Assurance-emploi (AE)

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Contenu de la décision



Motifs et décision

Comparution et mode d’audience

[1] Le Tribunal a tenu une audience par vidéoconférence à Rimouski le 1er mars 2016 pour les motifs énoncés dans l’avis d’audience daté du 18 janvier 2016, soit en raison de la complexité de la question en litige et de la disponibilité de la vidéoconférence dans la localité où habite l’appelant.

[2] L’appelant, Monsieur C. T. était présent à l’audience.

[3] La Commission intimée ne s’est pas présentée à l’audience.

Introduction – Exposé des faits et procédures

[4] L’appelant a déposé une demande initiale de prestations de maladie qui a été établie au 18 janvier 2015 (GD3-3 à GD3-16).

[5] La Commission a déterminé le taux hebdomadaire de prestations de l’appelant selon les informations fournies par celui-ci lorsqu’il a complété sa demande (GD3-10).

[6] Suite à la réception d’informations de l’Agence du Revenu du Canada (ARC) indiquant une rémunération différente de celle mentionnée par l’appelant, un nouveau calcul du taux de prestations a été effectué et ce taux s’en est trouvé diminué.

[7] L’appelant a présenté une demande de révision de la décision de la Commission concernant le calcul de son taux hebdomadaire de prestations (GD3-26 à GD3-29). Décision que la Commission a maintenue (GD3-31 et GD3-32), d’où le présent appel au Tribunal (GD2-1 à GD2-1 à GD2-8 et GD2A-1 à GD2A-3).

Question en litige

[8] La question en litige concerne le calcul du taux de prestations hebdomadaire de l’appelant aux termes de la partie VII.1 de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi ») – Prestations pour les travailleurs indépendants (articles 152.01 et suivants).

Droit applicable

[9] C’est la partie VII.1 de la Loi sur l’assurance-emploi (la « Loi »), en vigueur depuis janvier 2010, qui traite des prestations pour les travailleurs indépendants et plus spécifiquement dans le cas qui nous occupe, les articles 152.01 à 152.34.

[10] L’article 152.31(1) de la Loi prévoit :

152.31 (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), les dispositions de la présente loi, sauf les articles 5 à 37, 48 et 56 à 65.2, qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions de la présente partie, s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, à la présente partie.

[11] L’article 152.03(1) de la Loi stipule :

152.03 (1) Sous réserve de la présente partie, le travailleur indépendant qui cesse de travailler à ce titre par suite d’une maladie, d’une blessure ou d’une mise en quarantaine prévues par règlement et qui, sans cela, aurait travaillé est admissible au bénéfice des prestations tant qu’il est incapable de travailler à ce titre pour cette raison.

[12] L’article 152.08(1) de la Loi indique que la période de référence d’un travailleur indépendant est l’année précédant celle au cours de laquelle débute sa période de prestations.

[13] L’article 152.16 de la Loi se lit comme suit :

  1. 152.16 (1) Le taux des prestations hebdomadaires qui peuvent être versées à un travailleur indépendant est de cinquante-cinq pour cent du montant obtenu par division de la somme des montants figurant aux alinéas a) et b), par cinquante-deux :
    1. a) le montant de la rémunération provenant du travail qu’il a exécuté pour son propre compte, déterminé en application de l’alinéa 152.01(2)a), b) ou c), selon le cas, pour sa période de référence;
    2. b) s’agissant d’un travailleur indépendant ayant reçu une rémunération assurable provenant d’un emploi, y compris la rémunération assurable qu’il a tirée à titre de personne visée par les règlements pris en vertu de la partie VIII, pour sa période de référence, le montant de cette rémunération assurable pour cette période, compte non tenu de la rémunération assurable prévue par règlement.
  2. (2) Pour l’application du paragraphe (1), il ne peut être tenu compte de la partie de la somme des montants visés aux alinéas (1)a) et b) qui dépasse le maximum de la rémunération annuelle assurable établi conformément à l’article 4.

[14] L’article 152.01(2)a) de la Loi stipule :

  1. 152.1 (2) Pour l’application de la présente partie, le montant de la rémunération provenant du travail que le travailleur indépendant a exécuté pour son propre compte, pour une année :
    1. a) dans le cas d’un particulier visé à l’alinéa a) de la définition de travailleur indépendant au paragraphe (1), est la somme :
      1. (i) d’un montant égal à :
        1. (A) son revenu pour l’année, calculé en application de la Loi de l’impôt sur le revenu, provenant de ses entreprises, autres qu’une entreprise dont plus de cinquante pour cent du revenu brut se compose de loyers de terrains ou bâtiments, moins
        2. (B) toutes les pertes qu’il a subies pendant l’année dans l’exploitation de ces entreprises, calculées en application de la Loi de l’impôt sur le revenu,

[15] L’article 152.28(1) se lit comme suit :

152.28 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie et sauf disposition contraire prévue par un règlement pris en vertu du paragraphe (2), les dispositions des sections I et J de la partie I de la Loi de l’impôt sur le revenu concernant le paiement de l’impôt, les cotisations, les oppositions aux cotisations, les appels, les intérêts, les pénalités et les remboursements en trop, ainsi que la partie XV de cette loi, sauf l’article 221, et les paragraphes 248(7) et (11) de cette loi s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, relativement à tout montant payé ou à payer au titre de la cotisation pour une année à l’égard de la rémunération provenant du travail qu’un travailleur indépendant a exécuté pour son propre compte comme si ce montant était un montant payé ou à payer au titre d’un impôt prévu par cette loi.

[16] L’article 11.1 du Règlement sur l’assurance-emploi (le « Règlement) indique :

  1. 11.1 (1) Le montant de la rémunération provenant du travail que le travailleur indépendant a exécuté pour son propre compte et qui est visé au sous-alinéa 152.07(1)d)(i) de la Loi est rajusté annuellement et de façon composée, à compter du 1er janvier 2012, selon le rapport visé à l’alinéa 4(2)b) de la Loi.
  2. (2) Si le rapport mentionné au paragraphe (1) est inférieur à 1,0 et, de ce fait, le montant rajusté est égal à une somme inférieure à 6 000 $, le rapport est réputé être 1,0.
  3. (3) Si le rajustement calculé en application des paragraphes (1) et (2) n’est pas un multiple de un dollar, il est arrondi au multiple inférieur de un dollar

[17] C’est l’article 152.17(5) de la Loi qui détermine le taux maximal de prestations hebdomadaires, savoir :

(5) Le taux maximal des prestations hebdomadaires qui peuvent être versées au titre du présent article est le montant obtenu par division de cinquante-cinq pour cent du maximum de la rémunération annuelle assurable, établi conformément à l’article 4, par cinquante-deux.

Preuve

Preuve au dossier

[18] Lorsqu’il a complété sa demande de prestations initiale, l’appelant a déclaré :

  1. avoir conclu une entente avec la Commission pour participer au programme d’assurance- emploi des travailleurs autonomes (GD3-7).
  2. n’avoir reçu, pour l’année d’imposition précédente, que du revenu de travailleur autonome (GD3-8).
  3. que son revenu net de travailleur autonome tel qu’indiqué sur sa déclaration de revenu est de 57 534$ (GD3-10).

[19] Selon les informations fournies par l’appelant, la Commission a déterminé que le taux hebdomadaire de prestations serait de 524$, en a avisé l’appelant et lui a fait part qu’un nouveau calcul pourrait être effectué une fois que l’ARC aura communiqué le montant réel de sa rémunération tirée d’un travail autonome. (GD3-17).

[20] En date du 29 avril 2015, l’ARC informait la Commission que la rémunération réelle de l’appelant était de 14 289$ pour l’année d’imposition 2014. La Commission a procédé à un nouveau calcul du taux de prestations, lequel s’est trouvé diminué à 151$ par semaine. Ce nouveau calcul a généré un trop-payé de 3 572$ pour lequel un avis de dette a été transmis à l’appelant (GD3-23) et il a été avisé de cette décision de la Commission par écrit (GD3-24 et GD3-25).

[21] Lors du processus de révision administrative, la Commission a informé l’appelant (GD3-30) qu’aucun changement ne pouvait être effectué sans une nouvelle réévaluation que doit fournir l’ARC.

[22] Avec son avis d’appel (GD2-1 à GD2-8 et GD2A-1 à GD2A-3) l’appelant dépose une lettre datée du 30 juin 2015 (GD2-6), adressée à l’ARC, par laquelle il informe que la Commission attend que l’ARC lui fournisse les données sur sa rémunération puisqu’il estime que les renseignements déjà fournis sont incomplets, inopportuns et peu clairs. Il joint également une copie de son avis de cotisation fédéral pour l’année d’imposition 2014 (GD2-7 et GD2-8).

[23] Le 22 septembre 2015, le Tribunal informe l’appelant que son appel est en suspens jusqu’à l’obtention de l’évaluation qu’il a demandé à l’ARC.

[24] Le 19 novembre 2015, le Tribunal reçoit de l’appelant la réponse obtenue de l’ARC (GD6-2), en date du 13 novembre 2015, par laquelle il est informé que la revue de sa déclaration de revenus et de prestations 2014 a été faite et qu’ « aucun rajustement n’est nécessaire ». Dans sa lettre d’accompagnement (GD6-1), l’appelant déclare que son revenu brut total est de 55 967$ tel que le certifie l’avis de cotisation dont il joint une copie (GD6-3).

[25] L’appelant a également reçu de l’ARC une lettre datée du 20 novembre 2015 à laquelle l’annexe 13 qui démontre le calcul effectué, est jointe (GD9-2 à GD9-4). [Note du Tribunal : Ces documents ont été fournis au Tribunal et se sont croisés dans l’échange d’informations avec la lettre acheminée par le Tribunal dont il est fait mention au paragraphe suivant.]

[26] Le 24 novembre 2015, le membre du Tribunal chargé du dossier, a prié l’appelant de fournir une copie de sa déclaration de revenus fédérale pour l’année d’imposition 2014 et plus particulièrement l’annexe 13 de cette déclaration qui concerne ses revenus de travail autonome (GD7).

[27] L’appelant a fourni les documents demandés par le Tribunal (GD10-1 à GD10-38) et présente ses arguments. Il dit souhaiter, avant l’étude finale de son appel, procéder à une demande de révision de la décision du 20 novembre 2015 de l’ARC et demande à nouveau de mettre le dossier du Tribunal en suspens.

[28] Le 18 janvier 2016, le Tribunal a fait parvenir l’avis pour la tenue de la présente audience (GD1). L’appelant a confirmé (GD11-1 à GD11-19) le 28 janvier 2016 qu’il serait présent à l’audience convoquée pour le 1er mars 2016 et il joint une lettre de l’ARC datée du 18 janvier 2016 (GD11-4 et GD11-5) dans laquelle il est référé à la lettre du 20 novembre 2015 et indiqué que le calcul des cotisations à l’assurance-emploi pour le revenu d’un travail indépendant se fait à partir des revenus nets d’un travail indépendant. On y a joint les annexes 13 pour les années d’imposition 2013 et 2014 (GD11-9 et GD11-12) sur lesquelles on peut lire que les revenus nets doivent être utilisés et non les revenus bruts.

Preuve à l’audience

[29] Lors de l’audience, l’appelant n’a pas soumis de nouvelle preuve ou n’a pas apporté de preuve supplémentaire à ce qui est produit au dossier d’appel. Par son témoignage à l’audience, l’appelant fait valoir ce qui suit à l’encontre de la décision de la Commission.

[30] Le sens commun du terme « Rémunération » veut que ce soit une rémunération brute et non une rémunération nette comme le montant fourni par l’ARC à la Commission.

[31] Il souligne l’exemple contenu à la brochure explicative fournie et rédigée par la Commission pour le calcul du taux de prestations d’un travailleur autonome.

[32] Il mentionne avoir fait sa demande de prestations pour l’année 2013 sur la base de sa rémunération brute et qu’il a reçu des prestations calculées à partir de ce montant. Il n’y a donc aucune raison pour que le calcul se fasse différemment pour l’année 2014.

[33] Les dispositions de la Loi doivent être appliquées en tenant compte du contexte, des informations disponibles, de l’évolution de la société et en tenant compte du fait que les gens ne peuvent se référer qu’à ce qui est à leur portée. Si les brochures disponibles sont mal faites et incomplètes, il n’a pas à en faire les frais.

[34] Il demande qu’aucun montant ne lui soit réclamé puisqu’il a agi de bonne foi dans toute cette affaire. Le doute raisonnable devrait jouer en sa faveur.

Arguments des parties

[35] En outre des arguments présentés par son témoignage, l’appelant a fait valoir que :

  1. Il ne comprend pas comment le nouveau calcul de son taux a pu être établi de cette façon puisque sa rémunération annuelle est sensiblement la même d’une année fiscale à l’autre.
  2. La décision de l’ARC est erronée et lui porte préjudice. L’appelant demande que l’assurance- emploi respecte ses propres critères de calcul et non ceux de l’ARC qui traite de revenu net, ce qui est dans son cas « nul et non-avenu ». Manifestement, l’ARC ne veut pas répondre explicitement et clairement à sa demande mais emploie plutôt une terminologie fiscaliste qui crée de la confusion et lui porte préjudice.
  3. La conclusion de l’ARC sur son revenu net comme travailleur autonome en 2014 n’a rien à voir avec le litige sur le calcul des prestations d’assurance-emploi. Ce qu’il demandait, c’était l’établissement de sa rémunération moyenne hebdomadaire aux fins du calcul de ses prestations. Il soutient que la brochure « Prestations spéciales de l’assurance-emploi pour les travailleurs autonomes » dont il a fourni une copie (GD9-8 à GD9-10), ne parle jamais de revenu net, que cette rémunération hebdomadaire moyenne est une somme brute. Il affirme que sa rémunération moyenne hebdomadaire s’établissait à 1 076.22 par semaine.
  4. La rémunération moyenne hebdomadaire est définie au document d’information de l’assurance-emploi intitulé « Prestations spéciales de l’assurance-emploi pour les travailleurs autonomes : Si vous avez droit aux prestations de l’assurance-emploi, vous pouvez vous attendre à recevoir un montant correspondant à 55% de votre rémunération moyenne hebdomadaire jusqu’à concurrence d’un maximum annuel déterminé. »
  5. Statistiques Canada définit la rémunération moyenne hebdomadaire comme étant des données qui incluent les heures supplémentaires et correspondent à la rémunération brute avant les déductions à la source.
  6. L’ARC se réfère non seulement au revenu net mais à des cotisations versées à des fins fiscales alors qu’il s’agit du revenu brut à des fins de calcul pour le versement de prestations.
  7. Pour l’année fiscale 2013, les prestations reçues ont été basées sur son revenu brut. Ces paiements n’étaient pas basés sur son revenu net comme on veut le faire maintenant pour l’année fiscale 2014. Il voudrait une explication sur la raison pour laquelle il y a une différence de traitement entre l’année d’imposition 2013 et celle de 2014.
  8. Ce n’est pas une estimation de ses revenus qu’il a fournie à la Commission mais plutôt sa déclaration de revenus telle que confirmée le 4 mai 2015 dans son avis de cotisation de l’ARC.
  9. La Commission stipule qu’il n’y a pas de jurisprudence s’apparentant à la question en litige mais admet par ailleurs que la Cour fédérale a réaffirmé le principe selon lequel le taux de prestation d’un prestataire est basé sur la rémunération moyenne hebdomadaire et non sur le revenu net.
  10. Il a lu avec attention les sections pertinentes de la Loi sur l’assurance-emploi, du Règlement ainsi que la Loi sur l’équité pour les travailleurs autonomes. Il n’est jamais question dans ce texte de revenu net mais plutôt de rémunération ce qui veut dire avant déductions des dépenses inhérentes à un travailleur autonome.

[36] La Commission intimée a soutenu que (GD4-1 à GD4-10):

  1. Le taux de prestations de base est de 55% de la rémunération hebdomadaire moyenne assurable spécifiée à l’article 11.1 du Règlement. Le calcul du taux de prestations des travailleurs autonomes est basé sur la somme totale de toute la rémunération qu’ils ont tirée d’un travail autonome au cours de l’année civile antérieure.
  2. Le taux est déterminé en divisant la rémunération de travailleur autonome au cours de l’année civile antérieure par 52, puis en multipliant ce résultat par 55%. La période de référence correspond toujours à l’année civile précédant l’année du début de la période de prestations.
  3. Si l’ARC n’a pas eu l’occasion de traiter la déclaration de revenus et de prestations d’un travailleur autonome et que ces travailleurs autonomes n’ont pas le montant final de leur revenu, il leur est demandé d’estimer leur revenu de travailleur autonome après avoir soustrait les frais d’exploitation de l’année d’imposition antérieure. Le montant estimé est utilisé pour calculer la demande de prestations et les clients sont avisés qu’ils pourraient devoir rembourser des prestations si la rémunération estimée est supérieure au revenu réel.
  4. Le montant réel de la rémunération du travailleur autonome au cours de l’année d’imposition précédente est tiré de sa déclaration de revenus. Conformément à la Loi de l’impôt sur le revenu, ce montant correspond au montant total de son revenu moins ses dépenses et est inscrit à la ligne 4 de l’annexe 13 de la déclaration de revenus.
  5. Dans le dossier de l’appelant, la Commission a reçu l’information de l’ARC le 29 avril 2015 à l’effet que sa rémunération pour 2014 était de 14 289$. En conséquence, ce montant de 14  289$ a été divisé par 52, ce qui donne une rémunération hebdomadaire moyenne assurable de 274,78$ à laquelle le pourcentage de prestations est appliqué, ce qui donne un taux de prestations de 151$ par semaine.
  6. La commission n’a d’autre choix que de considérer le montant évalué par l’ARC et reçu via le système d’échange d’informations visible à la pièce GD3-22.
  7. Il n’y a présentement pas de jurisprudence s’apparentant à la présente question en litige parce que la législation est entrée en vigueur le 1er janvier 2010 mais la Cour d’appel fédérale a affirmé le principe qu’il n’est pas permis aux arbitres de réécrire la Loi ou de l’interpréter d’une manière contraire à son sens ordinaire.
  8. Le taux de prestations d’un prestataire est basé sur la rémunération hebdomadaire assurable. Le taux de prestations et la méthode utilisée pour les calculer est la même pour tous les prestataires, soit 55 % de la rémunération hebdomadaire assurable.

Analyse

[37] Dans l’affaire Canada (Procureur général) c. Knee, 2011 CAF 301, la Cour d’appel fédérale rappelle le principe selon lequel il n’est pas permis aux arbitres de réécrire la loi ou de l’interpréter d’une manière contraire à son sens ordinaire. La jurisprudence antérieure a confirmé à maintes reprises que les prescriptions de la Loi ne peuvent être écartées.

[38] Il s’agit donc ici d’appliquer les dispositions législatives concernant le calcul des prestations pouvant être versées à l’appelant comme travailleur autonome. Le Tribunal n’a pas le pouvoir de rendre une décision basée sur l’équité comme le voudrait l’appelant lorsqu’il invoque que les brochures fournies par Service Canada ne sont pas complètes, qu’elles sont mal faites, mal rédigées et qu’il n’a pas à en faire les frais. Le Tribunal souligne que les informations provenant de brochures explicatives ne peuvent pas être considérées comme des dispositions législatives. Il faut se rapporter aux Lois et Règlements applicables.

[39] Donc, principalement, l’appelant prétend que le calcul de son taux de prestations doit s’effectuer sur la base de ses revenus bruts de travailleur autonome pour l’année fiscale 2014. Quant au calcul qui avait été effectué l’année précédente pour déterminer son taux de prestations à partir des données de son année fiscale 2013, il ne s’agit pas de la période qui est présentement en litige et le Tribunal n’a pas les données nécessaires pour se prononcer sur ces calculs qui ont alors été faits. Toutefois, il est opportun d’indiquer qu’entre 2013 et 2014, aucune modification n’a été faite aux dispositions applicables pour le calcul du taux de prestations d’un travailleur autonome.

[40] L’article 152.01(2)a) de la Loi définit ce qu’est la rémunération provenant du travail d’un travailleur indépendant comme étant son revenu pour l’année calculé en application de la Loi de l’impôt sur le revenu. Il faut donc se référer à cette Loi de l’impôt sur le revenu pour ensuite déterminer selon l’article 152.16 le taux de prestations hebdomadaires qui peuvent être versées.

[41] Pour savoir ce qu’est le revenu de l’appelant provenant de son travail indépendant pour l’année fiscale 2014 en application de la Loi de l’impôt sur le revenu, le Tribunal convient que tout cela fait appel et requiert certaines notions fiscales pour en avoir une bonne compréhension mais il ne peut en être fait abstraction. Il faut donc se référer à sa déclaration d’impôts pour cette année 2014, plus particulièrement ce qu’il a déclaré comme revenu provenant de son travail indépendant et ce sur quoi il a été imposé pour ce travail.

[42] L’appelant a produit cette déclaration de revenus au Tribunal (GD10-5 à GD10-8). L’appelant a soutenu que son revenu était de 57 534$. Le Tribunal se doit de souligner qu’aux fins de la Loi de l’impôt sur le revenu, il existe plusieurs types de revenus. À la lecture de la déclaration de revenus de l’appelant, son revenu total pour cette année 2014 se compose de quatre (4) types de revenus dont des revenus provenant d’un travail indépendant. L’addition de tous les revenus de l’appelant s’élève à 55 967$ (GD10-6) mais les revenus spécifiques à son travail indépendant s’élèvent à un montant brut de 37 354$ qui, après déduction des dépenses énumérées que l’on retrouve en pièce GD10-16, s’élève à un montant net de 14 289$. Il a été imposé pour son travail indépendant sur cette somme de 14 289$. Ce montant représente son revenu de travail indépendant aux fins de la Loi de l’impôt sur le revenu.

[43] Pour peut-être permettre une meilleure compréhension, si un parallèle est fait avec un prestataire d’assurance-emploi qui n’est pas assujetti aux conditions pour un travailleur autonome, ce prestataire recevra des prestations dont la détermination du montant est basée sur son revenu d’emploi assurable aux fins de la Loi. Ce prestataire ne recevra pas de prestations dont le taux serait calculé à partir des revenus tirés de ses régimes enregistrés d’épargne-retraite ou de la Régie des rentes du Québec. Or, lorsqu’on se réfère à sa déclaration de revenus 2014, le montant que l’appelant prétend être son revenu de travailleur autonome comprend ces types de revenus.

[44] L’appelant ne peut pas vouloir être imposé sur son revenu net de travailleur indépendant qui s’élève à 14 289$ mais se référer au revenu brut de ce travail au montant de 37 354$ pour obtenir des prestations. Selon l’article 152.16 de la Loi sur l’assurance-emploi, le taux de prestations hebdomadaires est de 55% de sa rémunération provenant du travail qu’il a exécuté pour son propre compte, divisé par 52. La rémunération hebdomadaire moyenne de l’appelant est 14 289$ ÷ 52 = 275$ (arrondi). Ce dernier montant est, aux fins de la Loi sur l’assurance-emploi et en application de la Loi de l’impôt sur le revenu, la rémunération hebdomadaire moyenne pour un prestataire assujetti aux dispositions traitant des prestations pour les travailleurs indépendants. Dans le cas de l’appelant, il n’y a aucune autre façon de calculer son taux de prestations, soit : 14 289$ x 55% = 7 858$ ÷ 52 = 151$.

[45] Pour ces raisons, la Commission a correctement effectué le calcul du taux de prestations que pouvait recevoir l’appelant après avoir reçu les informations provenant de l’ARC ayant trait au revenu provenant de son travail indépendant au sens de la Loi de l’impôt sur le Revenu, pour l’année fiscale 2014.

Conclusion

[46] L’appel est rejeté.

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