Assurance-emploi (AE)

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Motifs et décision

Comparutions

La prestataire n’a pas comparu lors de l’audience.

Introduction

[1] L’appelante a présenté une demande de prestations d’assurance-emploi le 3 août 2011 (pièce GD3-11). Le 1er février 2012 et le 5 octobre 2012, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (la « Commission ») a communiqué à la prestataire son intention de ne pas payer de prestations d’assurance-emploi à la prestataire dès le 31 juillet 2011 pour cause de départ volontaire (pièce GD3-14 et 20). Ce n’est que le 27 mai 2015 que la prestataire a demandé à la Commission de réviser sa décision initiale (pièce GD3-16). Le 17 juin 2015, la Commission a refusé cette demande (pièce GD3-18) parce que la prestataire a déposé sa demande après l’expiration du délai de prescription prévu à l’article 1 du Règlement sur les demandes de révision.

[2] L’appelante a porté cette décision en appel devant le Tribunal le 3 septembre 2015, soit après le délai prévu à l’article 52 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (pièces GD2). Procédant par voie de décision interlocutoire après demande d’observations à la prestataire, le Tribunal a rendu une décision interlocutoire prorogeant le délai d’appel de la prestataire le 16 novembre 2015. Selon les informations provenant de Poste Canada portées au dossier de la prestataire, cette dernière aurait reçu la documentation afférente à son appel, la décision interlocutoire pour faire appel devant le Tribunal lui étant favorable ainsi que son avis d’appel pour la date du 17 février 2016 dès le 20 novembre 2015. Malheureusement, la prestataire ne s’est pas présentée à l’audience à la date prévue.

[3] Au sens du paragraphe 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale, le Tribunal est satisfait que la prestataire ait été avisée l’audience prévue dans sa cause et a procédé à cette dernière en son absence. L’audience a donc eu lieu le 17 février 2016 à l’heure prévue à l’avis d’audience communiqué à la prestataire en novembre 2015.

[4] Cet appel a été instruit selon le mode d’audience par téléconférence pour les raisons suivantes :

  1. L’information au dossier, y compris la nécessité d’obtenir des informations supplémentaires.

Question en litige

[5] Le Tribunal doit décider s’il accorde à l’appelante une prorogation du délai pour présenter une demande de révision d’une décision initiale rendue par le Commission.

Droit applicable

[6] Le paragraphe 12(1) du Règlement sur le Tribunal de la sécurité sociale prévoit que si une partie omet de se présenter à l’audience, le Tribunal peut procéder en son absence, s’il est convaincu qu’elle a été avisée de la tenue de l’audience.

[7] L’article 1 du Règlement sur les demandes de révision prévoit que :

  1. (1) Pour l’application du paragraphe 112(1) de la Loi sur l’assurance-emploi et sous réserve du paragraphe (2), la Commission peut accorder un délai plus long pour la présentation d’une demande de révision, si elle est convaincue, d’une part, qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande de prolongation du délai et, d’autre part, que l’intéressé a manifesté l’intention constante de demander la révision.
  2. (2) Dans les cas ci-après, la Commission doit aussi être convaincue que la demande de révision a des chances raisonnables de succès et que l’autorisation du délai supplémentaire ne lui porte pas préjudice ni d’ailleurs à aucune autre partie :
    1. a) la demande de révision est présentée après l’expiration du délai de trois cent soixante-cinq jours suivant le jour où l’intéressé a reçu communication de la décision;
    2. b) elle est présentée par une personne qui a fait une autre demande de prestations après que la décision lui a été communiquée;
    3. c) elle est présentée par une personne qui a demandé à la Commission d’annuler ou de modifier la décision en vertu de l’article 111 de la Loi sur l’assurance- emploi.

[8] Dans l’affaire Penney c. Canada (Procureur Général) (2009 CAF 354), la Cour d’appel fédérale (la « Cour ») appuie le principe mis de l’avant selon lequel le principe de justice naturelle n’est pas une règle basée sur un principe d’équité autorisant à déroger aux dispositions de la Loi. En soi, la Cour confirme qu’il est possible d’interjeter appel du refus de la Commission de laisser un appel tardif suivre son cours, mais uniquement au motif que la Commission a fondé sa décision sur des considérations non pertinentes ou a négligé des questions importantes.

[9] Comme aucune jurisprudence n’existe en ce qui a trait aux appels de demandes de révision de la Commission, le Tribunal s’appuie sur l’affaire Canada (Procureur général) c. Knowler (A-445-95), qui donne un pouvoir discrétionnaire à la Commission en cette matière en lien avec les dispositions antérieures concernant la prorogation de délai pour interjeter appel devant un conseil arbitral. Cette jurisprudence soutient que le pouvoir de la Commission d’accorder un délai supplémentaire est de nature discrétionnaire et sa décision d’accorder ou de refuser un délai supplémentaire ne peut être infirmée que si la Commission a exercé son pouvoir discrétionnaire de façon « non judiciaire » ou si la décision est fondée sur des considérations non pertinentes ou sans tenir compte de considérations pertinentes.

[10] Dans l’affaire Muckhenheim c. Canada (Procureur général) (2008 CAF 249), la Cour affirme que la Commission a intérêt à se fonder sur le caractère certain et définitif des ordonnances du juge-arbitre, parce qu’il doit y avoir un caractère certain et définitif pour les parties.

[11]  Dans l’affaire Grewal c. Canada (Procureur général) (85-A-55), la Cour met de l’avant qu’on s’attend à ce qu’un appelant poursuive l’appel avec la diligence qui peut raisonnablement être exigée de lui.

Preuve

[12] La preuve documentaire au dossier est la suivante :

  1. une demande de prestations datée du 3 août 2011 (pièce GD3-11);
  2. une décision initiale de la Commission datée du 1er février 2012 (pièce GD3-14);
  3. une demande de révision provenant de la prestataire, reçue à la Commission, datée du 27 mai 2015 (pièce GD3-16);
  4. une décision provenant de la Commission relative à l’alinéa 112(1) a) de la Loi datée du 22 juin 2015 (pièce GD3-21);
  5. un avis d’appel au Tribunal daté du 3 septembre 2015 (pièce GD2-1);
  6. la somme des observations datée de la prestataire comme demandée par le Tribunal (pièce GD6-1);
  7. que la prestataire a reçu son avis d’appel, la décision interlocutoire quant à la prorogation de délai pour faire appel devant le Tribunal et son dossier entier tel que présenté par la Commission le 20 novembre 2015 par poste recommandée (Document au dossier de la prestataire).

Arguments des parties

[13] L’appelante a fait valoir :

  1. au centre de chômage du Tremblay à X seul recours en appel d’après la loi du chômage je dois informer le Canada que mes papiers ont été remplis correctement (sic.) (pièce GD6-1);
  2. j’ai besoin d’une réponse au lieu de recevoir des papiers qui résulte en rien (sic.) (pièce GD6-1);
  3. toutes les personnes ont reçu leur chèque, mais moi rien (sic.) (pièce GD6-1);
  4. j’ai besoin d’une réponse assez claire si vous avez l’intention de canceller (sic.) (pièce GD6-1).

[14] L’intimée a soutenu :

  1. qu’elle peut accorder un délai supplémentaire pour présenter une demande de révision si la Commission est satisfaite qu’il existe une explication raisonnable pour la demande d’un délai supplémentaire et que la personne a démontré une intention continue de demander une demande de révision (pièce GD4-2);
  2. que dans les circonstances où le retard est de plus de 365 jours, elle doit également être satisfaite que la demande de révision a une chance raisonnable de succès, et que l’autorisation du délai supplémentaire pour faire une demande ne porterait pas préjudice à la Commission ou à une autre partie (pièce GD4-2);
  3. que la prestataire avait connaissance de la décision de la Commission datée du 1er février 2012, qu’elle a reçu par le biais d’un avis remis en mains propres le 5 octobre 2012, et elle a tardé jusqu’au 27 mai 2015 pour présenter une demande de révision (pièce GD4-2);
  4. que la prestataire n’a pas fourni d’explication raisonnable pour justifier le retard et n’a pas prouvé avoir l’intention constante de faire sa demande parce qu’elle confirme avoir reçu l’avis de décision qui lui a été remis en personne, mais ne donne aucune explication sur son retard à déposer une demande de révision (pièce GD4-2).

Analyse

[15] Pour qu’une demande de prorogation du délai pour déposer une demande de révision conformément au paragraphe 1(1) du Règlement sur les demandes de révision soit accordée, la Commission doit être convaincue qu’il existe une explication raisonnable à l’appui de la demande et que l’intéressé a manifesté son intention constante de demander la révision. Ensuite, dans le cadre du paragraphe 1(2) de ce même Règlement, la Commission doit aussi être convaincue que la demande a des chances raisonnables de succès et que l’autorisation du délai supplémentaire ne lui porte pas préjudice, ni a aucune autre partie dans le cas énuméré à l’alinéa 1(2) a). La charge du Tribunal est donc d’évaluer si la Commission a usé de son pouvoir discrétionnaire de façon judiciaire.

Explication raisonnable

[16] La prestataire explique dans sa lettre d’appel qu’elle est allée au centre de chômage du Tremblay à Longueuil, soit son seul recours en appel d’après la loi du chômage puisqu’elle doit informer l’État fédéral que ses papiers ont été remplis correctement.

[17] La prestataire a donné une explication sur une partie du processus qu’elle a mené pour déposer sa demande à la Commission ou au Tribunal. Cette explication ne propose pas de date ni d’horaire et n’explique pas pourquoi ce fut raisonnable, pour elle, de déposer sa demande de révision à la Commission à l’extérieur du délai généralement consenti par la Loi. Pour cette raison, le Tribunal soumet que le prestataire n’a pas fourni d’explication raisonnable expliquant son retard à déposer sa demande de révision à la Commission.

Intention constante de poursuivre l’appel

[18] Dans l’arrêt Grewal (85-A-55), la Cour met de l’avant que l’on s’attend à ce qu’un appelant poursuive l’appel avec la diligence qui peut raisonnablement être exigée de lui. En omettant de façon continue de négliger les délais contenus dans les communications qui lui ont été envoyées par la Commission, la prestataire démontre qu’elle n’a pas tenté de poursuivre l’appel avec la diligence qui est raisonnablement exigé d’elle. Le Tribunal note par ailleurs que la prestataire, même si elle a été avisée près de trois (3) mois d’avance de la date d’audience dans sa cause, elle ne s’est pas présentée et n’a pas non plus signifié son impossibilité de se présenter à cette audience téléphonique auprès du Tribunal. Le seul fait de déclarer qu’elle a besoin « d’une réponse au lieu de recevoir des papiers qui (ne résultent) en rien » (pièce GD6-1) n’est pas une réponse satisfaisante pour déterminer une quelconque intention constante de poursuivre un appel. Le Tribunal constate donc que la prestataire n’a donc pas eu l’intention constante de poursuivre son appel, cette intention qui dure, qui se produit de façon ininterrompue dans le temps.

Chance raisonnable de succès

[19] Dans sa lettre d’appel, la prestataire affirme que « toutes les personnes ont reçu leur chèque, mais moi rien (sic.) » (pièce GD6-1). Le Tribunal ne peut, en l’absence d’autres faits qui auraient pu lui être communiquées à l’audience, affirmer que l’appel de la prestataire a une chance raisonnable de succès étant donné le peu d’information dont il possède à propos du départ volontaire de la prestataire. En outre, il revient à un prestataire de faire la preuve de la chance raisonnable de succès dans sa cause, un test juridique relativement peu élevé étant donné les circonstances, mais dont la prestataire n’a pas tenté de remplir.

Préjudice aux autres parties

[20] Parce qu’il s’est passé presque trois (3) ans entre le moment où la prestataire a reçu la décision initiale (pièces GD3-14 et 20) et sa demande de révision à la Commission (pièce GD3- 16), le Tribunal doit mettre fin à ce litige. En se basant sur l’arrêt Muckenheim (2008 CAF 249), le Tribunal est d’avis qu’il doit mettre fin au litige entre les deux parties pour s’assurer que les décisions en cause aient un caractère certain et définitif pour les parties en cause. En ce sens, comme la prestataire ne soulève aucun fait qui démontrerait que la Commission a fondé sa décision sur des considérations non pertinentes ou négligé des questions importantes, le Tribunal se repose sur l’arrêt Knowler (A-445-95) pour affirmer qu’il causerait préjudice à la Commission de voir ces appels révisés. Le seul fait de déclarer qu’elle a « besoin d’une réponse assez claire si vous avez l’intention de canceller (sic.)  » ne démontre pas que la prorogation de délai pour faire appel devant la Commission ne causerait pas de préjudice aux parties.

Pouvoir discrétionnaire de la Commission utilisé de façon judiciaire

[21] En se basant sur l’arrêt Knowler (A-445-95), le Tribunal juge que la Commission n’a pas utilité son pouvoir discrétionnaire de façon non judiciaire. Au regard des faits, c’est-à-dire des différentes dates soumises par la prestataire et la Commission dans le dossier et la négligence évidente prestataire quant au suivi normal des communications qui lui ont été signifiées par la Commission, il apparaît clair que la Commission a jugé des éléments nécessaires à la bonne tenue du programme de l’assurance-emploi dans le cadre du dossier de la prestataire.

En résumé

[22] Finalement, le Tribunal n’a devant lui que la question de la prorogation de délai pour présenter une demande de révision en regard du Règlement sur les demandes de révision. Le Tribunal conclut que l’appel de la prestataire pour présenter une demande de révision ont été présentés sont hors délais. En s’appuyant sur l’arrêt Penney (2009 CAF 354), le Tribunal maintient que la Commission n’a pas fondé ses décisions sur des considérations non pertinentes en jugeant la prestataire hors délai dans l’analyse de la période de prestations devant elle et n’a pas négligé des questions importantes lors de l’analyse des dossiers du prestataire. En s’appuyant sur l’arrêt Knowler (A-445-95) le Tribunal maintient que la Commission a utilisé ses pouvoirs de façon judiciaire dans son refus d’accueillir la demande de révision du prestataire dans le dossier de la prestataire.

Conclusion

[23] L’appel est rejeté.

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