, pour recevoir des prestations de chômage;
  2. b) qu’il soit inadmissible, à l’égard de cet emploi, pour l’une des raisons prévues aux articles 31 à 33.

[11] Aux termes de l’alinéa 29c) de la Loi, il y a justification, c’est‑à‑dire que le prestataire est fondé à quitter volontairement son emploi ou à prendre congé si, compte tenu de toutes les circonstances, notamment de celles qui sont énumérées aux sous‑alinéas (i) à (xiv) de l’alinéa 29c), son départ ou son congé constitue la seule solution raisonnable dans son cas :

  1. (i) harcèlement, de nature sexuelle ou autre,
  2. (ii) nécessité d’accompagner son époux ou conjoint de fait ou un enfant à charge vers un autre lieu de résidence,
  3. (iii) discrimination fondée sur des motifs de distinction illicite, au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne,
  4. (iv) conditions de travail dangereuses pour sa santé ou sa sécurité,
  5. (v) nécessité de prendre soin d’un enfant ou d’un proche parent,
  6. (vi) assurance raisonnable d’un autre emploi dans un avenir immédiat,
  7. (vii) modification importante de ses conditions de rémunération,
  8. (viii) excès d’heures supplémentaires ou non‑rémunération de celles‑ci,
  9. (ix) modification importante des fonctions,
  10. (x) relations conflictuelles, dont la cause ne lui est pas essentiellement imputable, avec un supérieur,
  11. (xi) pratiques de l’employeur contraires au droit,
  12. (xii) discrimination relative à l’emploi en raison de l’appartenance à une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs,
  13. (xiii) incitation indue par l’employeur à l’égard du prestataire à quitter son emploi,
  14. (xiv) toute autre circonstance raisonnable prévue par règlement.

[12] Les paragraphes 30(2) et (3) de la Loi ajoutent les précisions suivantes au sujet de l’effet d’une exclusion du bénéfice de prestations :

(2) L’exclusion vaut pour toutes les semaines de la période de prestations du prestataire qui suivent son délai de carence. Il demeure par ailleurs entendu que la durée de cette exclusion n’est pas affectée par la perte subséquente d’un emploi au cours de la période de prestations.

(3) Dans le cas où l’événement à l’origine de l’exclusion survient au cours de sa période de prestations, l’exclusion du prestataire ne comprend pas les semaines de la période de prestations qui précèdent celle où survient l’événement.

[13] Selon la jurisprudence, la Commission doit d’abord prouver, selon la prépondérance des probabilités, que le prestataire a volontairement quitté son emploi. Une fois que le départ volontaire a été établi, le fardeau de la preuve consiste ensuite, pour le prestataire, à prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était fondé à quitter son emploi. Pour prouver cette justification, le prestataire doit prouver que, compte tenu de toutes les circonstances, il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter son emploi lorsqu’il l’a fait (White 2011 CAF 190; Patel 2010 CAF 95; Rena Astronomo A‑141‑97).

Preuve

Preuve de l’appelant

Demandes de prestations

[14] L’appelant a travaillé à « AAHO » (l’« employeur ») du 4 août 014 au 19 janvier 2015. L’appelant a quitté son emploi parce que son équipement et sa connexion Internet ne répondaient pas aux exigences et qu’il y avait des problèmes de connexion Internet à son emplacement (demandes de prestations, pièces GD3‑2 à 10).

Avis de 48 heures

[15] Par courriel daté du 20 janvier 2015, l’Employeur a envoyé à l’appelant un courriel d’« avis de 48 heures pour un bureau à la maison » qui indiquait que le bureau à domicile de l’appelant ne répond pas aux exigences de Sykes Home hébergé par Alpine Access. En vertu de la politique de l’Employeur, il fallait que l’appelant satisfasse aux exigences d’une connexion Internet haute vitesse avant le début de son quart de travail, le jeudi 22 janvier 2015, à 13 h (HAE). L’Employeur a déclaré que l’appelant était un employé apprécié et que s’il n’était pas en mesure de répondre aux exigences avant la date limite, il risquerait d’être retiré de l’effectif de l’employeur. Dans le courriel, l’employeur a inclus une liste des exigences. Le DP de l’Employeur a écrit « Si vous avez des questions, veuillez communiquer avec moi. »(L’« avis de 48 heures », 20 janvier 2015, pièces GD3‑20 et GD3‑34).

Conversations de la Commission avec l’appelant

[16] L’appelant a quitté son emploi parce qu’il travaillait de chez lui et ne satisfaisait plus aux exigences en matière d’informatique ou de connexion Internet. L’appelant n’était pas capable de mettre à niveau son ordinateur pour répondre aux exigences car il lui aurait été trop coûteux de remplacer son ordinateur. L’appelant a communiqué avec son fournisseur de service Internet, Telus, et on lui a dit que la baisse de service était due à une augmentation de la population et de la capacité de câblage qui allait être mise à niveau ultérieurement. L’appelant a une lettre de l’Employeur concernant ces questions et il la remettrait à la Commission (notes de la Commission, 21 février 2015, pièce GD3‑13).

[17] L’appelant a envoyé l’avis par télécopieur (23 février 2015, pièce GD3‑14).

[18] L’appelant avait l’Internet haute vitesse, mais l’Employeur exigeait un service ultra haute vitesse, lequel aurait nécessité de la part de l’appelant qu’il s’enregistre comme entreprise. Telus a dit à l’appelant que pour opérer la mise à niveau, il faudrait qu’il prouve qu’il était un travailleur autonome ou qu’il avait des besoins d’entreprise. L’appelant n’a pas demandé à Telus le genre de preuves qu’il leur fallait. L’appelant a présumé que, du fait qu’il n’était pas un travailleur autonome, il ne pouvait pas obtenir une mise à niveau de son service. L’appelant n’a pas communiqué avec d’autres fournisseurs de services Internet pour voir s’il pouvait obtenir la vitesse de connexion dont il avait besoin. L’appelant devait aussi mettre à niveau son ordinateur parce qu’il ne répondait plus aux exigences actuelles. Du fait que l’avis était de 48 heures, l’appelant n’avait pas le temps de mettre à niveau son Internet et son ordinateur. L’appelant a déclaré avoir informé l’Employeur qu’il lui faudrait plus de temps pour effectuer les mises à niveau, mais l’Employeur ne voulait pas lui accorder plus de temps (notes de la Commission, 26 février 2015, pièce GD3‑15).

[19] Les problèmes informatiques concernaient l’ordinateur de l’appelant et non celui de l’Employeur. L’Employeur fournissait à l’appelant l’ordinateur et la carte graphique (kit AIB) et l’appelant devait aussi utiliser son propre ordinateur, et c’était ce dernier appareil qui avait besoin d’être mis à niveau : comme son ordinateur ne répondait pas aux normes, c’est l’appelant qui avait la responsabilité de le réparer. L’appelant n’a pas demandé à l’Employeur de prolonger la période de 48 heures car il ne pensait pas que c’était possible. Lorsque la Commission a demandé à l’appelant s’il avait remarqué que dans le courriel du DP, il était écrit « Si vous avez des questions, veuillez communiquer avec moi » (pièce GD3‑34), l’appelant a répondu qu’il ne pensait pas que cela signifiait qu’il pouvait demander une prolongation de délai. L’appelant n’a pas donné suite à la demande du superviseur de communiquer avec lui après qu’il eût présenté sa première démission parce qu’il savait qu’il ne serait pas en mesure d’effectuer les mises à niveau nécessaires à son ordinateur. L’appelant n’était pas chez lui lorsque l’Employeur l’a appelé et il a commencé à explorer d’autres débouchés professionnels à la place. Le bail de l’appelant prenait fin en février 2015 et, ne trouvant pas un endroit abordable où vivre, il a décidé de déménager. L’appelant n’a pas envisagé de demander un transfert parce qu’il n’avait pas encore trouvé d’appartement en Ontario qui répondrait aux exigences de l’Employeur (un endroit calme et sécuritaire) et parce qu’il lui fallait encore mettre à niveau son ordinateur. L’appelant demeurait chez sa famille en Ontario et n’avait pas son propre espace de bureau (notes de la Commission, 9 mars 2015, pièce GD3‑37).

[20] L’appelant a déclaré qu’il était malade et qu’il habitait X et il s’est excusé d’avoir retourné l’appel si tardivement. L’appelant a déclaré qu’il faisait de l’asthme et qu’il avait eu une crise le vendredi, ce qui expliquait le délai. L’appelant a demandé pourquoi il lui fallait verser des cotisations d’assurance‑emploi s’il ne pouvait pas recevoir de prestations. L’appelant estimait qu’il n’avait pas d’autres solutions. Même si on lui avait accordé un congé, l’appelant n’aurait pas eu les moyens d’acheter un nouvel ordinateur. Il a pris la décision de quitter son emploi et d’explorer d’autres possibilités parce qu’il savait qu’il ne serait pas en mesure de satisfaire aux exigences. L’appelant a décidé de retourner en Ontario parce qu’il avait quelques entrevues d’emploi en janvier, lesquelles n’ont pas abouti. Il ne pouvait pas renouveler son bail. Il a décidé de déménager après avoir perdu son emploi. Il ne voulait pas que ses antécédents d’emploi montrent qu’il avait été congédié. Il n’a pas discuté de la situation avec son équipe lorsqu’on le lui a demandé car il s’avait que la situation ne pouvait pas être résolue (1er avril 2015, pièce GD3‑44).

Preuve tirée de la demande de révision (pièce GD3‑42) et de l’avis d’appel (pièce GD2)

[21] L’appelant ne pouvait pas répondre aux exigences de l’employeur en raison 1) du système informatique et 2) de la rapidité de la connexion Internet. Il s’est vu délivrer un avis de 48 heures auquel il lui fallait se conformer, à défaut de quoi il risquait le retrait; or il n’était pas en mesure de résoudre la situation en 48 heures (pièce GD3‑42).

[22] L’appelant avait deux emplois et son dernier employeur avait changé son horaire de travail, si bien qu’il était obligé de quitter son premier emploi, à contrecœur, ce qui lui a occasionné un manque à gagner (pièce GD2).

[23] Alors qu’il travaillait à son second emploi, son système a gelé un jour et on lui a demandé de le redémarrer. Le technicien de l’Employeur a alors jugé que le système de l’appelant ne répondait pas aux exigences de vitesse du système. L’appelant a expliqué que rien n’avait changé depuis les cinq derniers mois. Le superviseur a envoyé à l’appelant un avis de 48 heures pour qu’il se conforme aux exigences. La décision était très sévère et le fournisseur de services Internet ne pouvait pas lui garantir de la très grande vitesse et lui a dit que la vitesse n’avait pas diminué. Ce n’était pas un problème que l’appelant pouvait lui‑même régler, si bien qu’il n’a pas eu d’autre choix que de démissionner (pièce GD2).

[24] L’agente de la Commission a refusé de donner à l’appelant son nom de famille, et l’appelant a déclaré qu’elle était très cassante et qu’elle n’arrêtait pas de lui suggérer qu’il avait d’autres options (pièce GD2).

Preuve de l’Employeur

[25] Selon le relevé d’emploi daté du 4 février 2015, l’appelant a travaillé à « RWCS », l’Employeur, du 5 août 2014 au 19 janvier 2015. Le motif donné pour l’émission du relevé d’emploi était un code « E », qui signifie « Démission ». L’appelant avait cumulé 885 heures d’emploi assurable (pièce GD3‑12).

Conversations de l’Employeur avec la Commission

[26] L’appelant a quitté son emploi. L’IS a dit qu’elle vérifierait si le courriel a bien été envoyé. Lorsqu’un employé commence à travailler chez l’Employeur, on lui fournit un « A in a box kit » (l’« AIB ») pour accomplir le travail. Le kit AIB comprend une console d’ordinateur, un socle, un commutateur vidéo, un câble réseau/Ethernet, un clavier et une souris USB, une barre d’alimentation et un câble VGA. L’employé est tenu d’utiliser son propre moniteur et d’obtenir ses propres services téléphoniques et d’Internet. Si l’ordinateur ne répondait pas aux normes requises d’équipement, alors l’employé devait communiquer avec le soutien technique pour obtenir les réparations nécessaires. Si l’on trouvait que le problème résidait dans l’équipement, alors on envoyait un nouveau kit AIB à l’employé, et l’Employeur prenait à sa charge le coût de toutes les réparations. Si le problème concernait l’équipement de l’employé, alors on lui envoyait un avertissement pour qu’il mette à niveau ses services, à défaut de quoi, on mettait fin à la relation d’emploi. Lorsque l’employé informe l’Employeur qu’il est en train d’apporter les réparations nécessaires, l’Employeur a pour pratique de prolonger le délai accordé pour donner à l’employé le temps d’effectuer les mises à niveau ou réparations. L’Employeur n’a pas mis fin à la relation d’emploi avec l’appelant. L’Employeur a reçu de l’appelant un avis de démission daté du 22 janvier 2015 et déclare que l’appelant avait démissionné 1) en raison du problème de connexion Internet, 2) pour se rapprocher géographiquement de sa famille et 3) pour explorer d’autres possibilités professionnelles (notes de la Commission, 2 mars 2015, pièce GD3‑16).

[27] Les problèmes techniques surviennent habituellement lorsque l’employeur remarque qu’il y a des interruptions de connexion Internet ou d’appels téléphoniques. Si le problème ne se trouve pas dans le matériel fourni à l’employé, c’est à l’employé qu’il incombe de régler le problème avec le fournisseur de services Internet. Le courriel de l’appelant indiquait que Telus venait chez lui pour régler la panne, mais qu’on avait jugé qu’il ne satisfaisait pas aux exigences. Il a voulu qu’on le retire des effectifs de l’Employeur pour se chercher un autre emploi. Le gestionnaire de l’Employeur a envoyé un courriel à l’appelant pour voir s’il était disponible pour parler. L’Employeur a reçu un courriel de retour de l’appelant qui disait qu’il n’était pas chez lui et qui confirmait qu’il démissionnait de son emploi en raison du problème d’Internet, pour être plus près de sa famille et pour explorer d’autres possibilités d’emploi. L’Employeur n’aurait pas offert d’assistance pour la mise à niveau des services de l’appelant car c’est la responsabilité de ce dernier d’obtenir la connexion requise. Le choix du fournisseur de services Internet était laissé à la discrétion de l’appelant. L’appelant aurait pu prendre un congé personnel non payé pour avoir le temps d’apporter les mises à niveau s’il lui avait fallu plus de cinq jours. Si l’appelant avait besoin de plus de temps, il n’avait qu’à le demander. L’appelant aurait été transférable en Alberta ou en Ontario, parce que l’Employeur y avait des succursales. L’appelant n’a pas demandé à être transféré (notes de la Commission, 6 mars 2015, pièces GD3‑17 et 18).

[28] L’appelant n’était pas obligé de posséder lui‑même un second ordinateur comme solution de rechange à l’équipement fourni. La Commission a répété ce qu’avait dit l’appelant, à savoir que son système de bureau à la maison n’était pas conforme et qu’il ne pouvait pas répondre aux exigences car il n’avait pas les moyens d’acheter un nouveau système. L’IS lui a dit que, même si c’était le cas, l’Employeur lui aurait accordé un congé ou un calendrier de paye accéléré pour l’aider avec les coûts. L’IS a rappelé et a confirmé que l’appelant était tenu d’utiliser son propre ordinateur personnel pour la formation, mais pas pour les tâches quotidiennes. Le DP de l’Employeur a confirmé que l’avis de 48 heures avait résulté des problèmes d’accès Internet et non du fait que l’appelant devait se procurer un autre ordinateur de maison (notes de la Commission, 24 avril 2015, pièce GD3‑45).

Documents produits par l’Employeur

[29] Les pièces GD3‑25 à 30 constituent l’entente de l’employeur sur la zone de travail. Cette entente prévoit que l’appelant devait avoir un bureau désigné à la maison et devait maintenir un abonnement à une connexion Internet fiable, à haute vitesse, câblée et bidirectionnelle utilisant une connexion DSL ou par câble qui réponde aux exigences suivantes : 1. connexion terrestre (pas une connexion sans fil ou à large bande par satellite); 2) abonnement fiable avec temps de disponibilité continu; 3) utilisation illimitée. L’employé convenait aussi d’avoir un téléphone fixe avec certaines fonctions.

[30] Par courriel envoyé le 22 janvier 2015, à 15 h 29, l’appelant a écrit au DP de l’Employeur pour l’informer que Telus avait communiqué avec lui et envoyé un technicien à son appartement pour vérifier la ligne ou les arrêts ou interruptions à l’appartement. L’appelant y indiquait qu’il comprenait qu’il ne satisfaisait actuellement pas aux exigences d’une connexion Internet fiable à un bureau à domicile, si bien qu’il demandait à ce qu’on le retire de la liste pour pouvoir explorer d’autres débouchés (22 janvier 2015, pièce GD3‑35).

[31] Par courriel envoyé le 22 janvier 2015, à 13 h 37, le DP a répondu à l’appelant en lui posant la question « Êtes-vous capable d’aller sur le pont et de parler? » (pièce GD3‑36).

[32] Par courriel de réponse daté du 22 janvier 2015, à 16 h 22, l’appelant a déclaré « Désolé, je ne suis pas chez moi. Oui, je démissionne. C’est à cause de plusieurs raisons : 1) le problème de connexion Internet; 2) pour me rapprocher de ma famille; 3) pour explorer d’autres possibilités professionnelles » (pièce GD3‑36).

Observations

[33] L’appelant a plaidé qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi pour les raisons suivantes :

  1. L’appelant a été professionnel et responsable, et sa seule option était de chercher d’autres débouchés (pièce GD3‑42).
  2. L’appelant n’a pas voulu démissionner pour la forme, mais en raison de la situation ou des circonstances exigées par l’Employeur (pièce GD3‑42).
  3. L’appelant est pénalisé pour avoir respecté la décision de l’Employeur (pièce GD3‑42).
  4. L’appelant ne demande pas des prestations d’assurance-emploi pour le plaisir de le faire, mais en raison des circonstances qui échappent à son contrôle (pièce GD3‑42).
  5. La représentante à la Commission n’a fait que suggérer que l’appelant pourrait faire ceci ou cela (pièce GD3‑42).

[34] L’intimée a fait valoir ce qui suit :

  1. Le paragraphe 30(2) de la Loi prévoit que le prestataire qui quitte volontairement son emploi sans y être fondé (sans justification) est exclu du bénéfice des prestations pour une période indéfinie. Le critère juridique à appliquer consiste à déterminer si, compte tenu de toutes les circonstances, le départ de l’appelant constituait la seule solution raisonnable dans son cas. C’est à l’appelant qu’il incombe de prouver qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable au départ (White, 2011 CAF 190) (pièce GD4‑3).
  2. L’appelant avait plusieurs solutions raisonnables. Il aurait pu discuter de la situation avec son employeur pour obtenir les précisions sur ce qui était exigé, pour demander de l’assistance et pour obtenir davantage de temps que la période de 48 heures d’avis. L’Employeur lui a procuré cette solution raisonnable lorsqu’il lui a demandé « Êtes‑vous capable de venir sur le pont pour que nous puissions parler? » (pièce GD3‑36) (pièce GD4‑3).
  3. L’Employeur a confirmé que l’appelant n’était pas tenu de mettre à niveau son ordinateur personnel et que le seul problème résidait dans sa connexion Internet (pièce GD4‑3).
  4. Le résumé de la chronologie des événements fourni par l’Employeur montre que l’appelant ne voulait pas régler le problème et qu’il avait d’autres priorités (pièce GD4‑3).
  5. L’appelant aurait pu communiquer avec d’autres fournisseurs de services Internet (pièce GD4‑4).
  6. Étant donné que l’appelant a répondu qu’il n’était « pas chez lui » et qu’il a mentionné qu’il ne renouvelait pas son bail et qu’il avait d’autres entrevues d’emploi en Ontario en janvier, les deux autres motifs invoqués par l’appelant pour démissionner, à savoir « se rapprocher de la famille » et « explorer d’autres débouchés professionnels », étaient pertinents et le problème de la connexion Internet n’était pas la raison principale (pièce GD4‑4).
  7. L’appelant aurait pu demander plus de temps, de l’assistance ou un transfert à une succursale de l’employeur en Ontario (pièce GD4‑4).

Analyse

[35] Il est établi depuis longtemps que la règle générale voulant qu’une personne qui met volontairement un terme à sa relation d’emploi n’est pas admissible aux prestations d’assurance‑emploi (sauf dans les circonstances exceptionnelles prévues dans la législation) repose sur le fait que la Loi représente essentiellement un régime d’« assurance » contre le chômage involontaire et qu’une règle fondamentale de tout régime d’assurance est que « l’assuré ne crée ou n’accroisse pas délibérément le risque » (Lords Donaldson et Denning dans Crewe (1982) 2 All E.R. 745) (Tanguay A‑1458‑84).

[36] Cette justification est reprise dans les remarques incidentes du juge Pratte dans l’arrêt Tanguay, où il déclare que pour prouver qu’il était fondé à quitter son emploi, le prestataire doit d’abord convaincre le Tribunal qu’il n’avait d’autre solution raisonnable que de recevoir des prestations d’assurance‑emploi (le juge Pratte dans Tanguay A‑1458‑84). Pour satisfaire au critère juridique relatif à la justification, le prestataire doit prouver qu’aucune autre solution raisonnable ne s’offrait à lui lorsqu’il a quitté son emploi, comme l’exige l’alinéa 29c) de la Loi.

[37] Il est clair en droit que le régime d’assurance-emploi ne vise pas à subventionner les employés qui quittent volontairement leur emploi pour des motifs personnels et qui créent un risque pour des raisons ne constituant pas une justification (Bois 2001 CAF 175).

Conclusions de fait

[38] Le Tribunal tient pour avéré que la Commission a prouvé, selon la prépondérance des probabilités, que l’employé a quitté volontairement son emploi. L’appelant a admis ce fait dans sa demande de prestations et dans l’avis d’appel. Il incombe donc maintenant à l’employé de prouver qu’il était fondé à quitter son emploi (White, 2011 CAF 190; Patel 2010 CAF).

[39] L’appelant a soutenu, dans les déclarations qu’il a faites à la Commission et dans ses propres déclarations écrites et l’avis d’appel, qu’il avait été fondé à quitter volontairement son emploi.

[40] L’appelant a argué qu’il n’avait pas eu d’autre choix que de démissionner. L’appelant a affirmé qu’il n’avait pas les moyens de s’acheter un nouvel ordinateur et qu’il ne pouvait pas non plus se conformer aux exigences de son emploi dans le délai de 48 heures imparti par l’employeur.

[41] L’appelant a aussi déclaré qu’il voulait démissionner pour se rapprocher géographiquement de sa famille et explorer d’autres débouchés professionnels.

[42] L’Employeur a nié que l’appelant avait un problème d’ordinateur et a témoigné que l’appelant n’avait pas besoin de son propre ordinateur pour les fins du travail. L’Employeur a mentionné qu’il avait tenté d’entrer en contact avec l’appelant pour discuter de la question. L’Employeur a déclaré que, le 22 janvier 2015, l’appelant a remis sa démission et décliné l’offre du superviseur de discuter des questions relatives à sa difficulté à satisfaire aux exigences de l’emploi (pièces GD3‑35 et 36).

[43] En soupesant la preuve de l’appelant par rapport à celle de l’Employeur, il est apparu, à partir des notes de la Commission, que l’appelant s’était plusieurs fois contredit. Dans la pièce GD3‑15, la Commission a indiqué que l’appelant avait déclaré avoir demandé plus de temps à l’Employeur pour effectuer les mises à niveau et que l’Employeur ne voulait pas lui accorder ce délai supplémentaire. L’appelant semble ensuite avoir déclaré à la Commission qu’il n’a pas demandé plus de temps et qu’il n’a pas donné suite à la demande de l’Employeur de communiquer avec l’Employeur du fait que l’appelant savait qu’il ne serait pas en mesure d’effectuer les mises à niveau requises. Il a ensuite été noté que l’appelant avait imputé le problème à son propre ordinateur et a commencé à soutenir qu’il n’avait pas les moyens de réparer son propre ordinateur (pièces GD3‑37 à 44), alors que l’Employeur a clairement dit que l’appelant n’était pas tenu d’utiliser son propre ordinateur pour son travail.

[44] Le Tribunal estime, après avoir étudié le dossier avec soin, que les déclarations fournies par l’Employeur et l’appelant n’ont pas le même degré de crédibilité ou de plausibilité. Le Tribunal a préféré la preuve indirecte de l’Employeur concernant les faits relatifs à la cessation d’emploi et au problème d’ordinateur car les déclarations de l’Employeur étaient corroborées par les dossiers d’entreprise et les relevés de courriels, qui indiquaient les communications finales entre l’appelant et l’employeur, et en raison des propres admissions ou contradictions de l’appelant au dossier (pièces GD3‑35 et 36) (Morris A‑291‑98, autorisation de pourvoi à la C.S.C. refusée [1999] C.S.C.R. no 304; Mills A‑1873‑83).

[45] Le Tribunal estime que l’avis de 48 heures équivalait à un avertissement qu’il pourrait être mis fin à l’emploi de l’appelant s’il ne se conformait pas à une condition fondamentale de son contrat d’emploi. Après avoir reçu l’avis de 48 heures, l’appelant a fait des recherches pour déterminer s’il serait possible de se conformer aux exigences de l’Employeur avec son fournisseur de services Internet. L’appelant n’a pas communiqué avec d’autres fournisseurs de services Internet et il n’a pas discuté de la situation avec son employeur lorsque l’Employeur a communiqué avec lui par courriel.

[46] Au lieu de cela, l’appelant a fait des plans pour déménager à un autre endroit et se trouver un autre emploi.

[47] Nonobstant le fait que l’appelant ait pu paniquer au vu de sa situation d’emploi et qu’il ait pu craindre d’être congédié pour inconduite (pièce GD3‑44), l’appelant aurait pu prendre les mesures nécessaires pour conserver son emploi, notamment en ayant avec son employeur une discussion au sujet de la situation et des options qui s’offraient à lui pour la résoudre. Agir autrement, comme l’appelant l’a fait, signifie qu’il anticipait la fin de son emploi et qu’il a provoqué sa cessation d’emploi. Ce faisant, l’appelant a délibérément provoqué la réalisation du risque et a créé sa propre situation de chômage.

[48] C’est d’autant plus le cas que l’appelant a déclaré qu’il utilisait le même matériel et la même technologie depuis cinq mois lorsqu’il a appris ou aurait dû savoir ce qu’exigeait de lui son contrat d’emploi (pièces GD3‑25 à 30).

[49] Sur ce point, le Tribunal ne considère pas que le défaut de l’appelant de se conformer aux exigences techniques de son emploi équivalait à une justification et fait observer, entre parenthèses, que le défaut de se conformer de l’appelant aurait également pu être considéré comme de l’inconduite (Easson, 1994, 2 C.C.E.I. (2d) 82, 167 N.R. 232; Brisette [1994] 1 C.F. 684 (C.A.), A‑1342‑92;CUB 65001).

[50] En ce qui concerne les arguments de l’appelant selon lesquels il déménageait pour se rapprocher géographiquement de sa famille et se trouver un nouvel emploi, l’appelant a admis qu’il n’avait pas d’offre d’emploi ni d’emploi potentiel au moment où il a quitté son emploi. Ces motifs ont été invoqués à titre purement personnels et ne sauraient équivaloir à une « justification » aux termes de la Loi ou de la jurisprudence (Bois 2001 CAF 175; Campeau 2006 CAF 376; CUB 75011, 2010; CUB 80296, 2012; Langlois 2008 CAF 18; Laughland 2003 CAF 129).

Solutions raisonnables

[51] Même si l’appelant avait établi la première partie du critère relatif à la justification selon la prépondérance des probabilités (ce que, pour que ce soit clair, le Tribunal ne conclut pas), l’appelant n’a pas prouvé qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter volontairement son emploi.

[52] L’appelant a argué que la Commission n’aurait pas dû se préoccuper de tant de facteurs hypothétiques (lorsqu’elle lui a demandé s’il n’avait pas d’autres fournisseurs de service Internet que l’appelant aurait pu contacter, lorsqu’elle a tenté de mesurer la possibilité que l’appelant obtienne une prolongation du délai de 48 heures ou lorsqu’elle a suggéré qu’il aurait pu prendre un congé, pièces GD2 et GD3‑42). Le Tribunal n’est pas d’accord. La Commission appliquait simplement le « critère de la seule solution raisonnable » aux circonstances de l’appelant (White 2011 CAF 190; Patel 2010 CAF 95).

[53] Le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était fondé à quitter son emploi au motif qu’il n’a pas discuté de la situation avec son employeur et qu’il a même décliné l’offre de son employeur de le faire (pièces GD3‑35 et 36). Cela a empêché l’Employeur de tenter d’accommoder l’appelant ou de lui accorder un délai supplémentaire. C’est particulièrement pertinent compte tenu des déclarations que l’Employeur a faites à la Commission selon lesquelles l’Employeur aurait pu accorder à l’appelant une prolongation de délai, une période de congé ou encore un transfert en Ontario (pièces GD3‑16 à 18 et GD3‑45) (Murugaiah 2008 CAF 10; Hernandez 2007 CAF 320; Campeau 2006 CAF 376).

[54] Les autres solutions raisonnables pour l’appelant auraient consisté à communiquer avec d’autres fournisseurs de service Internet et à effectuer des recherches plus exhaustives pour trouver le service Internet haute vitesse requis. L’appelant aurait pu effectuer une recherche d’emploi et se trouver un autre emploi avant de remettre sa démission, comme il l’a fait dans son courriel du 22 janvier 2015 (pièces GD3‑35 et 36).

Conclusion

[55] Pour les motifs qui précèdent, le Tribunal conclut que l’appelant n’a pas prouvé, selon la prépondérance des probabilités, qu’il était fondé à quitter volontairement son emploi et qu’il n’avait pas d’autre solution raisonnable que de quitter volontairement son emploi (White 2011 CAF 190; Patel 2010 CAF 95).

[56] L’appel est donc rejeté.

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